Je ressors avec un avis très mitigé et globalement déçu de cette lecture.
Dès le départ, j’ai trouvé que la série s’ancrait dans quelque chose de plus ancien, j’ai pensé tout d’abord à la collection Vécu du même éditeur. Mais le dessin de Chaillet ramène immanquablement à quelques séries du Journal de Tintin de la grande époque, en particulier on sent l’influence du trait de Martin. Les phylactères bien remplis, très « explicatifs » y renvoient aussi.
Un texte trop abondant à mon goût donc, mais le dessin de Chaillet, sans doute un peu statique, est très bon pour reconstituer les décors d’époque (dernière décennie du XVème siècle et début du XVIème). On retrouve l’application des meilleures séries de la collection Vécu dans ce domaine.
L’intrigue se veut réaliste, s’ancre dans l’histoire de l’époque, en usant de personnages importants. Quelques imprécisions toutefois : le début du second tome confond Louis XII et Louis XIII (un siècle les sépare !), et, si le visage de François 1er est ressemblant, j’ai été surpris de le voir de même taille que tous ses interlocuteurs, lui qui était un colosse d’un peu moins de 2 mètres.
L’intrigue joue sur des ressors policiers – là aussi Convard use d’un rythme et d’une narration un peu vieillots. Mais cet aspect manque de crédibilité. D’abord j’imagine mal François 1er connaitre à ce point tous les détails, puis avoir l’envie et le temps de les raconter aussi minutieusement à un abbé.
Ensuite la vengeance de Léonard est franchement alambiquée et improbable (l’utilisation de ses « inventions » – son aile volante qui décolle, son armure suffisamment puissante et souple pour découper le visage d’une victime – on nous fait avaler trop de couleuvres, mais aussi le temps consacré, alors que Léonard est quand même plus qu’occupé durant toutes ces années, etc.).
Enfin, la multitude d’images où la jeune femme accompagnant Léonard voit son visage ou une partie de celui-ci miraculeusement masqué, finit par lasser – et du coup évente rapidement le secret.
De bons efforts de reconstitution, mais une intrigue maladroite qui ne m’a pas convaincu.
Un sujet douloureux – qui occupe de plus en plus l’actualité – mais traité de façon relativement sobre. Cela vient du fait que le dessin, un peu brouillon et minimaliste, au rendu presque enfantin, adoucit quelque peu le récit, pourtant très noir et oppressant.
L’auteure – qui hélas pour elle livre sans doute ici quelque chose d’autobiographique – prend le temps de montrer comment la relation toxique entre elle et le père de ses enfants se met en place. Comment une relation amoureuse ordinaire dégénère peu à peu en quelque chose de déséquilibré (dans tous les sens du terme), la violence prenant le pas. Au passage, le récit illustre aussi comment le fait de passer son temps sur internet et certains réseaux sociaux complotistes et fachos détruit le peu de neurones que l’on possède au départ : la façon dont le compagnon de la narratrice devient viriliste, néo-nazi, en embrigadant ses mômes dans ses délires mortifères est assez flippante.
Un témoignage intéressant (même si la conclusion semble faire rentrer tous les hommes dans ce même moule à connards, ce qui heureusement n’est pas le cas – je pense n’être pas si exceptionnel dans ce domaine !).
J'avais des a priori avant d'entamer la lecture, a priori à l'endroit du parti pris graphique. Mais très vite, tout s'est envolé devant l'originalité du récit. En outre, Prévert y est présenté comme quelqu'un d'espiègle et atypique, ne supportant ni la mise en case (au sens de "mettre quelqu'un dans une case"), et la somme d'informations fournie apporte la densité qui plait au bonhomme, offrant une vue assez exhaustive de son "travail". L'homme était bien poète, mais il l'était dans tout ce qu'il entreprenait.
Finalement, le dessin finit par apprivoiser l'oeil, au point qu'on le trouve en adéquation parfaite à la fois avec le propos mais également avec l'artiste. On songe parfois au dadaïsme, au surréalisme, à Picasso... En somme à tout ce qui faisait la vie culturelle d'avant-guerre jusqu'aux années 60. Tout cela est très congruent. Même le titre en forme d'antiphrase fait écho à la personnalité foisonnante de Prévert.
