Un adolescent contre des dinosaures
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Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre, mais vraisemblablement appelée à se dérouler dans l'univers partagé Valiant par la suite. Il contient les épisodes 1 à 4, initialement parus en 2016, écrits par B. Clay Moore. Chaque épisode comporte une partie se déroulant dans le passé dessinée et encrée par Lewis Larosa, et une partie se déroulant au temps présent dessinées et encrée par Clayton Henry. La mise en couleurs a été réalisée par Brian Reber, avec l'aide d'Andrew Dallhouse pour l'épisode 3. Les couvertures ont été réalisées par Lewis Larosa. Ce tome se termine avec les couvertures variantes réalisées par Jared Fletcher, Robert Gill, Renato Guedes, Felipe Massafera, Marguerite Sauvage et Bill Sienkiewicz.
Quelque part dans une jungle non identifiée, un garçon habillé de haillons guette une douzaine d'œufs disposés en cercle. Il est installé dans un arbre, et teste le piquant d'une griffe dont il se sert comme une arme. Un vélociraptor arrive dans la clairière, pour vérifier l'état de sa nidation. Sans hésitation, l'adolescent se jette sur lui et il s'en suit un combat acharné entre dinosaure et Kevin Sauvage junior. le garçon finit par triompher, non sans mal, et il récupère les œufs qu'il met dans un grand sac. Il rejoint alors sa base : une hutte de branchage sur une plage, défendue par des pieux effilés. Il pose le sac d'œufs parmi ses affaires et il joue avec un briquet à essence.
Une douzaine d'années auparavant, Kevin Sauvage (un joueur de football star) et sa femme Ronnie Sauvage (une ex-mannequin) effectuaient un voyage dans leur jet privé, avec leur pilote. Monsieur sirotait un whisky, pendant que madame vérifiait les comptes et que leur bébé dormait dans son berceau. Leur objectif était de relancer la carrière du footballeur aux États-Unis. En plein milieu du vol, leur avion fut frappé par un phénomène électromagnétique. Quand ils reprirent connaissance, leur avion était doucement en train de prendre l'eau et le pilote était mort dans le crash. Ils n'eurent que le temps de prendre leur bébé de de rallier la plage assez proche. Une fois allongée sur la plage, Ronnie s'occupa de son bébé et s'endormit rapidement. Pendant ce temps-là, Kevin alla récupérer ce qu'il pouvait à bord de l'épave de leur jet, avant qu'il ne s'abime au fond des eaux.
Depuis le redémarrage de leur univers partagé en 2012, les responsables éditoriaux Valiant ont privilégié la publication de comics avec des personnages déjà existants, datant de leur vague de publications initiale en 1989, comme X-O Manowar, Harbinger, Shadowman, Eternal Warrior, Bloodshot ou encore Archer & Armstrong. Ce n'est qu'exceptionnellement que Valiant a publié des nouveaux personnages, par exemple Divinity de Matt Kindt & Trevor Hairsine, ou Antonius Axia dans Britannia de Peter Milligan & Juan Jose Ryp. L'apparition d'un nouveau personnage constitue un petit événement pour cet éditeur. le lecteur découvre Savage avec la couverture de Lewis Larosa qui montre un jeune adolescent venant de triompher d'un vélociraptor avec une arme constituée d'une griffe d'un autre vélociraptor. Ce comics semble promettre des aventures opposant un être humain à des dinosaures.
C'est effectivement ce que découvre le lecteur dans les premières pages, et même la séquence qui conduit à la posture sur la couverture. Lewis Larosa est en très grande forme, avec des planches magnifiques, rendant bien compte de la sauvagerie du combat, des mouvements brusques, par le biais de cases de travers se percutant les unes les autres. Il insuffle une vie impressionnante dans ce vélociraptor et les quelques autres dinosaures qu'il est amené à dessiner par la suite. Il s'applique pour les représenter avec soin, conformément à l'état des connaissances actuelles, en évitant de projeter un quelconque anthropomorphisme sur ces prédateurs. L'épisode 2 offre le spectacle d'autres races de dinosaures représentées avec le même soin, ainsi qu'un autre combat physique, cette fois-ci contre un être humain. La séquence dans l'épisode 3 est tout aussi intense, même si elle ne comporte pas de dinosaure. Lewis Larosa bénéficie d'une mise en couleurs riche, évoquant de la peinture directe, venant habiller chaque surface et ajoutant des informations visuelles en arrière-plan pour donner plus de consistance à la jungle ou à l'océan.
Le lecteur se délecte de ces planches et regrettent qu'elles se lisent aussi vite du fait de l'absence de tout texte. Larosa sait imprimer une vitesse de lecture élevée, en cohérence avec la nature de ces séquences. Par comparaison, les dessins de Clayton Henry apparaissent plus fades et plus sages. Il utilise un trait fin et très propre sur lui, pour détourer les surfaces. Ses images se situent dans un registre plus descriptif, manquant de texture. Pourtant en y prêtant plus d'attention le lecteur constate que ses pages comportent autant d'informations visuelles que celles de Lewis Larosa, mais plus dans les détails des accessoires, des objets et des décors, que dans les textures et les sensations. le lecteur peut ainsi regarder les caractéristiques du jet privé, les tenues vestimentaires, les différentes plantes, les accessoires dont disposent les rescapés, etc. Malgré tout, les dinosaures perdent de leur superbe, deviennent moins impressionnants, et le petit Kevin impressionne moins, ramené à une apparence plus ordinaire.
Brian Reber revient à une mise en couleurs plus traditionnelle pour les planches de Clayton Henry, avec des aplats de couleurs, et des nuances pour augmenter sans exagérer le relief des surfaces délimitées par les traits de contour, et pour rendre compte de la luminosité de chaque séquence. En fonction des pages, Henry est amené à utiliser des traits de contours fins, ou très fins dont la délicatesse n'est pas très adaptée pour rendre compte de la brutalité des affrontements, de la sauvagerie de Savage, ou encore de la férocité des dinosaures. Or il se trouve que chaque épisode est dessiné aux trois quarts par Clayton Henry. D'un autre côté, il met en œuvre une direction d'acteurs bien pensée qui permet de croire à la situation des personnages et à leur implication. Ainsi le lecteur éprouve l'impression que Ronnie et Kevin junior se cachent réellement dans la jungle, se sentent en sécurité dans leur cabane sur la plage, prennent toutes les précautions nécessaires pour éviter d'avoir à se battre contre les dinosaures, et autres habitants de cette île.
Dès le premier épisode, le lecteur se rend compte que ce comics se lit deux fois plus vite qu'un comics de superhéros classique de même pagination. Il y a donc deux fils narratifs qui viennent se compléter. le second se déroule dans le passé et permet de comprendre d'où vient ce Savage. B. Clay Moore se montre un peu taquin vis-à-vis du footballeur vedette, déjà un peu sur le retour. Il montre sa faiblesse vis-à-vis de la boisson alcoolisée, mais aussi son courage. le portrait comporte quelques nuances qui évite la caricature facile. de la même manière, Ronnie dépasse les clichés inhérents à la femme de footballeur. Elle dispose d'un solide sens des affaires, mais aussi d'un véritable courage pour pouvoir subsister dans cet environnement inhospitalier. Malgré tout cette partie de l'histoire suit un chemin tout tracé, sans aucune originalité, jusqu'à ce que finalement Kevin Junior devienne le jeune homme que le lecteur découvre au début du récit.
Malgré les prouesses visuelles de Lewis Larosa et Brian Reber, le lecteur constate aussi que le premier fil narratif est très mince. Savage se bat contre un vélociraptor puis contre d'autres ennemis jusqu'à atteindre son objectif. Là encore l'intrigue s'avère très linéaire, même si elle est bien exécutée. Il est vrai que le scénariste ne dispose que de 4 épisodes pour convaincre le lecteur, mais d'un autre côté son intrigue se révèle assez décompressée, pour faire la part belle aux pages de Larosa. du coup, le lecteur n'a pas grand-chose à se mettre sous la dent. La dernière page de ce tome l'amène à penser qu'il s'agit plus d'un prologue que d'un chapitre consistant. Avec le recul, il se rend compte que l'objectif de B. Clay Moore était donc d'établir l'existence d'un personnage se battant contre des dinosaures, dont les droits de propriété intellectuelle sont conservés par l'éditeur. Cela fait penser à une autre série que Valiant avait publié dans les années 1990 : Turok, dinosaur hunter. Ce personnage n'appartenait pas à Valiant mais à un autre éditeur. du coup, Savage apparaît comme une déclinaison assez proche de Turok pour que Valiant puisse à nouveau disposer d'un personnage semblable.
Ce premier tome consacré à un nouveau personnage Valiant se lit très rapidement, avec un certain plaisir, mais aussi une frustration certaine du fait d'une intrigue convenue et peu substantielle. C'est sympathique comme introduction, mais insuffisant comme histoire.
Altan est un auteur original (remarque valable pour son dessin et pour la narration de ses récits), avec lequel j’ai toujours du mal. J’ai lu pas mal de ses œuvres, mais il n’y a guère que sur son Colombo que j’étais ressorti sur une note positive. Et avec « Ada », je suis encore partagé.
Le dessin est reconnaissable entre mille. Quelques airs de Tardi dans ce Noir et Blanc (surtout pour le visage de face d’Ada). Mais je n’aime vraiment pas ses visages, et surtout les nez qu’il impose à ses personnages. Mais bon, ça c’est affaire de goût, car son trait est lisible.
L’intrigue part sur des bases plutôt classiques – une jeune pensionnaire d’un collège huppé reçoit un bel héritage d’un oncle oublié, qui lui fait promettre avant de mourir de retrouver son fils perdu, cohéritier (alors que le seul fils de l’oncle qu’Ada connaissait s’assoie sur l’héritage, avec la frustration et l’envie d’inverser les choses que l’on devine). L’héritier recherché étant en Afrique, voilà Ada partie pour l’aventure !
Une trame classique donc, mais totalement pervertie par Altan, que ce soit dans son déroulé, les dialogues, et tous les commentaires en off placés sous les cases (il fait ça dans la plupart de ses séries), qui accentuent le côté décalé du récit.
Une sorte de parodie de roman d’aventure, en Afrique puis en Asie, avec un humour spécial, et quelques petites pointes d’érotisme.
Note réelle 2,5/5.
Pas assez loufoque ni absurde
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Ce tome comprend 1 récit complet qui ne nécessitent pas de connaissance particulière du personnage de Batman. Il est initialement paru sous la forme de deux épisodes de 44 pages, en 2007, écrits, dessinés et encrés par Sam Kieth, mis en couleurs par Alex Sinclair.
De manière imprévu, une voix se fait entendre dans la tête de Batman, le prévenant qu'il va être transporté dans une base spatiale située à 7,2 années-lumière de la Terre pour accomplir une mystérieuse mission. Il y est accueilli par une femme appelée Sophie qui lui explique qu'il a sûrement dû être contacté par Astrella pour endiguer une épidémie qui ne touche que les femmes, les transformant en véritable furie. Alors qu'ils arrivent à proximité du cadavre d'une victime, Lobo se matérialise devant eux clamant son innocence quant au cadavre. Batman n'en croit pas un mot et ils commencent à se battre entre eux, Sophie s'éloignant, éprouvant des chaleurs, finissant par se mettre dans une tenue plus détendue, s'emparant d'une arme à feu et tirant sur tout ce qui bouge.
Au moins, Sam Kieth l'annonce dès le début : ce récit relève de la farce, que ce soit avec le personnage outré de Lobo, ou avec ce mystérieux virus qui transforme les femmes en foldingue (Kieth ne pousse pas le bouchon jusqu'à évoquer un symptôme prémenstruel, mais on n'en est pas loin), évoquant vaguement une forme de libération par rapport à leur condition. Pour ce récit, Sam Kieth a construit une intrigue plus linéaire et plus directe, l'infection passant par plusieurs femmes successives (dont une énorme surprise pour l'avant dernière), les transformant en de dangereuses tueuses l'une après l'autre, suivie par le duo Batman & Lobo. le lecteur se rend compte que l'auteur est plus intéressé par Batman que par Lobo qui ne sert que de faire-valoir comique. Il continue à réaliser des dessins plus expressionnistes que descriptifs, avec une exagération parodique bien adaptée à un individu qui s'habille en chauve-souris et un autre qui est l'incarnation vivante du machisme dans tous ses excès. En plus, il bénéficie d'une mise en couleurs un peu vive, réalisée par Alex Sinclair qui trouve le bon équilibre entre préserver les ténèbres souhaitées par Kieth, habiller des fonds de case de plus en plus vides, et apporter un peu de vie par le biais de couleurs plus vives. le lecteur se laisse emporter par une aventure décomplexée, vaguement féministe, vaguement provocatrice, avec une fin aussi dramatique que grotesque.
Le lecteur ne se trompe pas sur les intentions de l'auteur, raconter une farce évoquant la condition féminine avec une touche de dérision. Les dessins restent dans une exagération présente dans chaque case, pour des visuels impressionnants et totalement sarcastiques. L'intrigue n'est pas épaisse, et il est impossible de croire aux personnages ne serait-ce qu'un seul instant. Finalement Sam Kieth aurait dû se lâcher encore plus dans l'absurde pour pouvoir rivaliser avec d'autres histoires de Lobo, comme celles d'Alan Grant, Keith Giffen et Simon Bisley dans La Balade de Lobo.
Une nouvelle série pour ados, aux relents de technothriller (voire de fantastique ?), écrite par Erik L'Homme auteur de romans encensés comme Le Livre des Etoiles.
