Retour chez Dargaud pour Trondheim, engendrant l'arrêt des Nouvelles aventures de Lapinot et le lancement de cette "Aventure de Lapinot dans une situation pas possible". Aucune véritable rupture néanmoins hormis ce changement d'éditeur.
Je ne sais si l'impulsion et l'inspiration s'étaient quelque peu taries dans les locaux de L'Association, je constate modestement que la qualité était moindre depuis que les aventures avaient perdu en formidable, davantage la faute selon moi à des scénarios souvent bien maigres, que l'auteur parvenait néanmoins à sublimer via des illustrations chaleureuses et sympathiques associées à un réel talent de dialoguiste.
Le scénario de ce premier tome est totalement rocambolesque et eut pu être écrit par l'inénarrable personnage de Richard. Peut-être un moyen pour l'auteur de personnifier une liberté éditoriale retrouvée, pour un résultat que L'Association aurait néanmoins sans doute validé, tant il s'inscrit dans une continuité.
C'est toujours très agréable à lire, un divertissement humaniste discourant sans véritable revendication ni accusation sur nos sociétés contemporaines.
Mon point de vue sur les Nouvelles aventures est encore d'actualité pour cette aventure-ci, pas de baisse de régime selon moi (manque d'objectivité, horizon d'attente préparé par l'avis de Tomdelapampa ?).
Le scénariste adapte son propre roman et disons que ça se voit que c'est un roman au vu des nombreux textes narratifs, ça peut prendre des pages avant qu'un des personnages parle !
On suit la vie d'Ernst Hanfstaengl, un des premiers compagnons d'Hitler qui est peu connu. Il faut dire que le dictateur l'a vite viré de son entourage une fois qu'il a obtenu le pouvoir. Il y a des bonnes anecdotes, mais on tombe dans les travers des biographies en BD : on a souvent un résumé de ce qui arrive à Hanfstaengl et on saute d'une époque à une autre rapidement. J'aurais préféré, par exemple, qu'on voit un peu plus en quoi celui qu'on surnommait Putzi a été important dans les premières années politiques d'Hitler. Il parait qu'il avait des contacts influents, mais on voit surtout qu'Hitler aimait sa femme et qu'il joue Wagner au piano. S'il y a des bons passages, cela devient un peu monotone à un moment vu que le type a l'habitude de manquer son rendez-vous avec l'histoire et à la fin il a l'air d'un gros loser. Enfin un loser qui a vécu libre plus longtemps que la plupart de ses compagnons d'armes, la vie de Putzi est à lire pour au moins découvrir à quel point la vie est ironique.
Le dessin est correct, mais la mise en page manque de dynamique, ce qui accentue le fait que ce one-shot est pas mal, mais c'est surtout un album à emprunter parce que l'envie de relecture est tout de même un peu nulle.
Tronchet est un auteur que j’aime bien, surtout lorsqu’il nous propose des histoires dominées par un humour un peu con, de l’humour noir et pas mal de cynisme, avec des anti-héros frôlant le pathétique. Même s’il a aussi publié des histoires plus classiques et intéressantes hors de ce cadre, c’est quand même dans cette veine humoristique que je l’attendais (ou l’espérais ?) ici. Il faut dire que le titre, allez savoir pourquoi, m’avais fait penser à l’album de Fabcaro Carnet du Pérou, ce qui avait renforcé mes attentes.
Sauf que, contrairement à Fabcaro, Tronchet a bien mis les pieds dans le pays décrit – il y est même resté près de trois ans avec sa femme (Anne Sibran) et leur fils. Et qu’en plus ici on est plus proche du carnet de voyage classique que de la franche déconne.
La lecture est plaisante, mais m’a un chouia laissé sur ma faim. Surtout la première partie, intéressante, avec quelques anecdotes amusantes ou plaisantes, mais qui n’égale pas les récits de Guy Delisle. La deuxième moitié de l’album m’a davantage intéressé. On quitte Quito pour aller à la rencontre d’Indigènes dans la forêt amazonienne, puis on traverse un immense lac de sel, pour finir par évoquer une mine d’argent (cette dernière visite inspirera probablement en partie Anne Sibran pour un roman, puis Tronchet pour son adaptation en BD dans Le Monde du dessous). Là il y a plus de réflexion, la partie documentaire et critique affleure davantage et rehausse l’intérêt de la lecture.