En prime, voilà-t'y pas qu'une fois ma lecture terminée, je réalise que le scénario était signé Hervé Bourhis. Comme quoi purée, y a pas de mystère...
Décidément la Fantasy a le vent en poupe en ce début d'année. Après les excellents L'Île aux orcs et Fantasy - Yourcenar / Alma, ce "Le Roi des fauves" pourrait bien, lui aussi, sortir du lot dans le genre sus nommé. Ce premier tome a d'indéniables qualités, mais je vais quand même attendre le second volume (prévu pour fin d'année), il doit clôturer la série, avant de le crier sur les toits.
Une adaptation du roman du même nom d'Aurélie Wellenstein, roman avec de très bonnes critiques (non lu). C'est un trio d'auteurs qui a déjà collaboré sur Robilar ou le Maistre Chat qui s'y attelle.
Un récit au rythme bien dosé, des personnages attachants, à défaut d'être innovants et un scénario avec une touche d'originalité.
Dans un royaume où règne l'inégalité, trois adolescents, Ivar, Oswald et Kaya, vont braver l'interdiction de chasser pour ne pas mourir de faim. Ils seront rattrapés par les soldats et jugés coupables. La sentence sera pire que la mort, ils vont être transformé en berserkirs (monstres à ressemblance animal). Pour cela on va leur faire avaler une larve (façon Alien) qui va s'occuper de la mutation sur plusieurs jours.
David Chauvel maîtrise son sujet, c'est captivant et il distribue avec justesse les informations sur ce monde fantastique teinté de magie.
J'aime beaucoup le dessin de Sylvain Guinebaud, je l'avais découvert avec le tome 3 de La Geste des Chevaliers Dragons. Un style qui se reconnaît au premier coup d'œil, avec cette particularité dans l'expression des visages, des mimiques poussées à l'extrême. Perso, j'adore.
Les couleurs de Lou sont superbes et changent suivant les différents espaces temps.
Du très bon boulot.
Impatient de rencontrer ce roi des fauves.
Et bien perso, j'ai vraiment aimé cet album. Je ne m'étendrai pas sur la qualité du dessin de Frantz Duchazeau qui n'est plus à démontrer. Le trait est enlevé et dynamique en apportant une fraicheur bienvenue.
Le scénario est original. Disons plutôt que le point de vue adopté offre une vision nuancée voire surprenante du petit prodige autrichien. J'aime beaucoup la vision de Milos Forman pour son film Amadeus, mais ici, Duchazeau nous présente un artiste qui est encore un enfant. Il est déjà très doué et sa réputation commence à s'étendre à toutes les cours d'Europe. Le jeune Mozart est exploité par une noblesse sans vergogne. Tout le monde se l'arrange, minaude, flatte, supplie le phénomène de dispenser des leçons qui ne seront jamais payées, bien évidemment. L'image donnée de la noblesse de cours est terrible, mais sans doute proche de la réalité (ça correspond à des choses lues précédemment dans divers ouvrages). On a affaire à un ramassis de vils personnes fardant leur individualisme derrière une obséquiosité de façade. Wolfgang travaille d'arrache-pied, frisant le burn-out, s'il est permis d'employer un terme contemporain. C'est finalement devant l'insistance de son père (présenté au départ comme quelqu'un de froid et d'autoritaire) qu'il finira par fuir la France pour retourner en Autriche.
Voilà pourquoi j'ai aimé cette BD : ça cause de musique tout en bénéficiant d'une narration fluide au service d'un dessin stylé, ainsi que d'un point de vue fort peu commun.
Fernando Posada est un être immortel, mi-humain mi-dragon, issu d’un monde parallèle empreint de fantasy. Là-bas, il existe depuis une éternité, ayant oublié ses origines, dispose de pouvoirs quasi divins et renait à chaque mort. Il y est devenu depuis des temps immémoriaux le roi d'un pays merveilleux sur lequel il veille vaguement quand il a le cœur à ça. Car l'éternité lui pèse tant qu'il a décidé de se faire renaître en parallèle sur notre Terre, où il est désormais un jeune ado rebelle de 13 ans, à la tête d'un petit groupe de rock avec ses deux meilleurs amis. Mais la tranquillité de sa double vie est troublée lorsqu’une jeune académicienne s’installe dans son palais pour en étudier l’histoire et percer les secrets de ce roi immortel.
