La biographie est bonne, relativement fidèle (des connaissances éloignées que je connaisse sur Nellie Bly) et, malheureusement, assez maigre j'ai trouvé.
Le défaut inhérent à toute biographie : comment résumer en si peu de mots, d'images, de temps l'ensemble d'une vie ? Comment rendre le tout digeste et intéressant pour les lecteur-ice-s/spectateur-ice-s ? Question mine de rien pas si simple qu'elle en a l'air. En tout cas, bien souvent, les biographies décident de se centrer sur un aspect de la vie de la personne, de prendre une ligne directrice afin de ne pas trop s'éparpiller dans les milliards de "sous-intrigues" qui composent nos existences (je dis sous-intrigues dans le cas où l'on considèrerait une vie sous un angle précis, qui serait alors "l'intrigue principale").
Ici, on se centre sur la profession de Nellie Bly : le journalisme. On retrace ses débuts, ses motivations, son parcours et sa fin. Pas inintéressant, mais peut-être un peu trop large, en tout cas avec si peu de pages. Parce que là, j'ai vraiment eu l'impression d'avoir survolé un résumé sur la vie de Nellie Bly plutôt que d'avoir lu (et surtout vécu) son histoire. Pas le temps de s'attarder sur un épisode précis, on enchaîne deux pages après sur le suivant. Cela peut passer dans des documentaires retraçant des périodes historiques dont les grandes lignes sont au moins vaguement connues du grand public, mais quand il s'agit d'une personne en particulier je pense qu'il est préférable d'éviter d'être trop mince dans les explications et les développements d'idées.
Et l'intrigue annexe amenant Nellie à raconter son passé n'aide pas. Elle est intéressante et importante sur le papier, il faut montrer l'importance et l'impact qu'à eu Nellie Bly sur l'avancée des droits des femmes et les successeuses qu'elle a inspirée, mais ces passages sont tout aussi expéditifs, on ne s'intéresse pas vraiment au personnage qui nous y est présenté. Normal, vous me direz, nous sommes-là pour Nellie. Oui, mais si on ne s'attarde ni sur l'histoire de Nellie ni sur l'histoire romancée d'une jeune femme qu'elle a inspirée, qu'est-ce que l'album nous raconte ?
L'album n'est pas mauvais pour autant, mais je l'ai vraiment trouvé oubliable, la faute à la narration anecdotique et au caractère trop mince des explications. Les informations sur les actions et la vie de cette femme restent intéressantes à lire, je déplore juste la forme.
La petite présentation des journalistes féminines qui ont succédé à Nellie Bly à la fin de l'album était elle très intéressante.
Comme l'a dit l'un de mes prédécesseurs, Angor est une petite série d'héroic-fantasy agréable à lire.
Ce n'est pas une grand histoire, mais c'est distrayant et fait le job.
On a donc un trio de héros, deux ados et un gamin, qui se retrouvent en possession d'un objet magique leur permettant d'atteindre l'âge adulte, et qui vont se retrouver mêlés à une quête type "McGuffin".
Les personnages sont assez sympathiques, l'univers décrit crédible, mais l'histoire est cependant un peu simpliste et "facile". Surtout vers la fin, qui laisse une étrange impression d'avoir été précipitée, alors qu'elle annonce clairement un nouveau cycle dont on a jamais vu la couleur.
Donc une petite chose sans prétention pour faire passer le temps.
A la manière de la BD La Bête, il s'agit ici d'une BD hommage au génial Marsupilami.
La BD joue avec l'horizon d'attente du lecteur, les codes du genre, pour varier son approche, entre le sage hommage et celui insidieusement plus renversant.
Ainsi surviennent aussi bien les mêmes codes du récit d'aventure, le même décor verdoyant, la belle légèreté ironique de l'humour, que Franquin avaient génialement mis en place, mais cette vision du mythe est maintes fois bousculée : par ces éléments inauguraux de piraterie, l'insidieuse violence des rapports sociaux ou ce Marsupilami aux couleurs parfaitement reconnaissables mais à la bouille enfantine, joviale, semblable à un étrange mais familier doudou.
Le projet est très intéressant, à destination d'un public jeune, mais l'intrigue dévoile fort peu de surprise une fois la forêt amazonienne plantée et les peuples indiens ajoutés. C'est agréable à lire, très coloré, amusant ou dynamique, mais trop attendu et sans perfidie scénaristique venant enrichir un sage récit d'aventure.