Les parents n’ont pas hésité à laisser leur fils vivre un long séjour parmi les « Indigènes », et plus généralement des aventures exotiques et hors des sentiers battus – je ne sais pas si je l’aurais fait, même si on imagine les expériences et souvenirs extraordinaires que cela a pu lui procurer.
Une petite lecture sympathique.
Après lecture de ce triptyque, je suis un peu surpris d'autant de louanges sur cette série qui figure dans les immanquables de BDThèque...
En effet, tout comme Bamiléké, j'ai trouvé la narration assez confuse entre passé et présent et avec des ficelles assez faciles pour introduire l'histoire. De plus, il ne se passe quand même pas grand chose dans le tome 1, qui se contente de planter le décor, ainsi que dans le tome 2 consacré au voyage de Siegfried avant l'affrontement final. Le tome 3 est un peu plus fouillé mais cela était malheureusement trop tard pour moi, n'ayant pas été sensible ni à la poésie qui devait se dégager de la série, ni aux personnages très lisses et classiques dans le genre.
J'ai également été un peu gêné par le trait très "Disneyien" d'Alex Alice avec son héros au physique parfait, ses jolis loups gambadant dans la forêt et le personnages de Mime au visage plus enfantin, dont l'objectif est uniquement de faire sourire le lecteur avec ses running gag relatifs à son enclume.
Il est vrai que je ne connais que très peu le mythe de l'anneau de Nibelung pour apprécier l'adaptation qu'en à faite Alex Alice et que j'ai peut-être trop lu de BD de ce type par le passé pour être surpris par cette série. J'ai ainsi préféré La Quête de l'Oiseau du Temps de Loisel dans le même genre.
L'ensemble reste tout de même honnête pour ne pas descendre en dessous de 3/5.
SCENARIO (Originalité, Histoire, personnages) : 5/10
GRAPHISME (Dessin, colorisation, mise en page) : 7/10
NOTE GLOBALE : 12/20
BD importante s'il en est. Retour sur le procès Pelicot et sur les dramatiques questions sociétales que cette sordide affaire de viols par soumission chimique nous crache à la figure.
Cette œuvre collective se propose via de multiples récits essentiellement documentaires, réalisés par des auteurs généralement différents, de rendre compte de l'importantissime procès des viols de Mazan. Après cette affaire, il n'est plus tenable de réfuter la réalité de la culture du viol dans nos sociétés patriarcales. Oui, cela choque, heurte bien des hommes, mais c'est une réalité idéologique et surtout sociologique. Cela n'équivaut pas à prétendre que tous les hommes sont des "crocodiles" violeurs en puissance, mais déclare simplement et tristement que de multiples pans de notre culture, que les lois de nos sociétés, etc. instaurent une norme comportementale empreinte de sexisme et de misogynie ayant de multiples conséquences, toutes minimisées et excusées, dont les plus dramatiques sont les féminicides et viols.
Loin d'être indigeste, ce volumineux pavé se lit d'une traite le souffle coupé : cette affaire happe l'attention tant elle bouscule notre croyance en l'homme. Egalement parce que la BD, certes souvent dans la paraphrase ou "l'anecdotique", parvient à recréer le sentiment alors dominant chez les féministes s'étant emparées du sujet, que cette fois, la situation bougerait, que la honte changerait de camp !
Non, il ne s'agissait généralement pas de monstres : les coupables n'étaient que des hommes, de simples routiers, pompiers, ouvriers..., parfois de bons pères de famille, des conjoints aimant, de bons employés appréciés de leurs collègues et patrons, des hommes pour nombre d'entre soutenus durant le procès par leurs proches et notamment leur conjointe.
Cette BD malheureusement met peu en perspective les choses, la faute aussi au projet initial, à ce souhait de construire une œuvre collective offrant modérément la possibilité de développer un point de vue, de synthétiser une pensée. Les brefs propos sur l'inceste et la culture du viol font entrevoir ce qu'aurait pu être cette BD, mais le projet ne souhaitait visiblement pas l'ampleur, plutôt dégager le sentiment d'une prise de conscience collective pouvant laisser espérer des jours meilleurs. Sur ce point, c'est réussi.