Il nous propose donc une sorte de traque d'adolescents ayant des caractéristiques physiques particulières, dont l'intérêt n'est qu'effleuré dans le premier tome, qui oscille entre un ado qui se planque chez sa copine et l'enquête d'un flic acharné. Rien de très original, si ce n'est le point commun des ados enlevés, car le scénario manque vraiment de palpitant malgré la menace constante de ces deux gars louches en chemises hawaïennes. Je trouve également que les personnages manquent d'épaisseur.
ce manque d'épaisseur se voit également dans le dessin. Marcello de Martino n'est pourtant pas un débutant, mais j'ai trouvé qu'il y avait de nombreux soucis anatomiques, des intégrations pas très naturelles dans les décors, une mise en scène un brin foutraque. Et une mise en couleurs informatique sans grande inventivité.
C'est mince pour accrocher un quelconque intérêt...
Voila une BD qui m'est passé complètement à côté. Je ne suis pas un méga-fan du Japon, c'est un pays intéressant mais comme tant d'autres. Donc la tendance à décortiquer chaque aspect de ce pays m'agace souvent, et ça a été le cas ici.
C'est une BD très belle dans un style rappelant des estampes japonaises et qui parle de ces femmes chanteuses au Shamisen, un instrument japonais. C'est joli et plein de bon sentiments, inspirés par le folklore japonais. Voila, si ça vous intéresse, foncez !
Personnellement ça m'a ennuyé d'un bout à l'autre. Parce que c'est pas très intéressant, le mélange avec le folklore me donne l'impression que la réalité ne suffit pas, la fin de l'histoire est très rapide et surtout j'ai été bien plus intéressé par les notes finales sur les vraies personnages historiques. Parce qu'il m'a manqué dans cette BD un coeur plus consistant, quelque chose que je retienne de l'ensemble. Là, en l'état, j'ai vu de jolies images et puis j'ai appris qu'il y avait des musiciennes errantes au Japon. Je ne dirais pas que j'en ressors très chamboulé.
Donc en soi, une BD qui intéressera des gens sans aucun doute, qui saura en contenter plus d'un, notamment les fans du Japon, mais qui m'a prodigieusement indifféré.
Conte pour les enfants
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Ce tome contient un récit complet indépendant de tout autre. Il reprend les cinq épisodes de la minisérie, initialement publiés de 2005 à 2007 par Boom Studios, écrits par John-Marc DeMatteis, dessinés et encrés par Mike Ploog, et mis en couleurs par Nick Bell & Sumi Pack.
Dans une ville de moyenne importance aux États-Unis, un cocon apparaît au milieu d'un tronc d'arbre situé dans le Park Wilde une griffe commence à déchirer l'enveloppe dudit cocon dans un appartement d'un immeuble non loin du parc, le père de la famille DiMarco est en train de faire la vaisselle, pendant que la mère finit de débarrasser. Cody (le fils aîné, à peine adolescent) annonce qu'il va faire un tour au parc. Sa jeune sœur Katherine Mary se moque de lui en indiquant qu'il va rejoindre son copain Paul Brightfield. La mère accepte en lui demandant d'être prudent. Alors qu'il sort, la voix du narrateur donne des renseignements sur Paul Brightfield, supputant sa potentielle dangerosité, sa véritable nature, sur le fait que la mère de Cody ne lui fait pas confiance. En se rendant au parc, Cody DiMarco passe devant sa copine Alana et son petit frère Nathaniel. Il décline son invitation à venir regarder un film chez eux, préférant a compagnie de son copain Paul, au grand dam d'Alana qui est son ami d'enfance.
Cody Dimarco arrive au parc et retrouve son ami Paul Brightfield, pendant qu'Alana pense à Cody et à la manière dont il s'est éloigné d'elle. En suivant Paul, Cody passe au travers d'une mince couche de terre, et se retrouve dans l'antre souterrain de son ami. Il s'installe alors confortablement pendant que Paul (ayant pris l'apparence d'un gros mille-pattes multicolore) lui raconte une histoire. Dans le même temps, le narrateur confirme que Paul Brightfield n'est pas un être humain, mais un mirage 3D composé de rêves errants et de poussière d'étoile. Il évoque également la manière dont Paul est apparu sous différentes formes au fil des années, pour approcher progressivement Cody de plus en plus près, comment cette entité dépourvue de forme a fini par prendre celle de Paul Brightfield. Puis le narrateur laisse la place au Livre qui raconte comment les créatures magiques ont peu à peu disparu de la Terre, jusqu'à qu'à ce qu'il n'en reste plus que 2 : Paul et son Miroir, changeant de forme au gré des siècles et de leur fantaisie. Paul finit par proposer à Cody de sortir et de marcher un peu dans la pénombre du soir. La créature a fini de déchirer son cocon, elle est libre de se promener dans le parc à sa guise.
John-Marc DeMatteis est un scénariste de comics à la carrière impressionnante, aussi bien capable d'écrire des histoires de superhéros inoubliables (par exemple pour Spider-Man: La Dernière Chasse de Kraven) que des récits personnels très ambitieux comme Moonshadow avec Jon J. Muth ou Blood avec Kent Williams. Mike Ploog est un dessinateur de comics, et il a déjà collaboré avec JM DeMatteis sur la série de livres Abadazad. En regardant la couverture, et en découvrant la nature des protagonistes, le lecteur comprend rapidement que les deux créateurs ont réalisé un ouvrage tout public, plus particulièrement à destination d'un public relativement jeune. Il constate également que chacun des cinq épisodes est assez copieux, puisque le récit comprend une trentaine de pages à chaque numéro. Il remarque rapidement que la voix du narrateur intervient de manière très régulière dans des cartouches de texte assez nombreux, et même complétés par d'autres remarques formulées par une autre voix, dans des cartouches avec un fond d'une couleur différente et complétés à quelques reprises par des remarques dans une police plus petite. Bien évidemment, ces cartouches de texte ont pour conséquence immédiate de rendre la lecture plus lente. Néanmoins, ils apportent des informations supplémentaires, et même de temps à autre, le texte reprend un élément déjà montré dans le dessin qu'il accompagne. Par le biais de la voix du narrateur, JM DeMatteis développe l'état d'esprit d'un personnage ou d'un autre, explicitant son émotion ou ce qui le met dans un tel état.
Le scénariste se sert également de cette voix supplémentaire pour s'adresser directement au lecteur, souvent de façon facétieuse. En particulier, il change sciemment de temps dans un même paragraphe passant du passé au présent assez régulièrement. Il ne manque pas de le faire remarquer au lecteur et de mettre ça sur le compte d'une perception du temps différente de celle d'un être humain. Même si DeMatteis donne l'impression de jouer sur ce changement intempestif de temps qui défie les règles de la concordance des temps, il s'avère qu'il y a bel et bien une explication qui est intimement liée au caractère intemporel ou en tout cas pérenne d'un récit. Il joue également sur l'identité non dévoilée de ce narrateur, ainsi que sur celle de celui qui se permet de faire des remarques en coin. Malgré tout, les propos de cette voix supplémentaire restent dans un registre plus explicatif que réflexif. Il faut attendre le dernier épisode pour qu'elle établisse des constats plus introspectifs sur la condition humaine, des motivations cachées, ou des convictions qui défient les lieux communs.
Dans sa forme, ce récit reprend les étapes du voyage du héros avec des compagnons en qui il peut avoir confiance. Effectivement la narration reste au niveau de Cody DiMarco, de son amitié indéfectible pour Paul Brightfield et de la confiance qu'il lui accorde, de son amitié pour Alana (mais qui passe après celle pour Paul) et de sa relation affective pour sa petite sœur. Pour autant, Alana, Katherine Mary et Nathaniel ne disposent pas d'une personnalité développée. Du fait de sa véritable nature, Paul Brightfield relève plus du concept que de l'individu. le lecteur découvre donc chaque scène par les yeux de Cody qui se laisse le plus souvent guider par les indications de Paul ou des créatures adultes qu'il rencontre. L'intrigue amène Cody et la petite troupe à interagir avec des créatures hautes en couleurs, soit bienveillantes, soit malveillantes, révélant éventuellement par la suite une trahison ou un changement d'allégeance. Un lecteur adulte éprouve de fortes difficultés pour se projeter dans un personnage aussi générique, ou pour s'intéresser à des rebondissements survenant au gré de la fantaisie du scénariste, sans beaucoup d'impact émotionnel.
Dans l'introduction, John-Marc DeMatteis raconte la genèse un peu compliquée du récit, ayant commencé lorsqu'il racontait des histoires à son jeune fils. Il explique le plaisir qu'il a eu à collaborer avec Mike Ploog dont les dessins ne sont pas pollués par les tics graphiques spécifiques aux récits de superhéros. Effectivement, Mike Ploog se tient à l'écart des individus bodybuildés, et met en scène des enfants qui ressemblent à des enfants, avec une morphologie d'enfant (différenciée suivant qu'il a plus ou moins de 10 ans), des expressions du visage enfantines, des vêtements de jeune, etc. Il réalise des traits de contours un peu lâches dans les arrondis ce qui donne plus de souplesse aux silhouettes de Cody, KM, Alana, Nathaniel et Paul. Il agrandit un peu leurs yeux pour faire passer plus d'émotion, essentiellement lors d'un étonnement ou sous l'effet de la peur. le lecteur se rend compte que Mike Ploog est adepte de la bouche ouverte pour ses personnages avec une régularité qui dépasse les 50%, reflétant un manque de nuances dans les expressions. En revanche les postures des personnages sont beaucoup plus naturelles et expressives. Il se montre très convaincant avec les différentes créatures merveilleuses et surnaturelles. L'artiste sait croquer des bestioles et une sorcière aux formes inventives, avec une texture presque palpable pour leur peau ou leur parure. le lecteur peut voir que ces créatures comprennent une discrète touche d'exagération qui les rend tout public, sans agressivité méchante.
Au départ, Mike Ploog doit représenter un environnement normal de petite ville. Il intègre suffisamment de détails pour donner un cachet spécifique à la rue et au parc. Puis l'action du récit se déroule dans un monde fantastique, et il s'amuse beaucoup avec les arbres torturés, la végétation à demi vivante, les flammes qui dansent. Il ne crée pas vraiment un environnement consistant et pensé à l'échelle de la localisation spatiale relative des différents endroits, mais les éléments de décor sont consistants d'un endroit à l'autre. À plusieurs reprises, il doit également changer de forme narrative, en passant d'une bande dessinée traditionnelle, à des illustrations pour les cellules de texte, voire même des fac-similés des pages d'un livre. le lecteur apprécie la fluidité de la narration visuelle pour ces trois formes, ainsi que les mises en page changeantes.
Au fur et à mesure de son avancée, le lecteur se rend compte que JM DeMatteis a souhaité rendre son ouvrage accessible au plus grand nombre et en particulier aux enfants. le lecteur peut parfois ne pas se sentir concerné par la narration qui en découle, avec une trame assez simpliste. Il se rattrape un peu avec les cellules de texte et les remarques du narrateur, mais là encore ses observations restent souvent dans le constat, sans beaucoup de réflexion. Même la remarque sur la nature malléable et relative du temps (entre le passé, le présent et le futur) ressemble plus à une blague récurrente, qu'à une réflexion sur sa nature. Malgré tout, il apparaît que cette remarque finit par prendre un autre sens quand on l'applique à l'intemporalité d'un récit. En outre, le lecteur se rend compte que la stratégie de Cody DiMarco face à la méchanceté de son ennemi, et les conseils de Paul Brightfield ne vont pas dans le sens de l'affrontement, mais prennent position pour une autre posture, plus adulte et plus humaniste.
Le lecteur adulte ressort de ce tome avec un sentiment mitigé. Il a pu apprécier l'originalité des dessins de Mike Ploog, et sa capacité à s'adapter aux changements de styles narratifs, mais il a également constaté qu'ils restent dans un registre assez classique, empruntant beaucoup à l'imagerie d'Alice aux pays des Merveilles. De la même manière, il a pu apprécier la sophistication de la narration de John-Marc DeMatteis, avec les observations du narrateur entremêlées à l'intrigue, mais avec une volonté de rester très concret qui ne permet pas au récit de s'envoler vers la poésie ou l'onirisme.
Cette BD, réalisée sur ordinateur en 1989, souffre de défauts visuels. Le trait est pixellisé, les couleurs sont froides et les décors semblent tracés à la règle. Cela a mal vieilli et ne m'a pas séduit.
L'intrigue est prévisible, avec une journaliste enlevée dans un pays dangereux et son ami courageux qui la sauve. La carte postale comme stratagème est peu crédible.
Malgré ses défauts, cette BD reste intéressante en tant que premier essai européen réalisé sur ordinateur. Cependant, je ne la recommande pas.
Le changement, c'est plus tard.
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Ce tome contient une histoire complète qui ne nécessite pas de connaissances préalables des personnages. Il comprend les 3 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2016/2017, écrits, dessinés, et encrés par Adam Hughes, avec une mise en couleurs effectuée par José Villarrubia, avec un lettrage réalisé par Jack Morelli. Il comprend également les 29 couvertures variantes réalisées, entre autres, par Mahmud Asrar, Cliff Chiang, Bilquis Evely, Francesco Francavilla, Tula Lotay, Moritat, Ryan Sook, Chip Zdarsky, David Mack, Bengal, Paolo Rivera, etc. Ce tome comprend également l'épisode 12 de la série Jughead, écrit par Ryan North, dessiné et encré par Derek Charm.
