Histoire d'une jolie tendresse sur la vie d'un chien errant, de son apprentissage de la survie via une vieille chienne débrouillarde, à sa rencontre avec ses nouveaux maîtres et notamment leur petite fille boudeuse, en passant par de belles rencontres avec la faune sauvage.
Il s'agit d'une belle tranche de vie originalement observée depuis le regard d'un chien, jouant habilement de l'humour et de l'émotion, vive dans sa rythmique, agréable dans ses variations et développements.
J'ai davantage de réserves pour les illustrations. Le style de Panaccione est certes sympathique (dynamique, ironique, chaleureux...), mais aussi assez brouillon. Le trait est précis pourtant ; cette regrettable impression est peut-être liée à la thématique de la laideur, ou bien aux couleurs, pas assez tranchées et contrastées, jouant moins leur rôle de frontières ? Pour moi, l'auteur ne parvient pas à emprunter la voie des géniaux Franquin ou Peyo, capables de concilier ces qualités-là avec leur rondeur d'une redoutable précision.
Si j’étais membre du jury à Angouleme, Christophe Bec et Stefano Raffaele recevraient une distinction méritée pour leur énormissime contribution à la BD. Vous l’avez compris je suis un fan absolu de ce duo incroyable. Je me procure leurs albums les yeux fermés. Et jamais je n’ai été déçu. Avec la terre vagabonde encore une fois nous sommes sur une véritable pépite alliant la plume brillante de Christophe Bec et les talents visuels de Stefano Raffaele. Les compères ont réussi une nouvelle fois à créer une œuvre captivante qui ne peut que vous transporter dans un univers riche et intrigant.
Christophe Bec est connu pour son habileté à tisser des histoires complexes et immersives. Il ne déçoit pas avec ce scénario inspiré de l’œuvre de Liu Cixin publiée en 2000. Il mélange habilement science-fiction et aventure, tout en explorant des thèmes profonds comme la survie, l'humanité et l'inconnu. L'intrigue est fascinante dès les premières pages. Christophe réussit à maintenir une tension narrative qui va vous garder en haleine jusqu'à la fin. Les personnages sont bien développés et nuancés, offrant une profondeur émotionnelle qui résonne longtemps après la dernière page tournée. Une lecture d’une traite s’imposera naturellement à vous.
En parallèle les dessins de Stefano Raffaele sont tout simplement spectaculaires. Chaque planche est un chef-d'œuvre en soi, débordant de détails et d'expressions qui donnent vie à l'histoire. Stefano maîtrise parfaitement les scènes d'action dynamiques autant que les moments de calme introspectifs. Son style visuel unique complète parfaitement le récit de Christophe Bec, créant une harmonie entre le texte et les images qui est rare dans le genre. C’est magnifique avec en bonus des posters visuels incroyables.
Cerise sur le gâteau avec cet album vous pouvez intellectualiser l’histoire en vous posant des questions philosophiques … tout en divertissant bien évidemment. Le duo va vous pousser à réfléchir sur notre place dans l'univers et les implications de nos actions collectives. Ce n’est pas génial ça ?
Je ne peux que recommander cette BD remarquable qui mérite une place dans votre bibliothèque. Je vous invite à courir chez votre libraire adoré pour vous la procurer.
Un concept de SF proche du fantastique qui attire forcément la curiosité. Comme dans le roman Under the Dome de Stephen King, la Terre se retrouve soudain scindée en territoires coupés les uns des autres par des murs invisibles et impénétrables. Outre l'effondrement de la civilisation que cela induit, la grosse particularité de cette situation est que le temps se déroule à des vitesses différentes dans chacune de ces zones. Là où 3 mois se sont écoulées dans celle du narrateur, des siècles voire des millénaires ont déjà eu le temps de se dérouler dans d'autres. Et quand il se retrouve à suivre un groupe de personnes issues d'une ville futuriste qui a su trouver comment passer d'une zone à l'autre, il va découvrir les effets de se retrouver dans des endroits où les choses ont évolué différemment et à des vitesses différentes. Avec toujours dans l'idée de comprendre l'origine de ces murailles invisibles...
Je suis toujours attiré par ce type de concept et l'envie de découvrir l'explication à des mystères aussi incroyables même si l'engouement tient généralement davantage dans la découverte des conséquences de ceux-ci plutôt que dans la révélation elle-même qui la plupart du temps est soit inexistante soit décevante. Pour le moment, au bout de 2 tomes parus, cette série ne révèle encore qu'une part du mystère, mais pas vraiment celle qu'on attendait. Et cette part là est plutôt bien trouvée quoiqu'elle ne répond pas à la question principale.
Pour le reste, c'est avant tout la pérégrination d'un groupe dans un décor post-apocalyptique voire presque de fantasy pour certaines zones traversées tant les choses ont changé. Le rythme est bon, le dessin est de bonne qualité et l'aventure tient en haleine.
Il y a toutefois quelques défauts.
Le premier pour moi, ce sont les trop longs et un peu pénibles monologues intérieurs semi-philosophiques du narrateur durant les premières pages de chaque album : je m'en serai volontiers passé.
Le second, c'est un côté un peu bancal des écoulements de temps différents. Certains changements sont trop radicaux et manquent de logique scientifique dans certaines zones, ce qui crée cette impression de fantasy. D'autre part, les changements de vitesse temporelle me paraissent un peu embrouillés et exploités avec facilité, comme notamment sur la deuxième moitié du second tome où les héros sont suivis et surveillés alors qu'ils passent de zones en zones : alors que le temps s'est écoulé parfois beaucoup plus rapidement ou lentement pour les surveillants et suiveurs, ceux-ci agissent comme s'ils étaient synchronisés sur la même vitesse que les héros et que leur destination finale. Et pour finir, autant on voit les héros observer la scène au ralenti d'une zone voisine et largement s'y préparer, autant les auteurs ont l'air d'avoir oublié que les quelques fois où ces mêmes héros se sont rendus dans des zones se déroulant bien plus rapidement, les habitants de celles-ci pouvaient les voir arriver au ralenti et se préparer à leur faire du mal dès leur arrivée (je pense aux hommes-singes agressifs du premier tome).
