Les interviews éditeurs / Interview de Richard Saint-Martin - Akileos

Richard Saint-Martin est l’une des deux moitiés à l’origine des Editions Akileos, une petite maison qui s’est fait connaître en publiant (entre autre) Courtney Crumrin. Rencontre.

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Richard Saint-Martin Bonjour Richard, peux-tu te présenter ?
Né sous un délicieux soleil d’automne du siècle passé, à quelques pas de Roland-Garros et du Parc des Princes, j’aurais pu devenir un sportif adulé et reconnu. Il n’en fut rien.

En fait, après avoir usé mes jeans sur les bancs (de touche) de la fac et suivi un stage chez un éditeur de BD qui à l’époque, n’était pas aussi gros qu’aujourd’hui et où j’ai fait la connaissance de mon futur associé, j’ai signé mon premier contrat professionnel avec une célèbre enseigne de vente de produits culturels en qualité de vendeur BD. Quelques temps après j’ai répondu à l’appel de la nouvelle (à l’époque) économie, afin de mettre au service de sites de vente en ligne mes formidables talents dans la vente et le marketing. Une expérience qui fit long feu.

Et, enfin, vint l’occasion… de celles qui font les larrons ! "N'écoutant que mon inconscience (et mon avidité)", j’ai souscrit avec entrain à la proposition du jeune (à l’époque) Emmanuel Bouteille. Et c’est ainsi que les Editions AKILEOS se sont révélées au monde. Hop et Alléluia !

Comment sont nées les Editions Akileos ?
Comme je le laissais entendre précédemment, d’un phantasme, d’une passion, de frustrations, d’une maturation et d’une occasion. En novembre 2002, l’acte de naissance a été publié. Ensuite, sont venues les rencontres…

Logo Akileos Comment est venue l’idée du logo et du nom de la maison d’édition ?
Je crois que le logo est venu avant le nom. J’avais en tête un casque d’hoplite. Pourquoi, je ne sais plus trop. En partie sans doute à cause de la couverture de l’album 300 de Miller. Bref, j’ai récupéré des illustrations et j’ai demandé à un copain de travailler sur le design du casque. Dans les propositions, une nous a séduit et elle identifie aujourd’hui nos albums.
Pour le nom, c’est beaucoup plus flou… Emmanuel et moi souhaitions un nom qui commence par la lettre A. Plusieurs noms ont fusé, mais beaucoup étaient déjà déposés. Puis Achille s’est pointé. Celui de la mythologie, bien sûr, mais aussi celui de Greg, Achille Talon, dont nous sommes fans. Le casque aidant, nous sommes passés à Akileos…

Au début, Akileos ne publiait que du comics, mais depuis un peu plus d’un an, il y a de la BD franco-belge, et même du manga, ou du moins son influence, avec la collection Tengaï. Une volonté de s’adapter au marché ?
Au début, nous avions surtout besoin d’avoir des titres au catalogue, le temps que des projets se montent et comme nous avions envie de faire découvrir des albums d’auteurs américains, nous avons publié des comics, les deux premiers étant l’excellente mini-série Whiteout. Ceci dit, le premier album que nous avons édité était le fait d’un auteur allemand et dès 2004, nous avons publié notre premier album ‘‘franco-belge’’, le premier tome de la série Milmo.

De toute façon, il n’a jamais été dans notre intention de nous enfermer dans un genre, mais d’éditer des albums ou des projets qui nous plaisent, tout simplement. Notre présence sur le secteur des manga, manhwa ou assimilés, qui ne sont ni plus ni moins que des BD d’ailleurs, résulte de la même philosophie, même si pour un titre comme Dragon Fall, c’est plus le jeu et une forme de challenge qui nous a poussé à le proposer en France. Pour les autres titres de la collection Tengaï, qui sont donc des traductions d’albums coréens ("0/6", "Emperor Castle") et américains ("I Luv Halloween", "The Dreaming" ; "Mark of the Succubus", "Fool’s Gold"), c’est encore une fois la rencontre avec des univers et des personnes qui nous ont motivé. Nous n’éditons pas pour exister ou prendre des parts de marché, sinon, c’est l’intégralité des catalogues d’éditeurs étrangers que nous proposerions, sans discernement.

