Perso j'aime bien ce nouvel opus de la collection Glénat/Mickey, le dix-septième. Un opus qui revient aux fondamentaux car on y retrouve tous les ennemis traditionnels de Mickey. Les auteurs installent nos héros dans une atmosphère SF qui oscille entre Star Trek et le 5eme élément. D'ailleurs la mise en couleur sur des planches "pointillées" va dans le sens d'un hommage aux vieilles séries américaines de SF. Comme les autres auteurs Nicolas Pothier remplit parfaitement le cahier des charges de la maison mère. Les bons et les méchants sont très facilement identifiables , à l'ancienne sans ambiguïté. Avec un récit aussi classique, Pothier tire son épingle grâce à beaucoup d'humour gentil autour d'innombrables jeux de mots qui travaillent sur le vocabulaire à sens multiple. C'est peut-être très bon enfant mais j'ai bien aimé les constructions qui amènent à ces dialogues humoristiques. C'est accessible à un très large public qui peut se familiariser avec les homonymes ou calembours non vulgaires.
Derrière sa présentation vintage le dessin de Johan Pilet reste moderne et dynamique avec un Mickey et un Pat inhabituels Un visuel classique qui reprend beaucoup de codes anciens de la SF.
Une lecture pour tous très distrayante même si je suis un converti de cette collection.
Je découvre cette série qui est restée dans l'ombre de Corto. Je me suis retrouvé dans l'ambiance Polynésienne des mers du sud. Cormorant possède plusieurs points communs avec Corto en plus cynique. On retrouve une galerie de personnages avec des autochtones forts en couleurs et en personnalités. Cormorant se retrouve avec un ami Lord et une sœur qui n'a pas froid aux yeux. Cela produit deux récits d'aventures très toniques où le trio se sort de situations très compliquées par la force des poings. On retrouve les éléments fétiches de Pratt, une reine indigène mystérieuse et dangereuse, des requins, des cannibales, des pirogues aux couleurs des tribus locales, des tatouages et la lie des marins blancs du coin pour un trésor qui devient vite secondaire.
En quelques traits ou taches noires les auteurs font vivre toute une population locale sur une plage. Aucune rondeur pour cette ambiance qui sent la piraterie. Le graphisme travaille sur les forts contrastes noirs/blancs sans beaucoup de nuances intermédiaires. Malgré des extérieurs ( mer, villages) à minima les auteurs réussissent à bien faire vivre cette ambiance d'aventure.
Une lecture plaisante pour les fans de Pratt afin de sortir ( si peu) du personnage de Corto. Un bon 3
Tony Stark c’est un peu la BD traditionnelle des années 70. Un héros, qui est en réalité un écrivain qui vit dans l Ouest Américain, et qui se retrouve mener dans des aventures, le tout dans une pagination de 46 planches. Tony Stark vit un peu en marge du monde et se veut un défenseur de la nature. Sans doute les auteurs étaient ils influencés par la mouvante écologiste qui a émergé dans les années 70. L’intérêt de cette série est que la plupart des scénarios ont été écrits par Jean Van Hamme qui a l’époque démarrait dans le milieu de la BD. Curieusement son nom n’apparaît pas sur les albums. L’autre intérêt de cette série de 8 albums dont l’intégrale vient d’être publiée aux éditions BD Must, est la qualité du dessin d’Edouard Aidans. On le voit clairement évoluer graphiquement, et le dessinateur atteint son sommet dans les tous derniers albums. Aidans a notamment un vrai talent pour dessiner les personnages féminins. Tout le monde ne peut pas en dire autant. Une série qui mérite d’être redécouverte et qui ravira les nostalgiques de la BD des années 70.
Je ne pars pas avec toi. Je vais dans la direction opposée.
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Ce tome regroupe trois histoires indépendantes : Jesuit Joe (parution initiale en 1980), La Macumba du Gringo (parution initiale en 1977) et À l’Ouest de l’Éden (parution initiale en 1979). Ces histoires ont été réalisées par Hugo Pratt (1927-1995) pour le scénario, le dessin, et la couleur. L’édition de 2020 se termine avec une postface dense de sept pages, rédigée par Francesco Boille, critique de cinéma et de bande dessinée franco-italien, intitulée : Évanescence, transcendances, immanences.
Jesuit Joe, quarante-huit pages. Quelque part dans une zone sauvage du grand nord canadien, en plein hiver, Jesuit Joe toque à la porte d’une cabane : pas de réponse. Il pénètre à l’intérieur et découvre une enveloppe sur la table, un uniforme de la police montée royale du Canada dans l’armoire. Il s’installe, mange un biscuit puis se change et revêt l’uniforme, puis endosse le chaud manteau et s’allume une cigarette. Des coups de feu retentissent : trois hommes tirent sur Jesuit Joe depuis l’extérieur. Il se défend, se jette par la fenêtre et les abat tous les trois. Il sort ensuite un couteau et scalpe l’un d’eux. Puis il va récupérer un canoë caché dans la végétation, et il le met à flot. Bientôt il entend des bruits de tambour. Toujours silencieux, il rejoint la rive, met son canoë à sec et il se dirige vers la source du bruit. Il découvre un Indien Cree en train de danser autour d’un nouveau-né dans un porte-bébé dorsal.
La macumba du gringo, quarante-huit pages. Quelque part dans le nord-est du Brésil, Mae Sabina, la prêtresse de Candomblé, se livre à une cérémonie occulte, avec chandelles et signe ésotérique sur un crâne pour tirer les cartes. Elle estime que le tirage n’est pas bon, pas bon du tout : la Lune appelle les fantômes. Elle explique à Satãnhia que son mec Gringo est lié à la carte de la Lune, le grand sommeil, la longue attente, or la Lune est une carte de mauvais augure, son interlocutrice a une rivale, et sa rivale c’est la Mort. Sabina gifle Satãnhia, cette dernière se défend en sortant un rasoir mécanique, puis le laisse tomber à terre et tombe à genoux, reposant sa tête sur les jambes de la sorcière. Ensuite elle lui confie la pedra cristalina que Gringo lui a donnée. Sabina poursuit sa divination : elle voit la mort, des soldats. Dans la jungle, un soldat tire et abat Gringo Vargas, un cangaçeiro., Ses deux comparses, Corsico et Dadã fuient à toutes jamabes. Les soldats s’approchent à leur recherche.