J’ai acheté cet album de James Tynion IV (The Department of Truth, Something is Killing the Children) pour lire un soir d’Halloween (en 2022, en VO), aguiché par la superbe couverture aux tons horrifiques, et à ce titre je ressors déçu de ma lecture.
On comprend en effet assez rapidement que les cauchemars de Jamie sont des manifestations de problèmes finalement assez terre-à-terre, à savoir les engueulades de ses parents. L’album propose certes une réflexion intéressante et pertinente sur les effets néfastes de nos comportements, nous parents, sur nos progénitures. Mais disons qu’il faut aussi s’enfiler des pages d’élucubrations d’un protagoniste un peu mou et pas toujours très attachant.
La mise en image de Gavin Fullerton (inconnu au bataillon) est en tout cas réussie.
Une lecture sympathique dans le genre roman graphique relationnel, mais passez votre chemin si vous êtes à la recherche d’une histoire horrifique. Je note que Urban fait aussi coïncider la sortie de l’album avec le mois d’Halloween… oui, je suis cynique.
Cette série est étrange, et je ne dis pas ça seulement parce que c'est une série fantastique. C'est surtout qu'elle oscille en permanence entre diverses histoires principales qui se croisent, dans une histoire de fantômes.
Difficile de décrire la série dans son ensemble, mais tout est articulé autour du personnage de Rose, jeune femme dont le père vient de mourir et qui peut sortir de son corps et parler aux fantômes. C'est assez lent dans le récit bien que les trois tomes embrassent une histoire assez touffue au final. Il y a des questions de famille, d'entreprises pharmaceutique méchante (référence à peine dissimulée du scandale du médiator), de sorcière, de lieux hantés... Mine de rien la densité des sujets est importante, même si je dois dire qu'au sortir du tome 2 je m'attendais à ce que toutes les résolutions ne soient pas satisfaisantes. Ce qui a effectivement été le cas, puisque l'enquête principale n'est pas le point final du récit, étrangement, avec une façon un peu molle de conclure cet arc narratif.
Dans l'ensemble c'est une série qui exploite l'idée des fantômes d'une manière originale, en effet, mais pas forcément extraordinaire non plus. A mon goût, ça manque de développement au vu de tout ce qui est présent et des nombreuses thématiques non entièrement développées. Une bonne série mais étrange, vraiment étrange. Elle a une atmosphère unique et se tient, même si je ne la trouve pas formidablement bien.
2.5
Un documentaire qui raconte la vraie histoire d'un réfugié afghan qui a fini ado à Paris dans une famille de juive venue de Tunisie.
La première partie montre la vie quotidienne de Lateef dans son nouvel environnement et c'est pas très captivant de le voir faire la fête avec sa famille d'accueil et ses nouveaux copains, mais au moins c'est sympathique de voir qu'il est capable d'être heureux après tout ce qu'il a vécu. Ensuite, on va voir comment il est passé de l'Afghanistan à la France avec tous les dangers que cela comporte. Il ne faut pas s'attendre à un truc qui creuse le sujet en profondeur comme ''L'Odyssée d'Hakim''. Sur une page on voit les problèmes du voyage, la page suivant Lateef est dans un autre pays, la page d'après on voit un autre problème et ensuite deux-trois cases plus loin il est dans un autre pays, etc et etc....La partie la plus intéressante est lorsque notre pauvre Lateef doit se faire reconnaitre comme réfugié mineur et bonne chance pour faire ça rapidement devant l'administration française qui bien sur prends ses décisions de manière arbitraire.
Au final, ça se laisse lire et le dessin est sympa, mais ayant déjà lu d'autres bandes dessinés sur le sujets des migrants, je n'ai pas appris grand chose en dehors de ce qui touche les mineurs, le documentaire portant pour une fois sur un ado et non un adulte. C'est un album intéressant si on veut un résumé rapide sur ce qui vit ses humains qui traversent des pays et des pays pour arriver à leur destination, mais si on n'a pas peur de grosses lectures, je conseil plus la lecture de L'Odyssée d'Hakim qui est vraiment la meilleur série sur le sujet.