À Riverdale (une ville fictive des États-Unis), Hot Dog, le chien de Jughead est en train de commenter (pour le bénéfice du lecteur) le dessin pleine page qui montre Betty (Elizabeth Copper) et Veronica (Veronica Lodge, surnommée Ronnie) en train de se crêper le chignon devant d'autres étudiants, dans le gymnase couvert de l'université. 6 semaines auparavant, Archie (Archibald Andrews) et Jughead (Forsythe Pendleton Jones III) étaient en train de marcher en réfléchissant à l'issue de combats imaginaires, entre le Père Noël et le Lapin de Pâques, entre eux, entre Betty et Veronica. En devisant ainsi, ils parviennent devant la maison de Betty. Elle est en train de manipuler des sacs de gravier de 30 kilogrammes, pendant que Veronica se prélasse dans une chaise longue en lui donnant des conseils relatifs à son hydratation. Les 4 amis décident de se rendre au diner de Pop (Terry Tate) pour aller manger.
En route, les quatre amis manquent de se faire renverser par un camion de l'entreprise Kweekwegs Koffee, une chaîne de café. Ils arrivent et constatent une pancarte annonçant la fermeture imminente du diner Chez Pop. Ils pénètrent dans l'établissement et interrogent Pop sur la raison de cette fermeture. Il leur explique que la chaîne Kweekwegs souhaite installer un de leurs établissements sur le site du sien, et qu'ils l'ont racheté à la banque auprès de laquelle il a contracté un prêt. Il disposait d'un délai de 6 semaines pour réunir la somme manquant pour rembourser la banque et ainsi éviter ce rachat. Malheureusement il ne voit pas comment réunir 60.000 dollars dans un délai aussi court. En outre, il ne peut pas renégocier son prêt, car la chaîne Kweekwegs a racheté cette banque. Betty décide immédiatement de prendre les choses en main pour réussir à réunir cette somme. Veronica reste étrangement en retrait.
Le personnage d'Archie a été créé en 1941 par John L. Goldwater, Bob Montana et Vic Bloom. Sa série de comics met en scène des personnages blancs au lycée vaguement facétieux, pour des gags très consensuels. La série initiale a donné lieu à de nombreuses séries dérivées dont une consacrée à Betty & Veronica. Les lecteurs se désintéressant progressivement de cette vision édulcorée et très blanche d'une petite ville de l'Amérique, les responsables éditoriaux ont entrepris de la moderniser. Un signe avant-coureur a été l'arrivée de zombies à Riverdale dans Afterlife with Archie (2013/2014) par Roberto Aguirre-Sacasa & Francesco Francavilla, et la mort d'Archie dans The Death of Archie: A Life Celebrated. En 2015, les lecteurs ont vu arriver une nouvelle série consacrée au personnage en 2015 par Mark Waid & Fiona Staples, avec des protagonistes un peu plus âgés, et des histoires pour un lectorat également un peu plus âgé. Enfin en 2017, Archie et consorts ont eu droit à une série télévisée : Riverdale. le présent tome s'inscrit dans cette vague de modernisation.
Le lecteur peut donc être attiré par l'envie de découvrir des personnages de son enfance se comportant en jeunes adultes, dans une histoire un peu moins tout public. Plus vraisemblablement, le lecteur de comics est venu attiré par l'identité de l'auteur : Adam Hughes, surtout célèbre pour ses couvertures proposant des versions pin-ups de superhéroïnes, et pour quelques rares épisodes dont il a dessiné l'intérieur, comme la rencontre WildCATS / X-Men : les temps modernes (1997). Il ne fait pas de doute que cet artiste saura transcender l'apparence de Betty et de Veronica pour en faire des jeunes femmes à la séduction physique irrésistible. La couverture montre deux jeunes bien comme il faut, pleines de vie, sans hypersexualisation de leur corps. le premier dessin en pleine page les montre en train de se tirer les cheveux, avec des silhouettes fines, en talons hauts, mais sans exagération de leur taille de bonnet ou de leurs hanches. le dessin le plus dénudé se trouve également dans l'épisode 1 alors qu'elles sont allongées sur le sol en bikini, mais là encore il n'y a pas de pose lascive ou suggestive. Dans l'épisode 2, il y a bien une scène de lavage de voiture en bikini, mais ce n'est ni Betty, ni Veronica qui passe l'éponge sur les carrosseries et le lecteur ne voit qu'un mollet dénudé et un avant-bras sortir de la mousse.
Adam Hughes réalise donc des planches très chastes, sans intention d'émoustiller le lecteur mâle ou de titiller sa libido. En entamant ce tome, le lecteur se trouve un peu surpris du parti pris du metteur en couleurs. José Villarrubia a choisi une palette un peu terne. Il ne s'agit pas de teintes sépia qui désigneraient le récit comme appartenant au passé, ou comme étant une vision fantasmée d'une Amérique sublimée. Il s'agit plutôt d'une approche qui refuse une vision rutilante, préférant donner une vision plus en retenue, ce qui est en cohérence avec l'approche de l'artiste. Tout du long des 3 épisodes, le lecteur apprécie de pouvoir se projeter dans des environnements représentés de manière réaliste avec un bon niveau de détails : la pelouse devant la maison des Cooper, le diner de Pop, le salon des Cooper, le gymnase du lycée. Il observe que les feuilles d'automne tombent régulièrement quand les personnages se trouvent dans la rue. Il peut regarder les tenues vestimentaires des personnages, simples et adaptées à des jeunes, ainsi que les différentes coiffures. Hughes sait conférer une évidence naturelle à tous ces éléments.
Le récit repose sur l'imminence d'un changement, une menace déjà utilisée dans la série Archie à plusieurs reprises, à savoir la disparition du diner de Pop. Il s'agit avant tout d'une comédie de situation, disposant d'un peu plus de moyens qu'à l'ordinaire, ce qui permet d'inclure des séquences tournées en extérieur. La vitalité de la narration repose donc beaucoup sur le jeu des acteurs. Sur ce plan-là, Adam Hughes sait insuffler de la vie à ces personnages, que ce soit au travers des expressions de leur visage ou de leur posture. Il compose des plans de prise de vue qui accompagnent les personnages, et changent régulièrement d'angle pour se focaliser soit sur leurs mouvements, soit sur leurs expressions. Il conçoit son découpage de planche en cases en fonction de la nature de la scène. Il intègre quelques dessins en pleine page, à raison d'un ou deux dans les 2 premiers épisodes, sans en abuser. Il joue avec les attentes du lecteur, en montrant Betty et Veronica prêtes à en venir aux mains, puis en expliquant à quoi correspond réellement cette scène. Il se joue de lui avec 2 pages dans l'épisode 1 sur fond blanc, avec plus de phylactères que de personnages, expliquant que le chien a mangé les planches dessinées et qu'il a dû y substituer celles-là.
Le lecteur découvre donc une comédie de situation, avec des personnages sympathiques, à la psychologie superficielle, avec des sentiments positifs et des émotions chaleureuses. Petit à petit, il se rend compte que l'auteur déroule son intrigue suivant une structure très linéaire réservant peu de surprises, dépourvue d'action. Les échanges entre les personnages restent au niveau de la discussion sans conséquence, leur dimension psychologique n'étant pas développée. Adam Hughes se conforme au cahier des charges qui est de mettre en scène des personnages sains et sans problème, dans une Amérique blanche et propre sur elle, sans dimension sociale. Ces personnages restent dans une stase qui les maintient dans une position immuable, échangeant des propos banals par lesquels il est hors de question de remettre en cause l'ordre établi ou d'introduire du changement. Alors que la narration visuelle a gagné en sophistication, l'histoire reste dans le même registre essentiellement destiné à des enfants.
Le lecteur est attiré par la promesse de trois épisodes dessinés par Adam Hughes. Cet artiste s'investit complètement dans la narration visuelle, sans se reposer sur la plastique des deux héroïnes. Le lecteur voit des personnages vivre sous ses yeux, dans une comédie de situation innocente. Il découvre petit à petit que le scénario reste sagement dans les clous des spécifications immuables de la série, pour un immobilisme déconcertant.
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- Jughead 12 - Betty, Veronica, Kevin, Reggie, Dilton, Jughead et Archie sont en train de jouer à un jeu vidéo, une course de voitures qui évoque Mario Kart avec des véhicules qui évoquent ceux de Les fous du volant. Reggie gagne haut la main et les tous les autres un gage : ils doivent le servir et accéder à ses demandes pendant une journée.
Le fait est que le lecteur n'est pas venu à ce tome pour lire un épisode de Jughead, mais pour découvrir la dernière création d'Adam Hughes. Il peut donc supposer que les responsables ont choisi un épisode pour accrocher le lecteur avec le meilleur d'une autre série. de fait, il a été écrit par Ryan North, le scénariste de la série Marvel The unbeatable Squirrel Girl. le lecteur découvre une histoire très linéaire à l'intrigue peu épaisse, avec beaucoup de parlottes, et quelques leçons de morale. Les dessins sont à destination de jeunes lecteurs, simplifiés et très expressifs, mais sans grande inspiration dans la mise en page, ou le jeu d'acteurs. Il est peu probable qu'un tel épisode l'incite à aller tester d'autres séries d'Archie Comics.
Le ravissement n'est pas pour le lecteur.
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Ce tome contient les quatre épisodes de la minisérie, initialement parus en 2017, écrits par Matt Kindt, dessinés et encrés par CAFU (Carlos Alberto Fernandez Urbano), et mis en couleurs par Andrew Dallhouse. Roberto de la Torre a dessiné et encré 5 pages de l'épisode 2, et 8 pages de l'épisode 3 qui constituent des retours en arrière. Juan José Ryp et Francis Portela ont dessiné quelques pages de l'épisode 4, ayant pour sujet l'un des personnages dans un autre environnement.
Tama est en train de progresser sur un chemin dans la dimension du Deadside, avec à ses côtés une créature familière qu'elle appelle T.A.D.D. Elle arrive au pied d'une sorte de tronc géant évidé suspendu dans les airs et il lui faut en commencer l'ascension. Au bout de plusieurs marches fichées dans le tronc courant en spirale le long de la paroi intérieure, elle parvient devant un premier gardien qui lui pose une énigme. Elle lui en a donné la réponse avant qu'il n'ait fini de prononcer le dernier mot et elle poursuit son ascension, toujours accompagnée par T.A.D.D. Après une poignée d'autres épreuves, elle finit par arriver devant Amy (aussi appelé Hanar), un démon géant emprisonné-là qui est obligé de toujours dire la vérité. Elle lui a amené un cadeau (une truffe de manticore), qu'elle lui offre avant de poser ses questions. Elle lui présente un scroll dont elle n'arrive pas à déchiffrer l'écriture.
Amy lui explique qu'il s'agit d'une écriture conçue pour être indéchiffrable, et utilisée à l'époque de la Tour de Babel. Il lui explique que contrairement au mythe qui est parvenu jusqu'à l'époque contemporaine, Babel désignait la créature qui était à l'origine de la construction de la Tour. Il lui indique où se trouve le site sur lequel la Tour fut érigée, dans Deadside. Ce site sert maintenant de repère à un barbare appelé Rex the Razer (celui qui rase les constructions). Tama est la géomancienne de cette époque, la personne chargée de protéger la Terre, et elle tire ses informations du livre du Géomancien dont les entrées sont souvent cryptiques. Elle décide de rendre visite à Rex, puis d'aller recruter des alliés sur Terre. Elle commence par contacter Ninjak (Colin King). Ce dernier l'aide à réquisitionner Punk Mambo (Victoria Greaves Trott) et Shadowman (Jack Boniface, aussi connu sous le nom de Magpie).
A priori, ce récit s'adresse en premier lieu à des lecteurs familiers de l'univers partagé Valiant. Pour commencer le scénariste n'effectue pas beaucoup de rappels sur la nature de Deadside, et il vaut mieux être familier de ce concept. Ensuite, en 4 épisodes, il n'a pas le temps de s'étendre sur Ninjak, et encore moins sur le passé complexe de Shadowman. Il s'agit d'un personnage qui a été créé en 1992, par Jim Shooter & Steve Englehart (scénaristes), et Mike Manley (dessinateur). Les épisodes de sa série se sont vendus à plusieurs centaines de milliers d'épisodes dans les années 1990 et il avait même eu droit à une minisérie réalisée par des auteurs de premier de plan par Garth Ennis & Ashley Wood (1997). C'est donc tout naturellement que l'éditeur Valiant a relancé une série à son nom en 2012 par Justin Jordan & Patrick Zircher, puis écrite par Peter Milligan.
Effectivement, il vaut mieux que le lecteur soit familier de l'univers partagé Valiant. Il lui faut avoir une vague idée de ce que représente le géomancien dans ce monde, ce qu'est Deadside (sinon il se demandera tout du long pourquoi Ninjak est obligé d'y porter une armure et pas les autres), qui est Ninjak, qui est Shadowman (ce qui est plus compliqué) et qui est Punk Mambo. S'il n'a jamais croisé ces personnages, il ne risque pas de s'y attacher car ils n'ont pas beaucoup de personnalité propre au-delà d'un unique trait de caractère. Pour les lecteurs qui fréquentent régulièrement l'univers Valiant, ces références font sens, mais ne sont pas gage d'une bonne histoire. Ninjak et Punk Mambo participent au récit mais de manière mécanique, et il n'y a pas de scène qui les mettent particulièrement en valeur. Tama est encore un personnage trop récent pour disposer de lecteurs qui la suivent. Neville, tout sympathique qu'il soit, n'apparaît que le temps de 2 pages. Il reste donc Shadowman qui se trouve au cœur du récit, car il est l'enjeu, l'individu que Babel souhaite capturer et utiliser.