À l’Ouest de l’Éden, quarante-huit pages. Le drapeau britannique : il repose sur un mât, deux crânes accrochés au sommet. Avec le recul, il s’agit du drapeau Red Ensign frappé d’un blason. Un soldat monte au sommet du fort et tire un coup de fusil en l’air. Le reste des soldats arrivent à dos de chameau. Le lieutenant Abel Robinson du bataillon de frontière du Somaliland Camel Corps demande au soldat ce qu’il en est : il répond qu’ils sont tous morts. Son second ajoute qu’il fallait s’y attendre, depuis trois jours leur radio ne répond plus. Le soldat montre au lieutenant où se trouve les cadavres, à leur vue il va vomir contre un mur. Cela étant, son second lui lit une lettre laissée par Mad Mullah, le vengeur.
Ce n’est pas facile tous les jours… Enfin si. Le lecteur entame la première histoire : douze pages narrées en image, sans dialogue ni narrateur omniscient, juste quelques onomatopées pour les bruitages de coup de feu et de tambour. Des scènes d’action avec une prise de vue d’une clarté exemplaire, des dessins épurés, une savante mise en couleurs naturaliste, avec quelques touches très discrètes d’expressionnisme pour les camaïeux habillant les fonds de case. Le lecteur retrouve quelques passages dépourvus de mots dans les deux histoires suivantes, pour une scène d’action ou pour une scène contemplative, totalement immersive. Les intrigues se déroulent de manière linéaire, avec une explication dans la dernière scène qui vient rappeler ce qui s’est passé, et l’éclairer avec des renseignements supplémentaires, de nature pragmatique, pour expliciter ce qui pouvait paraître arbitraire ou abscons au fil de l’eau. Trois histoires simples : un Indien issu des peuples autochtones qui s’attribue un uniforme de la Gendarmerie royale du Canada et qui dispense une justice expéditive très personnelle, une jeune femme qui venge la mort d’un bandit rebelle, et un tueur insaisissable qui exécute des soldats de l’armée d’occupation.
Ce n’est pas facile tous les jours… Vraiment pas. Le lecteur reste sur deux doutes à la fin du premier récit : Comment se termine-t-il vraiment, c’est-à-dire qui a tiré le dernier coup de feu ? Et comment Joseph Riel a-t-il su ce qui se trouvait dans l’enveloppe sans l’ouvrir ? Dans le second récit, il hésite à prendre au premier degré cette histoire de revenant, de vie après la mort, d’araignée Armadeira (Phoneutria, araignée au puissant venin), de discussion avec un spectre d’un récent défunt. Et dans la dernière, la composante ésotérique prend une importance qui ne permet plus de la laisser de côté, comme un artifice secondaire, pour donner plus de goût à l’intrigue. Déjà les symboles sur le chapeau du Cangageiro avait mis le doute dans l’esprit du lecteur, mais la mention d’Adam, Ève, Lilith, Urahel, Raphael et Gabrahel (trois chérubins) et Caïn dans le troisième implique que le cœur de l’histoire est de nature spirituelle. D’ailleurs, l’interprétation qu’en fait Francesco Boille relève entièrement de ce point de vue. Ces évanescences, transcendances et immanences émanent selon lui de : Trois récits d’interprétation historique centrés sur la condition humaine des plus marginaux sous une forme onirique, trois histoires de rêve-mort, hautement symboliques […], le fond est profond, la forme est légère.
De fait, le lecteur néophyte prend un énorme plaisir à lire ces planches. Hugo Pratt réalise des cases d’une beauté et d’une efficacité époustouflantes. S’il commence à se focaliser sur les détails, un trait, une forme prise à part, le lecteur se dit que la main de l’artiste manque d’assurance, que les aplats de noir sont trop irréguliers, que les formes sont imprécises, que les fonds de case sont réduits à leur plus simple expression. À la lecture, le ressenti est tout autre : chaque chose est parfaitement à sa place, précisément définie, sans aucun superflu. À l’opposé de dessins à l’allure naïve, il s’agit de l’essence de chaque élément qui est saisie. Le canoë de Jesuit Joe n’est pas à demi posé sur une grande zone entre verdâtre et grisâtre : il file doucement sur un large cours d’eau paisible, avec quelques feuilles à sa surface, avec la ligne des arbres sur la rive à contrejour. Il n’y a rien de trop et rien ne manque. Par deux fois dans le deuxième récit, la luminosité associée à l’humidité fait que les soldats et le fuyard sont représentés par des tâches noires allongées, évoquant des sculptures d’Alberto Giacometti (1901-1966), un moment visuel extraordinaire tirant vers l’abstraction, magique. Dans la même histoire, le bédéiste joue également avec des tâches de couleurs, deux formes irrégulières formant presque par magie les ailes de papillons. Dans la troisième histoire, Pratt continue à jouer avec le minimalisme, le sous-entendu visuel tirant vers le conceptuel, et vers l’abstraction. Le lieutenant Abel Robinson comme englobé dans un rond jaune, la forme indistincte de l’ample robe rouge de Lilith. Le motif récurrent de l’horizon : une bande noire irrégulière en bas de case pour figurer le sable proche, une autre bande irrégulière de couleur sable pour l’étendue jusqu’à l’horizon, une troisième bande irrégulière plus fine et plus claire pour la brume de chaleur, et une dernière bande de couleur intermédiaire entre les deux précédentes pour le ciel… et peut-être une vague silhouette en ombre chinoise pour le rebelle, un leitmotiv visuel de haute voltige.