Je découvre en mettant cet avis que l’album fait partie d’un édifice plus vaste, dont il est la deuxième pierre. Je n’ai pas lu le précédent album, mais chacun semble pouvoir se lire indépendamment. Du moins, si j’en crois Mac Arthur le premier n’éclaire pas forcément l’intrigue de celui-ci.
Car c’est un peu le reproche que je peux faire à cet album, si la lecture n’est jamais déplaisante ou ennuyeuse, j’en suis sorti en me demandant où Lemire voulait en venir. De la même façon – mais peut-être ne suis-je pas suffisamment connaisseur de l’auteur – je n’ai pas forcément retrouvé la patte de Lovecraft, pourtant visiblement revendiquée, si ce n’est une certaine ambiance morbide et angoissante, et la menace latente de « monstres » encore mal identifiés.
Un fin mot de l’histoire obscur donc, ce qui entraine un peu de frustration (en particulier autour de la « disparition » de l’une des héroïnes). Mais cela dit la lecture n’est pas désagréable. Les différents lieux /époques (le passé durant l’enfance des deux héroïnes, le présent pas mal d’années plus tard, et un monde parallèle illustrant l’univers fantasy d’un livre que les deux adolescentes étaient en train d’inventer/écrire) s’imbriquent assez bien, les allers-retours entre ces moments ne hachent pas trop le récit.
Mise en page et narration, mais aussi le dessin, sont aussi pour beaucoup dans le côté fluide de la lecture (qui est assez rapide, car il n’y a pas beaucoup de texte).
Une lecture plaisante donc, très noire, mais qui laisse pas mal de choses en suspens.
Une insatiable envie de douceur est une BD documentaire consacrée au sucre : son histoire dans la civilisation humaine, ses effets sur le corps et la santé, et sa place dans nos sociétés actuelles. Réalisée par Fiammetta Ghedini, chercheuse et dessinatrice, elle met en scène son propre parcours de recherche et ses voyages pour approfondir le sujet.
C'est un thème intéressant. À l'image d'un album comme Cigarettes - Le Dossier sans filtre, on y apprend de nombreux éléments instructifs : l'introduction relativement récente du sucre dans notre consommation quotidienne à l'échelle de l'Histoire, ses effets sur le corps humain comparables à ceux d'une drogue, son impact sur la civilisation humaine et son omniprésence actuelle. Et comme pour le tabac, on retrouve le poids des lobbys qui l'imposent au monde tout en étouffant les études sur ses effets nocifs.
L'autrice rencontre ainsi des scientifiques et des médecins, se rend dans une région de production de betteraves et visite une usine sucrière, ou encore voyage à Saint-Domingue pour observer la culture et l'exploitation de la canne à sucre. Elle aborde donc de multiples facettes du sujet, toutes très instructives.
Cependant, l'ensemble souffre d'un manque de structure et de maîtrise narrative. Le dessin, bien que fonctionnel, reste faible techniquement et peu engageant, tandis que le lettrage très manuscrit complique parfois la lecture. La mise en scène et la succession des chapitres paraissent improvisées, se contentant de suivre le cheminement de l'autrice sans véritable effort de construction ni de clarté dans le message. Elle insiste par ailleurs trop sur sa propre mise en scène, multipliant les passages anecdotiques et autobiographiques qui parasitent le documentaire et donnent une impression d'ego envahissant. Le même problème se retrouve dans la présentation de certaines personnes interrogées : elle ajoute des détails inutiles sur leurs origines ou leur parcours, qui n'apportent rien à la compréhension du sujet. On a l'impression que l'autrice hésite entre réaliser un roman graphique et livrer un véritable documentaire. Rien de cela n'est rédhibitoire, mais cela brouille le propos et rend la lecture moins fluide. Les informations essentielles sont bien présentes, mais elles se trouvent diluées dans un excès de mise en scène qui alourdit l'ensemble.
Au final, une BD riche en informations mais affaiblie par une narration trop éclatée, qui laisse un goût à la fois instructif et brouillon.