J'ai découvert cet album en arpentant la chouette chaîne YouTube de Frédéric Peynet, "Dans l'ombre des bulles".
Comme plusieurs aviseurs, je n'ai pas pu m'empêcher de faire le parallèle avec Tirésias du même scénariste : même traitement dynamique de l'antiquité grecque où les dieux agissent directement sur le quotidien de simples mortels. Dans les deux histoires, une personne se métamorphose littéralement, ce qui entraînera l'avènement d'une histoire d'amour.
Tirésias et Pygmalion nous sont présentés tous deux comme vains et égoïstes, mais là où Tirésias gagnait en humanité au fil du récit jusqu'à devenir touchant sur la dernière partie, je n'ai senti que peu d'évolution chez Pygmalion.
Son amour pour Agapè semble complètement subordonné à l'apparence physique de celle-ci, ce qui le rend assez superficiel.
La lecture reste plaisante avec ce superbe dessin réhaussé de couleurs chaudes au service d'une narration fluide et vivante.
Un manga facile qui se lit bien pour peu que l’on soit amateur de ce type de récit. Ça a été mon divertissement vide cerveau des dernières semaines.
Au menu du classique combats dans un monde Fantasy, du Shonen avec de bonnes idées mais pas tout le temps passionnant pour autant. Cependant la partie graphique assure bien le taf et c’est pas un truc en 70 tomes (ça rallonge déjà suffisamment la sauce ici).
Ce n’est pas une série que je relirai mais certains ingrédients m’ont bien attrapé : quelques personnages et leurs relations bien sûr, mais surtout ce petit côté sombre et incertain sur l’avenir de nos héros. Un détail qui fait pour beaucoup dans le sel de la série sinon c’est plutôt lambda dans les péripéties.
Si j’ai été un chouia moins touché que mes prédécesseurs par cet album, j’ai quand même apprécié cette lecture.
C’est un album qui aborde, de façon à la fois pudique et sans tabou les « drames de la vie » vécus par l’héroïne, Cécile (elle perd en quelques temps sa grand-mère, sa mère et sa sœur – trois personnes desquelles elle était très proche, et ce de façon assez brutale).
Ces décès amènent avec eux des questionnements, des regrets (sur ce qu’on n’a pas eu le temps de partager par exemple). Cette succession de drames se heurtent à une personnalité assez positive, qui plus est une femme qui découvre au milieu de ces événements qu’elle est enceinte. Comme un symbole, la vie « prend le dessus », malgré tout.
C’est ce malgré tout qu’illustre le récit, qui même tristesse et joie, avec quelques pointes d’humour et d’autodérision (voir en particulier lorsqu’il faut « habiller » les mortes pour leur « dernier voyage »).
Ça n’est pas forcément le type de récit qui me touche le plus, je ne suis pas le cœur de cible. Mais ici l’auteure (je ne sais ce qu’il peut y avoir d’autobiographique dans ces événements ?) a su trouver le juste équilibre pour raconter ces moments de vie – et de mort. Mots et situations sont simplement décrits. En effet, Cécile raconte ces événements à ses enfants, quelques années plus tard (ils n’ont pas directement connu les mortes).
J’ai trouvé le dessin très simple, mais très bon, et surtout très beau. J’ai un peu moins accroché à la colorisation. C’est sûrement un choix esthétique, mais je l’ai trouvé un peu trop terne parfois.
Une histoire globalement sympathique, mais dont j’attendais davantage. En tout cas autre chose.
Elle oscille entre le rigolo et le dramatique, mais aucun de ces aspects n’est suffisamment affirmé selon moi.
Il y a de bonnes idées (l’auteur mythomane devenu conseiller bien au-delà de ce qu’il est prêt à assumer, le jeune voulant éviter la fin du viager à la mort de son père). Mais tout ça est un peu noyé dans l’ensemble, et surtout le dernier quart de l’intrigue manque de clarté et de crédibilité (la fin est même un peu expédiée !).
Même l’aspect « romantique » (le héros hésitant à déclarer sa flamme à son amour de jeunesse) n’apporte pas ici le sel attendu (et j’ai eu du mal à « accepter » comme crédible l’acte de cette femme vers la fin).
Bon, pour le reste ça se laisse lire, et j’ai trouvé le dessin très agréable. Mais la fin en eau de boudin et quelques idées à peine exploitées m’ont un peu laissé sur ma faim.
Note réelle 2,5/5.