Du coup, des intrigues simples : une justice expéditive et arbitraire, des bandits abattus et un lieutenant britannique que la chaleur fait délirer. Oui… mais… impossible de s’affranchir de la dimension ésotérique. Les éditeurs ont fait le choix de mettre le récit le plus accessible en premier, même s’il s’agit du dernier par ordre de parution et donc de réalisation. Le deuxième met en scène une prêtresse avec un talent divinatoire, et peut-être une connexion chamanique avec les araignées. L’un des rebelles a développé une interprétation très personnelle sur l’importance et les motivations de Judas Iscariote. Le lecteur peut y voir un délire interprétatif, une obsession messianique entraînant des conséquences létales pour lui et ses proches. Les spectres peuvent alors se comprendre comme la métaphore de la culpabilité refoulée, de l’inconscient des personnages. Oui… mais… Dans la troisième histoire, Kayin se réfère explicitement à Adam, Ève et Lilith, cette dernière étant un démon féminin de la tradition juive, la première femme d'Adam, avant Ève. Kayin, un Somalien, fait le lien avec Ewa (une autre forme d’Ève), liant ainsi la tradition juive avec une mythologie africaine, imposant au lecteur cette dimension spirituelle du récit. Aussi quand il repense à la première histoire Jesuit Joe, il se dit qu’elle aussi doit comprendre une dimension ésotérique. Peut-être la forme d’autisme du personnage principal, guidé par une conception simpliste du monde, mais aussi une forme de connexion avec un savoir surnaturel, ce qui expliquerait qu’il savait ce que contenait la lettre sans ouvrir l’enveloppe. Il évoque également le fait que Louis Riel (1844-1885) était le frère de son grand-père. Cette information ne parlera qu’au lecteur familier avec ce chef du peuple métis dans les Prairies canadiennes, fondateur de la province du Manitoba, meneur de deux mouvements de résistance contre le gouvernement canadien, un lecteur ayant une idée de l’incidence de ses visions messianiques et de sa révélation divine. L’esprit du lecteur revient régulièrement à Jesuit Joe : redresseur de torts à l’instinct infaillible. Mais aussi dans la lignée des personnages principaux des deux autres histoires. Lui aussi est un rebelle à sa manière : il refuse la loi du gouvernement et il suit la sienne.
Trois récits de quarante-huit pages, à l’intrigue immédiatement accessible, à la narration visuelle extraordinaire dans son évidence, dans sa forme aboutie où chaque trait est signifiant et indispensable, un équilibre parfait entre description et évocation. Des histoires qui ne révèlent toute leur saveur qu’au lecteur acceptant de s’investir dans les questionnements ésotériques qu’elles charrient.
Encore un bon cru 2024.
Un nectar corsé, qui tient longtemps en bouche, issus de deux cépages de qualité. Un Lou Lubie que toutes les bonnes librairies exposent en bonne place en rayonnage, et une nouvelle arrivée dans le domaine du neuvième art : Solen Guivre.
Bon, je fais le mariole, mais c'est la première fois que je goûte un Lou Lubie.
Elle nous propose une réécriture du mythe d'Orphée et Eurydice et pour le coup, c'est une belle réussite. La trame vertébrale est conservée, par contre quelques modifications y sont apportées et pas des moindres, comme la présence de Pygmalion, elles apportent une nouvelle dimension au mythe. Une intrigue dense et féministe où l'amour sera évidemment au centre du récit, mais des sujets de société vont s'y glisser au fil des pages : La précarité des femmes, le diktat de la beauté, l'indépendance, le droit de choisir l'être aimé et la place de l'art.
Un récit mené de main de maître, une narration fluide et intelligente avec son lot de surprises. J'ai particulièrement aimé la fin (le choix d'Eurydice).
Une revisite moderne de cette tragédie.
Pour Solen Guivre c'est la première incursion dans le domaine de la BD, et c'est grâce à une annonce de Lou Lubie sur Instagram qu'elle a été choisi pour mettre en image cette histoire.
Un dessin au très beau rendu qui convient parfaitement à ce récit mythologique, il est d'une richesse folle, aussi bien dans les décors que pour les costumes des personnages, mais aussi dans la diversité des corps et des visages. J'ai été conquis par la mise en page et par les couleurs numériques.
La visite des enfers est inquiétante à souhait.
De l'excellent travail.
Une très agréable lecture que je recommande, forcément.
L'histoire n'est pas inintéressante, mais j'avoue être restée de marbre en la lisant.
Le sujet de l'homosexualité au sein de la société japonaise (extrêmement normée et patriarcale), de l'hétéronormativité et de la souffrance que peut causer l'indécision et la peur de s'affirmer est un sujet on ne peut plus intéressant.
Le problème que j'ai eu ici, c'est que le tout m'a paru extrêmement froid. Je n'ai pas vraiment ressenti les émois des personnages ou le drame de leur situation.
Ce n'est pas nécessairement la faute du dessin, le style sobre et épuré peut marcher, mais la pudeur émotionnel constante des personnages liée au texte VF qui m'a paru parfois assez artificiel ne m'a vraiment pas aidé pour l'immersion.
Encore une fois l'histoire de base n'est pas inintéressante, il y a beaucoup de chose à développer autour de l'homosexualité au sein de la société japonaise, mais ici j'ai eu la sensation de ne trouver que le service narratif minimum. La protagoniste est en couple, rencontre une femme, est attirée par elle, se sent enfermée dans son couple mais n'ose pas rompre, son indécision finit par lui coûter la potentielle relation mais elle finit par comprendre qu'elle doit s'affirmer et rompt enfin avec son ancien petit copain pour se mettre avec sa belle. C'est classique mais rien n'est proposé autour. Vraiment, j'ai lu de nombreux yuri reposant sur la même trame et avec des variations très diverses pour la forme, mais là je n'ai pas eu le sentiment de voir une nouveauté ou une réinterprétation de cette idée. C'est un récit très classique, sans grande plus-value à mes yeux et avec une forme malheureusement trop froide émotionnellement.
