Digne du premier Crisis ?
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Ce tome contient un crossover complet, sans les épisodes des séries mensuelles. Il existe une édition VO exhaustive : Zero Hour: Crisis in Time 25th Anniversary Omnibus. Il contient les 5 épisodes de la minisérie (de 4 à 0), ainsi que les 2 prologues contenus dans Showcase '94 8 & 9, initialement parus en 1994, écrits et dessinés par Dan Jurgens, encrés par Jerry Ordway, et mis en couleurs par Gregory Wright. Les 2 prologues ont été dessinés par Frank Frosco et encrés par Ken Branch, avec une mise en couleurs de Stuart Chaifetz. Ce tome contient également une introduction de 3 pages rédigée par Dan Jurgens en 2017, ainsi que la postface de 2 pages rédigée par le responsable éditorial KC Carlson en 1994 pour la première édition en recueil. Il se termine avec une frise chronologique de l'histoire de l'univers partagé DC en 4 pages, les couvertures sans logo, les images promotionnelles, et quinze pages de croquis, d'études de logo, avec le texte de la proposition initiale de Jurgens pour la minisérie.
Showcase '94 8 & 9 - Au sein de Vanishing Point (le QG des surveillants du temps), Waverider (Matthew Ryder) observe ses souvenirs, et fait observer à Rip Hunter qu'il s'agit d'une ligne temporelle qui n'existe plus, mais qu'elle reste très réelle pour lui. Dans sa base secrète, Monarch (Hector Hall) se félicite que Waverider l'ait repéré. Le combat peut s'engager. Zero Hour - Il y a trente-deux heures, sur Terre à la fin des Temps, Time Trapper se fait incinérer sur place par un individu dont l'identité n'est pas dévoilée. Il annonce que le temps est venu pour l'Heure Zéro. Sur Apokolips, Metron vient demander l'aide de Darkseid car le temps est en train de se déliter. Darkseid n'en a que faire. Sur Terre, Joker est en train de s'enfuir en courant dans une rue déserte, poursuivi par un individu portant l'emblème de la chauve-souris. Il finit par être attrapé à a cheville par un filin. Il se retourne et se retrouve face à Batgirl. Batman (Bruce Wayne) et Robin (Tim Drake) arrivent sur ces entrefaites et n'en croient pas leurs yeux : ils reconnaissent Barbara Gordon, en bonne santé, ayant retrouvé toute sa mobilité.
À Vanishing Point, Waverider, Rip Hunter et Matthew Ryder constatent qu'il n'y a plus d'années, plus de temps après le soixante-et-onzième siècle. Hunter et Waverider doivent aller enquêter. Au soixante-quatrième siècle, Flash (Wally West) neutralise Kadabra. Hunter et Waverider apparaissent sur la scène, alors que l'entropie est en train de dévorer l'environnement. Flash se lance dans le vortex à pleine vitesse pour le neutraliser : il se désagrège et Waverider ne récupère que son costume vide. À Metropolis, Superman (Clark Kent) rejoint Batman (Bruce Wayne) qui a garé sa Batmobile. Leur discussion est interrompue par l'arrivée de Metron sur son fauteuil Mobius. À Star City, en l'an 57.000, Waverider et Rip Hunter surgissent et se retrouvent devant Green Lantern (Hal Jordan) en train d'essayer d'enrayer le phénomène d'entropie en train de tout dévorer sur son passage. Au temps présent, sur Terre, Vanda Savage et en train d'affronter Hawkman qui soudain se tient devant lui en tant que six versions différentes séparées. Pendant ce temps-là, Superman va quérir l'aide de plusieurs superhéros : Green Lantern (Kyle Rayner), Aquaman, Superboy, Atom, Ray, Doctor Fate, Green Arrow et les équipes Outsiders, Team Titans.
Dans l'introduction, Dan Jurgens replace cette histoire dans son contexte et explique les enjeux afférents. En 1984/1985, les responsables éditoriaux avaient décidé de faire redémarrer à zéro l'univers partagé DC dans Crisis on infinite Earths (1985/1986) de Marv Wolfman & George Perez… Enfin à zéro pour certains personnages comme Superman (par John Byrne) et Wonder Woman (par George Perez) dont la continuité était totalement effacée, mais pas pour d'autres comme Batman qui conservait une bonne part de sa continuité passée. Du coup, certains événements passés avaient été difficiles à concilier, que ce soit l'existence de Superboy et son lien avec la Légion des SuperHéros, ou l'historique des Teen Titans. Par la suite, l'éditeur avait mis en œuvre un certain nombre de crossover comme Legends (1986, Len Wein, John Ostrander, John Byrne), Millennium (1988, Steve Englehart & Joe Staton), Invasion! (1989, Keith Giffen Todd McFarlane, Bart Sears). En 1991, sort Armageddon 2001 par Archie Goodwin & Denny O'Neill, Dan Jurgens, Dick Giordano, Steve Mitchell, Art Thibert, qui repose sur des voyages dans le temps. Zero Hour est sous-titré Crisis in time, faisant le lien à la fois avec Crisis in infinite Earths et avec Armageddon 2001. Cette minisérie affiche également l'objectif de fournir l'occasion aux scénaristes, et plus encore aux responsables éditoriaux de réaliser un épisode numéroté Zéro pour chaque série mensuelle, dans lequel ils peuvent modifier un élément de continuité afin de remédier aux incohérences engendrées par Crisis on infinite Earths.
Sur ces bases-là, Dan Jurgens raconte une histoire en forme de compte à rebours de 4 à 0, progressant vers la destruction totale du temps. Il met en œuvre les conventions attendues dans ce genre de récit. Extant, l'individu qui manipule tout depuis les coulisses, finit par se faire doubler par un autre individu plus puissant qui attendait son heure. Le scénario intègre les personnages les plus puissants de l'univers partagé DC, comme Spectre, pour montrer le niveau de destruction totale de la menace, tout en prenant soin de les neutraliser dès le départ pour que le suspense puisse croître. Il met en scène de nombreux personnages de l'univers partagé des superhéros de premier plan comme des superhéros moins connus. Wonder Woman, Batman, Superman (avec ses cheveux mi-longs) sont dont de la partie. D'autres personnages se retrouvent mêlés à la bataille comme Kyle Rayner (Green Lantern), Impulse (Bart Allen), Power Girl (Kara Zor-L enceinte), Vril Dox, Ray (Raymond Terrill), Guy Gardner sous son identité passagère de Warrior, Doctor Mist (Nommo, personnage très secondaire), Parallax, et des équipes comme les New Gods, la Justice Society of America (avec ses superhéros ayant dépassé les 50 ans et même les 60 ans), ou encore Cosmic Boy (Rokk Krinn), Saturn Girl (Imra Ardeen) et Lightning Lad (Garth Ranzz) de la Légion des SuperHéros.
Au fur et à mesure, Extant surgit à plusieurs moments dans le temps pour détruire un objectif, prenant à chaque fois les superhéros de court. L'auteur intègre quelques clins d'œil au premier Crisis comme la mort apparente de Flash (Wally West) qui fait écho à celle de Barry Allen. Bien sûr les superhéros sont sur la défensive, jusqu'à temps qu'ils parviennent à coordonner leurs efforts, à attaquer efficacement le vrai responsable de l'aggravation de la situation. Bien sûr, le scénariste a choisi un écoulement linéaire du temps pour Extant et les autres personnages s'avèrent incapables de le coincer en jouant sur l'écoulement du temps propre à leur personne, par exemple en essayant de panifier une attaque quelques secondes avant celle effectuée par Extant, dont ils ont déjà la connaissance parce qu'elle se situe dans leur passé. En outre, Dan Jurgens met en scène les superhéros en utilisant que leur caractéristique principale : ils ne sont guère plus que des porteurs de costume qui se distinguent les uns des autres par leurs superpouvoirs et les motifs colorés de leur tenue. Le lecteur éprouve des difficultés à s'attacher à ces personnages définis par un unique trait de caractère : la gentillesse de Batgirl, l'allure martiale intimidante d'Hawkman, la volonté d'agir rapidement de Flash, ou encore la posture virile de Guy Gardner (mais c'est pour ça qu'on l'aime).
En 1994, Dan Jurgens est déjà un créateur confirmé, ayant débuté sa carrière en 1983, ayant créé Booster Gold en 1986, et ayant mis en scène la mort de Superman. Dans l'histoire présente, le lecteur retrouve tout le savoir-faire professionnel de l'artiste : chaque personnage est représenté conformément à son apparence à ce moment de la continuité, facilement différenciable. Il met en scène l'utilisation de chaque superpouvoir avec le rentre-dedans et la pyrotechnie attendus, bien complémentés par la mise en couleurs vive et éclatante. Les finitions de Jerry Ordway (qui avait assisté George Perez sur Crisis on infinite Earths) sont impeccables. Le lecteur peut voir toute la culture graphique superhéros de Dan Jurgens dans sa capacité à utiliser les postures iconiques, à reprendre les mouvements caractéristiques de chaque personnage, à les disposer dans chaque case de manière à ce qu'ils soient tous distinguables, à mettre en œuvre les décharges d'énergie pour les rendre spectaculaires, à intégrer suffisamment de détails pour éviter la fadeur de dessins trop vides. Dans le même temps, la narration visuelle présente le même manque que la personnification des protagonistes : trop utilitaire et manquant de saveur personnelle. Au-delà de la mise en scène efficace et d'une grande lisibilité (ce qui n'est pas si évident que ça dans l'exercice du crossover qui rassemble de nombreux personnages), le lecteur ne découvre pas de case mémorable, ou de prise de vue à couper le souffle.