Un petit oui pour cet album. Je m’y suis lancé à l’aveugle et si ça se lit bien, des petits détails amoindrissent le ressenti final.
Pourtant j’aime l’idée générale, la localisation et la temporalité mais ça manque un peu de force et de liant.
La faute à un protagoniste principal plutôt fade, on traverse les époques à (trop) grands pas mais sans réels atomes crochus pour son parcours ou ses relations. Les transitions sont souvent abruptes et le récit, qui reste une peinture intéressante de cette période, brasse sans doute un peu trop de thèmes pour subjuguer.
Je salue l’envie, cette virée dans l’Espagne franquiste n’est pas déplaisante comme le portait de ce « parrain » local. En plus la partie graphique est agréable.
Ça manque juste d’un peu de magie comme les autres œuvres du duo Lapierre/Pellejero ont su me procurer. C’est ici limite trop dense pour ça.
Mince… On n’a pas eu le temps de faire avec le manteau.
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Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Sa première édition date de 2007. Il a été réalisé par Stéphane Levallois pour le scénario, les dessins, les lavis de gris. Il comprend cent-cinquante-sept pages de bandes dessinées. Il comporte une deuxième partie intitulée 2ème étage gauche, de seize pages, constituée d’illustrations en pleine page, des êtres humains portant un masque intégral, évoquant de plus ou moins loin un masque à gaz.
Dans un petit deux-pièces d’un immeuble parisien, Stéphane est assis sur tabouret, le crayon à papier à la main. Il s’adresse à son manteau qui posé en position assise sur le fauteuil en face de lui, et il lui déclare que ce sera ce manteau qui sera la vedette de l’histoire. Un peu plus tard, il se rend, vêtu de ce manteau, chez Florence, une copine. Elle le fait enter et lui propose d’aller dans sa chambre. Elle explique que sa mère n’est pas là, que sa sœur est partie avec sa copine, et que son père est dépourvu de tout courage. C’est un minable, il n’a rien dans le ventre. Elle continue : sa sœur est lesbienne. Stéphane a sorti son camescope de son étui et il indique à son amie qu’il est prêt. Elle ouvre sa robe et dévoile sa nudité. Il s’exclame qu’elle n’est pas grosse du tout. Elle demande si elle doit passer le manteau et il répond par l’affirmative. Il explique qu’il demandera aux autres modèles de faire de même : le manteau donnera une unité à l’exposition. Elle le passe, puis s’assoit sur le bord du lit et regarde la caméra comme il lui demande. Elle le regarde, les jambes serrées, et les mains posées sur les genoux.
Plus tard, Stéphane se rend dans la galerie Atome qui a promis d’exposer ses œuvres et il est reçu par la galeriste. Elle l’appelle Mon chou, et lui confirme que ce sera une exposition personnelle, rien que pour lui, seul. Elle continue : Francis et elle en ont discuté. Dans un mois et demi, à la fin de celle de Declerc. Elle explique qu’il pourrait y avoir trois grandes pièces, pas plus, une trentaine de pièces à exposer, des nus de femmes, des petits formats pour que l’on puisse les vendre. Et elle lui donne son congé en lui demandant d’aller leur faire des choses magnifiques. Un autre artiste arrive et elle l’appelle également mon chou. Une fois dehors, Stéphane se demande comment il va faire, car il n’a pas les moyens de se payer des modèles professionnels. Il trouve la solution : demander à ses amies de poser nues. Plus tard, il appelle son père et il lui dit que son travail va bénéficier d’une exposition, le vernissage devrait avoir lieu début septembre à la galerie Atome, elle durerait un mois environ. Son père l’informe que Monette ne va pas très bien : elle a maintenant quatre-vingt-huit ans, et elle s’ennuie. Elle est à l’hospice en banlieue, il est possible de s’y rendre par le train. Bien qu’il trouve ça loin, le fils promet d’aller lui rendre visite. Il faudra qu’il trouve le temps quand il sera moins débordé. Plus tard, il se rend chez son deuxième modèle : Florence.