Bref, c'est une série de SF qui attise par son concept intrigant semi-fantastique et apporte quelques développements crédibles à cette idée, mais aussi d'autres qui sont nettement moins plausibles et plus orientées vers le divertissement voire la fantasy. Je ne suis pas vraiment convaincu mais j'ai passé un moment sympathique tout de même.
Cette adaptation du 'un roman de R.J. Ellory nous invite à suivre la vie de Joseph Vaughan, enfant d'Augusta Falls, théâtre de crimes atroces, du début des années 40 jusqu'aux années 2000.
Cette série de meurtres épouvantables impactera toute la vie de Joseph jusqu'à que ce dernier arrive à démasquer le coupable pour enfin se libérer de ses démons.
Graphiquement c'est très bien réalisé et fort bien réussi. Les choix des couleurs ainsi que les dessins sont en parfaite adéquation avec la noirceur de ce polar.
Par contre j'ai eu un mal fou à m'attacher à ce pauvre Joseph qui au fil des pages va de malheurs en malheurs avec une capacité de résilience inouïe.
Enfin il y a un gros hic : je n'ai pas compris comment Joseph a fait pour démasquer le coupable.
Il me semble qu'il manque un bout dans cette adaptation ou bien le roman initial (que je ne connais pas) prend lui aussi un sacré raccourci.
Cette incompréhension dans le final même de l'intrigue est venu gâcher mon plaisir.
Reste donc un ouvrage fort joli mais pas indispensable
Conte culinaire servant de gentils orphelins désœuvrés à de terribles ogres affamés.
Après une introduction gothique à souhait à la Dickens, nous découvrons le repère des ogres pour y suivre les pérégrinations d'une jeune fille fascinée par la gastronomie, mais toujours susceptible de finir dans une assiette.
Que ces deux parties s'imbriquent maladroitement s'excuse volontiers, le merveilleux retenant davantage l'attention et autorisant tous les excès. Mais notre implication est entachée par ces revirements (comment notre héroïne parvient à passer de maladroite et peu dégourdie à courageuse et ingénue, mystère...) et un détachement s'invite inévitablement.
De même, les illustrations d'Andreae qui a bien des égards peuvent apparaître comme un véritable point fort, sont si chargées, fourmillantes de couleurs éclatantes et de détails, qu'elles finissent par nous rendre plus spectateurs que co-aventuriers : le souffle épique ne se vit même plus par procuration, il se constate.
Un joli conte, nous laissant sur le pas de la porte, et que l'on eut aimé apprécier davantage.
Le poète est semblable au prince des nuées qui hante la tempête et se rit de l’archer.
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Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre, consacrée à une visite atypique du musée d’Orsay. Son édition originale date de 2017. Il a été réalisé par Stéphane Levallois, pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il comprend soixante-neuf pages de bande dessinée. À la fin se trouve une liste des œuvres du musée d’Orsay (et d’ailleurs) citées dans le livre, soit environ soixante-quinze œuvres différentes, et un peu moins d’artistes. Cette liste s’intercale entre cinq portraits en pleine page : Dante Alighieri (d’après William Bouguereau), Heraklès (d’après Émile Antoine Burdelle, Henri de Toulouse-Lautrec), la Petite danseuse de 14 ans (d’après Edgar Degas), Johann Wolfgang Goethe (d’après Pierre-Jean David d’Angers).
Virgile Gautrey, un agent de surveillance, vient de se lever, et il s’habille méthodiquement. Il finit par lacer ses souliers, et passer la lanière qui tient son badge, autour du cou. Il est le gardien du musée d’Orsay. Il se rend tranquillement à son lieu de travail, passe son badge dans la liseuse et pénètre à l’intérieur. Il passe devant le buste de Johann Wolfgang von Goethe, sculpté par Pierre-Jean David d’Angers. Il monte à l’étage. Il prend une chaise et il s’installe devant Naissance de Vénus, de William Bouguereau. En lui-même, il pense au conseil à donner à un visiteur : quand on visite un musée, ne pas faire comme les autres, changer de rythme, traverser les salles d’un pas pressé, n’adresser à chaque œuvre qu’un regard furtif. À coup sûr, cela divertira les gardiens, brisera un instant la monotonie de leur quotidien. Il continue en son for intérieur ; avaler les salles toujours plus vite, jusqu’à ce que peut-être une œuvre arrête le visiteur. Et que pour la première fois de sa vie, il ressente une émotion si forte qu’il lui soit désormais impossible de se passer d’elle.
Totalement absorbé dans sa contemplation du tableau, Virgile Gautrey s’imagine voir Vénus courir nue devant lui, cherchant à atteindre un train sur le départ, le ratant, alors que lui reste de l’autre côté d’une vitre, incapable de la traverser, de rattraper cette femme. Le temps s’écoule à la grande horloge du musée et un autre gardien regarde le même tableau. Virgile Gautrey se réveille en sursaut dans son lit. Peu de temps après, il est le premier à arriver au musée. Il passe devant le buste de Goethe. Il passe devant le tableau La source, de Jean-Auguste Dominique Ingres, et il se fait la réflexion que la muse n’est plus là. Il se rend compte de l’impossibilité de ce qu’il vient de dire. Il continue de progresser dans la galerie et constate avec affolement que les jeunes filles ont disparu des autres tableaux. Il court jusqu’à la salle où se trouve Naissance de Vénus, elle n’est plus dans le tableau, il s’écroule à terre victime d’un malaise. Il gît sur le sol inconscient. Il reprend ses esprits, allongé sur un lit, le buste de Goethe lui parle. Il lui dit que le temps presse, que les muses ont disparu des œuvres, que ce musée pourrait être celui de la mémoire de Gautrey, et qu’il incombe à ce dernier de partir à leur recherche et de les ramener pour la célébration des trente ans.