Lors de sa parution, cette histoire revêtait une importance certaine, à la fois pour sa filiation annoncée avec Crisis on infinite Earths, à la fois pour son objectif d'offrir l'occasion de remédier à des incohérences de continuité dans des numéros zéro des séries mensuelles, et bien sûr dans l'interaction entre une multitude de personnages. À la lecture, il apparaît que Dan Jurgens s'acquitte honorablement de sa tâche, avec un professionnalisme indéniable. Mais le lecteur en ressort également avec l'impression que l'auteur est plus un bon artisan qu'un véritable artiste et qu'il n'arrive pas à insuffler le souffle épique attendu, que ce soit au travers d'environnements trop basiques, ou de personnages trop superficiels.
Mauvaise pioche cette série. Je n’ai lu que le 1er intégral mais je vais m’arrêter là.
C’est pas mauvais en soi, je suis un grand amateur du dessin animé diffusé dans les années 90, la présente série se veut d’ailleurs son prolongement sur papier.
J’ai aimé que chaque histoires mettent un méchant à l’honneur, présenter en préambule avec une petite carte d’identité (détail sympa).
Par contre, les récits développés sont vraiment moyens, tout va trop vite. Quelques traces d’humour sauvent un peu l’ensemble mais à moins de vraiment pas être regardant, le côté vide l’emporte. Le dessin et mise en page suivent malheureusement le même schéma.
Finalement une fausse bonne idée, ce qui marche en épisode tv ne sera pas spécialement le cas en papier. L’univers est respecté mais le rendu apparait ici trop teenage.
Le résultat m’a paru en dessous de Batman - Mad Love qui possède la même parenté mais plus fun et attrayant dans ses ingrédients.
Je suis vraiment désolé de mettre une mauvaise note à cette série d’un auteur dont j’ai aimé pas mal de scénarios originaux, et le dessin aux courbes bizarroïdes. Mais là, je me suis quand même pas mal ennuyé.
Le dessin déjà, m’a moins plu. Certes on n’est pas dans un dessin réaliste, mais le style gros pif me plait moins chez cet auteur que quand il use d’un trait brinquebalant. Seule la colorisation m’a bien plus. Mais bon, je chipote à ce sujet, car ça reste très lisible, hein.
Mais c’est l’histoire qui m’a laissé de côté. C’est amusant au départ, les textes ironiques, désabusés, un peu décalés, qui commentent les péripéties de notre Français « expatrié » (en Afrique la plupart du temps, à part une escapade finale au Québec) m’avaient laissé espérer une lecture plus plaisante qu’elle ne l’a finalement été.
En fait, ça tourne rapidement en rond. Et la narration, qui mise avant tout sur des textes hors phylactères, commentant l’action, exprimant au style indirect les pensées du héros, Jean Dextre, m’ont de moins en moins intéressé. L’humour qui parsème ces aventures du pauvre ne suffisait pas à masquer les longueurs. Quatre tomes, c’est beaucoup trop long pour cette idée – avec en plus l’impression que Dumontheuil improvisait parfois.
Bref, c’est une lecture décevante.
Cela se vend possiblement bien à la boutique de souvenirs de Carnac mais c'est franchement dispensable. On nous raconte l'histoire des alignements de menhirs avec des ficelles scénaristiques pas très fines. Une femme de nos jours s'évanouit en touchant une pierre d'ambre et se retrouve téléportée dans la préhistoire au milieu d'un village. Des tensions se font jour entre les habitants, notamment 2 frères. On a vaguement quelques scènes montrant comment les menhirs sont mis en place et gravés et les rites funéraires de l'époque. Le dessin reste correct, dans la veine "mainstream" avec des couleurs flashy qui me plaisent peu.
Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre. Il comprend les 5 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2015/2016, créés par Mike Mignola, coécrits par Mignola et Christopher Golden, dessinés et encrés par Patric Reynolds, avec une mise en couleurs de Dave Stewart. Il comprend deux histoires qui se suivent.
Épisodes 1 à 3 The rat Catcher - En 1925, la Terre a tremblé et Manhattan s'est pour partie enfoncée dans l'eau. En 1955, Simon Church rentre le soir chez lui et il se met à étudier ses livres, comme à son habitude. La foudre frappe le coin de son immeuble, juste au-dessus de la pièce dans laquelle se trouve son bureau. Il remarque un changement imperceptible dans la statue de terre qui y est exposée. En septembre 1965, trois orphelins parcourent en barque les rues submergées qui sont devenues autant de canaux urbains. Ils repèrent un couple sur un pont et le plus agile d'entre eux grimpe, sectionne la bandoulière du sac de la dame, s'en empare et saute dans l'embarcation. En s'éloignant, l'un d'entre eux est happé par une créature issue des profondeurs. Pendant ce temps-là, Joe Golem s'est assoupi et il rêve d'un golem de pierre se déchaînant contre des sorcières au quinzième siècle, en Croatie. Lori Noonan, la maîtresse d'école, demande à Simon Church d'enquêter suite à a disparition de trois orphelins de sa classe.
Épisodes 4 & 5 - The sunken dead - En octobre 1965, le pendule de Simon Church lui indique qu'il est en train de se passer quelque chose de pas catholique dans le quartier de Greenwich Village. Joe Golem étant parti se promener, il demande à sa cuisinière Martha où il se trouve. Il le récupère alors qu'il effectuait une balade en bateau avec Lori Noonan. Tous les deux, ils se dirigent vers l'habitation d'Argus Bostwick qui les reçoit de plus ou moins bonne grâce. Ils constatent rapidement qu'il a agrandi sa collection d'objets occultes, et qu'il a commencé un rituel aux conséquences fâcheuses.
Mike Mignola est un créateur qui ne semble jamais connaître la panne d'inspiration, la peur de la page blanche. De temps à autre, en marge de l'univers partagé d'Hellboy et du BPRD déjà bien fourni, il lance une autre série, généralement avec un collaborateur, par exemple la série consacrée à Lord Baltimore. Joe Golem avait déjà eu droit à un roman, coécrit avec Christopher Golden : Joe Golem and the drowning city, initialement paru en octobre 1992. Reprenant le même modèle que pour Baltimore, Mignola donne donc une prolongation au roman, avec son coauteur. Il ne s'agit pas d'une suite à proprement parler puisqu'il n'est pas besoin d'avoir lu le roman pour apprécier ce tome.
Aux dessins, le lecteur retrouve également l'artiste Ben Stenbeck qui a aussi illustré les cinq premiers tomes de la série Baltimore, ainsi que l'histoire Frankenstein Underground. Comme d'habitude dans les productions de Mike Mignola, Dave Stewart se charge de la mise en couleurs. En revanche les couvertures sont réalisées par Dave Palumbo. Ce dernier réalise des illustrations en peinture directe s'inscrivant dans la tradition des pulps (romans bon marché à sensation de la première moitié du vingtième siècle). Elles mettent en avant avec panache la virilité du héros, sa musculature, et une situation de danger, soit imminente, soit déjà physiquement advenue. Pour ces épisodes, Dave Stewart a choisi un parti pris chromatique affirmé. Il restreint sa palette au brun et à l'ocre, tirant parfois vers une teinte verdâtre, avec de rares effets de contraste avec une teinte orangée ou rougeâtre. Ce choix marque le récit d'une empreinte maussade, en cohérence avec la déliquescence de cette ville à moitié engloutie sous les flots. Il a aussi pour effet d'imprimer une sensation d'uniformité de surface à chaque séquence.
Ben Stenbeck réalise des dessins s'inscrivant dans une veine descriptive. La séquence d'ouverture permet de voir le bateau qui dessert Brooklyn Heights, ainsi que New York vu du ciel. Ces épisodes contiennent de nombreuses autres vues des canaux de New York, pour un effet assez glauque et oppressant du fait du choix des couleurs plutôt sombres et oppressantes. Le lecteur peut promener son regard dans la pièce qui sert de bureau à Simon Church. Il peut se faire une idée de l'ameublement de la chambre de Joe. La séquence dans les pièces immergées (lors de la recherche du monstre sous-marin) donne une bonne idée de leur disposition les unes par rapport aux autres et de leur volumétrie. La bibliothèque d'Argus Bostwick impressionne par sa hauteur sous plafond, ses piliers et ses poutres de bois. Par contre la reconstitution du village croate au quinzième siècle fleure bon l'approximation d'un dessinateur qui n'a pas fait beaucoup de recherches de référence et qui s'en tient à des clichés sur les villages européens vaguement moyenâgeux.
Ben Stenbeck a également eu la responsabilité de concevoir l'apparence des personnages. Joe Golem est donc un individu à la forte carrure avec une belle musculature, souvent en pardessus ou en tricot de corps, habillé à une mode qui rappelle plus les années 1940 que le début des années 1960. Simon Church a une vague allure de vieux monsieur aux cheveux blancs, avec des lunettes et une morphologie normale, sans musculature entretenue. Néanmoins son âge ne transparaît pas dans ses mouvements qui restent fluides comme ceux d'un jeune homme. Lori Noonan a également une silhouette normale, assez fine, avec également des tenues vestimentaires qui font plus datées que l'année 1965, certainement un effet de ralentissement sur les modes dû à l'effondrement partiel de la capitale. En passant d'une page à l'autre, le lecteur a parfois l'impression que le dessinateur éprouve des difficultés à garder une apparence cohérente pour les visages. Par exemple le volume et la forme de la coiffure de Lori Noonan subissent d'étranges variations que le seul effet de changement d'angle de vue ne suffit pas à expliquer.