La moitié inférieure d’une femme nue dans la partie gauche de la couverture et la possibilité qu’il s’agisse du dernier modèle de l’artiste. Le début du récit permet de rapidement comprendre la situation : Stéphane est un jeune artiste qui doit réaliser une commande pour remplir la commande d’une exposition de ses œuvres. Il va rencontrer plusieurs de ses amies qui vont accepter de poser nues pour lui, avec le même manteau, alors qu’il les filme, pour pouvoir décider dans son appartement de la posture dans laquelle il les représentera. C’est ainsi qu’il se rend chez Florence, Cécile et Solène, les deux premières habitant chez leurs parents. Sa petite amie Élise accepte également de poser pour lui. Et l’exposition a bien lieu, ses parents faisant le déplacement pour le voir. Les caractéristiques visuelles des cases de l’artiste sont identiques à celle de la couverture qui est d’ailleurs une image en pleine page, extraite de la page vingt-six. Le dessinateur utilise un trait de contour fin, comme un peu tremblé ou hésitant, peut-être avec le crayon à papier qu’il tient à la main dans la première planche. Il nourrit ces contours assez aérés avec des lavis de gris pour apporter des reliefs, parfois souligner une texture ou un ombrage. Il ajuste le nombre de cases par page au moment raconté, parfois avec deux ou trois cases pour une page, parfois plus. Il n’accorde pas une grande importance à la représentation des décors, parfois quelques traits pour un angle de mur, parfois absents.
Le lecteur constate rapidement qu’il s’agit d’une bande dessinée qui se lit à un rythme rapide. La première séance de pose débute en page six et Florence se dénude en page huit, dans un dessin en pleine page. Le lecteur constate que cela n’a rien de sexuel. Stéphane n’indique pas combien de refus il a essuyé, ni même s’il y en a eu un seul. Les séances de pose vont de soi : l’artiste arrive sur place, et la jeune femme se déshabille, ne portant déjà plus aucun vêtement. Elles n’exposent par leur motivation. La séance se déroule avec prise de vue par un caméscope qui permettra à Stéphane de trouver l’instant où la pose est la plus parlante, la plus intéressante sur le plan artistique. Les termes et les conditions sont convenus hors champ, hors page du récit. Les paroles échangées sont limitées : quelques propos de circonstances, quelques directives données par l’artiste quant à ce qu’il recherche, ce dont il a besoin pour pouvoir réaliser ses dessins, une réaction ou deux. Une séance interrompue par l’arrivée inopinée de la mère du modèle, une fatigue à la fin d’une séance. Le lecteur en déduit que ces moments sont dépourvus de toute tension sexuelle, de toute forme de séduction. Aucune ambiguïté, aucune tentation, un consentement explicite, une forme d’activité de nature purement professionnelle pour lui, et d’aide apportée à un ami pour elles.
Les séances de pose occupent dix-sept pages de la bande dessinée, le visionnage des prises de vue deux pages, et, pour être complet, Stéphane a une relation sexuelle avec Élise pendant quatre pages, sans rapport avec une séance de pose. Le reste de l’ouvrage, c’est-à-dire sa majeure partie, est consacré au quotidien banal de Stéphane : se rendre chez ses amies, se rendre à la galerie Atome, réaliser les dessins qui seront exposés, discuter avec sa copine, se rendre à l’hospice pour aller voir Monette, se rendre chez ses parents en banlieue, et bien sûr participer au vernissage de son exposition. La narration visuelle présente une grande facilité de lecture. La bande dessinée comprend quarante-cinq pages muettes, et vingt-cinq dessins en pleine page. Les dessins appartiennent à un registre descriptif et réaliste, avec un rendu éloigné de la représentation photographique du fait de la grande simplification des traits, de la fluctuation entre des formes uniquement détourées, c’est-à-dire du noir & blanc, et des formes rehaussées par les lavis de gris. Les caractéristiques de la représentation, les cadrages, le choix de ce qui est montré rendent compte du regard subjectif de l’auteur, de ce sur quoi se porte son attention, les êtres humains, leur posture et certains éléments de son environnement.
Pour autant, il se passe bien d’autres choses. En y repensant après coup, le lecteur se souvient de moments et de visions aussi disparates que : une grande affiche publicitaire pour l’Amer Picon, l’enseigne d’un Leader Price, la tête d’un cheval, une silhouette en train de courir évoquant Giacometti, un robinet de baignoire qui fuit, un petit carton au contenu mystérieux posé dans une immense pièce entièrement vide, un jardin à la française, une bibliothèque en verre (en pleine page), un exercice d’équilibre de yoga sur une seule jambe, le cadavre d’un petit oiseau dans la cuvette des WC, une main tenant un pistolet pointé à bout portant sur Stéphane, et un masque à gaz. En y repensant, les brefs échanges avec les modèles suffisent pour leur insuffler une personnalité, avec des réactions différentes qui s’ajoutent à l’absence de toute ambiguïté relationnelle. L’artiste apprend incidemment la réaction de deux modèles à l’exposition ce qui confirme qu’il s’agit d’êtres humains à la vie indépendante et autonome. D’ailleurs, le lecteur prend conscience que les situations qui lui sont présentées sont des moments choisis et triés à dessein, pour former un récit.