Le musée d’Orsay a été inauguré en 1986, et cette bande dessinée a été publiée en 2017, un hommage à ses trente ans d’existence. Le texte de présentation indique qu’elle constitue : un Jeu de piste alerte et poétique à Orsay, une nouvelle visite atypique du musée parisien, un conte irrévérencieux et léger pour la collection Futuropolis/Musée d’Orsay. En effet, comme l’indique le titre, plusieurs muses, la plupart dénudées, ont disparu de tableaux célèbres, et la quête du gardien est de les retrouver, et par là-même d’identifier leur ravisseur. Il s’appelle Virgile Gautrey, bien évidemment en référence à Virgile (-70 à -19), le poète latin auteur de l'Énéide, les Bucoliques et les Géorgiques. Durant son voyage, il rencontre Dante Alighieri (1265/67-1321, poète et écrivain) qui va lui servir de guide pendant plusieurs séquences, en hommage à La Divine Comédie (1307-1321), avec une inversion des rôles puisqu’ici Dante guide Virgile. En effet, Gautrey finit par arriver dans un endroit qu’il identifie comme étant l’Enfer. En fonction de sa culture, et de sa familiarité avec les collections du musée d’Orsay, l’illustration de couverture dit peut-être quelque chose au lecteur, plus ou moins vaguement. En arrivant à la fin de l’ouvrage, il découvre donc la liste des œuvres citées visuellement. La couverture est inspirée du tableau Les Oréades (1902) de William Bouguereau (1825-1905). Par la suite, il peut juste reconnaître l’architecture caractéristique du musée, ou bien quelques-uns des tableaux réinterprétés.
Aussi le ressenti de lecture dépend fortement du niveau de familiarité avec les œuvres du musée d’Orsay (et d’ailleurs). L’auteur explicite cette mention d’autres endroits : il s’agit de la galerie internationale d’art moderne à Venise, du musée de l’Orangerie, du musée du Louvre, de la fondation Beyeler à Bâle, du musée Rodin à Paris, même si cela ne concerne que quelques œuvres parmi toutes celles auxquelles il est rendu hommage. Sa lecture peut alors prendre une dimension ludique, en jouant à identifier chaque référence, chaque tableau intégré à la narration visuelle, ou bien rester au niveau de l’intrigue, tout en se disant qu’il ira consulter plus en détail la liste en fin d’ouvrage pour telle ou telle image qui l’a plus frappé. Il n’en est peut-être pas au niveau de Virgile Dautrey qui a vécu l’expérience de ressentir une émotion si forte qu’il lui soit désormais impossible de se passer de telle œuvre, mais il y a fort à parier qu’il éprouvera l’envie d’en voir plusieurs pour de vrai. Au fil des pages, une composition ou une autre le prend par surprise : la perspective des Raboteurs de Parquet (1875) de Gustave Caillebotte (1848-1894), la richesse d’un tableau à la manière de Gustav Klimt (1862-1918), le pointillisme de La voilette (vers 1883) de Georges Seurat (1859-1891), les splendides couleurs de Londres Le parlement trouée de soleil dans le brouillard (1904) de Claude Monet (1840-1926), l’eau calme et visqueuse de Le pauvre pêcheur (1881) de Pierre Puvis de Chavannes (1824-1898), ou encore bien d’autres.
L’artiste accomplit la prouesse de rendre hommage à ces quelques soixante-quinze œuvres d’art différentes en évoquant pour chacune l’exécution particulière de chaque créateur, tout en maintenant une unité graphique à sa narration visuelle, ce qui constitue un défi remarquable en soi. Tout commence avec une technique classique : des formes détourées par un trait de contour, un peu lâche, un peu fin, conservant un soupçon de spontanéité, avec une mise en couleurs de type aquarelle apportant des informations sur les teintes de chaque élément, comme ternies, et rehaussant le relief des surfaces, ainsi que le jeu d’ombres. Les traits de contour se font plus droits et plus secs pour représenter le hall central du musée d’Orsay avec ses murs bien droits, et ses arches bien rondes. Les premiers tableaux sont évoqués dans leur cadre, accrochés au mur, avec des touches de couleurs un peu plus vives, les faisant ressortir du reste de la case, sans pour autant qu’ils ne jurent avec la réalité banale de Virgile Gautrey. La vraie première prise de liberté (après la disparition des muses) survient avec une scène spectaculaire en quatre cases page treize : une transposition de L’accident gare de l’Ouest (aujourd’hui Gare Montparnasse) le 22 octobre 1895, célèbre photographie de Léopold Louis Mercier (1866-1913).
S’il y est sensible, le lecteur peut relever les fluctuations dans les techniques de dessins mises en œuvre par Stéphane Levallois qui lui permettent de s’aventurer vers les chefs d’œuvres picturaux, sans perdre le fil de son propre récit. Il peut jouer avec les lignes de contours en les rendant plus malléables ou plus floues, utiliser des couleurs plus vives pour un élément de la réalité banale de Virgile Gautrey en écho ou en annonce d’un tableau, utiliser le dispositif de l’ouverture d’une porte pour découvrir un autre monde ou une autre réalité derrière, diminuer le ratio de traits encrés au profit d’une plus grande importance accordée à la couleur directe, adapter des caractéristiques picturales telles que le pointillisme ou l’impressionnisme, jouer avec les aplats de noir, etc. Ainsi l’intégration des peintures se fait de manière organique, l’artiste gérant le degré de contraste en fonction de la séquence.
L’intrigue fonctionne sur le principe d’une enquête : quelle est la cause de la disparition des muses ? Quel est le coupable ? L’utilisation d’un voyage en train permet de voir défiler les paysages, et donne également l’impression d’une course-poursuite, une scène ou deux donnant l’impression que le gardien peut peut-être rattraper celui qui les enlevées. Conscient de la nature anniversaire du récit, le lecteur ressent l’impression d’un passage en revue un peu mécanique des œuvres emblématiques du musée d’Orsay, et dans le même temps il éprouve également le fait que ce dispositif fonctionne aussi comme une exploration d’hypothèses, de pistes, comme dans une enquête. Il voit que l’auteur met en scène deux enquêteurs : Virgile Gautrey d’un côté, le buste de Johann Wolfgang von Goethe de l’autre qui cherche avec ses propres moyens (il est muni de six jambes mécaniques) au sein même du musée d’Orsay, y compris dans les réserves. Le lecteur peut y voir un deuxième niveau de lecture : le constat que les disparitions concernent exclusivement des muses, le plus souvent des femmes nues, ce qui induit de manière sous-jacente un questionnement sur la nature du rapport de séduction entre muse et créateur, sur ce qui peut s’avérer séduisant pour la muse chez le créateur, et ce qui peut prendre sa place dans le cœur de sa muse.