Déçue, donc.
L'histoire était bonne mais j'avoue avoir été un peu déçue. On me l'avait bien vendue et je voyais qu'Alain Ayroles était au scénario, j'ai sans doute eu de trop grosses attentes.
En fait, je pense que les gens me l'ont surtout bien vendu car l'album est issu d'une collection dont les albums sont souvent assez oubliables et/ou médiocres. Je n'en avais lus que très peu il y a très longtemps et je les avais vite fait oubliés. Peut-être est-ce la raison de ma déception, je n'ai pas eu ce côté "vent de fraîcheur au milieu du reste".
Malgré ma déception susmentionnée, l'histoire reste bonne. L'idée de base d'envoyer sept moines, chacun représentant à l'extrême l'un des sept péchés capitaux, au sein d'une colonie viking pour les évangéliser est très bonne. Les voir peu à peu corrompre ce village, bien malgré eux, est prévisible mais très bien exécuté.
C'est juste dommage que le récit m'ait paru aller un chouïa trop vite, je pense que l'on aurait pu développer un petit peu plus ce village viking et ses habitants. J'ai parfois eu la sensation qu'iels étaient des figurants plutôt que des personnages secondaires.
Mais, encore une fois, l'histoire reste bonne.
L’album se laisse lire, mais je serai moins enthousiaste que bamiléké.
Je ne suis a priori pas le cœur de cible. D’abord parce que l’intrigue vise essentiellement un jeune – voire très jeune lectorat. Je trouve que ça passe plus difficilement la barrière de l’âge, même si d’autres peuvent y trouver davantage leur compte.
Mais c’est essentiellement l’aspect graphique qui ne m’attire pas. Affaire de goût ici, donc ne vous y arrêtez pas forcément. Mais le dessin est très franchement inspiré de certains dessins animés modernes (avec des visages, des expressions virant sur ce que je n’aime pas trop du manga). Certaines scènes, certains personnages m’ont aussi fait penser à quelques publications d’Ankama/Dofus (pas mon truc là non plus). Je ne suis pas fan non plus de la colorisation informatique.
Quant à l’histoire, elle se laisse lire donc, mais sans m’avoir chamboulé. La responsabilité des humains dans certains déséquilibres naturels n’est en fait qu’effleurée, évoquée vers la fin. C’est surtout une petite histoire mignonne autour de deux sœurs, gardiennes de la Nuit pour l’une et du Jour pour l’autre. De leur affrontement, mais aussi de ce qui pourrait profiter de leur manque de coopération. Avec tout un tas de petits personnages secondaires pas très fouillés mais qui densifient certaines scènes, tout ça devrait plaire aux plus jeunes lecteurs. Lecteurs qui peuvent s’identifier à a gamine qui va rencontrer tout ce petit monde censé rester secret, hors de vue des humains.
Un petit 3 étoiles me concernant, mais il y a quand même des qualités qui peuvent plaire à d’autres (aux goûts et âges éventuellement différents des miens).
Mon 2eme Paul et encore une franche réussite !!
Paul a un travail d'été m’avait déjà agréablement interpellé, mais là l’auteur enfonce le clou.
J’ai retrouvé avec plaisir l’univers de Michel Rabagliati, la période explorée est plus ou moins la même, à savoir son adolescence.
Cette fois, la structure est légèrement différente puisqu’à la place d’une longue histoire nous aurons droit à un ensemble de saynètes/portraits/expériences qui forme petit à petit un beau tableau. Si ce n’est pour le langage, une œuvre pas bien dépaysante (on a tous été jeune) mais il y a eu clairement un truc à ma lecture. Indépendamment les histoires sont sympas mais c’est leur cohésion qui fait tout le sel.
Je tire encore une fois mon chapeau à l’auteur, j’aime l’intelligence de sa narration, sa sincérité, la maîtrise de son dessin (grandement améliorée en 13 ans) et comment avec « rien » il arrive à me passionner. Ses fins d’album sont à chaque fois très réussies.
Je découvre son style sur le tard mais j’en suis assez fan. Plus qu’à lire les autres :)
Avis après 6 tomes.
Un shonen qui ne révolutionnera rien mais que j’ai trouvé assez sympa à suivre, je suis même deg’ que ma médiathèque ne soit pas à jour sur la suite de la série. Le début est un peu poussif mais après j’ai apprécié le rythme.
Dans un monde de Fantasy, où chaque personnes se voient affublés d’une compétence, nous suivrons Fate - un jeune garde persécuté qui malencontreusement va découvrir que sa capacité n’est pas si inutile. Cette dernière se révèlera même vite surpuissante, puisqu’à chacune de ses victoires, il gagne les statistiques de son adversaire … Il y aura bien sûr une contrepartie à ce pouvoir, entraînant notre jeune héros dans un cercle vicieux.
Autant dire que ça démarre doucement avant de vite s’emballer. Au milieu de tout ça va émerger de nombreux personnages (compagnons, méchants de service, l’amour …), une quête et un peu de mystère pour titiller le lecteur.
Le dessin est random mais efficace.
Rien de foncièrement original dans ce récit donc, mais ça reste bien fait pour les amateurs du genre.
Mini spoiler : j’aime bien l’explication du pouvoir en rapport avec les 7 péchés capitaux et ce que ça peut amener pour la suite … curieux de découvrir les derniers détenteurs.