Certainement, l’histoire s’apparente à une autofiction de la part de l’auteur, un regard jeté en arrière sur cette période de sa vie et sur ce projet. Le lecteur comprend qu’il découvre les souvenirs que Stéphane en a gardés, associés à une portion de son état d’esprit. Il évoque avec naturel ce projet artistique qui sort de l’ordinaire pour le commun des mortels, ainsi que sa relation avec Simone Frossard, surnommée Monette, et il y a cet élément fantastique qu’est un individu fantomatique portant un masque à gaz. En fonction des scènes et en fonction de sa sensibilité, le lecteur peut y voir un autre indistinct et silencieux, une présence de l’altérité, d’un être humain totalement étranger au projet de Stéphane, à sa vie d’artiste à ses aspirations et à ses ambitions, dont les traits du visage sont masqués. À la fois cela le rend anonyme et cela masque ses émotions, l’artiste se retrouvant en présence d’une personne sans réaction, totalement étrangère à son art, et possiblement totalement insensible également. Il peut aussi bien s’agir d’une métaphore sur le gouffre qui sépare l’artiste des personnes qui ne possèdent pas ce don, que la réalité diffuse de la masse chez laquelle son art ne suscite aucune réaction. Le lecteur peut également y voir une partie de la conscience de l’artiste qui n’est pas impliquée dans son activité, qui la considère avec détachement, avec recul sans être touché ou affecté, autrement que sur le plan matériel.
Le dernier modèle : la promesse de participer à des séances de pose de nu, et aussi de vivre un moment déterminant dans la pratique artistique du personnage qui ne recourra plus à des modèles vivants (puisqu’il s’agit du dernier). La narration visuelle très personnelle séduit rapidement le lecteur par son accessibilité, sa facilité de lecture, et sa façon de montrer les personnes, leurs activités et les lieux. Le récit tient la promesse implicite de la couverture, tout en évoquant une phase très personnelle de la vie de l’auteur, son rapport à son activité artistique, son incidence sur ses amies et ses parents, sur Monette qui l’apprécie pour lui-même détaché de sa pratique artistique. Une réflexion tout en sous-entendu sur les relations de l’artiste avec les personnes de son entourage. Déconcertant.
Au royaume d'Enégaur, la jeune Devane est chargée par son père forgeron de reforger l'épée légendaire du roi. Sauf que par la maladresse d'un de ses amis, un ptérodactyle idiot s'empare de l'épée. Devane et ses amis partent alors d'urgence à sa recherche avant que les gardes du roi ne se rendent compte de la disparition. Commence alors une suite d'aventures loufoques et mouvementées pour cette petite bande qui se fait appeler le Cercle des Intrépides.
C'est une série jeunesse d'héroïc-fantasy humoristique.
Le dessin de Massimo Di Leo est inspiré de l'animation et du jeu vidéo. Son style est burlesque, avec des personnages très expressifs aux allures parfois volontairement débiles. C'est un graphisme dynamique qui se prête bien autant à l'action qu'à l'humour. Son encrage épais et le peu de détails de ses planches et décors souvent vides laissent toutefois un léger sentiment qu'un format d'album plus réduit aurait mieux convenu.
L'histoire est rythmée, prenante et pleine d'humour. Les auteurs ne se prennent pas au sérieux et il en découle une histoire échevelée, narrée par un troubadour qui n'hésite pas à s'insérer lui-même dans l'intrigue et à ajouter sa propre touche humoristique. Les personnages sont pleins de drôlerie, souvent loufoques comme ce fermier misanthrope radicalement idiot ou cette race de vers géants qui dansent le twist, et en même temps relativement crédibles comme la relation entre les trois héros. Il se passe plein de choses, le sourire est toujours présent et l'histoire a le bon goût de se terminer en un tome laissant espérer une suite d'aventures de ce type, entre humour et aventure. Je n'ai qu'un regret, c'est que l'abondance de loufoque empêche le fond de l'intrigue aventureuse de prendre totalement prise puisqu'on sait que de toute manière tout est pour de rire.