Le lecteur remarque également assez rapidement que Ben Stenbeck utilise l'encrage pour marquer les surfaces de petites griffures, ou pour apposer des aplats de noir aux contours irréguliers. Ces zones noires ne figurent pas l'ombre portée par une source lumineuse ou une autre, mais remplissent une fonction expressionniste, l'irrégularité de leur contour évoquant vaguement l'usure provoquée par un environnement agressif ou débilitant. Comme il est d'usage dans les comics, l'artiste s'affranchit de temps à autre de dessiner les arrière-plans, ce qui se remarque beaucoup du fait du choix de mise en couleurs assez uni opéré par Dave Stewart. Du coup le lecteur sort un peu de l'environnement où se déroule la scène, puisque finalement les obstacles et le relief n'ont pas de conséquences sur les mouvements des personnages. Certaines cases perdent ainsi beaucoup de leur intérêt visuel en n'apportant finalement pas grand-chose à la narration de l'histoire.
Le lecteur plonge donc au cœur d'une situation déjà installée, Simon Church faisant effectuer des missions à Joe Golem. D'ailleurs Golem n'est pas son nom de famille qui n'est pas prononcé dans ces épisodes. Par contre le titre indique tout de suite au lecteur qu'elle est la nature de Joe. De ce fait, il n'éprouve pas beaucoup de curiosité pour ce personnage puisqu'il sait avant même de commencer sa lecture qu'il s'agit d'un être de terre animé par magie, avec une personnalité soit artificielle, soit très limitée. Par voie de conséquence, les séquences au quinzième siècle n'apportent pas grand-chose au récit, si ce n'est d'indiquer que Joe est troublé par ses remémorations qu'il interprète comme des cauchemars récurrents. Au bout de deux séquences dans le passé, le lecteur a compris le principe et ne voit pas ce qu'apportent les suivantes, peu denses en information. Il en découle que la construction du récit qui entrecoupe les deux enquêtes de Joe avec ces souvenirs apparaît artificielle et lourde, puisque le fil narratif dans le passé peine à capturer l'attention du lecteur (et puis les sorcières représentées par Stenbeck sont visuellement très fades).
La séquence d'ouverture établit en une page la situation de New York comme ville ayant subi une catastrophe dont elle ne s'est pas relevée. Le lecteur porte son attention sur les enquêtes et les personnages. Ces derniers ne sont pas très développés, disposant d'un trait de caractère principal et unique. Il reste donc l'intrigue, soit deux enquêtes successives. La première est très classique et très linéaire avec une chasse au monstre aquatique. Le lecteur peut quand même reconnaître la patte de Mignola dans les observations de Joe sur les motivations très humaines dudit monstre. La deuxième commence de manière plus originale, mais par contre se déroule de manière encore plus linéaire, enfilant cliché après cliché.
En refermant ce tome, le lecteur se dit que les collaborations entre Mike Mignola et Christopher Golden ne font pas ressortir les compétences des deux qui ont plutôt tendance à se neutraliser dans un récit fade, rendu plus insipide par des choix graphiques plus maniérés qu'inspirés.
Un concentré de testostérone pour une histoire bourrin de gars qui se pêtent la gueule. Ce comics mélange le côté anarcho-trash d'un Lobo, la satyre des super-héros américains d'un Marshal Law et la violence, le cul et le politiquement incorrect de The Boys, le tout dans un graphisme foutraque mélangeant les styles façon street art avec une tendance récurrente à vouloir représenter de gros sexes flasques.
Dans un monde très masculin, où les rares filles sont soit des putes, soit des vicieuses, soit de simples corps sans cervelle, le héros est une caricature de Captain America ou du Comédien de Watchmen, un super mâle bourrin drapé de la bannière étoilé partagé entre ses grosses envies sexuelles à assouvir et son gros truck qu'il conduit plein gaz. Missionné pour tuer tous les super-vilains dans la prison où il les a menés étant plus jeune, il rate son coup et laisse échapper les cinq plus dangereux qui n'ont plus comme objectif que de le tuer. S'engage une grosse course poursuite très musclée, bourrée d'explosions, de baston et de pas mal de torture aussi. Une sorte de gros défouloir pour l'auteur qui s'en donne à cœur joie tant au niveau de son histoire déjantée que de son graphisme.
Ca aurait pu être drôle mais c'est juste confus et paradoxalement verbeux. Alors que certaines scènes s'étirent parfois en une longue succession de pages cinématographiques, les pénibles monologues intérieurs des personnages brisent le rythme de lecture, empêchant de savourer ni l'action ni une quelconque subtilité des textes. Ceux-ci sont lourdingues et ne font pas avancer une intrigue qui, malgré l'abondance de bagarres et de brutalité, se traine et ne raconte rien. C'est creux, pas drôle, trop bourrin, et difficilement lisible. Clairement pas ma came.
Cette BD me fait poser beaucoup de questions après lecture. J'ai lu les critiques, et j'ai bien attendu avant d'écrire mon avis parce que je ne suis toujours pas certain de ce que j'en pense.
Est-ce que j'ai aimé ? Non. Est-ce que c'est une BD mauvaise ? Non. Alors quel est le problème ? Je dirais que cette BD ne me plait pas, et je ne suis pas certain du pourquoi. Déjà, je n'aime pas le dessin qui joue beaucoup sur un malaise dû à une laideur volontaire. Sauf que si je comprends l'idée et le résultat, je ne suis pas convaincu parce que la BD est assez moche (volontairement, ce n'est pas une remarque purement cosmétique) et que je n'ai pas envie de relire. Rien que le baiser en gros plan est tellement dérangeant que je n'ai pas envie de le revoir.
D'autre part, il y a ce scénario : des jeunes gens qui ont tous des problèmes dans leurs vies. Et des sacrés problèmes, j'aurais envie d'envoyer la plupart consulter un spécialiste. Mais surtout, je les ai tous trouvé désagréable. Ils sont souvent égocentriques, méchants et menteurs, devenant de fait des gens détestables à mes yeux. Et donc, je n'ai pas envie de suivre leur vie. D'ailleurs le final avec un viol me reste clairement en travers de la gorge. Je trouve qu'il y en a déjà suffisamment comme ça dans le monde pour ne pas avoir envie d'en voir un le soir lorsque je lis chez moi. Ce n'est pas tant une volonté de ne pas voir la chose que de ne pas y être exposé, ce qui est différent selon moi. Là c'est brut, sans conséquences et sans morale. Je comprends l'idée, je n'approuve pas.
J'ai du plus haut que je ne suis pas sur de ce que je pense de la BD, et c'est surtout parce que je ne suis pas sur de pourquoi je n'aime pas. Peut-être est illégitime de penser ainsi, mais cette jeunesse présentée ici, je ne la connais pas et je ne la croise pas. Du coup, je me demande d'où elle sort -et je répète, c'est sans doute purement personnel. D'autre part, je ne vois pas la critique du numérique ou de la vie par écran cité en résumé : il y a bien les écrans, mais assez peu présent et tout repose justement sur des dialogues en direct. On dirait plutôt que chacun vit dans un monde idéalisé et se heurte sans cesse à une réalité sordide. Mais je ne vois pas ces personnes lutter réellement contre les soucis, juste les accumuler. Il y a un léger mieux dans le final, qui me fait du coup me demander ce que l'auteur voulait vraiment dire, et paf, ce viol final. On reste dessus (ou presque) et je ne vois vraiment pas ce qu'il faut retenir de tout ça.
Une BD qui dérange, sans doute, mais qui ne me plait pas. Et même après cette critique, j'aurais du mal à dire explicitement pourquoi. Mais je suis certain qu'elle n'est pas pour moi !
Quand Golden City rencontre Idiocracy.
Freedom Unlimited est une île artificielle et mobile pour milliardaires tandis que le reste du monde se casse la gueule. Les riches se foutent de la gueule de la plèbe, c'est-à-dire les pouilleux qui ont moins d'un milliard de dollars et vivent en autarcie en attendant que la population humaine meurt dans sa propre bêtise. Ici tout est traité sur le ton de la dénonciation politique et du sarcasme à tendance loufoque.
Sur le ton et au niveau graphique, ça rappelle un peu Transmetropolitan avec sa critique du monde moderne et de vers quoi il pourrait tendre de pire. Et le dessin est du même niveau, très maîtrisé techniquement, avec des visages entre réalisme et caricature, avec beaucoup de détails en arrière plan et une mise en scène un peu déjantée. Sauf que ce serait un Transmetropolitan très basique et bas de plafond. La critique est tellement outrée qu'elle en devient bête.
Ça se fout d'un peu tout le monde, dans des thématiques très figées dans leur époque : on y sent la fin des années 2010, l'époque avant Covid et Ukraine, avec des réseaux sociaux et des dénonciations de cette époque, celle de Facebook et de Mark Zukerberg, des MAGA (malheureusement remis au goût du jour avec les élections américaines actuelles) et d'autres sujets qui donnent l'impression d'être déjà presque désuets.
On est dans une ambiance entre le récit d'action SF et le délire à la MAD où tout est prétexte à la déconne et à la surenchère. Ca désamorce complètement la partie aventure de l'histoire tout en n'étant pas forcément drôle d'un autre côté. Oh oh, le gars qui avait trouvé la solution miracle de taxer les plus riches pour sauver la Terre entière se fait éjecter par le millardaire égoïste : trop bien vu, ça ose dénoncer... Mouairf...
J'ai quand même rigolé deux ou trois fois sur quelques bonnes idées mais pour le reste je me suis assez ennuyé devant la platitude et le convenu de ce délire satyrique qui dénonce trop facilement.
Le drame du soufflé
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Ce tome fait suite à Infinity Countdown qui contient les épisodes 1 à 5 de la minisérie, ainsi que Infinity Countdown Prime, Infinity Countdown Adam Warlock, et le Free Comic Book Day 2018 Guardians of the Galaxy. Ce tome-ci contient lnfinity Wars Prime 1 et Infinity Wars 1 à 6. initialement parus en 2018, écrits par Gerry Duggan. Les 6 épisodes de la minisérie et l'épisode Prime ont été dessinés et encrés par Mike Deodato, avec une mise en couleurs de Frank Martin.