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Les Aventures de Lapinot
Retour chez Dargaud pour Trondheim, engendrant l'arrêt des Nouvelles aventures de Lapinot et le lancement de cette "Aventure de Lapinot dans une situation pas possible". Aucune véritable rupture néanmoins hormis ce changement d'éditeur. Je ne sais si l'impulsion et l'inspiration s'étaient quelque peu taries dans les locaux de L'Association, je constate modestement que la qualité était moindre depuis que les aventures avaient perdu en formidable, davantage la faute selon moi à des scénarios souvent bien maigres, que l'auteur parvenait néanmoins à sublimer via des illustrations chaleureuses et sympathiques associées à un réel talent de dialoguiste. Le scénario de ce premier tome est totalement rocambolesque et eut pu être écrit par l'inénarrable personnage de Richard. Peut-être un moyen pour l'auteur de personnifier une liberté éditoriale retrouvée, pour un résultat que L'Association aurait néanmoins sans doute validé, tant il s'inscrit dans une continuité. C'est toujours très agréable à lire, un divertissement humaniste discourant sans véritable revendication ni accusation sur nos sociétés contemporaines. Mon point de vue sur les Nouvelles aventures est encore d'actualité pour cette aventure-ci, pas de baisse de régime selon moi (manque d'objectivité, horizon d'attente préparé par l'avis de Tomdelapampa ?).
Putzi
Le scénariste adapte son propre roman et disons que ça se voit que c'est un roman au vu des nombreux textes narratifs, ça peut prendre des pages avant qu'un des personnages parle ! On suit la vie d'Ernst Hanfstaengl, un des premiers compagnons d'Hitler qui est peu connu. Il faut dire que le dictateur l'a vite viré de son entourage une fois qu'il a obtenu le pouvoir. Il y a des bonnes anecdotes, mais on tombe dans les travers des biographies en BD : on a souvent un résumé de ce qui arrive à Hanfstaengl et on saute d'une époque à une autre rapidement. J'aurais préféré, par exemple, qu'on voit un peu plus en quoi celui qu'on surnommait Putzi a été important dans les premières années politiques d'Hitler. Il parait qu'il avait des contacts influents, mais on voit surtout qu'Hitler aimait sa femme et qu'il joue Wagner au piano. S'il y a des bons passages, cela devient un peu monotone à un moment vu que le type a l'habitude de manquer son rendez-vous avec l'histoire et à la fin il a l'air d'un gros loser. Enfin un loser qui a vécu libre plus longtemps que la plupart de ses compagnons d'armes, la vie de Putzi est à lire pour au moins découvrir à quel point la vie est ironique. Le dessin est correct, mais la mise en page manque de dynamique, ce qui accentue le fait que ce one-shot est pas mal, mais c'est surtout un album à emprunter parce que l'envie de relecture est tout de même un peu nulle.
Vertiges de Quito
Tronchet est un auteur que j’aime bien, surtout lorsqu’il nous propose des histoires dominées par un humour un peu con, de l’humour noir et pas mal de cynisme, avec des anti-héros frôlant le pathétique. Même s’il a aussi publié des histoires plus classiques et intéressantes hors de ce cadre, c’est quand même dans cette veine humoristique que je l’attendais (ou l’espérais ?) ici. Il faut dire que le titre, allez savoir pourquoi, m’avais fait penser à l’album de Fabcaro Carnet du Pérou, ce qui avait renforcé mes attentes. Sauf que, contrairement à Fabcaro, Tronchet a bien mis les pieds dans le pays décrit – il y est même resté près de trois ans avec sa femme (Anne Sibran) et leur fils. Et qu’en plus ici on est plus proche du carnet de voyage classique que de la franche déconne. La lecture est plaisante, mais m’a un chouia laissé sur ma faim. Surtout la première partie, intéressante, avec quelques anecdotes amusantes ou plaisantes, mais qui n’égale pas les récits de Guy Delisle. La deuxième moitié de l’album m’a davantage intéressé. On quitte Quito pour aller à la rencontre d’Indigènes dans la forêt amazonienne, puis on traverse un immense lac de sel, pour finir par évoquer une mine d’argent (cette dernière visite inspirera probablement en partie Anne Sibran pour un roman, puis Tronchet pour son adaptation en BD dans Le Monde du dessous). Là il y a plus de réflexion, la partie documentaire et critique affleure davantage et rehausse l’intérêt de la lecture. Les parents n’ont pas hésité à laisser leur fils vivre un long séjour parmi les « Indigènes », et plus généralement des aventures exotiques et hors des sentiers battus – je ne sais pas si je l’aurais fait, même si on imagine les expériences et souvenirs extraordinaires que cela a pu lui procurer. Une petite lecture sympathique.