Mais je me suis quand même bien amusé et j'en lirai davantage avec plaisir.
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Nellie Bly
La biographie est bonne, relativement fidèle (des connaissances éloignées que je connaisse sur Nellie Bly) et, malheureusement, assez maigre j'ai trouvé. Le défaut inhérent à toute biographie : comment résumer en si peu de mots, d'images, de temps l'ensemble d'une vie ? Comment rendre le tout digeste et intéressant pour les lecteur-ice-s/spectateur-ice-s ? Question mine de rien pas si simple qu'elle en a l'air. En tout cas, bien souvent, les biographies décident de se centrer sur un aspect de la vie de la personne, de prendre une ligne directrice afin de ne pas trop s'éparpiller dans les milliards de "sous-intrigues" qui composent nos existences (je dis sous-intrigues dans le cas où l'on considèrerait une vie sous un angle précis, qui serait alors "l'intrigue principale"). Ici, on se centre sur la profession de Nellie Bly : le journalisme. On retrace ses débuts, ses motivations, son parcours et sa fin. Pas inintéressant, mais peut-être un peu trop large, en tout cas avec si peu de pages. Parce que là, j'ai vraiment eu l'impression d'avoir survolé un résumé sur la vie de Nellie Bly plutôt que d'avoir lu (et surtout vécu) son histoire. Pas le temps de s'attarder sur un épisode précis, on enchaîne deux pages après sur le suivant. Cela peut passer dans des documentaires retraçant des périodes historiques dont les grandes lignes sont au moins vaguement connues du grand public, mais quand il s'agit d'une personne en particulier je pense qu'il est préférable d'éviter d'être trop mince dans les explications et les développements d'idées. Et l'intrigue annexe amenant Nellie à raconter son passé n'aide pas. Elle est intéressante et importante sur le papier, il faut montrer l'importance et l'impact qu'à eu Nellie Bly sur l'avancée des droits des femmes et les successeuses qu'elle a inspirée, mais ces passages sont tout aussi expéditifs, on ne s'intéresse pas vraiment au personnage qui nous y est présenté. Normal, vous me direz, nous sommes-là pour Nellie. Oui, mais si on ne s'attarde ni sur l'histoire de Nellie ni sur l'histoire romancée d'une jeune femme qu'elle a inspirée, qu'est-ce que l'album nous raconte ? L'album n'est pas mauvais pour autant, mais je l'ai vraiment trouvé oubliable, la faute à la narration anecdotique et au caractère trop mince des explications. Les informations sur les actions et la vie de cette femme restent intéressantes à lire, je déplore juste la forme. La petite présentation des journalistes féminines qui ont succédé à Nellie Bly à la fin de l'album était elle très intéressante.
Angor
Comme l'a dit l'un de mes prédécesseurs, Angor est une petite série d'héroic-fantasy agréable à lire. Ce n'est pas une grand histoire, mais c'est distrayant et fait le job. On a donc un trio de héros, deux ados et un gamin, qui se retrouvent en possession d'un objet magique leur permettant d'atteindre l'âge adulte, et qui vont se retrouver mêlés à une quête type "McGuffin". Les personnages sont assez sympathiques, l'univers décrit crédible, mais l'histoire est cependant un peu simpliste et "facile". Surtout vers la fin, qui laisse une étrange impression d'avoir été précipitée, alors qu'elle annonce clairement un nouveau cycle dont on a jamais vu la couleur. Donc une petite chose sans prétention pour faire passer le temps.
El Diablo
A la manière de la BD La Bête, il s'agit ici d'une BD hommage au génial Marsupilami. La BD joue avec l'horizon d'attente du lecteur, les codes du genre, pour varier son approche, entre le sage hommage et celui insidieusement plus renversant. Ainsi surviennent aussi bien les mêmes codes du récit d'aventure, le même décor verdoyant, la belle légèreté ironique de l'humour, que Franquin avaient génialement mis en place, mais cette vision du mythe est maintes fois bousculée : par ces éléments inauguraux de piraterie, l'insidieuse violence des rapports sociaux ou ce Marsupilami aux couleurs parfaitement reconnaissables mais à la bouille enfantine, joviale, semblable à un étrange mais familier doudou. Le projet est très intéressant, à destination d'un public jeune, mais l'intrigue dévoile fort peu de surprise une fois la forêt amazonienne plantée et les peuples indiens ajoutés. C'est agréable à lire, très coloré, amusant ou dynamique, mais trop attendu et sans perfidie scénaristique venant enrichir un sage récit d'aventure.