Toutes les chansons que j’aimerais oublier est une œuvre dense et généreuse, où l’on sent que l’autrice a investi beaucoup d’elle-même. Sur plus de 180 pages au dessin soigné et accompagné de plusieurs illustrations pleine page, elle déploie un univers riche, foisonnant, et visiblement très personnel. Elle dote son personnage principal d’un charisme magnétique, à la fois souverain désabusé et caméléon magique, capable de se transformer à volonté, en homme, en femme, en dragon, et de plier le réel à ses désirs. Sous cette toute-puissance se cache pourtant une douleur profonde, un mal de vivre qu’il tente d’exorciser en enfouissant ses souvenirs dans des chansons qu’il voudrait oublier.
L’univers parallèle imaginé ici, aux accents des Mille et Une Nuits, est une réussite visuelle et narrative. On y croise une humanité cosmopolite réunie sous la protection de dragons à l’apparence mêlant ailes de papillon et plumage d’oiseau. Ces séquences sont les plus intéressantes de l’album : joliment dessinées, pleines de finesse dans les décors, les costumes, les visages et les atmosphères, elles confèrent à l’ensemble une dimension poétique et intemporelle. Et surtout, ce personnage de roi adolescent immortel, tout-puissant et insaisissable, dont les souvenirs se perdent dans les millénaires, possède une complexité et un potentiel fascinants que l’on aimerait voir davantage explorés. Il incarne à lui seul la beauté mélancolique de ce monde parallèle, tout en éveillant un sentiment vertigineux face au temps, à la mémoire et à l’usure de l’éternité.
En revanche, les passages ancrés dans notre monde (étrangement situé dans les années 1980, sans justification claire) souffrent d’un certain déséquilibre. Moins inspirés, plus mièvres, ils évoquent une ambiance de roman young adult façon Twilight avec cet immortel qui côtoie des adolescents, où l’on retrouve les codes du teenager mélancolique, du groupe de rock aux paroles sombres et du spleen adolescent. Cette vie parallèle, censée offrir une échappatoire au héros, finit par prendre le pas sur l’intrigue, tirant l’ensemble vers une romance douce-amère, un brin sirupeuse pour un lectorat adulte.
Il demeure pourtant de nombreuses qualités dans cet ouvrage : une richesse graphique évidente, un univers singulier, et quelques dynamiques de personnages intéressantes. Mais l’oscillation constante entre la majesté du monde fantasy et les émois adolescents du quotidien rend l’ensemble bancal. Une œuvre séduisante dans l’intention, souvent belle dans la forme, mais qui séduira sans doute davantage les lecteurs et lectrices plus jeunes que les adultes en quête d’une histoire pleinement aboutie.
J'ai trouvé cette biographie de Jacques Prévert très bien construite derrière ce titre provocateur. Un titre qui interroge un peu comme le faisait le peintre Magritte à la même époque. Ainsi Hervé Bourhis et Christian Cailleaux prennent le parti pris audacieux de s'écarter d'une biographie chronologique exhaustive et pas à pas pour se rapprocher des particularités du personnage. Prévert qui ne dédaignait pas l'Agit-prop aurait probablement apprécié la construction de cet ouvrage pas toujours hagiographique mais qui sonne particulièrement juste.
J'ai lu l'intégrale qui s'arrête dans les années 50 après son grave accident laissant une bonne partie de la vie de l'artiste aux bons soins de la curiosité du lectorat. Personnellement j'ai lu son recueil "Paroles" comme lycéen sans être transporté par l'émotion. L'ouvrage reste d'ailleurs assez discret sur la poésie préférant mettre l'accent sur le Prévert politique et le Prévert scénariste de cinéma. C'est sa collaboration avec Marcel Carné qui a produit plusieurs chef d'œuvres du cinéma français qui me touche le plus.