Un livre anniversaire et hommage qui l’assume en égrainant les œuvres les plus célèbres du musée d’Orsay, sur la base d’un scénario linéaire. Virgile Gautrey se retrouve face à une toile après l’autre, essayant de comprendre pourquoi les muses ont disparu des œuvres. L’auteur parvient à remplir ce contrat de passage en revue, grâce à une narration visuelle qui sait accommoder chaque toile juste assez pour l’intégrer dans les dessins de l’histoire, sans dénaturer l’œuvre originelle. Accompagnant cette énumération, l’intrigue recèle plus de substance : un regard personnel sur l’importance ou le sens de chaque toile pour l’auteur, une mise en correspondance de la notion de muse et du jeu de séduction réciproque que cette fonction suppose avec le créateur. Ludique et enrichissant.
Un album presque tous publics.
Une BD avec pour fond historique la révolution Russe, mais un folklore fantastique va prendre une place de plus en plus importante au fil du récit.
Je découvre Melody Cisinski, elle a étudié aux Gobelins. Elle a travaillé pour Disney (Dug Days), Marvel, Pixar, Mattel... Elle se spécialise dans l'animation et la 3D.
J'ai retrouvé cette touche informatisée dans sa proposition graphique. Un visuel très agréable à regarder, il dégage une atmosphère inquiétante qui sied à merveille à cette histoire. Un style réaliste, sauf pour la représentation des visages, très expressif et dynamique. J'ai aimé le soin apporté aux décors.
Une première partie avec des couleurs sombres, sauf ce rouge communiste pour Nikita et ce orange pour la chevelure de la princesse Nadya. Par contre la seconde partie a une colorisation différente, plus lumineuse. Je ne comprends pas cette différenciation.
1921, la guerre civile fait rage entre les tsaristes, les communistes et les anarchistes. Yuri, un cosaque, retrouve son ami d'enfance Nikita, un chef bolchevique sans scrupules, qui va lui confier une mission de la plus haute importance : tuer la dernière survivante de la famille Romanov, la princesse Nadya.
Un récit qui a su m'intéresser, les personnages de Yuri, au passé cabossé, de Nadya, une jeune fille au caractère bien trempé et du fantasque cheval Platon sont attachants, ce trio fonctionne très bien et apporte une petite touche d'humour qui tranche avec la noirceur de l'histoire.
Le rythme est soutenu avec quelques incursions dans le passé de Yuri, et la partie fantastique est bien amenée, elle puise dans la mythologie païenne. Mais une seconde partie qui s'essouffle un peu avec un fantastique un peu trop présent à mon goût.
Une lecture recommandable et divertissante.
Mouais. Voilà un album que j’ai lu sans réelle difficulté, mais aussi hélas sans jamais être captivé.
L’histoire de ces vieux bonhommes qui reconstituent une vieille équipe de rugby pour sauver leur ancien stade et leur ancien club sent fortement le déjà-vu. En mieux. Car ici l’histoire ne m’a pas emballé.
Les personnalités des « sauveurs de souvenirs » sont un peu caricaturales, et finalement peu fouillées. Et il manque les bons mots, les situations cocasses qui dans ce genre d’histoire relèvent le plat. Alors, une fois énoncées ces critiques, ça reste une histoire d’amitié virile qui peut plaire. Mais ça manque d’originalité.
Quant au dessin, il est lisible, et pas désagréable. J’ai été moins convaincu par la colorisation : les bleu/gris qui dominent ne sont pas heureux.
Note réelle 2,5/5.
Mouais. Disons que ça se laisse lire, mais ça ne casse pas trois pattes à un canard, et je n’y reviendrai pas.
Ça commence comme un roman graphique très classique, où nous voyons une jeune femme « du continent » venir s’installer (elle ouvre une chambre d’hôtes) sur l’île d’Ouessant, où elle est en bute à la froideur et l’hostilité des iliens.
Si cet aspect perdure, s’ajoute rapidement une histoire qui tourne au polar.
Pourquoi pas ? Ça aurait le mérite de dynamiser une intrigue un peu convenue. Mais hélas tout le côté polar manque aussi de rythme – et d’intérêt. Jusqu’aux conclusions finales de l’héroïne qui, s’étant transformée en enquêtrice, nous sort un final digne d’un whodunit du pauvre – c’est quand même tarabiscoté ce qu’elle déduit de ces observations !
Bref, un album à emprunter à l’occasion, surtout si vous êtes amoureux de cette belle région. Mais j’en suis sorti sur ma faim.
Note réelle 2,5/5.
Pas mal de bonnes choses dans ce premier tome, à commencer par la couverture. Composition superbe, le personnage avec son bras bio-mécanique contraste avec la guitare en bois, c'est du meilleur effet. Très belle mise en bouche, qui va se poursuivre dans une ville futuriste : un Lyon transformé en mégalopole glauque et sombre, il faut avouer que c'est amusant et séduisant. L'ambiance est très réussie, entre les véhicules volants quais de Sâone, et les bas fonds underground où on deale à tout bout de champ. Pour ne rien gâcher, c'est parfaitement mis en images par le dessin et la mise en couleur de Jef. Son style colle tout à fait à cet univers.
Coté scénario, c'est classique mais efficace. Il y a plusieurs protagonistes qui vont se croiser. L'intrigue tourne autour d'une drogue de synthèse, de sa distribution, et du contrôle des quartiers. Politiques et mafieux se partage le gâteau. Comme c'est de rigueur on ne sait pas initialement ce qui motive les différents personnages, ce qu'ils cherchent à faire exactement, ou pour le compte de qui ils agissent. L'histoire se met en place doucement, elle donne envie d'en savoir plus même si pour le moment ça reste introductif, et ce petit flou ambiant mérite d'être développé.
Les rouages de l'histoire sont en place, il ne reste plus qu'à ce que ça décolle vraiment pour transformer l'essai. En tout cas, l'envie de connaitre la suite est bien présente en fin de lecture.