Pygmalion et la vierge d'ivoire
J'ai découvert cet album en arpentant la chouette chaîne YouTube de Frédéric Peynet, "Dans l'ombre des bulles". Comme plusieurs aviseurs, je n'ai pas pu m'empêcher de faire le parallèle avec Tirésias du même scénariste : même traitement dynamique de l'antiquité grecque où les dieux agissent directement sur le quotidien de simples mortels. Dans les deux histoires, une personne se métamorphose littéralement, ce qui entraînera l'avènement d'une histoire d'amour. Tirésias et Pygmalion nous sont présentés tous deux comme vains et égoïstes, mais là où Tirésias gagnait en humanité au fil du récit jusqu'à devenir touchant sur la dernière partie, je n'ai senti que peu d'évolution chez Pygmalion. Son amour pour Agapè semble complètement subordonné à l'apparence physique de celle-ci, ce qui le rend assez superficiel. La lecture reste plaisante avec ce superbe dessin réhaussé de couleurs chaudes au service d'une narration fluide et vivante.
Red eyes sword - Akame ga Kill !
Un manga facile qui se lit bien pour peu que l’on soit amateur de ce type de récit. Ça a été mon divertissement vide cerveau des dernières semaines. Au menu du classique combats dans un monde Fantasy, du Shonen avec de bonnes idées mais pas tout le temps passionnant pour autant. Cependant la partie graphique assure bien le taf et c’est pas un truc en 70 tomes (ça rallonge déjà suffisamment la sauce ici). Ce n’est pas une série que je relirai mais certains ingrédients m’ont bien attrapé : quelques personnages et leurs relations bien sûr, mais surtout ce petit côté sombre et incertain sur l’avenir de nos héros. Un détail qui fait pour beaucoup dans le sel de la série sinon c’est plutôt lambda dans les péripéties.
Les Fleurs aussi ont une saison
Si j’ai été un chouia moins touché que mes prédécesseurs par cet album, j’ai quand même apprécié cette lecture. C’est un album qui aborde, de façon à la fois pudique et sans tabou les « drames de la vie » vécus par l’héroïne, Cécile (elle perd en quelques temps sa grand-mère, sa mère et sa sœur – trois personnes desquelles elle était très proche, et ce de façon assez brutale). Ces décès amènent avec eux des questionnements, des regrets (sur ce qu’on n’a pas eu le temps de partager par exemple). Cette succession de drames se heurtent à une personnalité assez positive, qui plus est une femme qui découvre au milieu de ces événements qu’elle est enceinte. Comme un symbole, la vie « prend le dessus », malgré tout. C’est ce malgré tout qu’illustre le récit, qui même tristesse et joie, avec quelques pointes d’humour et d’autodérision (voir en particulier lorsqu’il faut « habiller » les mortes pour leur « dernier voyage »). Ça n’est pas forcément le type de récit qui me touche le plus, je ne suis pas le cœur de cible. Mais ici l’auteure (je ne sais ce qu’il peut y avoir d’autobiographique dans ces événements ?) a su trouver le juste équilibre pour raconter ces moments de vie – et de mort. Mots et situations sont simplement décrits. En effet, Cécile raconte ces événements à ses enfants, quelques années plus tard (ils n’ont pas directement connu les mortes). J’ai trouvé le dessin très simple, mais très bon, et surtout très beau. J’ai un peu moins accroché à la colorisation. C’est sûrement un choix esthétique, mais je l’ai trouvé un peu trop terne parfois.
Monsieur Apothéoz
Une histoire globalement sympathique, mais dont j’attendais davantage. En tout cas autre chose. Elle oscille entre le rigolo et le dramatique, mais aucun de ces aspects n’est suffisamment affirmé selon moi. Il y a de bonnes idées (l’auteur mythomane devenu conseiller bien au-delà de ce qu’il est prêt à assumer, le jeune voulant éviter la fin du viager à la mort de son père). Mais tout ça est un peu noyé dans l’ensemble, et surtout le dernier quart de l’intrigue manque de clarté et de crédibilité (la fin est même un peu expédiée !). Même l’aspect « romantique » (le héros hésitant à déclarer sa flamme à son amour de jeunesse) n’apporte pas ici le sel attendu (et j’ai eu du mal à « accepter » comme crédible l’acte de cette femme vers la fin). Bon, pour le reste ça se laisse lire, et j’ai trouvé le dessin très agréable. Mais la fin en eau de boudin et quelques idées à peine exploitées m’ont un peu laissé sur ma faim. Note réelle 2,5/5.