Dans la Cité de l'Omnipotence, Loki est en train de consulter des tomes anciens dans la Grande Librairie. Il ne comprend pas pourquoi il n'est jamais le héros de ces histoires. Il soupçonne l'agissement d'un individu dans l'ombre qui oriente sa destinée. Il se fait rappeler à l'ordre par Flowa, la déesse bibliothécaire qui lui indique que l'établissement va fermer. Suite à son insistance, elle lui explique la raison pour laquelle Freyja a ordonné la construction de la Bibliothèque dans laquelle ont été placées des copies des ouvrages d'Asgard. Flowa a retrouvé l'ouvrage susceptible d'intéresser Loki sur sa destinée, mais des pages ont été arrachées. Elle lui indique qu'elle se souvient que le récit évoquait la Carrière des Dieux, situé aux confins de l'espace, gardée par des sorcières. Loki décide de s'y rendre et Flowa accepte de l'accompagner. Pendant ce temps-là, Adam Warlock arrive chez Stephen Strange et lui demande s'il a la pierre du temps. Il parle également de la corruption du monde de la pierre de l'âme. Ils se rendent dans ledit monde et se heurtent à un énorme monstre appelé Devondra. Sur la planète Chitauri Prime (le siège du pouvoir de Thanos), un individu appelé Requiem apparaît, transperce le torse de Thanos de son épée, puis le décapite.
Dans une taverne, Gamora aborde Peter Quill et lui demande son aide pour utiliser la pierre de puissance afin de pénétrer dans le monde de la pierre de l'âme, et d'y récupérer le morceau d'elle qui s'y trouve. Peter Quill ne donne pas suite à sa demande. Gamora l'embrasse à pleine bouche et s'en va. Groot et Rocket Raccoon arrivent et s'enquièrent de ce qui vient de se passer ; Peter Quill leur rappelle que l'équipe des Gardiens de la Galaxie est dissoute et n'existe plus. Sur Terre, Drax, Iron Man et Adam Warlock se rendent à un rendez-vous fixé par Doctor Strange au château du Belvédère à Central Park. Sur place se réunissent Doctor Strange, Captain Marvel (Carol Danvers), Groot, Iron Man (Tony Stark), Peter Quill, Drax, Adam Warlock, Turk Barrett, Spot (Johnny Ohnn), Typhoid Mary (Mary Walker), Bullseye (Lester), Sandman (Flint Marko), Tombstone (Lonnie Lincoln), et en protection Black Widow (Natasha Romanoff). La question est de savoir comment s'assurer que les pierres de l'infini ne pourront plus être rassemblées par un individu unique. Au cours de la discussion, une image surgit montrant Thanos mort, décapité. Pendant ce temps-là, Loki et Flowa poursuivent leur voyage vers la Carrière des Dieux.
En s'embarquant dans cette histoire, le lecteur sait qu'il s'agit d'une forme de récit très contraint, un crossover dont l'éditeur Marvel entend bien tirer le maximum de bénéfices, à commencer par Infinity Countdown, un prologue de plus de 200 pages, sans oublier les tomes satellites comme Infinity Warps: Two-in-One,Infinity Countdown: Darkhawk, ou encore Infinity Countdown Companion. Il sait aussi qu'il s'agit de l'aboutissement de plusieurs intrigues secondaires patiemment développées par Gerry Duggan dans la série Gardians of the Galaxy. La tentation est donc forte de connaître leur aboutissement. En outre, ce tome est bien conçu, pouvant être lu sans lire les autres, mêmes le prologue. Il commence par un trombinoscope des principaux personnages (au nombre de 19), une page de présentation des pierres de l'infini et de leurs interactions, indiquant également qui en est porteur. Le lecteur se lance à la découverte des nouvelles guerres de l'infini au titre évoquant celle de 1992 Inifinity War par Jim Starlin & Ron Lim, elle-même faisant référence au Gant de l'infini (1991) par Starlin, George Perez, Lim.
Très rapidement, le lecteur constate que Gerry Duggan ne se sent pas prisonnier de l'original de Starlin et qu'il dispose des coudées franches pour développer une intrigue originale. Le lecteur ne doit donc pas s'attendre à trouver Magus, ou la déesse. En prime, le scénariste commence fort, que ce soit par l'inclusion de Loki dont le lecteur se demande bien ce qu'il vient faire là, ou par l'assassinat de Thanos, assez bien agencé pour qu'il puisse y croire au moins le temps du récit. La réunion des porteurs de pierre de l'infini se déroule d'une manière qui défie les attentes (sans parler de la présence de Turk Barrett), et le mystère du monstre dans le monde de la pierre de l'âme est intriguant. En plus, Duggan évite d'étirer le suspense quant à l'identité de Requiem, ce qui permet de passer rapidement à la suite. Le lecteur apprécie également que les épisodes essentiels du récit (les 6 de la minisérie + le prologue Prime) soient dessinés par un seul et unique artiste. Mike Deodato est plutôt en bonne forme au début. Il est visible qu'il s'économise sur les décors, passé la première moitié du récit.
Dès l'épisode prologue Prime, le lecteur retrouve le tic de mise en page de l'artiste qui consiste à découper un dessin de la taille des 2 tiers de la page, un dessin en pleine page, ou même en double page, en des rectangles plus petits en superposant une grille à base de lignes blanches qui séparent artificiellement un même dessin. Le systématisme de ce dispositif visuel peut agacer, mais parfois Deodato l'utilise de manière plus pertinente pour substituer une partie du dessin (un rectangle) par un autre dessin qui se trouve ainsi en insertion, créant un rapprochement spatial, ou une concomitance temporelle intéressant. L'artiste dessine toujours de manière descriptive et réaliste, gérant avec une facilité épatante la multitude de personnages, et chacune des particularités de leur costume. Il fait l'effort de représenter des silhouettes différentes pour les personnages féminins, de la morphologie adolescente de Miss Marvel, à la silhouette plus accorte d'Emma Frost, en passant par le corps peu sexué de Gamora. De la même manière, les personnages masculins n'ont pas tous la même corpulence, depuis la silhouette massive de Thanos, à celle plus élancée de Loki.
Mike Deodato est un dessinateur confirmé de superhéros, maniant les conventions visuelles associées avec dextérité. Il sait concevoir une mise en scène de telle sorte que les individus ne se marchent pas sur les pieds même quand ils sont nombreux. Il maîtrise les postures en position de combats physiques, que ce soit les attaques à mains nues, ou les démonstrations de superpouvoir, avec une mise en couleurs complémentaires et enrichissantes de Frank Martin. Au fil des séquences, certaines images restent en tête par leur puissance spectaculaire, ou leur côté incongru : Loki en train de se faire mettre à la porte de la bibliothèque, la première apparition de Devondra (avec des relents de Cthulhu), le dessin en pleine page de la décapitation de Thanos, l'arrivée de Requiem sur Terre avec la tête de Thanos à la main, l'allure finalement très réussie des amalgames de 2 superhéros, Loki en passager sur une grosse cylindrée conduite par Emma Frost, Adam Warlock faisant léviter les 6 pierres au-dessus sa paume, etc. Finalement le lecteur se laisse entraîner dans cette histoire sans prétention philosophique ou psychologique, mais avec une intrigue de grande ampleur et des surprises régulières.
Dans la première moitié du récit, Gerry Duggan emmène le lecteur dans une intrigue originale, refusant la redite avec les sagas originelles de Jim Starlin, impliquant de nombreux personnages, mais sans perdre le lecteur, jouant avec ses attentes, pour mieux le surprendre. Le lecteur oublie rapidement la participation incongrue de Turk Barrett ou l'apparition éclair de Spider-Man en tant qu'obligation éditoriale. Même l'idée a priori idiote de fusionner deux personnages en 1 (par exemple Captain America avec Doctor Strange) ne semble pas si incongrue, pas si opportuniste (pour vendre des miniséries associées) que ça. Mais à partir de l'épisode 4, Gerry Duggan semble changer de registre de narration pour revenir à un récit de superhéros beaucoup plus classique, où les personnages se lancent dans une bataille après l'autre, pour triompher par la force et la volonté, supplantant ainsi la dimension mythologique du récit pour revenir à une succession de combats basiques. Le lecteur attend que ça se passe, en profitant des effets pyrotechniques de Deodato & Martin, mais le récit ne redécolle plus. L'histoire principale s'achemine ainsi vers sa conclusion sans retrouver son souffle épique.
La première moitié de la minisérie principale montre que Gerry Duggan sait utiliser à bon escient les ressources de l'univers partagé Marvel, et que Mike Deodato donne l'impression de facilité à mettre en scène autant de personnages. Dans la deuxième moitié, le soufflé retombe mollement, dans un registre superhéros manquant d'ampleur et d'ambition.
Je mets une étoile de plus que Spooky, en raison du dessin, qui est plutôt joli, agréable à l’œil. Avare de détails, avec des décors un peu escamotés, il est globalement plaisant. Plus clair que le récit lui-même en tout cas !
Car pour cela je rejoins Spooky. La narration est obscure, très verbeuse : c’est franchement indigeste, et rapidement j’ai perdu le fil de « l’histoire ». Traiter les camps d’extermination et la shoah de façon détournée, métaphorique, pourquoi pas ? Mais là le texte trop abondant (et les premières pages sont les pires à ce propos !), et un récit peu clair m’ont égaré.
Les cases et textes de la dernière page sont, eux, bien plus clairs et précis, cela donne les clés, recentre le récit, avec ce train qui arrive à Auschwitz, avec la fumée des crématoires en arrière-plan. Certes. Mais il est trop tard.