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Cabot-Caboche
Histoire d'une jolie tendresse sur la vie d'un chien errant, de son apprentissage de la survie via une vieille chienne débrouillarde, à sa rencontre avec ses nouveaux maîtres et notamment leur petite fille boudeuse, en passant par de belles rencontres avec la faune sauvage. Il s'agit d'une belle tranche de vie originalement observée depuis le regard d'un chien, jouant habilement de l'humour et de l'émotion, vive dans sa rythmique, agréable dans ses variations et développements. J'ai davantage de réserves pour les illustrations. Le style de Panaccione est certes sympathique (dynamique, ironique, chaleureux...), mais aussi assez brouillon. Le trait est précis pourtant ; cette regrettable impression est peut-être liée à la thématique de la laideur, ou bien aux couleurs, pas assez tranchées et contrastées, jouant moins leur rôle de frontières ? Pour moi, l'auteur ne parvient pas à emprunter la voie des géniaux Franquin ou Peyo, capables de concilier ces qualités-là avec leur rondeur d'une redoutable précision.
La Terre Vagabonde
Si j’étais membre du jury à Angouleme, Christophe Bec et Stefano Raffaele recevraient une distinction méritée pour leur énormissime contribution à la BD. Vous l’avez compris je suis un fan absolu de ce duo incroyable. Je me procure leurs albums les yeux fermés. Et jamais je n’ai été déçu. Avec la terre vagabonde encore une fois nous sommes sur une véritable pépite alliant la plume brillante de Christophe Bec et les talents visuels de Stefano Raffaele. Les compères ont réussi une nouvelle fois à créer une œuvre captivante qui ne peut que vous transporter dans un univers riche et intrigant. Christophe Bec est connu pour son habileté à tisser des histoires complexes et immersives. Il ne déçoit pas avec ce scénario inspiré de l’œuvre de Liu Cixin publiée en 2000. Il mélange habilement science-fiction et aventure, tout en explorant des thèmes profonds comme la survie, l'humanité et l'inconnu. L'intrigue est fascinante dès les premières pages. Christophe réussit à maintenir une tension narrative qui va vous garder en haleine jusqu'à la fin. Les personnages sont bien développés et nuancés, offrant une profondeur émotionnelle qui résonne longtemps après la dernière page tournée. Une lecture d’une traite s’imposera naturellement à vous. En parallèle les dessins de Stefano Raffaele sont tout simplement spectaculaires. Chaque planche est un chef-d'œuvre en soi, débordant de détails et d'expressions qui donnent vie à l'histoire. Stefano maîtrise parfaitement les scènes d'action dynamiques autant que les moments de calme introspectifs. Son style visuel unique complète parfaitement le récit de Christophe Bec, créant une harmonie entre le texte et les images qui est rare dans le genre. C’est magnifique avec en bonus des posters visuels incroyables. Cerise sur le gâteau avec cet album vous pouvez intellectualiser l’histoire en vous posant des questions philosophiques … tout en divertissant bien évidemment. Le duo va vous pousser à réfléchir sur notre place dans l'univers et les implications de nos actions collectives. Ce n’est pas génial ça ? Je ne peux que recommander cette BD remarquable qui mérite une place dans votre bibliothèque. Je vous invite à courir chez votre libraire adoré pour vous la procurer.
Les Murailles invisibles
Un concept de SF proche du fantastique qui attire forcément la curiosité. Comme dans le roman Under the Dome de Stephen King, la Terre se retrouve soudain scindée en territoires coupés les uns des autres par des murs invisibles et impénétrables. Outre l'effondrement de la civilisation que cela induit, la grosse particularité de cette situation est que le temps se déroule à des vitesses différentes dans chacune de ces zones. Là où 3 mois se sont écoulées dans celle du narrateur, des siècles voire des millénaires ont déjà eu le temps de se dérouler dans d'autres. Et quand il se retrouve à suivre un groupe de personnes issues d'une ville futuriste qui a su trouver comment passer d'une zone à l'autre, il va découvrir les effets de se retrouver dans des endroits où les choses ont évolué différemment et à des vitesses différentes. Avec toujours dans l'idée de comprendre l'origine de ces murailles invisibles... Je suis toujours attiré par ce type de concept et l'envie de découvrir l'explication à des mystères aussi incroyables même si l'engouement tient généralement davantage dans la découverte des conséquences de ceux-ci plutôt que dans la révélation elle-même qui la plupart du temps est soit inexistante soit décevante. Pour le moment, au bout de 2 tomes parus, cette série ne révèle encore qu'une part du mystère, mais pas vraiment celle qu'on attendait. Et cette part là est plutôt bien trouvée quoiqu'elle ne répond pas à la question principale. Pour le reste, c'est avant tout la pérégrination d'un groupe dans un décor post-apocalyptique voire presque de fantasy pour certaines zones traversées tant les choses ont changé. Le rythme est bon, le dessin est de bonne qualité et l'aventure tient en haleine. Il y a toutefois quelques défauts. Le premier pour moi, ce sont les trop longs et un peu pénibles monologues intérieurs semi-philosophiques du narrateur durant les premières pages de chaque album : je m'en serai volontiers passé. Le second, c'est un côté un peu bancal des écoulements de temps différents. Certains changements sont trop radicaux et manquent de logique scientifique dans certaines zones, ce qui crée cette impression de fantasy. D'autre part, les changements de vitesse temporelle me paraissent un peu embrouillés et exploités avec facilité, comme notamment sur la deuxième moitié du second tome où les héros sont suivis et surveillés alors qu'ils passent de zones en zones : alors que le temps s'est écoulé parfois beaucoup plus rapidement ou lentement pour les surveillants et suiveurs, ceux-ci agissent comme s'ils étaient synchronisés sur la même vitesse que les héros et que leur destination finale. Et pour finir, autant on voit les héros observer la scène au ralenti d'une zone voisine et largement s'y préparer, autant les auteurs ont l'air d'avoir oublié que les quelques fois où ces mêmes héros se sont rendus dans des zones se déroulant bien plus rapidement, les habitants de celles-ci pouvaient les voir arriver au ralenti et se préparer à leur faire du mal dès leur arrivée (je pense aux hommes-singes agressifs du premier tome). Bref, c'est une série de SF qui attise par son concept intrigant semi-fantastique et apporte quelques développements crédibles à cette idée, mais aussi d'autres qui sont nettement moins plausibles et plus orientées vers le divertissement voire la fantasy. Je ne suis pas vraiment convaincu mais j'ai passé un moment sympathique tout de même.