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Mickey contre l'alliance maléfique
Perso j'aime bien ce nouvel opus de la collection Glénat/Mickey, le dix-septième. Un opus qui revient aux fondamentaux car on y retrouve tous les ennemis traditionnels de Mickey. Les auteurs installent nos héros dans une atmosphère SF qui oscille entre Star Trek et le 5eme élément. D'ailleurs la mise en couleur sur des planches "pointillées" va dans le sens d'un hommage aux vieilles séries américaines de SF. Comme les autres auteurs Nicolas Pothier remplit parfaitement le cahier des charges de la maison mère. Les bons et les méchants sont très facilement identifiables , à l'ancienne sans ambiguïté. Avec un récit aussi classique, Pothier tire son épingle grâce à beaucoup d'humour gentil autour d'innombrables jeux de mots qui travaillent sur le vocabulaire à sens multiple. C'est peut-être très bon enfant mais j'ai bien aimé les constructions qui amènent à ces dialogues humoristiques. C'est accessible à un très large public qui peut se familiariser avec les homonymes ou calembours non vulgaires. Derrière sa présentation vintage le dessin de Johan Pilet reste moderne et dynamique avec un Mickey et un Pat inhabituels Un visuel classique qui reprend beaucoup de codes anciens de la SF. Une lecture pour tous très distrayante même si je suis un converti de cette collection.
Capitaine Cormorant
Je découvre cette série qui est restée dans l'ombre de Corto. Je me suis retrouvé dans l'ambiance Polynésienne des mers du sud. Cormorant possède plusieurs points communs avec Corto en plus cynique. On retrouve une galerie de personnages avec des autochtones forts en couleurs et en personnalités. Cormorant se retrouve avec un ami Lord et une sœur qui n'a pas froid aux yeux. Cela produit deux récits d'aventures très toniques où le trio se sort de situations très compliquées par la force des poings. On retrouve les éléments fétiches de Pratt, une reine indigène mystérieuse et dangereuse, des requins, des cannibales, des pirogues aux couleurs des tribus locales, des tatouages et la lie des marins blancs du coin pour un trésor qui devient vite secondaire. En quelques traits ou taches noires les auteurs font vivre toute une population locale sur une plage. Aucune rondeur pour cette ambiance qui sent la piraterie. Le graphisme travaille sur les forts contrastes noirs/blancs sans beaucoup de nuances intermédiaires. Malgré des extérieurs ( mer, villages) à minima les auteurs réussissent à bien faire vivre cette ambiance d'aventure. Une lecture plaisante pour les fans de Pratt afin de sortir ( si peu) du personnage de Corto. Un bon 3
Tony Stark
Tony Stark c’est un peu la BD traditionnelle des années 70. Un héros, qui est en réalité un écrivain qui vit dans l Ouest Américain, et qui se retrouve mener dans des aventures, le tout dans une pagination de 46 planches. Tony Stark vit un peu en marge du monde et se veut un défenseur de la nature. Sans doute les auteurs étaient ils influencés par la mouvante écologiste qui a émergé dans les années 70. L’intérêt de cette série est que la plupart des scénarios ont été écrits par Jean Van Hamme qui a l’époque démarrait dans le milieu de la BD. Curieusement son nom n’apparaît pas sur les albums. L’autre intérêt de cette série de 8 albums dont l’intégrale vient d’être publiée aux éditions BD Must, est la qualité du dessin d’Edouard Aidans. On le voit clairement évoluer graphiquement, et le dessinateur atteint son sommet dans les tous derniers albums. Aidans a notamment un vrai talent pour dessiner les personnages féminins. Tout le monde ne peut pas en dire autant. Une série qui mérite d’être redécouverte et qui ravira les nostalgiques de la BD des années 70.
Jesuit Joe
Je ne pars pas avec toi. Je vais dans la direction opposée. - Ce tome regroupe trois histoires indépendantes : Jesuit Joe (parution initiale en 1980), La Macumba du Gringo (parution initiale en 1977) et À l’Ouest de l’Éden (parution initiale en 1979). Ces histoires ont été réalisées par Hugo Pratt (1927-1995) pour le scénario, le dessin, et la couleur. L’édition de 2020 se termine avec une postface dense de sept pages, rédigée par Francesco Boille, critique de cinéma et de bande dessinée franco-italien, intitulée : Évanescence, transcendances, immanences. Jesuit Joe, quarante-huit pages. Quelque part dans une zone sauvage du grand nord canadien, en plein hiver, Jesuit Joe toque à la porte d’une cabane : pas de réponse. Il pénètre à l’intérieur et découvre une enveloppe sur la table, un uniforme de la police montée royale du Canada dans l’armoire. Il s’installe, mange un biscuit puis se change et revêt l’uniforme, puis endosse le chaud manteau et s’allume une cigarette. Des coups de feu retentissent : trois hommes tirent sur Jesuit Joe depuis l’extérieur. Il se défend, se jette par la fenêtre et les abat tous les trois. Il sort ensuite un couteau et scalpe l’un d’eux. Puis il va récupérer un canoë caché dans la végétation, et il le met à flot. Bientôt il entend des bruits de tambour. Toujours silencieux, il rejoint la rive, met son canoë à sec et il se dirige vers la source du bruit. Il découvre un Indien Cree en train de danser autour d’un nouveau-né dans un porte-bébé dorsal. La macumba du gringo, quarante-huit pages. Quelque part dans le nord-est du Brésil, Mae Sabina, la prêtresse de Candomblé, se livre à une cérémonie occulte, avec chandelles et signe ésotérique sur un crâne pour tirer les cartes. Elle estime que le tirage n’est pas bon, pas bon du tout : la Lune appelle les fantômes. Elle explique à Satãnhia que son mec Gringo est lié à la carte de la Lune, le grand sommeil, la longue attente, or la Lune est une carte de mauvais augure, son interlocutrice a une rivale, et sa rivale c’est la Mort. Sabina gifle Satãnhia, cette dernière se défend en sortant un rasoir mécanique, puis le laisse tomber à terre et tombe à genoux, reposant sa tête