Le lecteur ressent bien la difficulté du scénariste à mettre en scène un personnage aussi compliqué que Shadowman. Il le cantonne au rôle de McGuffin, un individu à nouveau sans beaucoup de personnalité, qui est en mesure de fournir l'énergie manquante à Babel pour parachever sa Tour. Matt Kindt évoque rapidement les blocs de construction du personnage : son alter ego Jack Boniface (mais il ne fait que citer son nom), son lien avec la mythologie des Loa (réduite ici à une source d'énergie surnaturelle), et à peine son autre alias Magpie. du coup Shadowman est réduit à un artifice narratif, et le récit permet de rappeler qu'il constitue un lien entre Deadside et Liveside. le lecteur reporte alors son attention sur l'intrigue proprement dite et sur la narration visuelle. le début du récit est assez prometteur car Matt Kindt se montre facétieux avec le personnage de Tama qui affronte les épreuves parsemant son chemin avec une aisance rafraîchissante. Sa prise de contact avec Amy s'avère tout aussi amusante, car elle est la première de tous ses visiteurs à avoir pensé à lui amener un cadeau. La redescente vers la cité est tout aussi enlevée, avec 6 épreuves en 1 case chacune, en une seule page. La suite se gâte un peu. le lecteur découvre l'histoire de Babel, sa motivation pour construire une Tour, la manière dont il s'est échappé de sa geôle après sa première tentative ratée, et la façon dont il a recruté des sbires. L'histoire en elle-même est un peu originale, mais elle reste très linéaire et trop impersonnelle pour arriver à impliquer le lecteur. Quant à la mission menée par Tama et son équipe, c'est la succession d'affrontements attendus, avec un traître dans l'équipe qui veut faire passer son intérêt personnel avant le reste. Mais comme le scénariste n'a pas réussi à faire exister ses personnages, ils ne dégagent pas d'empathie, et le lecteur ne voit que la mécanique du scénario sans éprouver aucun sentiment pour l'un ou l'autre.
Sur le plan de la narration visuelle, le lecteur retrouve des dessinateurs habitués de l'univers Valiant. La combinaison des dessins très propres sur eux et de la mise en couleurs pleine de couleurs chatoyantes séduit immédiatement le lecteur qui se projeter aux côtés des personnages. le premier épisode est très impressionnant pour son inventivité dans les territoires traversés par Tama, les créatures rencontrées, et les cadrages. le lecteur la regarde progresser dans ce tronc d'arbre creux. Il découvre avec elle les créatures étonnantes. Il reprend la route jusqu'à la forteresse volante occupant la place de l'ancienne Tour de Babel, et il a même la surprise de faire le tour des bureaux du quartier général du MI6. Les couleurs habillent et complètent les dessins et ajoute une touche surnaturelle aux créatures diverses, ainsi qu'à l'atmosphère même de Deadside. Les pages réalisées par CAFU dans les épisodes 2 & 3 reprennent les mêmes éléments que dans l'épisode 1, sans nouvelle surprise et avec une densité d'information significativement plus faible. Fort heureusement, la tendance s'inverse dans le dernier épisode avec l'inondation très spectaculaire.
Au cours du récit, dans les épisodes 2 & 3, le lecteur apprend l'histoire passée de Babel au travers de ce que raconte Rex the Razer, puis Babel lui-même. Il est donc justifié que la narration visuelle soit assurée par un autre artiste pour rendre compte de cette temporalité différente. Roberto de la Torre réalise des dessins plus organiques, plus griffés, moins propres sur eux, attestant d'une époque moins civilisée, et de pratiques plus violentes. Andrew Dalhouse modifie également son schéma de couleurs, en utilisant des teintes essentiellement marron afin d'indiquer qu'il s'agit de scènes dans le passé. le résultat apparaît plus brut, et très bien adapté à la nature de ses séquences. le lecteur attentif sourit un instant quand il se rend compte que la guerrière dessinée par de la Torre dans l'épisode 2 porte un bikini à maille qui évoque immédiatement Red Sonja. Dans l'épisode 4, le lecteur découvre une poignée de planches réalisées par Juan José Ryp et Francis Portella, deux autres artistes habitués des parutions Valiant. À nouveau, la participation de deux autres dessinateurs est justifiée par le scénario, en particulier lors des pages se déroulant dans Liveside. Ryp est méticuleux comme à son habitude, et Portella est lumineux comme à son habitude.
Arrivée à la fin du récit le lecteur a bien compris qu'il s'agissait d'une histoire de commande pour Matt Kindt, servant à repositionner Shadowman dans l'univers partagé Valiant et à faire office d'introduction pour sa série de 2018. Les dessins réalisent une narration visuelle attractive, mais qui n'arrive pas à masquer le déroulement mécanique du récit, ni à pallier l'absence de personnalité des protagonistes.
Une belle synthèse, mais manquant d'originalité
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Ce tome revient sur les événements qui ont immédiatement précédé la première apparition des X-Men dans l'épisode 1 de la série Uncanny X-Men, paru en 1963. Il contient les six épisodes de la minisérie, initialement parus en 1999/2000, écrits par Joe Casey, dessinés par Steve Rude avec un encrage d'Andrew Pepoy (épisodes 1 à 3), Paul Smith & Michael Ryan avec un encrage d'Andrew Pepoy & Paul Smith (épisode 4), et Esad Ribic avec un encrage d'Andrew Pepoy (épisodes 5 & 6). La mise en couleurs a été réalisée par Paul Mounts pour les 6 épisodes.
Un jeune mutant a perdu le contrôle de ses pouvoirs, et a détruit par accident de nombreux pavillons dans la ville de Middletown au Missouri. Juste après un reportage sur cette tragédie, la télévision diffuse l'intervention de William Metzger, un individu qui prône la défense de la race humaine contre ces monstres incontrôlables dont les mutations génétiques peuvent provoquer des catastrophes. Dans un bureau de FBI, l'agent Amos (surnommé Fred) Duncan reçoit l'ordre de son supérieur hiérarchique d'investiguer sur le sujet. de retour à son bureau, Fred Duncan le trouve plongé dans le noir. Il commence à parler à haute voix pour prendre des notes sur son dictaphone qu'il a surnommé Bill. Il est interrompu par un individu en chaise roulante qui se trouve dans son bureau et qui commence à lui expliquer son point de vue sur les mutants. La nuit, un individu avec des ailes vient en aide à une femme se faisant agresser dans une rue de New York. le lendemain, Charles Xavier se rend chez les Grey pour évoquer la possibilité qu'ils inscrivent leur fille dans son établissement. Elaine et John Grey promettent d'y réfléchir.
La télévision annonce que le lycée de Freeport High School a battu tous les records d'endettement, atteignant le million de dollars de déficit. Ce jour-ci, un nouveau professeur en chaise roulante y postule pour se faire engager. Dans les couloirs, 3 individus (Chad, Mikey et Starkey) à l'allure donnant l'impression qu'ils cherchent une victime à humilier évoquent le discours de William Metzger dans les jours à venir. Ils regardent passer d'un air envieux Hank McCoy la star de l'équipe de football du lycée. Dans le gymnase, Scott Summers, un adolescent souffreteux se fait rabrouer par le professeur de sport, qui se moque de ses lunettes rouges et de sa constitution chétive. Dans l'escalier de service, Bobby Drake s'est isolé pour être tranquille en se demandant pourquoi il a si froid. Dans différents états, la peur motive des citoyens à organiser une poignée de lynchage.
Régulièrement l'éditeur Marvel demande à une équipe créatrice de remettre au goût du jour, les origines d'un de ses personnages ou d'une équipe. Au tournant du millénaire, il échoit à Joe Casey de s'acquitter de cette mission pour les X-Men. du point de vue de l'intrigue, il s'agit d'une gageure car il faut intéresser le lecteur à une histoire qu'il connait déjà, voire dont il a déjà lu de nombreuses versions. Joe Casey a l'idée de commencer son histoire quelques jours avant la première scène de Uncanny X-Men 1, paru en 1963, de Jack Kirby & Stan Lee. Ce premier épisode s'ouvrait avec le professeur X appelant ses X-Men à lui. Ils étaient alors au nombre de 4 : Cyclops, Iceman, Beast et Angel, déjà avec des costumes jeune & bleu. Mais, bien sûr, ils ne sortaient pas de nulle part, ils avaient été recrutés précédemment, et l'hystérie anti-mutante trouvait ses racines dans des événements passés. Joe Casey montre donc ce qui a conduit à cet état de fait.
En fonction de sa familiarité avec les premiers épisodes de la série Uncanny X-Men, le lecteur (re)découvre des faits sur le passé des personnages, amalgamés dans une narration qui rétablit une cohérence entre eux, en amenant de nouveaux éléments. le scénariste a l'art et la manière de lier les événements dans un tout cohérent. Il peut voir dans quelles conditions vivaient les premiers X-Men avant d'intégrer l'école de Westchester : Jean Grey tranquillement dans le pavillon cossu de ses parents, Hank McCoy en utilisant ses pouvoirs dans le civil tout en les faisant passer pour les capacités d'un athlète accompli, Warren Worthington en essayant d'utiliser ses pouvoirs pour redresser les torts, Scott Summers vivant dans la pauvreté et exploité par un criminel sans scrupule, Bobby Drake dans le pavillon plus modeste de ses parents. de ce point de vue, le récit satisfait la curiosité du lecteur, mais sans réussir à générer assez d'empathie pour ces personnages. Ils sont pris dans une situation où ils doivent cacher leur pouvoir, où ils tentent de les utiliser discrètement et où ils se trouvent dans des fortunes diverses. La problématique pour le lecteur est qu'il sait déjà tout cela, et que Joe Casey ne parvient pas à faire ressentir leurs états d'esprit ou leurs émotions. C'est plus ou moins marqué en fonction des personnages ; c'est criant pour Bobby Drake, et c'est moins marqué pour Scott Summers.
Le lecteur peut alors s'intéresser aux personnages secondaires comme Fred Duncan, William Metzger, les 3 loubards, ou même Charles Xavier. En fait il n'en apprend pas beaucoup plus sur Fred Duncan, les 3 loubards brillent par leur dimension générique, et même William Metzger ne se différencie pas beaucoup des nombreux agitateurs anti-mutants qui l'ont précédé ou qui le suivront. du coup, le lecteur se rabat sur l'intrigue qui est dense et racontée de façon moderne, sans bulle de pensée, et avec des inserts d'émission de télévision réguliers, pour rendre compte de la perception du phénomène tel qu'il est relayé par les médias. Il y a quelques surprises avec l'apparition d'un ou deux personnages emblématiques de la série, et bien sûr des affrontements physiques à chaque épisode pour fournir le quota d'action. À nouveau le tout est bien ficelé, mais étrangement, Joe Casey semble intimidé par son sujet, trop respectueux, alors qu'il a écrit de nombreux récits décapants comme la série SEX avec Piotr Kowalski, Butcher Baker the righteous maker avec Mike Huddleston, et des récits de superhéros traditionnels comme Vengeance avec Nick Dragotta, The Bounce avec David Messina, Godland avec Tom Scioli.
Le lecteur est plus impressionné par la couverture du recueil et par les 3 premiers épisodes dessinés par Steve Rude. Cet artiste a l'art et la manière de donner une impression de personnages enjoués, d'environnements vaguement rétro, avec des dessins facilement lisibles tout en contenant une bonne densité d'informations visuelles. Dès le premier épisode, le lecteur peut par exemple repérer Dana Scully et Fox Mulder dans un des couloirs du FBI. L'encrage d'Andrew Pepoy respecte bien les crayonnés de Rude, en particulier dans les arrondis élégants. le lecteur prend grand plaisir à s'immerger dans cet environnement vaguement suranné, avec des hommages visuels patents à Jack Kirby (les belles courbes de Cerebro). Il observe les tenues vestimentaires de chaque personnage, y compris des figurants, notant qu'elles renvoient parfois aux années 1960. Il détaille les ameublements et les accessoires de chaque endroit pour s'imprégner de leur atmosphère, de la personnalité des personnes qui les ont aménagés. L'intérieur des Grey est vraiment douillet, alors que la cantine du lycée est aussi impersonnelle qu'elle est fonctionnelle. Il regarde incrédule l'opulence de l'aménagement du jardin de l'école de Westchester. Régulièrement le regard du lecteur s'arrête sur une image saisissante comme l'agent Duncan parlant à son dictaphone (clin d'œil à Dale Cooper parlant à Diane), Jean Grey s'amusant à faire tournoyer des pétales de fleur autour d'elle dans le jardin de ses parents (magnifique), Scott Summers avec un teeshirt crasseux et troué dans une posture d'abattement indicible, Bobby Drake caché sous ses draps partiellement recouverts de neige.
Le lecteur ressent forcément une pointe de déception du fait que Steve Rude n'ait pas dessiné les 6 épisodes. Les dessins de Paul Smith s'inscrivent dans l'approche de ceux de Rude, mais avec un encrage plus léger, et une densité d'information moins élevée. Ils en conservent néanmoins l'élégance. Les dessins d'Esad Ribic reviennent à une apparence beaucoup plus classique de dessins de superhéros, une variété de prise de vue moins importante, mais une forme de romantisation des personnages pour leur donner une aura plus tragique. Globalement ces deux derniers épisodes sont nettement un cran en dessous des quatre premiers.
À la fin du tome, le lecteur reste sur l'impression d'un rendez-vous manqué. Joe Casey sait tisser la toile de fond de la création des X-Men, en étant raccord avec leurs débuts dans leur propre série en 1963. Mais il a bien du mal à les faire exister, à générer une empathie chez le lecteur. La première partie du récit n'en reste pas moins très agréable du fait des dessins toujours pleins de charme et d'élégance de Steve Rude. La narration visuelle baisse d'un cran dans la deuxième moitié du récit.