Devant une telle diversité, Cailleaux ne pouvait pas se contenter s'aligner des cases où il aurait enfermer l'artiste. L'auteur propose donc un graphisme pluriel où des pages de type illustrations, affiches alternent avec des pages plus BD pour revenir à une présentation de type collage. Le trait est classique et c'est dans cette construction que se trouve l'originalité de la narration visuelle.
Un ouvrage intéressant juste et bien documenté qui fait l'effort de faire vivre le personnage plus que de le raconter.
Evidemment je ne suis pas le lecteur idéal pour le propos de Margaux. Toutefois je ne déteste pas lire ce genre à la mode produit par des jeunes femmes modernes. Hélas ici j'ai vite déchanté car j'ai trouvé la suite d'anecdotes sur son installation dans sa nouvelle maison et dans sa nouvelle vie de couple trop superficielle et pas assez humoristique. Malgré l'effort de l'autrice de finir ce tome 1 sur une fin ouverte et dramatique qui remet sa situation en cause , je n'ai vraiment pas l'intention de poursuivre.
Dommage car le graphisme de Margaux Motin est vraiment agréable. C'est très dynamique avec beaucoup de vivacité dans le trait et les expressions. Une qualité graphique qui aurait mérité un scénario plus abouti.
My Capricorn Friend est un one-shot que j’avais hâte de découvrir, et dans l’ensemble, je ne suis pas déçu. L’histoire est bien construite, le propos est fort, et le sujet du harcèlement scolaire est traité avec beaucoup de justesse, sans tomber dans le pathos.
Le lien entre les deux personnages principaux, Yuya et Naoto, est touchant, et l’ambiance du récit oscille entre tension, mystère et émotion. Graphiquement, c’est propre et maîtrisé, avec une mise en scène sobre mais efficace.
Cela dit, j’ai deviné assez tôt où l’histoire allait nous mener, ce qui enlève un peu d’impact à la fin. Et justement, cette fin m’a laissé une légère impression d’inachevé. On reste un peu sur sa faim, comme si quelque chose manquait pour que ce soit vraiment marquant.
Un bon manga malgré tout, que je recommande pour la qualité de son traitement et sa sensibilité, même si je n’en fais pas un coup de cœur.
J'ai lu les tomes parus chez Urban Comics qui regroupe la plupart des récits scénarisés par Jamie Delano. Il faut savoir que c'est un scénariste important pour John Constantine parce que c'était le premier scénariste de la série régulier du personnage qui jusqu'à lors était un personnage secondaire de Swamp Thing.
C'est donc lui qui va créer des éléments récurrents de la série et va mettre Constantine dans des récits au ton adultes, quoique le personnage n'est pas encore aussi trash que feront ensuite des auteurs comme Garth Ennis. Le résultat sont des histoires fantastiques dans le ton de ce qui se faisait à la fin des années 80-début des années 90. Le fait que ça s'adressait à un public plus mature fait en sorte qu'on peu explorer des thèmes qu'on ne verra pas dans les titres de super-héros DC Comics comme Batman et Superman. J'aime bien l'ambiance qui se dégage de ses récits où tout peut arriver, mais John Constantine ne m'a pas semblé aussi charismatique que sous la plume de certains scénaristes qui vont se succéder sur le titre après Delano. Certains récits sont un peu décousus, je pense notamment à la grosse saga qu'on a droit dans le tome 2 qui est la partie où j'ai le moins accroché.
Un autre truc un peu dérangeant est que les dessinateurs vont souvent changés durant ses trois tomes et si j'en aime certains qui sont très bons pour installer le genre d'ambiance parfait pour des récits d'Hellblazer, il y en d'autres dont j'ai moins aimé le travail et au final il y a des styles qui sont trop hétérogène pour aider à la cohérence de la série. Parfois Constantine semblait changer de tête selon les chapitres ! Au final, c'est des tomes à emprunter si on veut connaitre l'historique du personnage.