sur les jambes de la sorcière. Ensuite elle lui confie la pedra cristalina que Gringo lui a donnée. Sabina poursuit sa divination : elle voit la mort, des soldats. Dans la jungle, un soldat tire et abat Gringo Vargas, un cangaçeiro., Ses deux comparses, Corsico et Dadã fuient à toutes jamabes. Les soldats s’approchent à leur recherche. À l’Ouest de l’Éden, quarante-huit pages. Le drapeau britannique : il repose sur un mât, deux crânes accrochés au sommet. Avec le recul, il s’agit du drapeau Red Ensign frappé d’un blason. Un soldat monte au sommet du fort et tire un coup de fusil en l’air. Le reste des soldats arrivent à dos de chameau. Le lieutenant Abel Robinson du bataillon de frontière du Somaliland Camel Corps demande au soldat ce qu’il en est : il répond qu’ils sont tous morts. Son second ajoute qu’il fallait s’y attendre, depuis trois jours leur radio ne répond plus. Le soldat montre au lieutenant où se trouve les cadavres, à leur vue il va vomir contre un mur. Cela étant, son second lui lit une lettre laissée par Mad Mullah, le vengeur. Ce n’est pas facile tous les jours… Enfin si. Le lecteur entame la première histoire : douze pages narrées en image, sans dialogue ni narrateur omniscient, juste quelques onomatopées pour les bruitages de coup de feu et de tambour. Des scènes d’action avec une prise de vue d’une clarté exemplaire, des dessins épurés, une savante mise en couleurs naturaliste, avec quelques touches très discrètes d’expressionnisme pour les camaïeux habillant les fonds de case. Le lecteur retrouve quelques passages dépourvus de mots dans les deux histoires suivantes, pour une scène d’action ou pour une scène contemplative, totalement immersive. Les intrigues se déroulent de manière linéaire, avec une explication dans la dernière scène qui vient rappeler ce qui s’est passé, et l’éclairer avec des renseignements supplémentaires, de nature pragmatique, pour expliciter ce qui pouvait paraître arbitraire ou abscons au fil de l’eau. Trois histoires simples : un Indien issu des peuples autochtones qui s’attribue un uniforme de la Gendarmerie royale du Canada et qui dispense une justice expéditive très personnelle, une jeune femme qui venge la mort d’un bandit rebelle, et un tueur insaisissable qui exécute des soldats de l’armée d’occupation. Ce n’est pas facile tous les jours… Vraiment pas. Le lecteur reste sur deux doutes à la fin du premier récit : Comment se termine-t-il vraiment, c’est-à-dire qui a tiré le dernier coup de feu ? Et comment Joseph Riel a-t-il su ce qui se trouvait dans l’enveloppe sans l’ouvrir ? Dans le second récit, il hésite à prendre au premier degré cette histoire de revenant, de vie après la mort, d’araignée Armadeira (Phoneutria, araignée au puissant venin), de discussion avec un spectre d’un récent défunt. Et dans la dernière, la composante ésotérique prend une importance qui ne permet plus de la laisser de côté, comme un artifice secondaire, pour donner plus de goût à l’intrigue. Déjà les symboles sur le chapeau du Cangageiro avait mis le doute dans l’esprit du lecteur, mais la mention d’Adam, Ève, Lilith, Urahel, Raphael et Gabrahel (trois chérubins) et Caïn dans le troisième implique que le cœur de l’histoire est de nature spirituelle. D’ailleurs, l’interprétation qu’en fait Francesco Boille relève entièrement de ce point de vue. Ces évanescences, transcendances et immanences émanent selon lui de : Trois récits d’interprétation historique centrés sur la condition humaine des plus marginaux sous une forme onirique, trois histoires de rêve-mort, hautement symboliques […], le fond est profond, la forme est légère. De fait, le lecteur néophyte prend un énorme plaisir à lire ces planches. Hugo Pratt réalise des cases d’une beauté et d’une efficacité époustouflantes. S’il commence à se focaliser sur les détails, un trait, une forme prise à part, le lecteur se dit que la main de l’artiste manque d’assurance, que les aplats de noir sont trop irréguliers, que les formes sont imprécises, que les fonds de case sont réduits à leur plus simple expression. À la lecture, le ressenti est tout autre : chaque chose est parfaitement à sa place, précisément définie, sans aucun superflu. À l’opposé de dessins à l’allure naïve, il s’agit de l’essence de chaque élément qui est saisie. Le canoë de Jesuit Joe n’est pas à demi posé sur une grande zone entre verdâtre et grisâtre : il file doucement sur un large cours d’eau paisible, avec quelques feuilles à sa surface, avec la ligne des arbres sur la rive à contrejour. Il n’y a rien de trop et rien ne manque. Par deux fois dans le deuxième récit, la luminosité associée à l’humidité fait que les soldats et le fuyard sont représentés par des tâches noires allongées, évoquant des sculptures d’Alberto Giacometti (1901-1966), un moment visuel extraordinaire tirant vers l’abstraction, magique. Dans la même histoire, le bédéiste joue également avec des tâches de couleurs, deux formes irrégulières formant presque par magie les ailes de papillons. Dans la troisième histoire, Pratt continue à jouer avec le minimalisme, le sous-entendu visuel tirant vers le conceptuel, et vers l’abstraction. Le lieutenant Abel Robinson comme englobé dans un rond jaune, la forme indistincte de l’ample robe rouge de Lilith. Le motif récurrent de l’horizon : une bande noire irrégulière en bas de case pour figurer le sable proche, une autre bande irrégulière de couleur sable pour l’étendue jusqu’à l’horizon, une troisième bande irrégulière plus fine et plus claire pour la brume de chaleur, et une dernière bande de couleur intermédiaire entre les deux précédentes pour le ciel… et peut-être une vague silhouette en ombre chinoise pour le rebelle, un leitmotiv visuel de haute voltige. Du coup, des intrigues simples : une justice expéditive et arbitraire, des bandits abattus et un lieutenant britannique que la chaleur fait délirer. Oui… mais… impossible de s’affranchir de la