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Savage (Valiant)
Un adolescent contre des dinosaures - Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre, mais vraisemblablement appelée à se dérouler dans l'univers partagé Valiant par la suite. Il contient les épisodes 1 à 4, initialement parus en 2016, écrits par B. Clay Moore. Chaque épisode comporte une partie se déroulant dans le passé dessinée et encrée par Lewis Larosa, et une partie se déroulant au temps présent dessinées et encrée par Clayton Henry. La mise en couleurs a été réalisée par Brian Reber, avec l'aide d'Andrew Dallhouse pour l'épisode 3. Les couvertures ont été réalisées par Lewis Larosa. Ce tome se termine avec les couvertures variantes réalisées par Jared Fletcher, Robert Gill, Renato Guedes, Felipe Massafera, Marguerite Sauvage et Bill Sienkiewicz. Quelque part dans une jungle non identifiée, un garçon habillé de haillons guette une douzaine d'œufs disposés en cercle. Il est installé dans un arbre, et teste le piquant d'une griffe dont il se sert comme une arme. Un vélociraptor arrive dans la clairière, pour vérifier l'état de sa nidation. Sans hésitation, l'adolescent se jette sur lui et il s'en suit un combat acharné entre dinosaure et Kevin Sauvage junior. le garçon finit par triompher, non sans mal, et il récupère les œufs qu'il met dans un grand sac. Il rejoint alors sa base : une hutte de branchage sur une plage, défendue par des pieux effilés. Il pose le sac d'œufs parmi ses affaires et il joue avec un briquet à essence. Une douzaine d'années auparavant, Kevin Sauvage (un joueur de football star) et sa femme Ronnie Sauvage (une ex-mannequin) effectuaient un voyage dans leur jet privé, avec leur pilote. Monsieur sirotait un whisky, pendant que madame vérifiait les comptes et que leur bébé dormait dans son berceau. Leur objectif était de relancer la carrière du footballeur aux États-Unis. En plein milieu du vol, leur avion fut frappé par un phénomène électromagnétique. Quand ils reprirent connaissance, leur avion était doucement en train de prendre l'eau et le pilote était mort dans le crash. Ils n'eurent que le temps de prendre leur bébé de de rallier la plage assez proche. Une fois allongée sur la plage, Ronnie s'occupa de son bébé et s'endormit rapidement. Pendant ce temps-là, Kevin alla récupérer ce qu'il pouvait à bord de l'épave de leur jet, avant qu'il ne s'abime au fond des eaux. Depuis le redémarrage de leur univers partagé en 2012, les responsables éditoriaux Valiant ont privilégié la publication de comics avec des personnages déjà existants, datant de leur vague de publications initiale en 1989, comme X-O Manowar, Harbinger, Shadowman, Eternal Warrior, Bloodshot ou encore Archer & Armstrong. Ce n'est qu'exceptionnellement que Valiant a publié des nouveaux personnages, par exemple Divinity de Matt Kindt & Trevor Hairsine, ou Antonius Axia dans Britannia de Peter Milligan & Juan Jose Ryp. L'apparition d'un nouveau personnage constitue un petit événement pour cet éditeur. le lecteur découvre Savage avec la couverture de Lewis Larosa qui montre un jeune adolescent venant de triompher d'un vélociraptor avec une arme constituée d'une griffe d'un autre vélociraptor. Ce comics semble promettre des aventures opposant un être humain à des dinosaures. C'est effectivement ce que découvre le lecteur dans les premières pages, et même la séquence qui conduit à la posture sur la couverture. Lewis Larosa est en très grande forme, avec des planches magnifiques, rendant bien compte de la sauvagerie du combat, des mouvements brusques, par le biais de cases de travers se percutant les unes les autres. Il insuffle une vie impressionnante dans ce vélociraptor et les quelques autres dinosaures qu'il est amené à dessiner par la suite. Il s'applique pour les représenter avec soin, conformément à l'état des connaissances actuelles, en évitant de projeter un quelconque anthropomorphisme sur ces prédateurs. L'épisode 2 offre le spectacle d'autres races de dinosaures représentées avec le même soin, ainsi qu'un autre combat physique, cette fois-ci contre un être humain. La séquence dans l'épisode 3 est tout aussi intense, même si elle ne comporte pas de dinosaure. Lewis Larosa bénéficie d'une mise en couleurs riche, évoquant de la peinture directe, venant habiller chaque surface et ajoutant des informations visuelles en arrière-plan pour donner plus de consistance à la jungle ou à l'océan. Le lecteur se délecte de ces planches et regrettent qu'elles se lisent aussi vite du fait de l'absence de tout texte. Larosa sait imprimer une vitesse de lecture élevée, en cohérence avec la nature de ces séquences. Par comparaison, les dessins de Clayton Henry apparaissent plus fades et plus sages. Il utilise un trait fin et très propre sur lui, pour détourer les surfaces. Ses images se situent dans un registre plus descriptif, manquant de texture. Pourtant en y prêtant plus d'attention le lecteur constate que ses pages comportent autant d'informations visuelles que celles de Lewis Larosa, mais plus dans les détails des accessoires, des objets et des décors, que dans les textures et les sensations. le lecteur peut ainsi regarder les caractéristiques du jet privé, les tenues vestimentaires, les différentes plantes, les accessoires dont disposent les rescapés, etc. Malgré tout, les dinosaures perdent de leur superbe, deviennent moins impressionnants, et le petit Kevin impressionne moins, ramené à une apparence plus ordinaire. Brian Reber revient à une mise en couleurs plus traditionnelle pour les planches de Clayton Henry, avec des aplats de couleurs, et des nuances pour augmenter sans exagérer le relief des surfaces délimitées par les traits de contour, et pour rendre compte de la luminosité de chaque séquence. En fonction des pages, Henry est amené à utiliser des traits de contours fins, ou très fins dont la délicatesse n'est pas très adaptée pour rendre compte de la brutalité des affrontements, de la sauvagerie de Savage, ou encore de la férocité des dinosaures. Or il se trouve que chaque épisode est dessiné aux trois quarts par Clayton Henry. D'un autre côté, il met en œuvre une direction d'acteurs bien pensée qui permet de croire à la situation des personnages et à leur implication. Ainsi le lecteur éprouve l'impression que Ronnie et Kevin junior se cachent réellement dans la jungle, se sentent en sécurité dans leur cabane sur la plage, prennent toutes les précautions nécessaires pour éviter d'avoir à se battre contre les dinosaures, et autres habitants de cette île. Dès le premier épisode, le lecteur se rend compte que ce comics se lit deux fois plus vite qu'un comics de superhéros classique de même pagination. Il y a donc deux fils narratifs qui viennent se compléter. le second se déroule dans le passé et permet de comprendre d'où vient ce Savage. B. Clay Moore se montre un peu taquin vis-à-vis du footballeur vedette, déjà un peu sur le retour. Il montre sa faiblesse vis-à-vis de la boisson alcoolisée, mais aussi son courage. le portrait comporte quelques nuances qui évite la caricature facile. de la même manière, Ronnie dépasse les clichés inhérents à la femme de footballeur. Elle dispose d'un solide sens des affaires, mais aussi d'un véritable courage pour pouvoir subsister dans cet environnement inhospitalier. Malgré tout cette partie de l'histoire suit un chemin tout tracé, sans aucune originalité, jusqu'à ce que finalement Kevin Junior devienne le jeune homme que le lecteur découvre au début du récit. Malgré les prouesses visuelles de Lewis Larosa et Brian Reber, le lecteur constate aussi que le premier fil narratif est très mince. Savage se bat contre un vélociraptor puis contre d'autres ennemis jusqu'à atteindre son objectif. Là encore l'intrigue s'avère très linéaire, même si elle est bien exécutée. Il est vrai que le scénariste ne dispose que de 4 épisodes pour convaincre le lecteur, mais d'un autre côté son intrigue se révèle assez décompressée, pour faire la part belle aux pages de Larosa. du coup, le lecteur n'a pas grand-chose à se mettre sous la dent. La dernière page de ce tome l'amène à penser qu'il s'agit plus d'un prologue que d'un chapitre consistant. Avec le recul, il se rend compte que l'objectif de B. Clay Moore était donc d'établir l'existence d'un personnage se battant contre des dinosaures, dont les droits de propriété intellectuelle sont conservés par l'éditeur. Cela fait penser à une autre série que Valiant avait publié dans les années 1990 : Turok, dinosaur hunter. Ce personnage n'appartenait pas à Valiant mais à un autre éditeur. du coup, Savage apparaît comme une déclinaison assez proche de Turok pour que Valiant puisse à nouveau disposer d'un personnage semblable. Ce premier tome consacré à un nouveau personnage Valiant se lit très rapidement, avec un certain plaisir, mais aussi une frustration certaine du fait d'une intrigue convenue et peu substantielle. C'est sympathique comme introduction, mais insuffisant comme histoire.
Ada
Altan est un auteur original (remarque valable pour son dessin et pour la narration de ses récits), avec lequel j’ai toujours du mal. J’ai lu pas mal de ses œuvres, mais il n’y a guère que sur son Colombo que j’étais ressorti sur une note positive. Et avec « Ada », je suis encore partagé. Le dessin est reconnaissable entre mille. Quelques airs de Tardi dans ce Noir et Blanc (surtout pour le visage de face d’Ada). Mais je n’aime vraiment pas ses visages, et surtout les nez qu’il impose à ses personnages. Mais bon, ça c’est affaire de goût, car son trait est lisible. L’intrigue part sur des bases plutôt classiques – une jeune pensionnaire d’un collège huppé reçoit un bel héritage d’un oncle oublié, qui lui fait promettre avant de mourir de retrouver son fils perdu, cohéritier (alors que le seul fils de l’oncle qu’Ada connaissait s’assoie sur l’héritage, avec la frustration et l’envie d’inverser les choses que l’on devine). L’héritier recherché étant en Afrique, voilà Ada partie pour l’aventure ! Une trame classique donc, mais totalement pervertie par Altan, que ce soit dans son déroulé, les dialogues, et tous les commentaires en off placés sous les cases (il fait ça dans la plupart de ses séries), qui accentuent le côté décalé du récit. Une sorte de parodie de roman d’aventure, en Afrique puis en Asie, avec un humour spécial, et quelques petites pointes d’érotisme. Note réelle 2,5/5.
Batman / Lobo
Pas assez loufoque ni absurde - Ce tome comprend 1 récit complet qui ne nécessitent pas de connaissance particulière du personnage de Batman. Il est initialement paru sous la forme de deux épisodes de 44 pages, en 2007, écrits, dessinés et encrés par Sam Kieth, mis en couleurs par Alex Sinclair. De manière imprévu, une voix se fait entendre dans la tête de Batman, le prévenant qu'il va être transporté dans une base spatiale située à 7,2 années-lumière de la Terre pour accomplir une mystérieuse mission. Il y est accueilli par une femme appelée Sophie qui lui explique qu'il a sûrement dû être contacté par Astrella pour endiguer une épidémie qui ne touche que les femmes, les transformant en véritable furie. Alors qu'ils arrivent à proximité du cadavre d'une victime, Lobo se matérialise devant eux clamant son innocence quant au cadavre. Batman n'en croit pas un mot et ils commencent à se battre entre eux, Sophie s'éloignant, éprouvant des chaleurs, finissant par se mettre dans une tenue plus détendue, s'emparant d'une arme à feu et tirant sur tout ce qui bouge. Au moins, Sam Kieth l'annonce dès le début : ce récit relève de la farce, que ce soit avec le personnage outré de Lobo, ou avec ce mystérieux virus qui transforme les femmes en foldingue (Kieth ne pousse pas le bouchon jusqu'à évoquer un symptôme prémenstruel, mais on n'en est pas loin), évoquant vaguement une forme de libération par rapport à leur condition. Pour ce récit, Sam Kieth a construit une intrigue plus linéaire et plus directe, l'infection passant par plusieurs femmes successives (dont une énorme surprise pour l'avant dernière), les transformant en de dangereuses tueuses l'une après l'autre, suivie par le duo Batman & Lobo. le lecteur se rend compte que l'auteur est plus intéressé par Batman que par Lobo qui ne sert que de faire-valoir comique. Il continue à réaliser des dessins plus expressionnistes que descriptifs, avec une exagération parodique bien adaptée à un individu qui s'habille en chauve-souris et un autre qui est l'incarnation vivante du machisme dans tous ses excès. En plus, il bénéficie d'une mise en couleurs un peu vive, réalisée par Alex Sinclair qui trouve le bon équilibre entre préserver les ténèbres souhaitées par Kieth, habiller des fonds de case de plus en plus vides, et apporter un peu de vie par le biais de couleurs plus vives. le lecteur se laisse emporter par une aventure décomplexée, vaguement féministe, vaguement provocatrice, avec une fin aussi dramatique que grotesque. Le lecteur ne se trompe pas sur les intentions de l'auteur, raconter une farce évoquant la condition féminine avec une touche de dérision. Les dessins restent dans une exagération présente dans chaque case, pour des visuels impressionnants et totalement sarcastiques. L'intrigue n'est pas épaisse, et il est impossible de croire aux personnages ne serait-ce qu'un seul instant. Finalement Sam Kieth aurait dû se lâcher encore plus dans l'absurde pour pouvoir rivaliser avec d'autres histoires de Lobo, comme celles d'Alan Grant, Keith Giffen et Simon Bisley dans La Balade de Lobo.