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Heure Zéro
Digne du premier Crisis ? - Ce tome contient un crossover complet, sans les épisodes des séries mensuelles. Il existe une édition VO exhaustive : Zero Hour: Crisis in Time 25th Anniversary Omnibus. Il contient les 5 épisodes de la minisérie (de 4 à 0), ainsi que les 2 prologues contenus dans Showcase '94 8 & 9, initialement parus en 1994, écrits et dessinés par Dan Jurgens, encrés par Jerry Ordway, et mis en couleurs par Gregory Wright. Les 2 prologues ont été dessinés par Frank Frosco et encrés par Ken Branch, avec une mise en couleurs de Stuart Chaifetz. Ce tome contient également une introduction de 3 pages rédigée par Dan Jurgens en 2017, ainsi que la postface de 2 pages rédigée par le responsable éditorial KC Carlson en 1994 pour la première édition en recueil. Il se termine avec une frise chronologique de l'histoire de l'univers partagé DC en 4 pages, les couvertures sans logo, les images promotionnelles, et quinze pages de croquis, d'études de logo, avec le texte de la proposition initiale de Jurgens pour la minisérie. Showcase '94 8 & 9 - Au sein de Vanishing Point (le QG des surveillants du temps), Waverider (Matthew Ryder) observe ses souvenirs, et fait observer à Rip Hunter qu'il s'agit d'une ligne temporelle qui n'existe plus, mais qu'elle reste très réelle pour lui. Dans sa base secrète, Monarch (Hector Hall) se félicite que Waverider l'ait repéré. Le combat peut s'engager. Zero Hour - Il y a trente-deux heures, sur Terre à la fin des Temps, Time Trapper se fait incinérer sur place par un individu dont l'identité n'est pas dévoilée. Il annonce que le temps est venu pour l'Heure Zéro. Sur Apokolips, Metron vient demander l'aide de Darkseid car le temps est en train de se déliter. Darkseid n'en a que faire. Sur Terre, Joker est en train de s'enfuir en courant dans une rue déserte, poursuivi par un individu portant l'emblème de la chauve-souris. Il finit par être attrapé à a cheville par un filin. Il se retourne et se retrouve face à Batgirl. Batman (Bruce Wayne) et Robin (Tim Drake) arrivent sur ces entrefaites et n'en croient pas leurs yeux : ils reconnaissent Barbara Gordon, en bonne santé, ayant retrouvé toute sa mobilité. À Vanishing Point, Waverider, Rip Hunter et Matthew Ryder constatent qu'il n'y a plus d'années, plus de temps après le soixante-et-onzième siècle. Hunter et Waverider doivent aller enquêter. Au soixante-quatrième siècle, Flash (Wally West) neutralise Kadabra. Hunter et Waverider apparaissent sur la scène, alors que l'entropie est en train de dévorer l'environnement. Flash se lance dans le vortex à pleine vitesse pour le neutraliser : il se désagrège et Waverider ne récupère que son costume vide. À Metropolis, Superman (Clark Kent) rejoint Batman (Bruce Wayne) qui a garé sa Batmobile. Leur discussion est interrompue par l'arrivée de Metron sur son fauteuil Mobius. À Star City, en l'an 57.000, Waverider et Rip Hunter surgissent et se retrouvent devant Green Lantern (Hal Jordan) en train d'essayer d'enrayer le phénomène d'entropie en train de tout dévorer sur son passage. Au temps présent, sur Terre, Vanda Savage et en train d'affronter Hawkman qui soudain se tient devant lui en tant que six versions différentes séparées. Pendant ce temps-là, Superman va quérir l'aide de plusieurs superhéros : Green Lantern (Kyle Rayner), Aquaman, Superboy, Atom, Ray, Doctor Fate, Green Arrow et les équipes Outsiders, Team Titans. Dans l'introduction, Dan Jurgens replace cette histoire dans son contexte et explique les enjeux afférents. En 1984/1985, les responsables éditoriaux avaient décidé de faire redémarrer à zéro l'univers partagé DC dans Crisis on infinite Earths (1985/1986) de Marv Wolfman & George Perez… Enfin à zéro pour certains personnages comme Superman (par John Byrne) et Wonder Woman (par George Perez) dont la continuité était totalement effacée, mais pas pour d'autres comme Batman qui conservait une bonne part de sa continuité passée. Du coup, certains événements passés avaient été difficiles à concilier, que ce soit l'existence de Superboy et son lien avec la Légion des SuperHéros, ou l'historique des Teen Titans. Par la suite, l'éditeur avait mis en œuvre un certain nombre de crossover comme Legends (1986, Len Wein, John Ostrander, John Byrne), Millennium (1988, Steve Englehart & Joe Staton), Invasion! (1989, Keith Giffen Todd McFarlane, Bart Sears). En 1991, sort Armageddon 2001 par Archie Goodwin & Denny O'Neill, Dan Jurgens, Dick Giordano, Steve Mitchell, Art Thibert, qui repose sur des voyages dans le temps. Zero Hour est sous-titré Crisis in time, faisant le lien à la fois avec Crisis in infinite Earths et avec Armageddon 2001. Cette minisérie affiche également l'objectif de fournir l'occasion aux scénaristes, et plus encore aux responsables éditoriaux de réaliser un épisode numéroté Zéro pour chaque série mensuelle, dans lequel ils peuvent modifier un élément de continuité afin de remédier aux incohérences engendrées par Crisis on infinite Earths. Sur ces bases-là, Dan Jurgens raconte une histoire en forme de compte à rebours de 4 à 0, progressant vers la destruction totale du temps. Il met en œuvre les conventions attendues dans ce genre de récit. Extant, l'individu qui manipule tout depuis les coulisses, finit par se faire doubler par un autre individu plus puissant qui attendait son heure. Le scénario intègre les personnages les plus puissants de l'univers partagé DC, comme Spectre, pour montrer le niveau de destruction totale de la menace, tout en prenant soin de les neutraliser dès le départ pour que le suspense puisse croître. Il met en scène de nombreux personnages de l'univers partagé des superhéros de premier plan comme des superhéros moins connus. Wonder Woman, Batman, Superman (avec ses cheveux mi-longs) sont dont de la partie. D'autres personnages se retrouvent mêlés à la bataille comme Kyle Rayner (Green Lantern), Impulse (Bart Allen), Power Girl (Kara Zor-L enceinte), Vril Dox, Ray (Raymond Terrill), Guy Gardner sous son identité passagère de Warrior, Doctor Mist (Nommo, personnage très secondaire), Parallax, et des équipes comme les New Gods, la Justice Society of America (avec ses superhéros ayant dépassé les 50 ans et même les 60 ans), ou encore Cosmic Boy (Rokk Krinn), Saturn Girl (Imra Ardeen) et Lightning Lad (Garth Ranzz) de la Légion des SuperHéros. Au fur et à mesure, Extant surgit à plusieurs moments dans le temps pour détruire un objectif, prenant à chaque fois les superhéros de court. L'auteur intègre quelques clins d'œil au premier Crisis comme la mort apparente de Flash (Wally West) qui fait écho à celle de Barry Allen. Bien sûr les superhéros sont sur la défensive, jusqu'à temps qu'ils parviennent à coordonner leurs efforts, à attaquer efficacement le vrai responsable de l'aggravation de la situation. Bien sûr, le scénariste a choisi un écoulement linéaire du temps pour Extant et les autres personnages s'avèrent incapables de le coincer en jouant sur l'écoulement du temps propre à leur personne, par exemple en essayant de panifier une attaque quelques secondes avant celle effectuée par Extant, dont ils ont déjà la connaissance parce qu'elle se situe dans leur passé. En outre, Dan Jurgens met en scène les superhéros en utilisant que leur caractéristique principale : ils ne sont guère plus que des porteurs de costume qui se distinguent les uns des autres par leurs superpouvoirs et les motifs colorés de leur tenue. Le lecteur éprouve des difficultés à s'attacher à ces personnages définis par un unique trait de caractère : la gentillesse de Batgirl, l'allure martiale intimidante d'Hawkman, la volonté d'agir rapidement de Flash, ou encore la posture virile de Guy Gardner (mais c'est pour ça qu'on l'aime). En 1994, Dan Jurgens est déjà un créateur confirmé, ayant débuté sa carrière en 1983, ayant créé Booster Gold en 1986, et ayant mis en scène la mort de Superman. Dans l'histoire présente, le lecteur retrouve tout le savoir-faire professionnel de l'artiste : chaque personnage est représenté conformément à son apparence à ce moment de la continuité, facilement différenciable. Il met en scène l'utilisation de chaque superpouvoir avec le rentre-dedans et la pyrotechnie attendus, bien complémentés par la mise en couleurs vive et éclatante. Les finitions de Jerry Ordway (qui avait assisté George Perez sur Crisis on infinite Earths) sont impeccables. Le lecteur peut voir toute la culture graphique superhéros de Dan Jurgens dans sa capacité à utiliser les postures iconiques, à reprendre les mouvements caractéristiques de chaque personnage, à les disposer dans chaque case de manière à ce qu'ils soient tous distinguables, à mettre en œuvre les décharges d'énergie pour les rendre spectaculaires, à intégrer suffisamment de détails pour éviter la fadeur de dessins trop vides. Dans le même temps, la narration visuelle présente le même manque que la personnification des protagonistes : trop utilitaire et manquant de saveur personnelle. Au-delà de la mise en scène efficace et d'une grande lisibilité (ce qui n'est pas si évident que ça dans l'exercice du crossover qui rassemble de nombreux personnages), le lecteur ne découvre pas de case mémorable, ou de prise de vue à couper le souffle. Lors de sa parution, cette histoire revêtait une importance certaine, à la fois pour sa filiation annoncée avec Crisis on infinite Earths, à la fois pour son objectif d'offrir l'occasion de remédier à des incohérences de continuité dans des numéros zéro des séries mensuelles, et bien sûr dans l'interaction entre une multitude de personnages. À la lecture, il apparaît que Dan Jurgens s'acquitte honorablement de sa tâche, avec un professionnalisme indéniable. Mais le lecteur en ressort également avec l'impression que l'auteur est plus un bon artisan qu'un véritable artiste et qu'il n'arrive pas à insuffler le souffle épique attendu, que ce soit au travers d'environnements trop basiques, ou de personnages trop superficiels.