dimension ésotérique. Les éditeurs ont fait le choix de mettre le récit le plus accessible en premier, même s’il s’agit du dernier par ordre de parution et donc de réalisation. Le deuxième met en scène une prêtresse avec un talent divinatoire, et peut-être une connexion chamanique avec les araignées. L’un des rebelles a développé une interprétation très personnelle sur l’importance et les motivations de Judas Iscariote. Le lecteur peut y voir un délire interprétatif, une obsession messianique entraînant des conséquences létales pour lui et ses proches. Les spectres peuvent alors se comprendre comme la métaphore de la culpabilité refoulée, de l’inconscient des personnages. Oui… mais… Dans la troisième histoire, Kayin se réfère explicitement à Adam, Ève et Lilith, cette dernière étant un démon féminin de la tradition juive, la première femme d'Adam, avant Ève. Kayin, un Somalien, fait le lien avec Ewa (une autre forme d’Ève), liant ainsi la tradition juive avec une mythologie africaine, imposant au lecteur cette dimension spirituelle du récit. Aussi quand il repense à la première histoire Jesuit Joe, il se dit qu’elle aussi doit comprendre une dimension ésotérique. Peut-être la forme d’autisme du personnage principal, guidé par une conception simpliste du monde, mais aussi une forme de connexion avec un savoir surnaturel, ce qui expliquerait qu’il savait ce que contenait la lettre sans ouvrir l’enveloppe. Il évoque également le fait que Louis Riel (1844-1885) était le frère de son grand-père. Cette information ne parlera qu’au lecteur familier avec ce chef du peuple métis dans les Prairies canadiennes, fondateur de la province du Manitoba, meneur de deux mouvements de résistance contre le gouvernement canadien, un lecteur ayant une idée de l’incidence de ses visions messianiques et de sa révélation divine. L’esprit du lecteur revient régulièrement à Jesuit Joe : redresseur de torts à l’instinct infaillible. Mais aussi dans la lignée des personnages principaux des deux autres histoires. Lui aussi est un rebelle à sa manière : il refuse la loi du gouvernement et il suit la sienne. Trois récits de quarante-huit pages, à l’intrigue immédiatement accessible, à la narration visuelle extraordinaire dans son évidence, dans sa forme aboutie où chaque trait est signifiant et indispensable, un équilibre parfait entre description et évocation. Des histoires qui ne révèlent toute leur saveur qu’au lecteur acceptant de s’investir dans les questionnements ésotériques qu’elles charrient.
Eurydice
Encore un bon cru 2024. Un nectar corsé, qui tient longtemps en bouche, issus de deux cépages de qualité. Un Lou Lubie que toutes les bonnes librairies exposent en bonne place en rayonnage, et une nouvelle arrivée dans le domaine du neuvième art : Solen Guivre. Bon, je fais le mariole, mais c'est la première fois que je goûte un Lou Lubie. Elle nous propose une réécriture du mythe d'Orphée et Eurydice et pour le coup, c'est une belle réussite. La trame vertébrale est conservée, par contre quelques modifications y sont apportées et pas des moindres, comme la présence de Pygmalion, elles apportent une nouvelle dimension au mythe. Une intrigue dense et féministe où l'amour sera évidemment au centre du récit, mais des sujets de société vont s'y glisser au fil des pages : La précarité des femmes, le diktat de la beauté, l'indépendance, le droit de choisir l'être aimé et la place de l'art. Un récit mené de main de maître, une narration fluide et intelligente avec son lot de surprises. J'ai particulièrement aimé la fin (le choix d'Eurydice). Une revisite moderne de cette tragédie. Pour Solen Guivre c'est la première incursion dans le domaine de la BD, et c'est grâce à une annonce de Lou Lubie sur Instagram qu'elle a été choisi pour mettre en image cette histoire. Un dessin au très beau rendu qui convient parfaitement à ce récit mythologique, il est d'une richesse folle, aussi bien dans les décors que pour les costumes des personnages, mais aussi dans la diversité des corps et des visages. J'ai été conquis par la mise en page et par les couleurs numériques. La visite des enfers est inquiétante à souhait. De l'excellent travail. Une très agréable lecture que je recommande, forcément.
Indigo Blue
L'histoire n'est pas inintéressante, mais j'avoue être restée de marbre en la lisant. Le sujet de l'homosexualité au sein de la société japonaise (extrêmement normée et patriarcale), de l'hétéronormativité et de la souffrance que peut causer l'indécision et la peur de s'affirmer est un sujet on ne peut plus intéressant. Le problème que j'ai eu ici, c'est que le tout m'a paru extrêmement froid. Je n'ai pas vraiment ressenti les émois des personnages ou le drame de leur situation. Ce n'est pas nécessairement la faute du dessin, le style sobre et épuré peut marcher, mais la pudeur émotionnel constante des personnages liée au texte VF qui m'a paru parfois assez artificiel ne m'a vraiment pas aidé pour l'immersion. Encore une fois l'histoire de base n'est pas inintéressante, il y a beaucoup de chose à développer autour de l'homosexualité au sein de la société japonaise, mais ici j'ai eu la sensation de ne trouver que le service narratif minimum. La protagoniste est en couple, rencontre une femme, est attirée par elle, se sent enfermée dans son couple mais n'ose pas rompre, son indécision finit par lui coûter la potentielle relation mais elle finit par comprendre qu'elle doit s'affirmer et rompt enfin avec son ancien petit copain pour se mettre avec sa belle. C'est classique mais rien n'est proposé autour. Vraiment, j'ai lu de nombreux yuri reposant sur la même trame et avec des variations très diverses pour la forme, mais là je n'ai pas eu le sentiment de voir une nouveauté ou une réinterprétation de cette idée. C'est un récit très classique, sans grande plus-value à mes yeux et avec une forme malheureusement trop froide émotionnellement. Déçue, donc.