Ils viendront
Une nouvelle série pour ados, aux relents de technothriller (voire de fantastique ?), écrite par Erik L'Homme auteur de romans encensés comme Le Livre des Etoiles. Il nous propose donc une sorte de traque d'adolescents ayant des caractéristiques physiques particulières, dont l'intérêt n'est qu'effleuré dans le premier tome, qui oscille entre un ado qui se planque chez sa copine et l'enquête d'un flic acharné. Rien de très original, si ce n'est le point commun des ados enlevés, car le scénario manque vraiment de palpitant malgré la menace constante de ces deux gars louches en chemises hawaïennes. Je trouve également que les personnages manquent d'épaisseur. ce manque d'épaisseur se voit également dans le dessin. Marcello de Martino n'est pourtant pas un débutant, mais j'ai trouvé qu'il y avait de nombreux soucis anatomiques, des intégrations pas très naturelles dans les décors, une mise en scène un brin foutraque. Et une mise en couleurs informatique sans grande inventivité. C'est mince pour accrocher un quelconque intérêt...
Shamisen
Voila une BD qui m'est passé complètement à côté. Je ne suis pas un méga-fan du Japon, c'est un pays intéressant mais comme tant d'autres. Donc la tendance à décortiquer chaque aspect de ce pays m'agace souvent, et ça a été le cas ici. C'est une BD très belle dans un style rappelant des estampes japonaises et qui parle de ces femmes chanteuses au Shamisen, un instrument japonais. C'est joli et plein de bon sentiments, inspirés par le folklore japonais. Voila, si ça vous intéresse, foncez ! Personnellement ça m'a ennuyé d'un bout à l'autre. Parce que c'est pas très intéressant, le mélange avec le folklore me donne l'impression que la réalité ne suffit pas, la fin de l'histoire est très rapide et surtout j'ai été bien plus intéressé par les notes finales sur les vraies personnages historiques. Parce qu'il m'a manqué dans cette BD un coeur plus consistant, quelque chose que je retienne de l'ensemble. Là, en l'état, j'ai vu de jolies images et puis j'ai appris qu'il y avait des musiciennes errantes au Japon. Je ne dirais pas que j'en ressors très chamboulé. Donc en soi, une BD qui intéressera des gens sans aucun doute, qui saura en contenter plus d'un, notamment les fans du Japon, mais qui m'a prodigieusement indifféré.
Stardust Kid
Conte pour les enfants - Ce tome contient un récit complet indépendant de tout autre. Il reprend les cinq épisodes de la minisérie, initialement publiés de 2005 à 2007 par Boom Studios, écrits par John-Marc DeMatteis, dessinés et encrés par Mike Ploog, et mis en couleurs par Nick Bell & Sumi Pack. Dans une ville de moyenne importance aux États-Unis, un cocon apparaît au milieu d'un tronc d'arbre situé dans le Park Wilde une griffe commence à déchirer l'enveloppe dudit cocon dans un appartement d'un immeuble non loin du parc, le père de la famille DiMarco est en train de faire la vaisselle, pendant que la mère finit de débarrasser. Cody (le fils aîné, à peine adolescent) annonce qu'il va faire un tour au parc. Sa jeune sœur Katherine Mary se moque de lui en indiquant qu'il va rejoindre son copain Paul Brightfield. La mère accepte en lui demandant d'être prudent. Alors qu'il sort, la voix du narrateur donne des renseignements sur Paul Brightfield, supputant sa potentielle dangerosité, sa véritable nature, sur le fait que la mère de Cody ne lui fait pas confiance. En se rendant au parc, Cody DiMarco passe devant sa copine Alana et son petit frère Nathaniel. Il décline son invitation à venir regarder un film chez eux, préférant a compagnie de son copain Paul, au grand dam d'Alana qui est son ami d'enfance. Cody Dimarco arrive au parc et retrouve son ami Paul Brightfield, pendant qu'Alana pense à Cody et à la manière dont il s'est éloigné d'elle. En suivant Paul, Cody passe au travers d'une mince couche de terre, et se retrouve dans l'antre souterrain de son ami. Il s'installe alors confortablement pendant que Paul (ayant pris l'apparence d'un gros mille-pattes multicolore) lui raconte une histoire. Dans le même temps, le narrateur confirme que Paul Brightfield n'est pas un être humain, mais un mirage 3D composé de rêves errants et de poussière d'étoile. Il évoque également la manière dont Paul est apparu sous différentes formes au fil des années, pour approcher progressivement Cody de plus en plus près, comment cette entité dépourvue de forme a fini par prendre celle de Paul Brightfield. Puis le narrateur laisse la place au Livre qui raconte comment les créatures magiques ont peu à peu disparu de la Terre, jusqu'à qu'à ce qu'il n'en reste plus que 2 : Paul et son Miroir, changeant de forme au gré des siècles et de leur fantaisie. Paul finit par proposer à Cody de sortir et de marcher un peu dans la pénombre du soir. La créature a fini de déchirer son cocon, elle est libre de se promener dans le parc à sa guise. John-Marc DeMatteis est un scénariste de comics à la carrière impressionnante, aussi bien capable d'écrire des histoires de superhéros inoubliables (par exemple pour Spider-Man: La Dernière Chasse de Kraven) que des récits personnels très ambitieux comme Moonshadow avec Jon J. Muth ou Blood avec Kent Williams. Mike Ploog est un dessinateur de comics, et il a déjà collaboré avec JM DeMatteis sur la série de livres Abadazad. En regardant la couverture, et en découvrant la nature des protagonistes, le lecteur comprend rapidement que les deux créateurs ont réalisé un ouvrage tout public, plus particulièrement à destination d'un public relativement jeune. Il constate également que chacun des cinq épisodes est assez copieux, puisque le récit comprend une trentaine de pages à chaque numéro. Il remarque rapidement que la voix du narrateur intervient de manière très régulière dans des cartouches de texte assez nombreux, et même complétés par d'autres remarques formulées par une autre voix, dans des cartouches avec un fond d'une couleur différente et complétés à quelques reprises par des remarques dans une police plus petite. Bien évidemment, ces cartouches de texte ont pour conséquence immédiate de rendre la lecture plus lente. Néanmoins, ils apportent des informations supplémentaires, et même de temps à autre, le texte reprend un élément déjà montré dans le dessin qu'il accompagne. Par le biais de la voix du narrateur, JM DeMatteis développe l'état d'esprit d'un personnage ou d'un autre, explicitant son émotion ou ce qui le met dans un tel état. Le scénariste se sert également de cette voix supplémentaire pour s'adresser directement au lecteur, souvent de façon facétieuse. En particulier, il change sciemment de temps dans un même paragraphe passant du passé au présent assez régulièrement. Il ne manque pas de le faire remarquer au lecteur et de mettre ça sur le compte d'une perception du temps différente de celle d'un être humain. Même si DeMatteis donne l'impression de jouer sur ce changement intempestif de temps qui défie les règles de la concordance des temps, il s'avère qu'il y a bel et bien une explication qui est intimement liée au caractère intemporel ou en tout cas pérenne d'un récit. Il joue également sur l'identité non dévoilée de ce narrateur, ainsi que sur celle de celui qui se permet de faire des remarques en coin. Malgré tout, les propos de cette voix supplémentaire restent dans un registre plus explicatif que réflexif. Il faut attendre le dernier épisode pour qu'elle établisse des constats plus introspectifs sur la condition humaine, des motivations cachées, ou des convictions qui défient les lieux communs. Dans sa forme, ce récit reprend les étapes du voyage du héros avec des compagnons en qui il peut avoir confiance. Effectivement la narration reste au niveau de Cody DiMarco, de son amitié indéfectible pour Paul Brightfield et de la confiance qu'il lui accorde, de son amitié pour Alana (mais qui passe après celle pour Paul) et de sa relation affective pour sa petite sœur. Pour autant, Alana, Katherine Mary et Nathaniel ne disposent pas d'une personnalité développée. Du fait de sa véritable nature, Paul Brightfield relève plus du concept que de l'individu. le lecteur découvre donc chaque scène par les yeux de Cody qui se laisse le plus souvent guider par les indications de Paul ou des créatures adultes qu'il rencontre. L'intrigue amène Cody et la petite troupe à interagir avec des créatures hautes en couleurs, soit bienveillantes, soit malveillantes, révélant éventuellement par la suite une trahison ou un changement d'allégeance. Un lecteur adulte éprouve de fortes difficultés pour se projeter dans un personnage aussi générique, ou pour s'intéresser à des rebondissements survenant au gré de la fantaisie du scénariste, sans beaucoup d'impact émotionnel. Dans l'introduction, John-Marc DeMatteis raconte la genèse un peu compliquée du récit, ayant commencé lorsqu'il racontait des histoires à son jeune fils. Il explique le plaisir qu'il a eu à collaborer avec Mike Ploog dont les dessins ne sont pas pollués par les tics graphiques spécifiques aux récits de superhéros. Effectivement, Mike Ploog se tient à l'écart des individus bodybuildés, et met en scène des enfants qui ressemblent à des enfants, avec une morphologie d'enfant (différenciée suivant qu'il a plus ou moins de 10 ans), des expressions du visage enfantines, des vêtements de jeune, etc. Il réalise des traits de contours un peu lâches dans les arrondis ce qui donne plus de souplesse aux silhouettes de Cody, KM, Alana, Nathaniel et Paul. Il agrandit un peu leurs yeux pour faire passer plus d'émotion, essentiellement lors d'un étonnement ou sous l'effet de la peur. le lecteur se rend compte que Mike Ploog est adepte de la bouche ouverte pour ses personnages avec une régularité qui dépasse les 50%, reflétant un manque de nuances dans les expressions. En revanche les postures des personnages sont beaucoup plus naturelles et expressives. Il se montre très convaincant avec les différentes créatures merveilleuses et surnaturelles. L'artiste sait croquer des bestioles et une sorcière aux formes inventives, avec une texture presque palpable pour leur peau ou leur parure. le lecteur peut voir que ces créatures comprennent une discrète touche d'exagération qui les rend tout public, sans agressivité méchante. Au départ, Mike Ploog doit représenter un environnement normal de petite ville. Il intègre suffisamment de détails pour donner un cachet spécifique à la rue et au parc. Puis l'action du récit se déroule dans un monde fantastique, et il s'amuse beaucoup avec les arbres torturés, la végétation à demi vivante, les flammes qui dansent. Il ne crée pas vraiment un environnement consistant et pensé à l'échelle de la localisation spatiale relative des différents endroits, mais les éléments de décor sont consistants d'un endroit à l'autre. À plusieurs reprises, il doit également changer de forme narrative, en passant d'une bande dessinée traditionnelle, à des illustrations pour les cellules de texte, voire même des fac-similés des pages d'un livre. le lecteur apprécie la fluidité de la narration visuelle pour ces trois formes, ainsi que les mises en page changeantes. Au fur et à mesure de son avancée, le lecteur se rend compte que JM DeMatteis a souhaité rendre son ouvrage accessible au plus grand nombre et en particulier aux enfants. le lecteur peut parfois ne pas se sentir concerné par la narration qui en découle, avec une trame assez simpliste. Il se rattrape un peu avec les cellules de texte et les remarques du narrateur, mais là encore ses observations restent souvent dans le constat, sans beaucoup de réflexion. Même la remarque sur la nature malléable et relative du temps (entre le passé, le présent et le futur) ressemble plus à une blague récurrente, qu'à une réflexion sur sa nature. Malgré tout, il apparaît que cette remarque finit par prendre un autre sens quand on l'applique à l'intemporalité d'un récit. En outre, le lecteur se rend compte que la stratégie de Cody DiMarco face à la méchanceté de son ennemi, et les conseils de Paul Brightfield ne vont pas dans le sens de l'affrontement, mais prennent position pour une autre posture, plus adulte et plus humaniste. Le lecteur adulte ressort de ce tome avec un sentiment mitigé. Il a pu apprécier l'originalité des dessins de Mike Ploog, et sa capacité à s'adapter aux changements de styles narratifs, mais il a également constaté qu'ils restent dans un registre assez classique, empruntant beaucoup à l'imagerie d'Alice aux pays des Merveilles. De la même manière, il a pu apprécier la sophistication de la narration de John-Marc DeMatteis, avec les observations du narrateur entremêlées à l'intrigue, mais avec une volonté de rester très concret qui ne permet pas au récit de s'envoler vers la poésie ou l'onirisme.
Digitaline
Cette BD, réalisée sur ordinateur en 1989, souffre de défauts visuels. Le trait est pixellisé, les couleurs sont froides et les décors semblent tracés à la règle. Cela a mal vieilli et ne m'a pas séduit. L'intrigue est prévisible, avec une journaliste enlevée dans un pays dangereux et son ami courageux qui la sauve. La carte postale comme stratagème est peu crédible. Malgré ses défauts, cette BD reste intéressante en tant que premier essai européen réalisé sur ordinateur. Cependant, je ne la recommande pas.