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Je ressors avec un avis très mitigé et globalement déçu de cette lecture. Dès le départ, j’ai trouvé que la série s’ancrait dans quelque chose de plus ancien, j’ai pensé tout d’abord à la collection Vécu du même éditeur. Mais le dessin de Chaillet ramène immanquablement à quelques séries du Journal de Tintin de la grande époque, en particulier on sent l’influence du trait de Martin. Les phylactères bien remplis, très « explicatifs » y renvoient aussi. Un texte trop abondant à mon goût donc, mais le dessin de Chaillet, sans doute un peu statique, est très bon pour reconstituer les décors d’époque (dernière décennie du XVème siècle et début du XVIème). On retrouve l’application des meilleures séries de la collection Vécu dans ce domaine. L’intrigue se veut réaliste, s’ancre dans l’histoire de l’époque, en usant de personnages importants. Quelques imprécisions toutefois : le début du second tome confond Louis XII et Louis XIII (un siècle les sépare !), et, si le visage de François 1er est ressemblant, j’ai été surpris de le voir de même taille que tous ses interlocuteurs, lui qui était un colosse d’un peu moins de 2 mètres. L’intrigue joue sur des ressors policiers – là aussi Convard use d’un rythme et d’une narration un peu vieillots. Mais cet aspect manque de crédibilité. D’abord j’imagine mal François 1er connaitre à ce point tous les détails, puis avoir l’envie et le temps de les raconter aussi minutieusement à un abbé. Ensuite la vengeance de Léonard est franchement alambiquée et improbable (l’utilisation de ses « inventions » – son aile volante qui décolle, son armure suffisamment puissante et souple pour découper le visage d’une victime – on nous fait avaler trop de couleuvres, mais aussi le temps consacré, alors que Léonard est quand même plus qu’occupé durant toutes ces années, etc.). Enfin, la multitude d’images où la jeune femme accompagnant Léonard voit son visage ou une partie de celui-ci miraculeusement masqué, finit par lasser – et du coup évente rapidement le secret. De bons efforts de reconstitution, mais une intrigue maladroite qui ne m’a pas convaincu.
En territoire ennemi
Un sujet douloureux – qui occupe de plus en plus l’actualité – mais traité de façon relativement sobre. Cela vient du fait que le dessin, un peu brouillon et minimaliste, au rendu presque enfantin, adoucit quelque peu le récit, pourtant très noir et oppressant. L’auteure – qui hélas pour elle livre sans doute ici quelque chose d’autobiographique – prend le temps de montrer comment la relation toxique entre elle et le père de ses enfants se met en place. Comment une relation amoureuse ordinaire dégénère peu à peu en quelque chose de déséquilibré (dans tous les sens du terme), la violence prenant le pas. Au passage, le récit illustre aussi comment le fait de passer son temps sur internet et certains réseaux sociaux complotistes et fachos détruit le peu de neurones que l’on possède au départ : la façon dont le compagnon de la narratrice devient viriliste, néo-nazi, en embrigadant ses mômes dans ses délires mortifères est assez flippante. Un témoignage intéressant (même si la conclusion semble faire rentrer tous les hommes dans ce même moule à connards, ce qui heureusement n’est pas le cas – je pense n’être pas si exceptionnel dans ce domaine !).
Jacques Prévert n'est pas un poète (Prévert, inventeur)
J'avais des a priori avant d'entamer la lecture, a priori à l'endroit du parti pris graphique. Mais très vite, tout s'est envolé devant l'originalité du récit. En outre, Prévert y est présenté comme quelqu'un d'espiègle et atypique, ne supportant ni la mise en case (au sens de "mettre quelqu'un dans une case"), et la somme d'informations fournie apporte la densité qui plait au bonhomme, offrant une vue assez exhaustive de son "travail". L'homme était bien poète, mais il l'était dans tout ce qu'il entreprenait. Finalement, le dessin finit par apprivoiser l'oeil, au point qu'on le trouve en adéquation parfaite à la fois avec le propos mais également avec l'artiste. On songe parfois au dadaïsme, au surréalisme, à Picasso... En somme à tout ce qui faisait la vie culturelle d'avant-guerre jusqu'aux années 60. Tout cela est très congruent. Même le titre en forme d'antiphrase fait écho à la personnalité foisonnante de Prévert. En prime, voilà-t'y pas qu'une fois ma lecture terminée, je réalise que le scénario était signé Hervé Bourhis. Comme quoi purée, y a pas de mystère...