Batman - Aventures (Dessin animé)
Mauvaise pioche cette série. Je n’ai lu que le 1er intégral mais je vais m’arrêter là. C’est pas mauvais en soi, je suis un grand amateur du dessin animé diffusé dans les années 90, la présente série se veut d’ailleurs son prolongement sur papier. J’ai aimé que chaque histoires mettent un méchant à l’honneur, présenter en préambule avec une petite carte d’identité (détail sympa). Par contre, les récits développés sont vraiment moyens, tout va trop vite. Quelques traces d’humour sauvent un peu l’ensemble mais à moins de vraiment pas être regardant, le côté vide l’emporte. Le dessin et mise en page suivent malheureusement le même schéma. Finalement une fausse bonne idée, ce qui marche en épisode tv ne sera pas spécialement le cas en papier. L’univers est respecté mais le rendu apparait ici trop teenage. Le résultat m’a paru en dessous de Batman - Mad Love qui possède la même parenté mais plus fun et attrayant dans ses ingrédients.
Le Landais volant
Je suis vraiment désolé de mettre une mauvaise note à cette série d’un auteur dont j’ai aimé pas mal de scénarios originaux, et le dessin aux courbes bizarroïdes. Mais là, je me suis quand même pas mal ennuyé. Le dessin déjà, m’a moins plu. Certes on n’est pas dans un dessin réaliste, mais le style gros pif me plait moins chez cet auteur que quand il use d’un trait brinquebalant. Seule la colorisation m’a bien plus. Mais bon, je chipote à ce sujet, car ça reste très lisible, hein. Mais c’est l’histoire qui m’a laissé de côté. C’est amusant au départ, les textes ironiques, désabusés, un peu décalés, qui commentent les péripéties de notre Français « expatrié » (en Afrique la plupart du temps, à part une escapade finale au Québec) m’avaient laissé espérer une lecture plus plaisante qu’elle ne l’a finalement été. En fait, ça tourne rapidement en rond. Et la narration, qui mise avant tout sur des textes hors phylactères, commentant l’action, exprimant au style indirect les pensées du héros, Jean Dextre, m’ont de moins en moins intéressé. L’humour qui parsème ces aventures du pauvre ne suffisait pas à masquer les longueurs. Quatre tomes, c’est beaucoup trop long pour cette idée – avec en plus l’impression que Dumontheuil improvisait parfois. Bref, c’est une lecture décevante.
Carnac
Cela se vend possiblement bien à la boutique de souvenirs de Carnac mais c'est franchement dispensable. On nous raconte l'histoire des alignements de menhirs avec des ficelles scénaristiques pas très fines. Une femme de nos jours s'évanouit en touchant une pierre d'ambre et se retrouve téléportée dans la préhistoire au milieu d'un village. Des tensions se font jour entre les habitants, notamment 2 frères. On a vaguement quelques scènes montrant comment les menhirs sont mis en place et gravés et les rites funéraires de l'époque. Le dessin reste correct, dans la veine "mainstream" avec des couleurs flashy qui me plaisent peu.
Joe Golem - Détective de l'occulte
Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre. Il comprend les 5 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2015/2016, créés par Mike Mignola, coécrits par Mignola et Christopher Golden, dessinés et encrés par Patric Reynolds, avec une mise en couleurs de Dave Stewart. Il comprend deux histoires qui se suivent. Épisodes 1 à 3 The rat Catcher - En 1925, la Terre a tremblé et Manhattan s'est pour partie enfoncée dans l'eau. En 1955, Simon Church rentre le soir chez lui et il se met à étudier ses livres, comme à son habitude. La foudre frappe le coin de son immeuble, juste au-dessus de la pièce dans laquelle se trouve son bureau. Il remarque un changement imperceptible dans la statue de terre qui y est exposée. En septembre 1965, trois orphelins parcourent en barque les rues submergées qui sont devenues autant de canaux urbains. Ils repèrent un couple sur un pont et le plus agile d'entre eux grimpe, sectionne la bandoulière du sac de la dame, s'en empare et saute dans l'embarcation. En s'éloignant, l'un d'entre eux est happé par une créature issue des profondeurs. Pendant ce temps-là, Joe Golem s'est assoupi et il rêve d'un golem de pierre se déchaînant contre des sorcières au quinzième siècle, en Croatie. Lori Noonan, la maîtresse d'école, demande à Simon Church d'enquêter suite à a disparition de trois orphelins de sa classe. Épisodes 4 & 5 - The sunken dead - En octobre 1965, le pendule de Simon Church lui indique qu'il est en train de se passer quelque chose de pas catholique dans le quartier de Greenwich Village. Joe Golem étant parti se promener, il demande à sa cuisinière Martha où il se trouve. Il le récupère alors qu'il effectuait une balade en bateau avec Lori Noonan. Tous les deux, ils se dirigent vers l'habitation d'Argus Bostwick qui les reçoit de plus ou moins bonne grâce. Ils constatent rapidement qu'il a agrandi sa collection d'objets occultes, et qu'il a commencé un rituel aux conséquences fâcheuses. Mike Mignola est un créateur qui ne semble jamais connaître la panne d'inspiration, la peur de la page blanche. De temps à autre, en marge de l'univers partagé d'Hellboy et du BPRD déjà bien fourni, il lance une autre série, généralement avec un collaborateur, par exemple la série consacrée à Lord Baltimore. Joe Golem avait déjà eu droit à un roman, coécrit avec Christopher Golden : Joe Golem and the drowning city, initialement paru en octobre 1992. Reprenant le même modèle que pour Baltimore, Mignola donne donc une prolongation au roman, avec son coauteur. Il ne s'agit pas d'une suite à proprement parler puisqu'il n'est pas besoin d'avoir lu le roman pour apprécier ce tome. Aux dessins, le lecteur retrouve également l'artiste Ben Stenbeck qui a aussi illustré les cinq premiers tomes de la série Baltimore, ainsi que l'histoire Frankenstein Underground. Comme d'habitude dans les productions de Mike Mignola, Dave Stewart se charge de la mise en couleurs. En revanche les couvertures sont réalisées par Dave Palumbo. Ce dernier réalise des illustrations en peinture directe s'inscrivant dans la tradition des pulps (romans bon marché à sensation de la première moitié du vingtième siècle). Elles mettent en avant avec panache la virilité du héros, sa musculature, et une situation de danger, soit imminente, soit déjà physiquement advenue. Pour ces épisodes, Dave Stewart a choisi un parti pris chromatique affirmé. Il restreint sa palette au brun et à l'ocre, tirant parfois vers une teinte verdâtre, avec de rares effets de contraste avec une teinte orangée ou rougeâtre. Ce choix marque le récit d'une empreinte maussade, en cohérence avec la déliquescence de cette ville à moitié engloutie sous les flots. Il a aussi pour effet d'imprimer une sensation d'uniformité de surface à chaque séquence. Ben Stenbeck réalise des dessins s'inscrivant dans une veine descriptive. La séquence d'ouverture permet de voir le bateau qui dessert Brooklyn Heights, ainsi que New York vu du ciel. Ces épisodes contiennent de nombreuses autres vues des canaux de New York, pour un effet assez glauque et oppressant du fait du choix des couleurs plutôt sombres et oppressantes. Le lecteur peut promener son regard dans la pièce qui sert de bureau à Simon Church. Il peut se faire une idée de l'ameublement de la chambre de Joe. La séquence dans les pièces immergées (lors de la recherche du monstre sous-marin) donne une bonne idée de leur disposition les unes par rapport aux autres et de leur volumétrie. La bibliothèque d'Argus Bostwick impressionne par sa hauteur sous plafond, ses piliers et ses poutres de bois. Par contre la reconstitution du village croate au quinzième siècle fleure bon l'approximation d'un dessinateur qui n'a pas fait beaucoup de recherches de référence et qui s'en tient à des clichés sur les villages européens vaguement moyenâgeux. Ben Stenbeck a également eu la responsabilité de concevoir l'apparence des personnages. Joe Golem est donc un individu à la forte carrure avec une belle musculature, souvent en pardessus ou en tricot de corps, habillé à une mode qui rappelle plus les années 1940 que le début des années 1960. Simon Church a une vague allure de vieux monsieur aux cheveux blancs, avec des lunettes et une morphologie normale, sans musculature entretenue. Néanmoins son âge ne transparaît pas dans ses mouvements qui restent fluides comme ceux d'un jeune homme. Lori Noonan a également une silhouette normale, assez fine, avec également des tenues vestimentaires qui font plus datées que l'année 1965, certainement un effet de ralentissement sur les modes dû à l'effondrement partiel de la capitale. En passant d'une page à l'autre, le lecteur a parfois l'impression que le dessinateur éprouve des difficultés à garder une apparence cohérente pour les visages. Par exemple le volume et la forme de la coiffure de Lori Noonan subissent d'étranges variations que le seul effet de changement d'angle de vue ne suffit pas à expliquer. Le lecteur remarque également assez rapidement que Ben Stenbeck utilise l'encrage pour marquer les surfaces de petites griffures, ou pour apposer des aplats de noir aux contours irréguliers. Ces zones noires ne figurent pas l'ombre portée par une source lumineuse ou une autre, mais remplissent une fonction expressionniste, l'irrégularité de leur contour évoquant vaguement l'usure provoquée par un environnement agressif ou débilitant. Comme il est d'usage dans les comics, l'artiste s'affranchit de temps à autre de dessiner les arrière-plans, ce qui se remarque beaucoup du fait du choix de mise en couleurs assez uni opéré par Dave Stewart. Du coup le lecteur sort un peu de l'environnement où se déroule la scène, puisque finalement les obstacles et le relief n'ont pas de conséquences sur les mouvements des personnages. Certaines cases perdent ainsi beaucoup de leur intérêt visuel en n'apportant finalement pas grand-chose à la narration de l'histoire. Le lecteur plonge donc au cœur d'une situation déjà installée, Simon Church faisant effectuer des missions à Joe Golem. D'ailleurs Golem n'est pas son nom de famille qui n'est pas prononcé dans ces épisodes. Par contre le titre indique tout de suite au lecteur qu'elle est la nature de Joe. De ce fait, il n'éprouve pas beaucoup de curiosité pour ce personnage puisqu'il sait avant même de commencer sa lecture qu'il s'agit d'un être de terre animé par magie, avec une personnalité soit artificielle, soit très limitée. Par voie de conséquence, les séquences au quinzième siècle n'apportent pas grand-chose au récit, si ce n'est d'indiquer que Joe est troublé par ses remémorations qu'il interprète comme des cauchemars récurrents. Au bout de deux séquences dans le passé, le lecteur a compris le principe et ne voit pas ce qu'apportent les suivantes, peu denses en information. Il en découle que la construction du récit qui entrecoupe les deux enquêtes de Joe avec ces souvenirs apparaît artificielle et lourde, puisque le fil narratif dans le passé peine à capturer l'attention du lecteur (et puis les sorcières représentées par Stenbeck sont visuellement très fades). La séquence d'ouverture établit en une page la situation de New York comme ville ayant subi une catastrophe dont elle ne s'est pas relevée. Le lecteur porte son attention sur les enquêtes et les personnages. Ces derniers ne sont pas très développés, disposant d'un trait de caractère principal et unique. Il reste donc l'intrigue, soit deux enquêtes successives. La première est très classique et très linéaire avec une chasse au monstre aquatique. Le lecteur peut quand même reconnaître la patte de Mignola dans les observations de Joe sur les motivations très humaines dudit monstre. La deuxième commence de manière plus originale, mais par contre se déroule de manière encore plus linéaire, enfilant cliché après cliché. En refermant ce tome, le lecteur se dit que les collaborations entre Mike Mignola et Christopher Golden ne font pas ressortir les compétences des deux qui ont plutôt tendance à se neutraliser dans un récit fade, rendu plus insipide par des choix graphiques plus maniérés qu'inspirés.