Riverdale présente Betty et Veronica
Le changement, c'est plus tard. - Ce tome contient une histoire complète qui ne nécessite pas de connaissances préalables des personnages. Il comprend les 3 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2016/2017, écrits, dessinés, et encrés par Adam Hughes, avec une mise en couleurs effectuée par José Villarrubia, avec un lettrage réalisé par Jack Morelli. Il comprend également les 29 couvertures variantes réalisées, entre autres, par Mahmud Asrar, Cliff Chiang, Bilquis Evely, Francesco Francavilla, Tula Lotay, Moritat, Ryan Sook, Chip Zdarsky, David Mack, Bengal, Paolo Rivera, etc. Ce tome comprend également l'épisode 12 de la série Jughead, écrit par Ryan North, dessiné et encré par Derek Charm. À Riverdale (une ville fictive des États-Unis), Hot Dog, le chien de Jughead est en train de commenter (pour le bénéfice du lecteur) le dessin pleine page qui montre Betty (Elizabeth Copper) et Veronica (Veronica Lodge, surnommée Ronnie) en train de se crêper le chignon devant d'autres étudiants, dans le gymnase couvert de l'université. 6 semaines auparavant, Archie (Archibald Andrews) et Jughead (Forsythe Pendleton Jones III) étaient en train de marcher en réfléchissant à l'issue de combats imaginaires, entre le Père Noël et le Lapin de Pâques, entre eux, entre Betty et Veronica. En devisant ainsi, ils parviennent devant la maison de Betty. Elle est en train de manipuler des sacs de gravier de 30 kilogrammes, pendant que Veronica se prélasse dans une chaise longue en lui donnant des conseils relatifs à son hydratation. Les 4 amis décident de se rendre au diner de Pop (Terry Tate) pour aller manger. En route, les quatre amis manquent de se faire renverser par un camion de l'entreprise Kweekwegs Koffee, une chaîne de café. Ils arrivent et constatent une pancarte annonçant la fermeture imminente du diner Chez Pop. Ils pénètrent dans l'établissement et interrogent Pop sur la raison de cette fermeture. Il leur explique que la chaîne Kweekwegs souhaite installer un de leurs établissements sur le site du sien, et qu'ils l'ont racheté à la banque auprès de laquelle il a contracté un prêt. Il disposait d'un délai de 6 semaines pour réunir la somme manquant pour rembourser la banque et ainsi éviter ce rachat. Malheureusement il ne voit pas comment réunir 60.000 dollars dans un délai aussi court. En outre, il ne peut pas renégocier son prêt, car la chaîne Kweekwegs a racheté cette banque. Betty décide immédiatement de prendre les choses en main pour réussir à réunir cette somme. Veronica reste étrangement en retrait. Le personnage d'Archie a été créé en 1941 par John L. Goldwater, Bob Montana et Vic Bloom. Sa série de comics met en scène des personnages blancs au lycée vaguement facétieux, pour des gags très consensuels. La série initiale a donné lieu à de nombreuses séries dérivées dont une consacrée à Betty & Veronica. Les lecteurs se désintéressant progressivement de cette vision édulcorée et très blanche d'une petite ville de l'Amérique, les responsables éditoriaux ont entrepris de la moderniser. Un signe avant-coureur a été l'arrivée de zombies à Riverdale dans Afterlife with Archie (2013/2014) par Roberto Aguirre-Sacasa & Francesco Francavilla, et la mort d'Archie dans The Death of Archie: A Life Celebrated. En 2015, les lecteurs ont vu arriver une nouvelle série consacrée au personnage en 2015 par Mark Waid & Fiona Staples, avec des protagonistes un peu plus âgés, et des histoires pour un lectorat également un peu plus âgé. Enfin en 2017, Archie et consorts ont eu droit à une série télévisée : Riverdale. le présent tome s'inscrit dans cette vague de modernisation. Le lecteur peut donc être attiré par l'envie de découvrir des personnages de son enfance se comportant en jeunes adultes, dans une histoire un peu moins tout public. Plus vraisemblablement, le lecteur de comics est venu attiré par l'identité de l'auteur : Adam Hughes, surtout célèbre pour ses couvertures proposant des versions pin-ups de superhéroïnes, et pour quelques rares épisodes dont il a dessiné l'intérieur, comme la rencontre WildCATS / X-Men : les temps modernes (1997). Il ne fait pas de doute que cet artiste saura transcender l'apparence de Betty et de Veronica pour en faire des jeunes femmes à la séduction physique irrésistible. La couverture montre deux jeunes bien comme il faut, pleines de vie, sans hypersexualisation de leur corps. le premier dessin en pleine page les montre en train de se tirer les cheveux, avec des silhouettes fines, en talons hauts, mais sans exagération de leur taille de bonnet ou de leurs hanches. le dessin le plus dénudé se trouve également dans l'épisode 1 alors qu'elles sont allongées sur le sol en bikini, mais là encore il n'y a pas de pose lascive ou suggestive. Dans l'épisode 2, il y a bien une scène de lavage de voiture en bikini, mais ce n'est ni Betty, ni Veronica qui passe l'éponge sur les carrosseries et le lecteur ne voit qu'un mollet dénudé et un avant-bras sortir de la mousse. Adam Hughes réalise donc des planches très chastes, sans intention d'émoustiller le lecteur mâle ou de titiller sa libido. En entamant ce tome, le lecteur se trouve un peu surpris du parti pris du metteur en couleurs. José Villarrubia a choisi une palette un peu terne. Il ne s'agit pas de teintes sépia qui désigneraient le récit comme appartenant au passé, ou comme étant une vision fantasmée d'une Amérique sublimée. Il s'agit plutôt d'une approche qui refuse une vision rutilante, préférant donner une vision plus en retenue, ce qui est en cohérence avec l'approche de l'artiste. Tout du long des 3 épisodes, le lecteur apprécie de pouvoir se projeter dans des environnements représentés de manière réaliste avec un bon niveau de détails : la pelouse devant la maison des Cooper, le diner de Pop, le salon des Cooper, le gymnase du lycée. Il observe que les feuilles d'automne tombent régulièrement quand les personnages se trouvent dans la rue. Il peut regarder les tenues vestimentaires des personnages, simples et adaptées à des jeunes, ainsi que les différentes coiffures. Hughes sait conférer une évidence naturelle à tous ces éléments. Le récit repose sur l'imminence d'un changement, une menace déjà utilisée dans la série Archie à plusieurs reprises, à savoir la disparition du diner de Pop. Il s'agit avant tout d'une comédie de situation, disposant d'un peu plus de moyens qu'à l'ordinaire, ce qui permet d'inclure des séquences tournées en extérieur. La vitalité de la narration repose donc beaucoup sur le jeu des acteurs. Sur ce plan-là, Adam Hughes sait insuffler de la vie à ces personnages, que ce soit au travers des expressions de leur visage ou de leur posture. Il compose des plans de prise de vue qui accompagnent les personnages, et changent régulièrement d'angle pour se focaliser soit sur leurs mouvements, soit sur leurs expressions. Il conçoit son découpage de planche en cases en fonction de la nature de la scène. Il intègre quelques dessins en pleine page, à raison d'un ou deux dans les 2 premiers épisodes, sans en abuser. Il joue avec les attentes du lecteur, en montrant Betty et Veronica prêtes à en venir aux mains, puis en expliquant à quoi correspond réellement cette scène. Il se joue de lui avec 2 pages dans l'épisode 1 sur fond blanc, avec plus de phylactères que de personnages, expliquant que le chien a mangé les planches dessinées et qu'il a dû y substituer celles-là. Le lecteur découvre donc une comédie de situation, avec des personnages sympathiques, à la psychologie superficielle, avec des sentiments positifs et des émotions chaleureuses. Petit à petit, il se rend compte que l'auteur déroule son intrigue suivant une structure très linéaire réservant peu de surprises, dépourvue d'action. Les échanges entre les personnages restent au niveau de la discussion sans conséquence, leur dimension psychologique n'étant pas développée. Adam Hughes se conforme au cahier des charges qui est de mettre en scène des personnages sains et sans problème, dans une Amérique blanche et propre sur elle, sans dimension sociale. Ces personnages restent dans une stase qui les maintient dans une position immuable, échangeant des propos banals par lesquels il est hors de question de remettre en cause l'ordre établi ou d'introduire du changement. Alors que la narration visuelle a gagné en sophistication, l'histoire reste dans le même registre essentiellement destiné à des enfants. Le lecteur est attiré par la promesse de trois épisodes dessinés par Adam Hughes. Cet artiste s'investit complètement dans la narration visuelle, sans se reposer sur la plastique des deux héroïnes. Le lecteur voit des personnages vivre sous ses yeux, dans une comédie de situation innocente. Il découvre petit à petit que le scénario reste sagement dans les clous des spécifications immuables de la série, pour un immobilisme déconcertant. - - Jughead 12 - Betty, Veronica, Kevin, Reggie, Dilton, Jughead et Archie sont en train de jouer à un jeu vidéo, une course de voitures qui évoque Mario Kart avec des véhicules qui évoquent ceux de Les fous du volant. Reggie gagne haut la main et les tous les autres un gage : ils doivent le servir et accéder à ses demandes pendant une journée. Le fait est que le lecteur n'est pas venu à ce tome pour lire un épisode de Jughead, mais pour découvrir la dernière création d'Adam Hughes. Il peut donc supposer que les responsables ont choisi un épisode pour accrocher le lecteur avec le meilleur d'une autre série. de fait, il a été écrit par Ryan North, le scénariste de la série Marvel The unbeatable Squirrel Girl. le lecteur découvre une histoire très linéaire à l'intrigue peu épaisse, avec beaucoup de parlottes, et quelques leçons de morale. Les dessins sont à destination de jeunes lecteurs, simplifiés et très expressifs, mais sans grande inspiration dans la mise en page, ou le jeu d'acteurs. Il est peu probable qu'un tel épisode l'incite à aller tester d'autres séries d'Archie Comics.
Rapture - Ninjak / Shadowman
Le ravissement n'est pas pour le lecteur. - Ce tome contient les quatre épisodes de la minisérie, initialement parus en 2017, écrits par Matt Kindt, dessinés et encrés par CAFU (Carlos Alberto Fernandez Urbano), et mis en couleurs par Andrew Dallhouse. Roberto de la Torre a dessiné et encré 5 pages de l'épisode 2, et 8 pages de l'épisode 3 qui constituent des retours en arrière. Juan José Ryp et Francis Portela ont dessiné quelques pages de l'épisode 4, ayant pour sujet l'un des personnages dans un autre environnement. Tama est en train de progresser sur un chemin dans la dimension du Deadside, avec à ses côtés une créature familière qu'elle appelle T.A.D.D. Elle arrive au pied d'une sorte de tronc géant évidé suspendu dans les airs et il lui faut en commencer l'ascension. Au bout de plusieurs marches fichées dans le tronc courant en spirale le long de la paroi intérieure, elle parvient devant un premier gardien qui lui pose une énigme. Elle lui en a donné la réponse avant qu'il n'ait fini de prononcer le dernier mot et elle poursuit son ascension, toujours accompagnée par T.A.D.D. Après une poignée d'autres épreuves, elle finit par arriver devant Amy (aussi appelé Hanar), un démon géant emprisonné-là qui est obligé de toujours dire la vérité. Elle lui a amené un cadeau (une truffe de manticore), qu'elle lui offre avant de poser ses questions. Elle lui présente un scroll dont elle n'arrive pas à déchiffrer l'écriture. Amy lui explique qu'il s'agit d'une écriture conçue pour être indéchiffrable, et utilisée à l'époque de la Tour de Babel. Il lui explique que contrairement au mythe qui est parvenu jusqu'à l'époque contemporaine, Babel désignait la créature qui était à l'origine de la construction de la Tour. Il lui indique où se trouve le site sur lequel la Tour fut érigée, dans Deadside. Ce site sert maintenant de repère à un barbare appelé Rex the Razer (celui qui rase les constructions). Tama est la géomancienne de cette époque, la personne chargée de protéger la Terre, et elle tire ses informations du livre du Géomancien dont les entrées sont souvent cryptiques. Elle décide de rendre visite à Rex, puis d'aller recruter des alliés sur Terre. Elle commence par contacter Ninjak (Colin King). Ce dernier l'aide à réquisitionner Punk Mambo (Victoria Greaves Trott) et Shadowman (Jack Boniface, aussi connu sous le nom de Magpie). A priori, ce récit s'adresse en premier lieu à des lecteurs familiers de l'univers partagé Valiant. Pour commencer le scénariste n'effectue pas beaucoup de rappels sur la nature de Deadside, et il vaut mieux être familier de ce concept. Ensuite, en 4 épisodes, il n'a pas le temps de s'étendre sur Ninjak, et encore moins sur le passé complexe de Shadowman. Il s'agit d'un personnage qui a été créé en 1992, par Jim Shooter & Steve Englehart (scénaristes), et Mike Manley (dessinateur). Les épisodes de sa série se sont vendus à plusieurs centaines de milliers d'épisodes dans les années 1990 et il avait même eu droit à une minisérie réalisée par des auteurs de premier de plan par Garth Ennis & Ashley Wood (1997). C'est donc tout naturellement que l'éditeur Valiant a relancé une série à son nom en 2012 par Justin Jordan & Patrick Zircher, puis écrite par Peter Milligan. Effectivement, il vaut mieux que le lecteur soit familier de l'univers partagé Valiant. Il lui faut avoir une vague idée de ce que représente le géomancien dans ce monde, ce qu'est Deadside (sinon il se demandera tout du long pourquoi Ninjak est obligé d'y porter une armure et pas les autres), qui est Ninjak, qui est Shadowman (ce qui est plus compliqué) et qui est Punk Mambo. S'il n'a jamais croisé ces personnages, il ne risque pas de s'y attacher car ils n'ont pas beaucoup de personnalité propre au-delà d'un unique trait de caractère. Pour les lecteurs qui fréquentent régulièrement l'univers Valiant, ces références font sens, mais ne sont pas gage d'une bonne histoire. Ninjak et Punk Mambo participent au récit mais de manière mécanique, et il n'y a pas de scène qui les mettent particulièrement en valeur. Tama est encore un personnage trop