Seul le silence
Cette adaptation du 'un roman de R.J. Ellory nous invite à suivre la vie de Joseph Vaughan, enfant d'Augusta Falls, théâtre de crimes atroces, du début des années 40 jusqu'aux années 2000. Cette série de meurtres épouvantables impactera toute la vie de Joseph jusqu'à que ce dernier arrive à démasquer le coupable pour enfin se libérer de ses démons. Graphiquement c'est très bien réalisé et fort bien réussi. Les choix des couleurs ainsi que les dessins sont en parfaite adéquation avec la noirceur de ce polar. Par contre j'ai eu un mal fou à m'attacher à ce pauvre Joseph qui au fil des pages va de malheurs en malheurs avec une capacité de résilience inouïe. Enfin il y a un gros hic : je n'ai pas compris comment Joseph a fait pour démasquer le coupable. Il me semble qu'il manque un bout dans cette adaptation ou bien le roman initial (que je ne connais pas) prend lui aussi un sacré raccourci. Cette incompréhension dans le final même de l'intrigue est venu gâcher mon plaisir. Reste donc un ouvrage fort joli mais pas indispensable
La Cuisine des ogres
Conte culinaire servant de gentils orphelins désœuvrés à de terribles ogres affamés. Après une introduction gothique à souhait à la Dickens, nous découvrons le repère des ogres pour y suivre les pérégrinations d'une jeune fille fascinée par la gastronomie, mais toujours susceptible de finir dans une assiette. Que ces deux parties s'imbriquent maladroitement s'excuse volontiers, le merveilleux retenant davantage l'attention et autorisant tous les excès. Mais notre implication est entachée par ces revirements (comment notre héroïne parvient à passer de maladroite et peu dégourdie à courageuse et ingénue, mystère...) et un détachement s'invite inévitablement. De même, les illustrations d'Andreae qui a bien des égards peuvent apparaître comme un véritable point fort, sont si chargées, fourmillantes de couleurs éclatantes et de détails, qu'elles finissent par nous rendre plus spectateurs que co-aventuriers : le souffle épique ne se vit même plus par procuration, il se constate. Un joli conte, nous laissant sur le pas de la porte, et que l'on eut aimé apprécier davantage.
Les Disparues d'Orsay
Le poète est semblable au prince des nuées qui hante la tempête et se rit de l’archer. - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre, consacrée à une visite atypique du musée d’Orsay. Son édition originale date de 2017. Il a été réalisé par Stéphane Levallois, pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il comprend soixante-neuf pages de bande dessinée. À la fin se trouve une liste des œuvres du musée d’Orsay (et d’ailleurs) citées dans le livre, soit environ soixante-quinze œuvres différentes, et un peu moins d’artistes. Cette liste s’intercale entre cinq portraits en pleine page : Dante Alighieri (d’après William Bouguereau), Heraklès (d’après Émile Antoine Burdelle, Henri de Toulouse-Lautrec), la Petite danseuse de 14 ans (d’après Edgar Degas), Johann Wolfgang Goethe (d’après Pierre-Jean David d’Angers). Virgile Gautrey, un agent de surveillance, vient de se lever, et il s’habille méthodiquement. Il finit par lacer ses souliers, et passer la lanière qui tient son badge, autour du cou. Il est le gardien du musée d’Orsay. Il se rend tranquillement à son lieu de travail, passe son badge dans la liseuse et pénètre à l’intérieur. Il passe devant le buste de Johann Wolfgang von Goethe, sculpté par Pierre-Jean David d’Angers. Il monte à l’étage. Il prend une chaise et il s’installe devant Naissance de Vénus, de William Bouguereau. En lui-même, il pense au conseil à donner à un visiteur : quand on visite un musée, ne pas faire comme les autres, changer de rythme, traverser les salles d’un pas pressé, n’adresser à chaque œuvre qu’un regard furtif. À coup sûr, cela divertira les gardiens, brisera un instant la monotonie de leur quotidien. Il continue en son for intérieur ; avaler les salles toujours plus vite, jusqu’à ce que peut-être une œuvre arrête le visiteur. Et que pour la première fois de sa vie, il ressente une émotion si forte qu’il lui soit désormais impossible de se passer d’elle. Totalement absorbé dans sa contemplation du tableau, Virgile Gautrey s’imagine voir Vénus courir nue devant lui, cherchant à atteindre un train sur le départ, le ratant, alors que lui reste de l’autre côté d’une vitre, incapable de la traverser, de rattraper cette femme. Le temps s’écoule à la grande horloge du musée et un autre gardien regarde le même tableau. Virgile Gautrey se réveille en sursaut dans son lit. Peu de temps après, il est le premier à arriver au musée. Il passe devant le buste de Goethe. Il passe devant le tableau La source, de Jean-Auguste Dominique Ingres, et il se fait la réflexion que la muse n’est plus là. Il se rend compte de l’impossibilité de ce qu’il vient de dire. Il continue de progresser dans la galerie et constate avec affolement que les jeunes filles ont disparu des autres tableaux. Il court jusqu’à la salle où se trouve Naissance de Vénus, elle n’est plus dans le tableau, il s’écroule à terre victime d’un malaise. Il gît sur le sol inconscient. Il reprend ses esprits, allongé sur un lit, le buste de Goethe lui parle. Il lui dit que le temps presse, que les muses ont disparu des œuvres, que ce musée pourrait être celui de la mémoire de Gautrey, et qu’il incombe à ce dernier de partir à leur recherche et de les ramener pour la célébration des trente ans. Le musée d’Orsay a été inauguré en 1986, et cette bande dessinée a été publiée en 2017, un hommage à ses trente ans d’existence. Le texte de présentation indique qu’elle constitue : un Jeu de piste alerte et poétique à Orsay, une nouvelle visite atypique du musée parisien, un conte irrévérencieux et léger pour la collection Futuropolis/Musée d’Orsay. En effet, comme l’indique le titre, plusieurs muses, la plupart dénudées, ont disparu de tableaux célèbres, et la quête du gardien est de les retrouver, et par là-même d’identifier leur ravisseur. Il s’appelle Virgile Gautrey, bien évidemment en référence à Virgile (-70 à -19), le poète latin auteur de l'Énéide, les Bucoliques et les Géorgiques. Durant son voyage, il rencontre Dante Alighieri (1265/67-1321, poète et écrivain) qui va lui servir de guide pendant plusieurs séquences, en hommage à La Divine Comédie (1307-1321), avec une inversion des rôles puisqu’ici Dante guide Virgile. En effet, Gautrey finit par arriver dans un endroit qu’il