Siegfried
Après lecture de ce triptyque, je suis un peu surpris d'autant de louanges sur cette série qui figure dans les immanquables de BDThèque... En effet, tout comme Bamiléké, j'ai trouvé la narration assez confuse entre passé et présent et avec des ficelles assez faciles pour introduire l'histoire. De plus, il ne se passe quand même pas grand chose dans le tome 1, qui se contente de planter le décor, ainsi que dans le tome 2 consacré au voyage de Siegfried avant l'affrontement final. Le tome 3 est un peu plus fouillé mais cela était malheureusement trop tard pour moi, n'ayant pas été sensible ni à la poésie qui devait se dégager de la série, ni aux personnages très lisses et classiques dans le genre. J'ai également été un peu gêné par le trait très "Disneyien" d'Alex Alice avec son héros au physique parfait, ses jolis loups gambadant dans la forêt et le personnages de Mime au visage plus enfantin, dont l'objectif est uniquement de faire sourire le lecteur avec ses running gag relatifs à son enclume. Il est vrai que je ne connais que très peu le mythe de l'anneau de Nibelung pour apprécier l'adaptation qu'en à faite Alex Alice et que j'ai peut-être trop lu de BD de ce type par le passé pour être surpris par cette série. J'ai ainsi préféré La Quête de l'Oiseau du Temps de Loisel dans le même genre. L'ensemble reste tout de même honnête pour ne pas descendre en dessous de 3/5. SCENARIO (Originalité, Histoire, personnages) : 5/10 GRAPHISME (Dessin, colorisation, mise en page) : 7/10 NOTE GLOBALE : 12/20
Notre affaire - Une BD de combat et d'espoir
BD importante s'il en est. Retour sur le procès Pelicot et sur les dramatiques questions sociétales que cette sordide affaire de viols par soumission chimique nous crache à la figure. Cette œuvre collective se propose via de multiples récits essentiellement documentaires, réalisés par des auteurs généralement différents, de rendre compte de l'importantissime procès des viols de Mazan. Après cette affaire, il n'est plus tenable de réfuter la réalité de la culture du viol dans nos sociétés patriarcales. Oui, cela choque, heurte bien des hommes, mais c'est une réalité idéologique et surtout sociologique. Cela n'équivaut pas à prétendre que tous les hommes sont des "crocodiles" violeurs en puissance, mais déclare simplement et tristement que de multiples pans de notre culture, que les lois de nos sociétés, etc. instaurent une norme comportementale empreinte de sexisme et de misogynie ayant de multiples conséquences, toutes minimisées et excusées, dont les plus dramatiques sont les féminicides et viols. Loin d'être indigeste, ce volumineux pavé se lit d'une traite le souffle coupé : cette affaire happe l'attention tant elle bouscule notre croyance en l'homme. Egalement parce que la BD, certes souvent dans la paraphrase ou "l'anecdotique", parvient à recréer le sentiment alors dominant chez les féministes s'étant emparées du sujet, que cette fois, la situation bougerait, que la honte changerait de camp ! Non, il ne s'agissait généralement pas de monstres : les coupables n'étaient que des hommes, de simples routiers, pompiers, ouvriers..., parfois de bons pères de famille, des conjoints aimant, de bons employés appréciés de leurs collègues et patrons, des hommes pour nombre d'entre soutenus durant le procès par leurs proches et notamment leur conjointe. Cette BD malheureusement met peu en perspective les choses, la faute aussi au projet initial, à ce souhait de construire une œuvre collective offrant modérément la possibilité de développer un point de vue, de synthétiser une pensée. Les brefs propos sur l'inceste et la culture du viol font entrevoir ce qu'aurait pu être cette BD, mais le projet ne souhaitait visiblement pas l'ampleur, plutôt dégager le sentiment d'une prise de conscience collective pouvant laisser espérer des jours meilleurs. Sur ce point, c'est réussi.