récent pour disposer de lecteurs qui la suivent. Neville, tout sympathique qu'il soit, n'apparaît que le temps de 2 pages. Il reste donc Shadowman qui se trouve au cœur du récit, car il est l'enjeu, l'individu que Babel souhaite capturer et utiliser. Le lecteur ressent bien la difficulté du scénariste à mettre en scène un personnage aussi compliqué que Shadowman. Il le cantonne au rôle de McGuffin, un individu à nouveau sans beaucoup de personnalité, qui est en mesure de fournir l'énergie manquante à Babel pour parachever sa Tour. Matt Kindt évoque rapidement les blocs de construction du personnage : son alter ego Jack Boniface (mais il ne fait que citer son nom), son lien avec la mythologie des Loa (réduite ici à une source d'énergie surnaturelle), et à peine son autre alias Magpie. du coup Shadowman est réduit à un artifice narratif, et le récit permet de rappeler qu'il constitue un lien entre Deadside et Liveside. le lecteur reporte alors son attention sur l'intrigue proprement dite et sur la narration visuelle. le début du récit est assez prometteur car Matt Kindt se montre facétieux avec le personnage de Tama qui affronte les épreuves parsemant son chemin avec une aisance rafraîchissante. Sa prise de contact avec Amy s'avère tout aussi amusante, car elle est la première de tous ses visiteurs à avoir pensé à lui amener un cadeau. La redescente vers la cité est tout aussi enlevée, avec 6 épreuves en 1 case chacune, en une seule page. La suite se gâte un peu. le lecteur découvre l'histoire de Babel, sa motivation pour construire une Tour, la manière dont il s'est échappé de sa geôle après sa première tentative ratée, et la façon dont il a recruté des sbires. L'histoire en elle-même est un peu originale, mais elle reste très linéaire et trop impersonnelle pour arriver à impliquer le lecteur. Quant à la mission menée par Tama et son équipe, c'est la succession d'affrontements attendus, avec un traître dans l'équipe qui veut faire passer son intérêt personnel avant le reste. Mais comme le scénariste n'a pas réussi à faire exister ses personnages, ils ne dégagent pas d'empathie, et le lecteur ne voit que la mécanique du scénario sans éprouver aucun sentiment pour l'un ou l'autre. Sur le plan de la narration visuelle, le lecteur retrouve des dessinateurs habitués de l'univers Valiant. La combinaison des dessins très propres sur eux et de la mise en couleurs pleine de couleurs chatoyantes séduit immédiatement le lecteur qui se projeter aux côtés des personnages. le premier épisode est très impressionnant pour son inventivité dans les territoires traversés par Tama, les créatures rencontrées, et les cadrages. le lecteur la regarde progresser dans ce tronc d'arbre creux. Il découvre avec elle les créatures étonnantes. Il reprend la route jusqu'à la forteresse volante occupant la place de l'ancienne Tour de Babel, et il a même la surprise de faire le tour des bureaux du quartier général du MI6. Les couleurs habillent et complètent les dessins et ajoute une touche surnaturelle aux créatures diverses, ainsi qu'à l'atmosphère même de Deadside. Les pages réalisées par CAFU dans les épisodes 2 & 3 reprennent les mêmes éléments que dans l'épisode 1, sans nouvelle surprise et avec une densité d'information significativement plus faible. Fort heureusement, la tendance s'inverse dans le dernier épisode avec l'inondation très spectaculaire. Au cours du récit, dans les épisodes 2 & 3, le lecteur apprend l'histoire passée de Babel au travers de ce que raconte Rex the Razer, puis Babel lui-même. Il est donc justifié que la narration visuelle soit assurée par un autre artiste pour rendre compte de cette temporalité différente. Roberto de la Torre réalise des dessins plus organiques, plus griffés, moins propres sur eux, attestant d'une époque moins civilisée, et de pratiques plus violentes. Andrew Dalhouse modifie également son schéma de couleurs, en utilisant des teintes essentiellement marron afin d'indiquer qu'il s'agit de scènes dans le passé. le résultat apparaît plus brut, et très bien adapté à la nature de ses séquences. le lecteur attentif sourit un instant quand il se rend compte que la guerrière dessinée par de la Torre dans l'épisode 2 porte un bikini à maille qui évoque immédiatement Red Sonja. Dans l'épisode 4, le lecteur découvre une poignée de planches réalisées par Juan José Ryp et Francis Portella, deux autres artistes habitués des parutions Valiant. À nouveau, la participation de deux autres dessinateurs est justifiée par le scénario, en particulier lors des pages se déroulant dans Liveside. Ryp est méticuleux comme à son habitude, et Portella est lumineux comme à son habitude. Arrivée à la fin du récit le lecteur a bien compris qu'il s'agissait d'une histoire de commande pour Matt Kindt, servant à repositionner Shadowman dans l'univers partagé Valiant et à faire office d'introduction pour sa série de 2018. Les dessins réalisent une narration visuelle attractive, mais qui n'arrive pas à masquer le déroulement mécanique du récit, ni à pallier l'absence de personnalité des protagonistes.
X-Men - Les Enfants de l'atome
Une belle synthèse, mais manquant d'originalité - Ce tome revient sur les événements qui ont immédiatement précédé la première apparition des X-Men dans l'épisode 1 de la série Uncanny X-Men, paru en 1963. Il contient les six épisodes de la minisérie, initialement parus en 1999/2000, écrits par Joe Casey, dessinés par Steve Rude avec un encrage d'Andrew Pepoy (épisodes 1 à 3), Paul Smith & Michael Ryan avec un encrage d'Andrew Pepoy & Paul Smith (épisode 4), et Esad Ribic avec un encrage d'Andrew Pepoy (épisodes 5 & 6). La mise en couleurs a été réalisée par Paul Mounts pour les 6 épisodes. Un jeune mutant a perdu le contrôle de ses pouvoirs, et a détruit par accident de nombreux pavillons dans la ville de Middletown au Missouri. Juste après un reportage sur cette tragédie, la télévision diffuse l'intervention de William Metzger, un individu qui prône la défense de la race humaine contre ces monstres incontrôlables dont les mutations génétiques peuvent provoquer des catastrophes. Dans un bureau de FBI, l'agent Amos (surnommé Fred) Duncan reçoit l'ordre de son supérieur hiérarchique d'investiguer sur le sujet. de retour à son bureau, Fred Duncan le trouve plongé dans le noir. Il commence à parler à haute voix pour prendre des notes sur son dictaphone qu'il a surnommé Bill. Il est interrompu par un individu en chaise roulante qui se trouve dans son bureau et qui commence à lui expliquer son point de vue sur les mutants. La nuit, un individu avec des ailes vient en aide à une femme se faisant agresser dans une rue de New York. le lendemain, Charles Xavier se rend chez les Grey pour évoquer la possibilité qu'ils inscrivent leur fille dans son établissement. Elaine et John Grey promettent d'y réfléchir. La télévision annonce que le lycée de Freeport High School a battu tous les records d'endettement, atteignant le million de dollars de déficit. Ce jour-ci, un nouveau professeur en chaise roulante y postule pour se faire engager. Dans les couloirs, 3 individus (Chad, Mikey et Starkey) à l'allure donnant l'impression qu'ils cherchent une victime à humilier évoquent le discours de William Metzger dans les jours à venir. Ils regardent passer d'un air envieux Hank McCoy la star de l'équipe de football du lycée. Dans le gymnase, Scott Summers, un adolescent souffreteux se fait rabrouer par le professeur de sport, qui se moque de ses lunettes rouges et de sa constitution chétive. Dans l'escalier de service, Bobby Drake s'est isolé pour être tranquille en se demandant pourquoi il a si froid. Dans différents états, la peur motive des citoyens à organiser une poignée de lynchage. Régulièrement l'éditeur Marvel demande à une équipe créatrice de remettre au goût du jour, les origines d'un de ses personnages ou d'une équipe. Au tournant du millénaire, il échoit à Joe Casey de s'acquitter de cette mission pour les X-Men. du point de vue de l'intrigue, il s'agit d'une gageure car il faut intéresser le lecteur à une histoire qu'il connait déjà, voire dont il a déjà lu de nombreuses versions. Joe Casey a l'idée de commencer son histoire quelques jours avant la première scène de Uncanny X-Men 1, paru en 1963, de Jack Kirby & Stan Lee. Ce premier épisode s'ouvrait avec le professeur X appelant ses X-Men à lui. Ils étaient alors au nombre de 4 : Cyclops, Iceman, Beast et Angel, déjà avec des costumes jeune & bleu. Mais, bien sûr, ils ne sortaient pas de nulle part, ils avaient été recrutés précédemment, et l'hystérie anti-mutante trouvait ses racines dans des événements passés. Joe Casey montre donc ce qui a conduit à cet état de fait. En fonction de sa familiarité avec les premiers épisodes de la série Uncanny X-Men, le lecteur (re)découvre des faits sur le passé des personnages, amalgamés dans une narration qui rétablit une cohérence entre eux, en amenant de nouveaux éléments. le scénariste a l'art et la manière de lier les événements dans un tout cohérent. Il peut voir dans quelles conditions vivaient les premiers X-Men avant d'intégrer l'école de Westchester : Jean Grey tranquillement dans le pavillon cossu de ses parents, Hank McCoy en utilisant ses pouvoirs dans le civil tout en les faisant passer pour les capacités d'un athlète accompli, Warren Worthington en essayant d'utiliser ses pouvoirs pour redresser les torts, Scott Summers vivant dans la pauvreté et exploité par un criminel sans scrupule, Bobby Drake dans le pavillon plus modeste de ses parents. de ce point de vue, le récit satisfait la curiosité du lecteur, mais sans réussir à générer assez d'empathie pour ces personnages. Ils sont pris dans une situation où ils doivent cacher leur pouvoir, où ils tentent de les utiliser discrètement et où ils se trouvent dans des fortunes diverses. La problématique pour le lecteur est qu'il sait déjà tout cela, et que Joe Casey ne parvient pas à faire ressentir leurs états d'esprit ou leurs émotions. C'est plus ou moins marqué en fonction des personnages ; c'est criant pour Bobby Drake, et c'est moins marqué pour Scott Summers. Le lecteur peut alors s'intéresser aux personnages secondaires comme Fred Duncan, William Metzger, les 3 loubards, ou même Charles Xavier. En fait il n'en apprend pas beaucoup plus sur Fred Duncan, les 3 loubards brillent par leur dimension générique, et même William Metzger ne se différencie pas beaucoup des nombreux agitateurs anti-mutants qui l'ont précédé ou qui le suivront. du coup, le lecteur se rabat sur l'intrigue qui est dense et racontée de façon moderne, sans bulle de pensée, et avec des inserts d'émission de télévision réguliers, pour rendre compte de la perception du phénomène tel qu'il est relayé par les médias. Il y a quelques surprises avec l'apparition d'un ou deux personnages emblématiques de la série, et bien sûr des affrontements physiques à chaque épisode pour fournir le quota d'action. À nouveau le tout est bien ficelé, mais étrangement, Joe Casey semble intimidé par son sujet, trop respectueux, alors qu'il a écrit de nombreux récits décapants comme la série SEX avec Piotr Kowalski, Butcher Baker the righteous maker avec Mike Huddleston, et des récits de superhéros traditionnels comme Vengeance avec Nick Dragotta, The Bounce avec David Messina, Godland avec Tom Scioli. Le lecteur est plus impressionné par la couverture du recueil et par les 3 premiers épisodes dessinés par Steve Rude. Cet artiste a l'art et la manière de donner une impression de personnages enjoués, d'environnements vaguement rétro, avec des dessins facilement lisibles tout en contenant une bonne densité d'informations visuelles. Dès le premier épisode, le lecteur peut par exemple repérer Dana Scully et Fox Mulder dans un des couloirs du FBI. L'encrage d'Andrew Pepoy respecte bien les crayonnés de Rude, en particulier dans les arrondis élégants. le lecteur prend grand plaisir à s'immerger dans cet environnement vaguement suranné, avec des hommages visuels patents à Jack Kirby (les belles courbes de Cerebro). Il observe les tenues vestimentaires de chaque personnage, y compris des figurants, notant qu'elles renvoient parfois aux années 1960. Il détaille les ameublements et les accessoires de chaque endroit pour s'imprégner de leur atmosphère, de la personnalité des personnes qui les ont aménagés. L'intérieur des Grey est vraiment douillet, alors que la cantine du lycée est aussi impersonnelle qu'elle est fonctionnelle. Il regarde incrédule l'opulence de l'aménagement du jardin de l'école de Westchester. Régulièrement le regard du lecteur s'arrête sur une image saisissante comme l'agent Duncan parlant à son dictaphone (clin d'œil à Dale Cooper parlant à Diane), Jean Grey s'amusant à faire tournoyer des pétales de fleur autour d'elle dans le jardin de ses parents (magnifique), Scott Summers avec un teeshirt crasseux et troué dans une posture d'abattement indicible, Bobby Drake caché sous ses draps partiellement recouverts de neige. Le lecteur ressent forcément une pointe de déception du fait que Steve Rude n'ait pas dessiné les 6 épisodes. Les dessins de Paul Smith s'inscrivent dans l'approche de ceux de Rude, mais avec un encrage plus léger, et une densité d'information moins élevée. Ils en conservent néanmoins l'élégance. Les dessins d'Esad Ribic reviennent à une apparence beaucoup plus classique de dessins de superhéros, une variété de prise de vue moins importante, mais une forme de romantisation des personnages pour leur donner une aura plus tragique. Globalement ces deux derniers épisodes sont nettement un cran en dessous des quatre premiers. À la fin du tome, le lecteur reste sur l'impression d'un rendez-vous manqué. Joe Casey sait tisser la toile de fond de la création des X-Men, en étant raccord avec leurs débuts dans leur propre série en 1963. Mais il a bien du mal à les faire exister, à générer une empathie chez le lecteur. La première partie du récit n'en reste pas moins très agréable du fait des dessins toujours pleins de charme et d'élégance de Steve Rude. La narration visuelle baisse d'un cran dans la deuxième moitié du récit.