Butcher Baker - Le Redresseur de torts
Un concentré de testostérone pour une histoire bourrin de gars qui se pêtent la gueule. Ce comics mélange le côté anarcho-trash d'un Lobo, la satyre des super-héros américains d'un Marshal Law et la violence, le cul et le politiquement incorrect de The Boys, le tout dans un graphisme foutraque mélangeant les styles façon street art avec une tendance récurrente à vouloir représenter de gros sexes flasques. Dans un monde très masculin, où les rares filles sont soit des putes, soit des vicieuses, soit de simples corps sans cervelle, le héros est une caricature de Captain America ou du Comédien de Watchmen, un super mâle bourrin drapé de la bannière étoilé partagé entre ses grosses envies sexuelles à assouvir et son gros truck qu'il conduit plein gaz. Missionné pour tuer tous les super-vilains dans la prison où il les a menés étant plus jeune, il rate son coup et laisse échapper les cinq plus dangereux qui n'ont plus comme objectif que de le tuer. S'engage une grosse course poursuite très musclée, bourrée d'explosions, de baston et de pas mal de torture aussi. Une sorte de gros défouloir pour l'auteur qui s'en donne à cœur joie tant au niveau de son histoire déjantée que de son graphisme. Ca aurait pu être drôle mais c'est juste confus et paradoxalement verbeux. Alors que certaines scènes s'étirent parfois en une longue succession de pages cinématographiques, les pénibles monologues intérieurs des personnages brisent le rythme de lecture, empêchant de savourer ni l'action ni une quelconque subtilité des textes. Ceux-ci sont lourdingues et ne font pas avancer une intrigue qui, malgré l'abondance de bagarres et de brutalité, se traine et ne raconte rien. C'est creux, pas drôle, trop bourrin, et difficilement lisible. Clairement pas ma came.
Padovaland
Cette BD me fait poser beaucoup de questions après lecture. J'ai lu les critiques, et j'ai bien attendu avant d'écrire mon avis parce que je ne suis toujours pas certain de ce que j'en pense. Est-ce que j'ai aimé ? Non. Est-ce que c'est une BD mauvaise ? Non. Alors quel est le problème ? Je dirais que cette BD ne me plait pas, et je ne suis pas certain du pourquoi. Déjà, je n'aime pas le dessin qui joue beaucoup sur un malaise dû à une laideur volontaire. Sauf que si je comprends l'idée et le résultat, je ne suis pas convaincu parce que la BD est assez moche (volontairement, ce n'est pas une remarque purement cosmétique) et que je n'ai pas envie de relire. Rien que le baiser en gros plan est tellement dérangeant que je n'ai pas envie de le revoir. D'autre part, il y a ce scénario : des jeunes gens qui ont tous des problèmes dans leurs vies. Et des sacrés problèmes, j'aurais envie d'envoyer la plupart consulter un spécialiste. Mais surtout, je les ai tous trouvé désagréable. Ils sont souvent égocentriques, méchants et menteurs, devenant de fait des gens détestables à mes yeux. Et donc, je n'ai pas envie de suivre leur vie. D'ailleurs le final avec un viol me reste clairement en travers de la gorge. Je trouve qu'il y en a déjà suffisamment comme ça dans le monde pour ne pas avoir envie d'en voir un le soir lorsque je lis chez moi. Ce n'est pas tant une volonté de ne pas voir la chose que de ne pas y être exposé, ce qui est différent selon moi. Là c'est brut, sans conséquences et sans morale. Je comprends l'idée, je n'approuve pas. J'ai du plus haut que je ne suis pas sur de ce que je pense de la BD, et c'est surtout parce que je ne suis pas sur de pourquoi je n'aime pas. Peut-être est illégitime de penser ainsi, mais cette jeunesse présentée ici, je ne la connais pas et je ne la croise pas. Du coup, je me demande d'où elle sort -et je répète, c'est sans doute purement personnel. D'autre part, je ne vois pas la critique du numérique ou de la vie par écran cité en résumé : il y a bien les écrans, mais assez peu présent et tout repose justement sur des dialogues en direct. On dirait plutôt que chacun vit dans un monde idéalisé et se heurte sans cesse à une réalité sordide. Mais je ne vois pas ces personnes lutter réellement contre les soucis, juste les accumuler. Il y a un léger mieux dans le final, qui me fait du coup me demander ce que l'auteur voulait vraiment dire, et paf, ce viol final. On reste dessus (ou presque) et je ne vois vraiment pas ce qu'il faut retenir de tout ça. Une BD qui dérange, sans doute, mais qui ne me plait pas. Et même après cette critique, j'aurais du mal à dire explicitement pourquoi. Mais je suis certain qu'elle n'est pas pour moi !
Billionaire Island
Quand Golden City rencontre Idiocracy. Freedom Unlimited est une île artificielle et mobile pour milliardaires tandis que le reste du monde se casse la gueule. Les riches se foutent de la gueule de la plèbe, c'est-à-dire les pouilleux qui ont moins d'un milliard de dollars et vivent en autarcie en attendant que la population humaine meurt dans sa propre bêtise. Ici tout est traité sur le ton de la dénonciation politique et du sarcasme à tendance loufoque. Sur le ton et au niveau graphique, ça rappelle un peu Transmetropolitan avec sa critique du monde moderne et de vers quoi il pourrait tendre de pire. Et le dessin est du même niveau, très maîtrisé techniquement, avec des visages entre réalisme et caricature, avec beaucoup de détails en arrière plan et une mise en scène un peu déjantée. Sauf que ce serait un Transmetropolitan très basique et bas de plafond. La critique est tellement outrée qu'elle en devient bête. Ça se fout d'un peu tout le monde, dans des thématiques très figées dans leur époque : on y sent la fin des années 2010, l'époque avant Covid et Ukraine, avec des réseaux sociaux et des dénonciations de cette époque, celle de Facebook et de Mark Zukerberg, des MAGA (malheureusement remis au goût du jour avec les élections américaines actuelles) et d'autres sujets qui donnent l'impression d'être déjà presque désuets. On est dans une ambiance entre le récit d'action SF et le délire à la MAD où tout est prétexte à la déconne et à la surenchère. Ca désamorce complètement la partie aventure de l'histoire tout en n'étant pas forcément drôle d'un autre côté. Oh oh, le gars qui avait trouvé la solution miracle de taxer les plus riches pour sauver la Terre entière se fait éjecter par le millardaire égoïste : trop bien vu, ça ose dénoncer... Mouairf... J'ai quand même rigolé deux ou trois fois sur quelques bonnes idées mais pour le reste je me suis assez ennuyé devant la platitude et le convenu de ce délire satyrique qui dénonce trop facilement.