Le Roi des fauves
Décidément la Fantasy a le vent en poupe en ce début d'année. Après les excellents L'Île aux orcs et Fantasy - Yourcenar / Alma, ce "Le Roi des fauves" pourrait bien, lui aussi, sortir du lot dans le genre sus nommé. Ce premier tome a d'indéniables qualités, mais je vais quand même attendre le second volume (prévu pour fin d'année), il doit clôturer la série, avant de le crier sur les toits. Une adaptation du roman du même nom d'Aurélie Wellenstein, roman avec de très bonnes critiques (non lu). C'est un trio d'auteurs qui a déjà collaboré sur Robilar ou le Maistre Chat qui s'y attelle. Un récit au rythme bien dosé, des personnages attachants, à défaut d'être innovants et un scénario avec une touche d'originalité. Dans un royaume où règne l'inégalité, trois adolescents, Ivar, Oswald et Kaya, vont braver l'interdiction de chasser pour ne pas mourir de faim. Ils seront rattrapés par les soldats et jugés coupables. La sentence sera pire que la mort, ils vont être transformé en berserkirs (monstres à ressemblance animal). Pour cela on va leur faire avaler une larve (façon Alien) qui va s'occuper de la mutation sur plusieurs jours. David Chauvel maîtrise son sujet, c'est captivant et il distribue avec justesse les informations sur ce monde fantastique teinté de magie. J'aime beaucoup le dessin de Sylvain Guinebaud, je l'avais découvert avec le tome 3 de La Geste des Chevaliers Dragons. Un style qui se reconnaît au premier coup d'œil, avec cette particularité dans l'expression des visages, des mimiques poussées à l'extrême. Perso, j'adore. Les couleurs de Lou sont superbes et changent suivant les différents espaces temps. Du très bon boulot. Impatient de rencontrer ce roi des fauves.
Mozart à Paris
Et bien perso, j'ai vraiment aimé cet album. Je ne m'étendrai pas sur la qualité du dessin de Frantz Duchazeau qui n'est plus à démontrer. Le trait est enlevé et dynamique en apportant une fraicheur bienvenue. Le scénario est original. Disons plutôt que le point de vue adopté offre une vision nuancée voire surprenante du petit prodige autrichien. J'aime beaucoup la vision de Milos Forman pour son film Amadeus, mais ici, Duchazeau nous présente un artiste qui est encore un enfant. Il est déjà très doué et sa réputation commence à s'étendre à toutes les cours d'Europe. Le jeune Mozart est exploité par une noblesse sans vergogne. Tout le monde se l'arrange, minaude, flatte, supplie le phénomène de dispenser des leçons qui ne seront jamais payées, bien évidemment. L'image donnée de la noblesse de cours est terrible, mais sans doute proche de la réalité (ça correspond à des choses lues précédemment dans divers ouvrages). On a affaire à un ramassis de vils personnes fardant leur individualisme derrière une obséquiosité de façade. Wolfgang travaille d'arrache-pied, frisant le burn-out, s'il est permis d'employer un terme contemporain. C'est finalement devant l'insistance de son père (présenté au départ comme quelqu'un de froid et d'autoritaire) qu'il finira par fuir la France pour retourner en Autriche. Voilà pourquoi j'ai aimé cette BD : ça cause de musique tout en bénéficiant d'une narration fluide au service d'un dessin stylé, ainsi que d'un point de vue fort peu commun.