identifie comme étant l’Enfer. En fonction de sa culture, et de sa familiarité avec les collections du musée d’Orsay, l’illustration de couverture dit peut-être quelque chose au lecteur, plus ou moins vaguement. En arrivant à la fin de l’ouvrage, il découvre donc la liste des œuvres citées visuellement. La couverture est inspirée du tableau Les Oréades (1902) de William Bouguereau (1825-1905). Par la suite, il peut juste reconnaître l’architecture caractéristique du musée, ou bien quelques-uns des tableaux réinterprétés. Aussi le ressenti de lecture dépend fortement du niveau de familiarité avec les œuvres du musée d’Orsay (et d’ailleurs). L’auteur explicite cette mention d’autres endroits : il s’agit de la galerie internationale d’art moderne à Venise, du musée de l’Orangerie, du musée du Louvre, de la fondation Beyeler à Bâle, du musée Rodin à Paris, même si cela ne concerne que quelques œuvres parmi toutes celles auxquelles il est rendu hommage. Sa lecture peut alors prendre une dimension ludique, en jouant à identifier chaque référence, chaque tableau intégré à la narration visuelle, ou bien rester au niveau de l’intrigue, tout en se disant qu’il ira consulter plus en détail la liste en fin d’ouvrage pour telle ou telle image qui l’a plus frappé. Il n’en est peut-être pas au niveau de Virgile Dautrey qui a vécu l’expérience de ressentir une émotion si forte qu’il lui soit désormais impossible de se passer de telle œuvre, mais il y a fort à parier qu’il éprouvera l’envie d’en voir plusieurs pour de vrai. Au fil des pages, une composition ou une autre le prend par surprise : la perspective des Raboteurs de Parquet (1875) de Gustave Caillebotte (1848-1894), la richesse d’un tableau à la manière de Gustav Klimt (1862-1918), le pointillisme de La voilette (vers 1883) de Georges Seurat (1859-1891), les splendides couleurs de Londres Le parlement trouée de soleil dans le brouillard (1904) de Claude Monet (1840-1926), l’eau calme et visqueuse de Le pauvre pêcheur (1881) de Pierre Puvis de Chavannes (1824-1898), ou encore bien d’autres. L’artiste accomplit la prouesse de rendre hommage à ces quelques soixante-quinze œuvres d’art différentes en évoquant pour chacune l’exécution particulière de chaque créateur, tout en maintenant une unité graphique à sa narration visuelle, ce qui constitue un défi remarquable en soi. Tout commence avec une technique classique : des formes détourées par un trait de contour, un peu lâche, un peu fin, conservant un soupçon de spontanéité, avec une mise en couleurs de type aquarelle apportant des informations sur les teintes de chaque élément, comme ternies, et rehaussant le relief des surfaces, ainsi que le jeu d’ombres. Les traits de contour se font plus droits et plus secs pour représenter le hall central du musée d’Orsay avec ses murs bien droits, et ses arches bien rondes. Les premiers tableaux sont évoqués dans leur cadre, accrochés au mur, avec des touches de couleurs un peu plus vives, les faisant ressortir du reste de la case, sans pour autant qu’ils ne jurent avec la réalité banale de Virgile Gautrey. La vraie première prise de liberté (après la disparition des muses) survient avec une scène spectaculaire en quatre cases page treize : une transposition de L’accident gare de l’Ouest (aujourd’hui Gare Montparnasse) le 22 octobre 1895, célèbre photographie de Léopold Louis Mercier (1866-1913). S’il y est sensible, le lecteur peut relever les fluctuations dans les techniques de dessins mises en œuvre par Stéphane Levallois qui lui permettent de s’aventurer vers les chefs d’œuvres picturaux, sans perdre le fil de son propre récit. Il peut jouer avec les lignes de contours en les rendant plus malléables ou plus floues, utiliser des couleurs plus vives pour un élément de la réalité banale de Virgile Gautrey en écho ou en annonce d’un tableau, utiliser le dispositif de l’ouverture d’une porte pour découvrir un autre monde ou une autre réalité derrière, diminuer le ratio de traits encrés au profit d’une plus grande importance accordée à la couleur directe, adapter des caractéristiques picturales telles que le pointillisme ou l’impressionnisme, jouer avec les aplats de noir, etc. Ainsi l’intégration des peintures se fait de manière organique, l’artiste gérant le degré de contraste en fonction de la séquence. L’intrigue fonctionne sur le principe d’une enquête : quelle est la cause de la disparition des muses ? Quel est le coupable ? L’utilisation d’un voyage en train permet de voir défiler les paysages, et donne également l’impression d’une course-poursuite, une scène ou deux donnant l’impression que le gardien peut peut-être rattraper celui qui les enlevées. Conscient de la nature anniversaire du récit, le lecteur ressent l’impression d’un passage en revue un peu mécanique des œuvres emblématiques du musée d’Orsay, et dans le même temps il éprouve également le fait que ce dispositif fonctionne aussi comme une exploration d’hypothèses, de pistes, comme dans une enquête. Il voit que l’auteur met en scène deux enquêteurs : Virgile Gautrey d’un côté, le buste de Johann Wolfgang von Goethe de l’autre qui cherche avec ses propres moyens (il est muni de six jambes mécaniques) au sein même du musée d’Orsay, y compris dans les réserves. Le lecteur peut y voir un deuxième niveau de lecture : le constat que les disparitions concernent exclusivement des muses, le plus souvent des femmes nues, ce qui induit de manière sous-jacente un questionnement sur la nature du rapport de séduction entre muse et créateur, sur ce qui peut s’avérer séduisant pour la muse chez le créateur, et ce qui peut prendre sa place dans le cœur de sa muse. Un livre anniversaire et hommage qui l’assume en égrainant les œuvres les plus célèbres du musée d’Orsay, sur la base d’un scénario linéaire. Virgile Gautrey se retrouve face à une toile après l’autre, essayant de comprendre pourquoi les muses ont disparu des œuvres. L’auteur parvient à remplir ce contrat de passage en revue, grâce à une narration visuelle qui sait accommoder chaque toile juste assez pour l’intégrer dans les dessins de l’histoire, sans dénaturer l’œuvre originelle. Accompagnant cette énumération, l’intrigue recèle plus de substance : un regard personnel sur l’importance ou le sens de chaque toile pour l’auteur, une mise en correspondance de la notion de muse et du jeu de séduction réciproque que cette fonction suppose avec le créateur. Ludique et enrichissant.