Infinity Wars
Le drame du soufflé - Ce tome fait suite à Infinity Countdown qui contient les épisodes 1 à 5 de la minisérie, ainsi que Infinity Countdown Prime, Infinity Countdown Adam Warlock, et le Free Comic Book Day 2018 Guardians of the Galaxy. Ce tome-ci contient lnfinity Wars Prime 1 et Infinity Wars 1 à 6. initialement parus en 2018, écrits par Gerry Duggan. Les 6 épisodes de la minisérie et l'épisode Prime ont été dessinés et encrés par Mike Deodato, avec une mise en couleurs de Frank Martin. Dans la Cité de l'Omnipotence, Loki est en train de consulter des tomes anciens dans la Grande Librairie. Il ne comprend pas pourquoi il n'est jamais le héros de ces histoires. Il soupçonne l'agissement d'un individu dans l'ombre qui oriente sa destinée. Il se fait rappeler à l'ordre par Flowa, la déesse bibliothécaire qui lui indique que l'établissement va fermer. Suite à son insistance, elle lui explique la raison pour laquelle Freyja a ordonné la construction de la Bibliothèque dans laquelle ont été placées des copies des ouvrages d'Asgard. Flowa a retrouvé l'ouvrage susceptible d'intéresser Loki sur sa destinée, mais des pages ont été arrachées. Elle lui indique qu'elle se souvient que le récit évoquait la Carrière des Dieux, situé aux confins de l'espace, gardée par des sorcières. Loki décide de s'y rendre et Flowa accepte de l'accompagner. Pendant ce temps-là, Adam Warlock arrive chez Stephen Strange et lui demande s'il a la pierre du temps. Il parle également de la corruption du monde de la pierre de l'âme. Ils se rendent dans ledit monde et se heurtent à un énorme monstre appelé Devondra. Sur la planète Chitauri Prime (le siège du pouvoir de Thanos), un individu appelé Requiem apparaît, transperce le torse de Thanos de son épée, puis le décapite. Dans une taverne, Gamora aborde Peter Quill et lui demande son aide pour utiliser la pierre de puissance afin de pénétrer dans le monde de la pierre de l'âme, et d'y récupérer le morceau d'elle qui s'y trouve. Peter Quill ne donne pas suite à sa demande. Gamora l'embrasse à pleine bouche et s'en va. Groot et Rocket Raccoon arrivent et s'enquièrent de ce qui vient de se passer ; Peter Quill leur rappelle que l'équipe des Gardiens de la Galaxie est dissoute et n'existe plus. Sur Terre, Drax, Iron Man et Adam Warlock se rendent à un rendez-vous fixé par Doctor Strange au château du Belvédère à Central Park. Sur place se réunissent Doctor Strange, Captain Marvel (Carol Danvers), Groot, Iron Man (Tony Stark), Peter Quill, Drax, Adam Warlock, Turk Barrett, Spot (Johnny Ohnn), Typhoid Mary (Mary Walker), Bullseye (Lester), Sandman (Flint Marko), Tombstone (Lonnie Lincoln), et en protection Black Widow (Natasha Romanoff). La question est de savoir comment s'assurer que les pierres de l'infini ne pourront plus être rassemblées par un individu unique. Au cours de la discussion, une image surgit montrant Thanos mort, décapité. Pendant ce temps-là, Loki et Flowa poursuivent leur voyage vers la Carrière des Dieux. En s'embarquant dans cette histoire, le lecteur sait qu'il s'agit d'une forme de récit très contraint, un crossover dont l'éditeur Marvel entend bien tirer le maximum de bénéfices, à commencer par Infinity Countdown, un prologue de plus de 200 pages, sans oublier les tomes satellites comme Infinity Warps: Two-in-One,Infinity Countdown: Darkhawk, ou encore Infinity Countdown Companion. Il sait aussi qu'il s'agit de l'aboutissement de plusieurs intrigues secondaires patiemment développées par Gerry Duggan dans la série Gardians of the Galaxy. La tentation est donc forte de connaître leur aboutissement. En outre, ce tome est bien conçu, pouvant être lu sans lire les autres, mêmes le prologue. Il commence par un trombinoscope des principaux personnages (au nombre de 19), une page de présentation des pierres de l'infini et de leurs interactions, indiquant également qui en est porteur. Le lecteur se lance à la découverte des nouvelles guerres de l'infini au titre évoquant celle de 1992 Inifinity War par Jim Starlin & Ron Lim, elle-même faisant référence au Gant de l'infini (1991) par Starlin, George Perez, Lim. Très rapidement, le lecteur constate que Gerry Duggan ne se sent pas prisonnier de l'original de Starlin et qu'il dispose des coudées franches pour développer une intrigue originale. Le lecteur ne doit donc pas s'attendre à trouver Magus, ou la déesse. En prime, le scénariste commence fort, que ce soit par l'inclusion de Loki dont le lecteur se demande bien ce qu'il vient faire là, ou par l'assassinat de Thanos, assez bien agencé pour qu'il puisse y croire au moins le temps du récit. La réunion des porteurs de pierre de l'infini se déroule d'une manière qui défie les attentes (sans parler de la présence de Turk Barrett), et le mystère du monstre dans le monde de la pierre de l'âme est intriguant. En plus, Duggan évite d'étirer le suspense quant à l'identité de Requiem, ce qui permet de passer rapidement à la suite. Le lecteur apprécie également que les épisodes essentiels du récit (les 6 de la minisérie + le prologue Prime) soient dessinés par un seul et unique artiste. Mike Deodato est plutôt en bonne forme au début. Il est visible qu'il s'économise sur les décors, passé la première moitié du récit. Dès l'épisode prologue Prime, le lecteur retrouve le tic de mise en page de l'artiste qui consiste à découper un dessin de la taille des 2 tiers de la page, un dessin en pleine page, ou même en double page, en des rectangles plus petits en superposant une grille à base de lignes blanches qui séparent artificiellement un même dessin. Le systématisme de ce dispositif visuel peut agacer, mais parfois Deodato l'utilise de manière plus pertinente pour substituer une partie du dessin (un rectangle) par un autre dessin qui se trouve ainsi en insertion, créant un rapprochement spatial, ou une concomitance temporelle intéressant. L'artiste dessine toujours de manière descriptive et réaliste, gérant avec une facilité épatante la multitude de personnages, et chacune des particularités de leur costume. Il fait l'effort de représenter des silhouettes différentes pour les personnages féminins, de la morphologie adolescente de Miss Marvel, à la silhouette plus accorte d'Emma Frost, en passant par le corps peu sexué de Gamora. De la même manière, les personnages masculins n'ont pas tous la même corpulence, depuis la silhouette massive de Thanos, à celle plus élancée de Loki. Mike Deodato est un dessinateur confirmé de superhéros, maniant les conventions visuelles associées avec dextérité. Il sait concevoir une mise en scène de telle sorte que les individus ne se marchent pas sur les pieds même quand ils sont nombreux. Il maîtrise les postures en position de combats physiques, que ce soit les attaques à mains nues, ou les démonstrations de superpouvoir, avec une mise en couleurs complémentaires et enrichissantes de Frank Martin. Au fil des séquences, certaines images restent en tête par leur puissance spectaculaire, ou leur côté incongru : Loki en train de se faire mettre à la porte de la bibliothèque, la première apparition de Devondra (avec des relents de Cthulhu), le dessin en pleine page de la décapitation de Thanos, l'arrivée de Requiem sur Terre avec la tête de Thanos à la main, l'allure finalement très réussie des amalgames de 2 superhéros, Loki en passager sur une grosse cylindrée conduite par Emma Frost, Adam Warlock faisant léviter les 6 pierres au-dessus sa paume, etc. Finalement le lecteur se laisse entraîner dans cette histoire sans prétention philosophique ou psychologique, mais avec une intrigue de grande ampleur et des surprises régulières. Dans la première moitié du récit, Gerry Duggan emmène le lecteur dans une intrigue originale, refusant la redite avec les sagas originelles de Jim Starlin, impliquant de nombreux personnages, mais sans perdre le lecteur, jouant avec ses attentes, pour mieux le surprendre. Le lecteur oublie rapidement la participation incongrue de Turk Barrett ou l'apparition éclair de Spider-Man en tant qu'obligation éditoriale. Même l'idée a priori idiote de fusionner deux personnages en 1 (par exemple Captain America avec Doctor Strange) ne semble pas si incongrue, pas si opportuniste (pour vendre des miniséries associées) que ça. Mais à partir de l'épisode 4, Gerry Duggan semble changer de registre de narration pour revenir à un récit de superhéros beaucoup plus classique, où les personnages se lancent dans une bataille après l'autre, pour triompher par la force et la volonté, supplantant ainsi la dimension mythologique du récit pour revenir à une succession de combats basiques. Le lecteur attend que ça se passe, en profitant des effets pyrotechniques de Deodato & Martin, mais le récit ne redécolle plus. L'histoire principale s'achemine ainsi vers sa conclusion sans retrouver son souffle épique. La première moitié de la minisérie principale montre que Gerry Duggan sait utiliser à bon escient les ressources de l'univers partagé Marvel, et que Mike Deodato donne l'impression de facilité à mettre en scène autant de personnages. Dans la deuxième moitié, le soufflé retombe mollement, dans un registre superhéros manquant d'ampleur et d'ambition.
Dans la nuit du champ
Je mets une étoile de plus que Spooky, en raison du dessin, qui est plutôt joli, agréable à l’œil. Avare de détails, avec des décors un peu escamotés, il est globalement plaisant. Plus clair que le récit lui-même en tout cas ! Car pour cela je rejoins Spooky. La narration est obscure, très verbeuse : c’est franchement indigeste, et rapidement j’ai perdu le fil de « l’histoire ». Traiter les camps d’extermination et la shoah de façon détournée, métaphorique, pourquoi pas ? Mais là le texte trop abondant (et les premières pages sont les pires à ce propos !), et un récit peu clair m’ont égaré. Les cases et textes de la dernière page sont, eux, bien plus clairs et précis, cela donne les clés, recentre le récit, avec ce train qui arrive à Auschwitz, avec la fumée des crématoires en arrière-plan. Certes. Mais il est trop tard.