Toutes les chansons que j’aimerais oublier
Fernando Posada est un être immortel, mi-humain mi-dragon, issu d’un monde parallèle empreint de fantasy. Là-bas, il existe depuis une éternité, ayant oublié ses origines, dispose de pouvoirs quasi divins et renait à chaque mort. Il y est devenu depuis des temps immémoriaux le roi d'un pays merveilleux sur lequel il veille vaguement quand il a le cœur à ça. Car l'éternité lui pèse tant qu'il a décidé de se faire renaître en parallèle sur notre Terre, où il est désormais un jeune ado rebelle de 13 ans, à la tête d'un petit groupe de rock avec ses deux meilleurs amis. Mais la tranquillité de sa double vie est troublée lorsqu’une jeune académicienne s’installe dans son palais pour en étudier l’histoire et percer les secrets de ce roi immortel. Toutes les chansons que j’aimerais oublier est une œuvre dense et généreuse, où l’on sent que l’autrice a investi beaucoup d’elle-même. Sur plus de 180 pages au dessin soigné et accompagné de plusieurs illustrations pleine page, elle déploie un univers riche, foisonnant, et visiblement très personnel. Elle dote son personnage principal d’un charisme magnétique, à la fois souverain désabusé et caméléon magique, capable de se transformer à volonté, en homme, en femme, en dragon, et de plier le réel à ses désirs. Sous cette toute-puissance se cache pourtant une douleur profonde, un mal de vivre qu’il tente d’exorciser en enfouissant ses souvenirs dans des chansons qu’il voudrait oublier. L’univers parallèle imaginé ici, aux accents des Mille et Une Nuits, est une réussite visuelle et narrative. On y croise une humanité cosmopolite réunie sous la protection de dragons à l’apparence mêlant ailes de papillon et plumage d’oiseau. Ces séquences sont les plus intéressantes de l’album : joliment dessinées, pleines de finesse dans les décors, les costumes, les visages et les atmosphères, elles confèrent à l’ensemble une dimension poétique et intemporelle. Et surtout, ce personnage de roi adolescent immortel, tout-puissant et insaisissable, dont les souvenirs se perdent dans les millénaires, possède une complexité et un potentiel fascinants que l’on aimerait voir davantage explorés. Il incarne à lui seul la beauté mélancolique de ce monde parallèle, tout en éveillant un sentiment vertigineux face au temps, à la mémoire et à l’usure de l’éternité. En revanche, les passages ancrés dans notre monde (étrangement situé dans les années 1980, sans justification claire) souffrent d’un certain déséquilibre. Moins inspirés, plus mièvres, ils évoquent une ambiance de roman young adult façon Twilight avec cet immortel qui côtoie des adolescents, où l’on retrouve les codes du teenager mélancolique, du groupe de rock aux paroles sombres et du spleen adolescent. Cette vie parallèle, censée offrir une échappatoire au héros, finit par prendre le pas sur l’intrigue, tirant l’ensemble vers une romance douce-amère, un brin sirupeuse pour un lectorat adulte. Il demeure pourtant de nombreuses qualités dans cet ouvrage : une richesse graphique évidente, un univers singulier, et quelques dynamiques de personnages intéressantes. Mais l’oscillation constante entre la majesté du monde fantasy et les émois adolescents du quotidien rend l’ensemble bancal. Une œuvre séduisante dans l’intention, souvent belle dans la forme, mais qui séduira sans doute davantage les lecteurs et lectrices plus jeunes que les adultes en quête d’une histoire pleinement aboutie.
Jacques Prévert n'est pas un poète (Prévert, inventeur)
J'ai trouvé cette biographie de Jacques Prévert très bien construite derrière ce titre provocateur. Un titre qui interroge un peu comme le faisait le peintre Magritte à la même époque. Ainsi Hervé Bourhis et Christian Cailleaux prennent le parti pris audacieux de s'écarter d'une biographie chronologique exhaustive et pas à pas pour se rapprocher des particularités du personnage. Prévert qui ne dédaignait pas l'Agit-prop aurait probablement apprécié la construction de cet ouvrage pas toujours hagiographique mais qui sonne particulièrement juste. J'ai lu l'intégrale qui s'arrête dans les années 50 après son grave accident laissant une bonne partie de la vie de l'artiste aux bons soins de la curiosité du lectorat. Personnellement j'ai lu son recueil "Paroles" comme lycéen sans être transporté par l'émotion. L'ouvrage reste d'ailleurs assez discret sur la poésie préférant mettre l'accent sur le Prévert politique et le Prévert scénariste de cinéma. C'est sa collaboration avec Marcel Carné qui a produit plusieurs chef d'œuvres du cinéma français qui me touche le plus. Devant une telle diversité, Cailleaux ne pouvait pas se contenter s'aligner des cases où il aurait enfermer l'artiste. L'auteur propose donc un graphisme pluriel où des pages de type illustrations, affiches alternent avec des pages plus BD pour revenir à une présentation de type collage. Le trait est classique et c'est dans cette construction que se trouve l'originalité de la narration visuelle. Un ouvrage intéressant juste et bien documenté qui fait l'effort de faire vivre le personnage plus que de le raconter.