Derrière la porte
J’ai acheté cet album de James Tynion IV (The Department of Truth, Something is Killing the Children) pour lire un soir d’Halloween (en 2022, en VO), aguiché par la superbe couverture aux tons horrifiques, et à ce titre je ressors déçu de ma lecture. On comprend en effet assez rapidement que les cauchemars de Jamie sont des manifestations de problèmes finalement assez terre-à-terre, à savoir les engueulades de ses parents. L’album propose certes une réflexion intéressante et pertinente sur les effets néfastes de nos comportements, nous parents, sur nos progénitures. Mais disons qu’il faut aussi s’enfiler des pages d’élucubrations d’un protagoniste un peu mou et pas toujours très attachant. La mise en image de Gavin Fullerton (inconnu au bataillon) est en tout cas réussie. Une lecture sympathique dans le genre roman graphique relationnel, mais passez votre chemin si vous êtes à la recherche d’une histoire horrifique. Je note que Urban fait aussi coïncider la sortie de l’album avec le mois d’Halloween… oui, je suis cynique.
Rose
Cette série est étrange, et je ne dis pas ça seulement parce que c'est une série fantastique. C'est surtout qu'elle oscille en permanence entre diverses histoires principales qui se croisent, dans une histoire de fantômes. Difficile de décrire la série dans son ensemble, mais tout est articulé autour du personnage de Rose, jeune femme dont le père vient de mourir et qui peut sortir de son corps et parler aux fantômes. C'est assez lent dans le récit bien que les trois tomes embrassent une histoire assez touffue au final. Il y a des questions de famille, d'entreprises pharmaceutique méchante (référence à peine dissimulée du scandale du médiator), de sorcière, de lieux hantés... Mine de rien la densité des sujets est importante, même si je dois dire qu'au sortir du tome 2 je m'attendais à ce que toutes les résolutions ne soient pas satisfaisantes. Ce qui a effectivement été le cas, puisque l'enquête principale n'est pas le point final du récit, étrangement, avec une façon un peu molle de conclure cet arc narratif. Dans l'ensemble c'est une série qui exploite l'idée des fantômes d'une manière originale, en effet, mais pas forcément extraordinaire non plus. A mon goût, ça manque de développement au vu de tout ce qui est présent et des nombreuses thématiques non entièrement développées. Une bonne série mais étrange, vraiment étrange. Elle a une atmosphère unique et se tient, même si je ne la trouve pas formidablement bien.
Lateef - Afghan chez les Cohen
2.5 Un documentaire qui raconte la vraie histoire d'un réfugié afghan qui a fini ado à Paris dans une famille de juive venue de Tunisie. La première partie montre la vie quotidienne de Lateef dans son nouvel environnement et c'est pas très captivant de le voir faire la fête avec sa famille d'accueil et ses nouveaux copains, mais au moins c'est sympathique de voir qu'il est capable d'être heureux après tout ce qu'il a vécu. Ensuite, on va voir comment il est passé de l'Afghanistan à la France avec tous les dangers que cela comporte. Il ne faut pas s'attendre à un truc qui creuse le sujet en profondeur comme ''L'Odyssée d'Hakim''. Sur une page on voit les problèmes du voyage, la page suivant Lateef est dans un autre pays, la page d'après on voit un autre problème et ensuite deux-trois cases plus loin il est dans un autre pays, etc et etc....La partie la plus intéressante est lorsque notre pauvre Lateef doit se faire reconnaitre comme réfugié mineur et bonne chance pour faire ça rapidement devant l'administration française qui bien sur prends ses décisions de manière arbitraire. Au final, ça se laisse lire et le dessin est sympa, mais ayant déjà lu d'autres bandes dessinés sur le sujets des migrants, je n'ai pas appris grand chose en dehors de ce qui touche les mineurs, le documentaire portant pour une fois sur un ado et non un adulte. C'est un album intéressant si on veut un résumé rapide sur ce qui vit ses humains qui traversent des pays et des pays pour arriver à leur destination, mais si on n'a pas peur de grosses lectures, je conseil plus la lecture de L'Odyssée d'Hakim qui est vraiment la meilleur série sur le sujet.