L’une de tes plus belles découvertes est sans conteste Courtney Crumrin, de Ted Naifeh. Comment s’est passée la collaboration avec ce sympathique auteur américain ?

L’aventure Courtney Crumrin est assez représentative de notre démarche. Il y a d’abord eu un coup de cœur pour la série dans sa version originale et donc le désir de la proposer en France dans un format qui valorise le travail de Ted Naifeh.

Ensuite, il y a eu la rencontre avec l’auteur, des échanges et aujourd’hui l’envie de collaborer sur des projets et de continuer à développer ses univers. Vous découvrirez d’ailleurs tout cela dans le courant de cette année, avec le tome quatre de la série et sans doute début 2008, avec une création.

Ceci dit, ce qui est vrai pour Ted Naifeh, l’est également pour un artiste comme Eric Shanower, l’auteur de L'âge de Bronze, dont le travail nous a tout d’abord ravis et avec qui nous avons aujourd’hui établi une véritable relation et une belle collaboration.


Accéder à la fiche de EgoVox Depuis ses débuts, Akileos semble privilégier la qualité à la quantité, puisque seuls 17 albums sont sortis en 2006. Qu’en sera-t-il en 2007 ?
Encore une fois, nous n’avons pas vocation à éditer pour éditer, donc rassurez-vous, ça n’est encore pas cette année que nous décuplerons notre production. En 2007, nous atteindrons d’ailleurs ce qui pourrait être considéré comme étant notre vitesse de croisière, soit une quarantaine d’albums, dont une bonne moitié dans la collection Tengaï. Il y aura bien entendu des suites attendues, comme le troisième et dernier tome de la série Milmo ou le deuxième tome de la série EgoVox, mais aussi de superbes créations originales comme "Nyarlathotep", "Entre-Deux Mondes", "Cléo et Patrick" ou une adaptation de "Double assassinat dans la rue Morgue" et nous continuerons bien sûr à vous proposer des adaptations, dont la très séduisante série "Mort@17" de Josh Howard.

Petite nouveauté tout de même cette année, avec la création d’une collection de sketch books qui nous tient vraiment à cœur, mais sur laquelle je ne peux pas trop m’étendre pour le moment.

Comment définirais-tu les ambitions d’Akileos ?
Démesurées ?! Sérieusement, on a des ambitions d’éditeur, à savoir faire de beaux et bons albums et rester maîtres de notre ligne éditoriale.

Le marché de la BD peut être rude avec les éditeurs dits « indépendants ». Quels sont tes meilleurs atouts pour faire connaître tes BDs ? Les librairies ? Une présence accrue sur Internet ?
Les libraires sont clairement les maîtres du jeu. Ce sont eux qui valorisent ou non un album. Aujourd’hui, du fait du nombre de nouveautés qui déboulent chaque semaine, ils sont les premiers, voire les seuls, à pouvoir séparer le bon grain de l’ivraie. Encore faut-il qu’ils en aient le temps ou l’envie. L’internet et peut-être plus particulièrement certains forums de discussion sont une bonne chose pour garder un contact avec les lecteurs. Et autant je ne suis pas certain que ce média soit un formidable prescripteur, autant je pense qu’il peut tuer un album.

Accéder à la fiche de Milmo La diversité des collections présentes chez Akileos reflète un souci de toucher tous les publics. Mais tu n’as pas de collection orientée vers la jeunesse. Est-ce un hasard ?
Il n’y a pas de volonté délibérée de notre part. Il s’agit plutôt d’une absence de projets séduisants, même si un nous a quand même tapé dans l’œil il y a peu. Une fois encore, nous ne décidons pas à l’avance de nos orientations éditoriales, elles sont le fait de nos coups de cœurs et de nos rencontres. Un exemple, nous avions décidé de ne pas faire de projet d’Heroic-fantasy. Tout avait déjà été dit, déjà été fait… Résultat, notre première production a été Milmo !

Quelles sont les prochaines sorties à ne pas manquer chez Akileos ?
Il n’y en a pas tant que ça, je dirais donc toutes. D’autant plus que chaque album ne doit rien au hasard et est très souvent un choix du cœur. Et procurez-vous notre dernier catalogue et vous verrez bien que je ne vous abuse pas…

Richard, merci.
Merci.
Interview réalisée le 15/02/2007, par Spooky.