Le Printemps suivant
Evidemment je ne suis pas le lecteur idéal pour le propos de Margaux. Toutefois je ne déteste pas lire ce genre à la mode produit par des jeunes femmes modernes. Hélas ici j'ai vite déchanté car j'ai trouvé la suite d'anecdotes sur son installation dans sa nouvelle maison et dans sa nouvelle vie de couple trop superficielle et pas assez humoristique. Malgré l'effort de l'autrice de finir ce tome 1 sur une fin ouverte et dramatique qui remet sa situation en cause , je n'ai vraiment pas l'intention de poursuivre. Dommage car le graphisme de Margaux Motin est vraiment agréable. C'est très dynamique avec beaucoup de vivacité dans le trait et les expressions. Une qualité graphique qui aurait mérité un scénario plus abouti.
My capricorn friend
My Capricorn Friend est un one-shot que j’avais hâte de découvrir, et dans l’ensemble, je ne suis pas déçu. L’histoire est bien construite, le propos est fort, et le sujet du harcèlement scolaire est traité avec beaucoup de justesse, sans tomber dans le pathos. Le lien entre les deux personnages principaux, Yuya et Naoto, est touchant, et l’ambiance du récit oscille entre tension, mystère et émotion. Graphiquement, c’est propre et maîtrisé, avec une mise en scène sobre mais efficace. Cela dit, j’ai deviné assez tôt où l’histoire allait nous mener, ce qui enlève un peu d’impact à la fin. Et justement, cette fin m’a laissé une légère impression d’inachevé. On reste un peu sur sa faim, comme si quelque chose manquait pour que ce soit vraiment marquant. Un bon manga malgré tout, que je recommande pour la qualité de son traitement et sa sensibilité, même si je n’en fais pas un coup de cœur.
Jamie Delano Présente Hellblazer (John Constantine Hellblazer)
J'ai lu les tomes parus chez Urban Comics qui regroupe la plupart des récits scénarisés par Jamie Delano. Il faut savoir que c'est un scénariste important pour John Constantine parce que c'était le premier scénariste de la série régulier du personnage qui jusqu'à lors était un personnage secondaire de Swamp Thing. C'est donc lui qui va créer des éléments récurrents de la série et va mettre Constantine dans des récits au ton adultes, quoique le personnage n'est pas encore aussi trash que feront ensuite des auteurs comme Garth Ennis. Le résultat sont des histoires fantastiques dans le ton de ce qui se faisait à la fin des années 80-début des années 90. Le fait que ça s'adressait à un public plus mature fait en sorte qu'on peu explorer des thèmes qu'on ne verra pas dans les titres de super-héros DC Comics comme Batman et Superman. J'aime bien l'ambiance qui se dégage de ses récits où tout peut arriver, mais John Constantine ne m'a pas semblé aussi charismatique que sous la plume de certains scénaristes qui vont se succéder sur le titre après Delano. Certains récits sont un peu décousus, je pense notamment à la grosse saga qu'on a droit dans le tome 2 qui est la partie où j'ai le moins accroché. Un autre truc un peu dérangeant est que les dessinateurs vont souvent changés durant ses trois tomes et si j'en aime certains qui sont très bons pour installer le genre d'ambiance parfait pour des récits d'Hellblazer, il y en d'autres dont j'ai moins aimé le travail et au final il y a des styles qui sont trop hétérogène pour aider à la cohérence de la série. Parfois Constantine semblait changer de tête selon les chapitres ! Au final, c'est des tomes à emprunter si on veut connaitre l'historique du personnage.