Le Rêve du Tchernobog (La Révolution des damnés)
Un album presque tous publics. Une BD avec pour fond historique la révolution Russe, mais un folklore fantastique va prendre une place de plus en plus importante au fil du récit. Je découvre Melody Cisinski, elle a étudié aux Gobelins. Elle a travaillé pour Disney (Dug Days), Marvel, Pixar, Mattel... Elle se spécialise dans l'animation et la 3D. J'ai retrouvé cette touche informatisée dans sa proposition graphique. Un visuel très agréable à regarder, il dégage une atmosphère inquiétante qui sied à merveille à cette histoire. Un style réaliste, sauf pour la représentation des visages, très expressif et dynamique. J'ai aimé le soin apporté aux décors. Une première partie avec des couleurs sombres, sauf ce rouge communiste pour Nikita et ce orange pour la chevelure de la princesse Nadya. Par contre la seconde partie a une colorisation différente, plus lumineuse. Je ne comprends pas cette différenciation. 1921, la guerre civile fait rage entre les tsaristes, les communistes et les anarchistes. Yuri, un cosaque, retrouve son ami d'enfance Nikita, un chef bolchevique sans scrupules, qui va lui confier une mission de la plus haute importance : tuer la dernière survivante de la famille Romanov, la princesse Nadya. Un récit qui a su m'intéresser, les personnages de Yuri, au passé cabossé, de Nadya, une jeune fille au caractère bien trempé et du fantasque cheval Platon sont attachants, ce trio fonctionne très bien et apporte une petite touche d'humour qui tranche avec la noirceur de l'histoire. Le rythme est soutenu avec quelques incursions dans le passé de Yuri, et la partie fantastique est bien amenée, elle puise dans la mythologie païenne. Mais une seconde partie qui s'essouffle un peu avec un fantastique un peu trop présent à mon goût. Une lecture recommandable et divertissante.
Adieu coach
Mouais. Voilà un album que j’ai lu sans réelle difficulté, mais aussi hélas sans jamais être captivé. L’histoire de ces vieux bonhommes qui reconstituent une vieille équipe de rugby pour sauver leur ancien stade et leur ancien club sent fortement le déjà-vu. En mieux. Car ici l’histoire ne m’a pas emballé. Les personnalités des « sauveurs de souvenirs » sont un peu caricaturales, et finalement peu fouillées. Et il manque les bons mots, les situations cocasses qui dans ce genre d’histoire relèvent le plat. Alors, une fois énoncées ces critiques, ça reste une histoire d’amitié virile qui peut plaire. Mais ça manque d’originalité. Quant au dessin, il est lisible, et pas désagréable. J’ai été moins convaincu par la colorisation : les bleu/gris qui dominent ne sont pas heureux. Note réelle 2,5/5.
Ouessantines
Mouais. Disons que ça se laisse lire, mais ça ne casse pas trois pattes à un canard, et je n’y reviendrai pas. Ça commence comme un roman graphique très classique, où nous voyons une jeune femme « du continent » venir s’installer (elle ouvre une chambre d’hôtes) sur l’île d’Ouessant, où elle est en bute à la froideur et l’hostilité des iliens. Si cet aspect perdure, s’ajoute rapidement une histoire qui tourne au polar. Pourquoi pas ? Ça aurait le mérite de dynamiser une intrigue un peu convenue. Mais hélas tout le côté polar manque aussi de rythme – et d’intérêt. Jusqu’aux conclusions finales de l’héroïne qui, s’étant transformée en enquêtrice, nous sort un final digne d’un whodunit du pauvre – c’est quand même tarabiscoté ce qu’elle déduit de ces observations ! Bref, un album à emprunter à l’occasion, surtout si vous êtes amoureux de cette belle région. Mais j’en suis sorti sur ma faim. Note réelle 2,5/5.
La Mécanique
Pas mal de bonnes choses dans ce premier tome, à commencer par la couverture. Composition superbe, le personnage avec son bras bio-mécanique contraste avec la guitare en bois, c'est du meilleur effet. Très belle mise en bouche, qui va se poursuivre dans une ville futuriste : un Lyon transformé en mégalopole glauque et sombre, il faut avouer que c'est amusant et séduisant. L'ambiance est très réussie, entre les véhicules volants quais de Sâone, et les bas fonds underground où on deale à tout bout de champ. Pour ne rien gâcher, c'est parfaitement mis en images par le dessin et la mise en couleur de Jef. Son style colle tout à fait à cet univers. Coté scénario, c'est classique mais efficace. Il y a plusieurs protagonistes qui vont se croiser. L'intrigue tourne autour d'une drogue de synthèse, de sa distribution, et du contrôle des quartiers. Politiques et mafieux se partage le gâteau. Comme c'est de rigueur on ne sait pas initialement ce qui motive les différents personnages, ce qu'ils cherchent à faire exactement, ou pour le compte de qui ils agissent. L'histoire se met en place doucement, elle donne envie d'en savoir plus même si pour le moment ça reste introductif, et ce petit flou ambiant mérite d'être développé. Les rouages de l'histoire sont en place, il ne reste plus qu'à ce que ça décolle vraiment pour transformer l'essai. En tout cas, l'envie de connaitre la suite est bien présente en fin de lecture.