Le Mythe de l’ossuaire - Des milliers de plumes noires
Je découvre en mettant cet avis que l’album fait partie d’un édifice plus vaste, dont il est la deuxième pierre. Je n’ai pas lu le précédent album, mais chacun semble pouvoir se lire indépendamment. Du moins, si j’en crois Mac Arthur le premier n’éclaire pas forcément l’intrigue de celui-ci. Car c’est un peu le reproche que je peux faire à cet album, si la lecture n’est jamais déplaisante ou ennuyeuse, j’en suis sorti en me demandant où Lemire voulait en venir. De la même façon – mais peut-être ne suis-je pas suffisamment connaisseur de l’auteur – je n’ai pas forcément retrouvé la patte de Lovecraft, pourtant visiblement revendiquée, si ce n’est une certaine ambiance morbide et angoissante, et la menace latente de « monstres » encore mal identifiés. Un fin mot de l’histoire obscur donc, ce qui entraine un peu de frustration (en particulier autour de la « disparition » de l’une des héroïnes). Mais cela dit la lecture n’est pas désagréable. Les différents lieux /époques (le passé durant l’enfance des deux héroïnes, le présent pas mal d’années plus tard, et un monde parallèle illustrant l’univers fantasy d’un livre que les deux adolescentes étaient en train d’inventer/écrire) s’imbriquent assez bien, les allers-retours entre ces moments ne hachent pas trop le récit. Mise en page et narration, mais aussi le dessin, sont aussi pour beaucoup dans le côté fluide de la lecture (qui est assez rapide, car il n’y a pas beaucoup de texte). Une lecture plaisante donc, très noire, mais qui laisse pas mal de choses en suspens.
Une insatiable envie de douceur - Enquête sur le sucre
Une insatiable envie de douceur est une BD documentaire consacrée au sucre : son histoire dans la civilisation humaine, ses effets sur le corps et la santé, et sa place dans nos sociétés actuelles. Réalisée par Fiammetta Ghedini, chercheuse et dessinatrice, elle met en scène son propre parcours de recherche et ses voyages pour approfondir le sujet. C'est un thème intéressant. À l'image d'un album comme Cigarettes - Le Dossier sans filtre, on y apprend de nombreux éléments instructifs : l'introduction relativement récente du sucre dans notre consommation quotidienne à l'échelle de l'Histoire, ses effets sur le corps humain comparables à ceux d'une drogue, son impact sur la civilisation humaine et son omniprésence actuelle. Et comme pour le tabac, on retrouve le poids des lobbys qui l'imposent au monde tout en étouffant les études sur ses effets nocifs. L'autrice rencontre ainsi des scientifiques et des médecins, se rend dans une région de production de betteraves et visite une usine sucrière, ou encore voyage à Saint-Domingue pour observer la culture et l'exploitation de la canne à sucre. Elle aborde donc de multiples facettes du sujet, toutes très instructives. Cependant, l'ensemble souffre d'un manque de structure et de maîtrise narrative. Le dessin, bien que fonctionnel, reste faible techniquement et peu engageant, tandis que le lettrage très manuscrit complique parfois la lecture. La mise en scène et la succession des chapitres paraissent improvisées, se contentant de suivre le cheminement de l'autrice sans véritable effort de construction ni de clarté dans le message. Elle insiste par ailleurs trop sur sa propre mise en scène, multipliant les passages anecdotiques et autobiographiques qui parasitent le documentaire et donnent une impression d'ego envahissant. Le même problème se retrouve dans la présentation de certaines personnes interrogées : elle ajoute des détails inutiles sur leurs origines ou leur parcours, qui n'apportent rien à la compréhension du sujet. On a l'impression que l'autrice hésite entre réaliser un roman graphique et livrer un véritable documentaire. Rien de cela n'est rédhibitoire, mais cela brouille le propos et rend la lecture moins fluide. Les informations essentielles sont bien présentes, mais elles se trouvent diluées dans un excès de mise en scène qui alourdit l'ensemble. Au final, une BD riche en informations mais affaiblie par une narration trop éclatée, qui laisse un goût à la fois instructif et brouillon.