Sept Missionnaires
L'histoire était bonne mais j'avoue avoir été un peu déçue. On me l'avait bien vendue et je voyais qu'Alain Ayroles était au scénario, j'ai sans doute eu de trop grosses attentes. En fait, je pense que les gens me l'ont surtout bien vendu car l'album est issu d'une collection dont les albums sont souvent assez oubliables et/ou médiocres. Je n'en avais lus que très peu il y a très longtemps et je les avais vite fait oubliés. Peut-être est-ce la raison de ma déception, je n'ai pas eu ce côté "vent de fraîcheur au milieu du reste". Malgré ma déception susmentionnée, l'histoire reste bonne. L'idée de base d'envoyer sept moines, chacun représentant à l'extrême l'un des sept péchés capitaux, au sein d'une colonie viking pour les évangéliser est très bonne. Les voir peu à peu corrompre ce village, bien malgré eux, est prévisible mais très bien exécuté. C'est juste dommage que le récit m'ait paru aller un chouïa trop vite, je pense que l'on aurait pu développer un petit peu plus ce village viking et ses habitants. J'ai parfois eu la sensation qu'iels étaient des figurants plutôt que des personnages secondaires. Mais, encore une fois, l'histoire reste bonne.
Le Soleil de minuit
L’album se laisse lire, mais je serai moins enthousiaste que bamiléké. Je ne suis a priori pas le cœur de cible. D’abord parce que l’intrigue vise essentiellement un jeune – voire très jeune lectorat. Je trouve que ça passe plus difficilement la barrière de l’âge, même si d’autres peuvent y trouver davantage leur compte. Mais c’est essentiellement l’aspect graphique qui ne m’attire pas. Affaire de goût ici, donc ne vous y arrêtez pas forcément. Mais le dessin est très franchement inspiré de certains dessins animés modernes (avec des visages, des expressions virant sur ce que je n’aime pas trop du manga). Certaines scènes, certains personnages m’ont aussi fait penser à quelques publications d’Ankama/Dofus (pas mon truc là non plus). Je ne suis pas fan non plus de la colorisation informatique. Quant à l’histoire, elle se laisse lire donc, mais sans m’avoir chamboulé. La responsabilité des humains dans certains déséquilibres naturels n’est en fait qu’effleurée, évoquée vers la fin. C’est surtout une petite histoire mignonne autour de deux sœurs, gardiennes de la Nuit pour l’une et du Jour pour l’autre. De leur affrontement, mais aussi de ce qui pourrait profiter de leur manque de coopération. Avec tout un tas de petits personnages secondaires pas très fouillés mais qui densifient certaines scènes, tout ça devrait plaire aux plus jeunes lecteurs. Lecteurs qui peuvent s’identifier à a gamine qui va rencontrer tout ce petit monde censé rester secret, hors de vue des humains. Un petit 3 étoiles me concernant, mais il y a quand même des qualités qui peuvent plaire à d’autres (aux goûts et âges éventuellement différents des miens).
Paul dans le Nord
Mon 2eme Paul et encore une franche réussite !! Paul a un travail d'été m’avait déjà agréablement interpellé, mais là l’auteur enfonce le clou. J’ai retrouvé avec plaisir l’univers de Michel Rabagliati, la période explorée est plus ou moins la même, à savoir son adolescence. Cette fois, la structure est légèrement différente puisqu’à la place d’une longue histoire nous aurons droit à un ensemble de saynètes/portraits/expériences qui forme petit à petit un beau tableau. Si ce n’est pour le langage, une œuvre pas bien dépaysante (on a tous été jeune) mais il y a eu clairement un truc à ma lecture. Indépendamment les histoires sont sympas mais c’est leur cohésion qui fait tout le sel. Je tire encore une fois mon chapeau à l’auteur, j’aime l’intelligence de sa narration, sa sincérité, la maîtrise de son dessin (grandement améliorée en 13 ans) et comment avec « rien » il arrive à me passionner. Ses fins d’album sont à chaque fois très réussies. Je découvre son style sur le tard mais j’en suis assez fan. Plus qu’à lire les autres :)
Berserk of Gluttony
Avis après 6 tomes. Un shonen qui ne révolutionnera rien mais que j’ai trouvé assez sympa à suivre, je suis même deg’ que ma médiathèque ne soit pas à jour sur la suite de la série. Le début est un peu poussif mais après j’ai apprécié le rythme. Dans un monde de Fantasy, où chaque personnes se voient affublés d’une compétence, nous suivrons Fate - un jeune garde persécuté qui malencontreusement va découvrir que sa capacité n’est pas si inutile. Cette dernière se révèlera même vite surpuissante, puisqu’à chacune de ses victoires, il gagne les statistiques de son adversaire … Il y aura bien sûr une contrepartie à ce pouvoir, entraînant notre jeune héros dans un cercle vicieux. Autant dire que ça démarre doucement avant de vite s’emballer. Au milieu de tout ça va émerger de nombreux personnages (compagnons, méchants de service, l’amour …), une quête et un peu de mystère pour titiller le lecteur. Le dessin est random mais efficace. Rien de foncièrement original dans ce récit donc, mais ça reste bien fait pour les amateurs du genre. Mini spoiler : j’aime bien l’explication du pouvoir en rapport avec les 7 péchés capitaux et ce que ça peut amener pour la suite … curieux de découvrir les derniers détenteurs.