Barcelona, âme noire
Un petit oui pour cet album. Je m’y suis lancé à l’aveugle et si ça se lit bien, des petits détails amoindrissent le ressenti final. Pourtant j’aime l’idée générale, la localisation et la temporalité mais ça manque un peu de force et de liant. La faute à un protagoniste principal plutôt fade, on traverse les époques à (trop) grands pas mais sans réels atomes crochus pour son parcours ou ses relations. Les transitions sont souvent abruptes et le récit, qui reste une peinture intéressante de cette période, brasse sans doute un peu trop de thèmes pour subjuguer. Je salue l’envie, cette virée dans l’Espagne franquiste n’est pas déplaisante comme le portait de ce « parrain » local. En plus la partie graphique est agréable. Ça manque juste d’un peu de magie comme les autres œuvres du duo Lapierre/Pellejero ont su me procurer. C’est ici limite trop dense pour ça.
Le Dernier modèle
Mince… On n’a pas eu le temps de faire avec le manteau. - Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Sa première édition date de 2007. Il a été réalisé par Stéphane Levallois pour le scénario, les dessins, les lavis de gris. Il comprend cent-cinquante-sept pages de bandes dessinées. Il comporte une deuxième partie intitulée 2ème étage gauche, de seize pages, constituée d’illustrations en pleine page, des êtres humains portant un masque intégral, évoquant de plus ou moins loin un masque à gaz. Dans un petit deux-pièces d’un immeuble parisien, Stéphane est assis sur tabouret, le crayon à papier à la main. Il s’adresse à son manteau qui posé en position assise sur le fauteuil en face de lui, et il lui déclare que ce sera ce manteau qui sera la vedette de l’histoire. Un peu plus tard, il se rend, vêtu de ce manteau, chez Florence, une copine. Elle le fait enter et lui propose d’aller dans sa chambre. Elle explique que sa mère n’est pas là, que sa sœur est partie avec sa copine, et que son père est dépourvu de tout courage. C’est un minable, il n’a rien dans le ventre. Elle continue : sa sœur est lesbienne. Stéphane a sorti son camescope de son étui et il indique à son amie qu’il est prêt. Elle ouvre sa robe et dévoile sa nudité. Il s’exclame qu’elle n’est pas grosse du tout. Elle demande si elle doit passer le manteau et il répond par l’affirmative. Il explique qu’il demandera aux autres modèles de faire de même : le manteau donnera une unité à l’exposition. Elle le passe, puis s’assoit sur le bord du lit et regarde la caméra comme il lui demande. Elle le regarde, les jambes serrées, et les mains posées sur les genoux. Plus tard, Stéphane se rend dans la galerie Atome qui a promis d’exposer ses œuvres et il est reçu par la galeriste. Elle l’appelle Mon chou, et lui confirme que ce sera une exposition personnelle, rien que pour lui, seul. Elle continue : Francis et elle en ont discuté. Dans un mois et demi, à la fin de celle de Declerc. Elle explique qu’il pourrait y avoir trois grandes pièces, pas plus, une trentaine de pièces à exposer, des nus de femmes, des petits formats pour que l’on puisse les vendre. Et elle lui donne son congé en lui demandant d’aller leur faire des choses magnifiques. Un autre artiste arrive et elle l’appelle également mon chou. Une fois dehors, Stéphane se demande comment il va faire, car il n’a pas les moyens de se payer des modèles professionnels. Il trouve la solution : demander à ses amies de poser nues. Plus tard, il appelle son père et il lui dit que son travail va bénéficier d’une exposition, le vernissage devrait avoir lieu début septembre à la galerie Atome, elle durerait un mois environ. Son père l’informe que Monette ne va pas très bien : elle a maintenant quatre-vingt-huit ans, et elle s’ennuie. Elle est à l’hospice en banlieue, il est possible de s’y rendre par le train. Bien qu’il trouve ça loin, le fils promet d’aller lui rendre visite. Il faudra qu’il trouve le temps quand il sera moins débordé. Plus tard, il se rend chez son deuxième modèle : Florence. La moitié inférieure d’une femme nue dans la partie gauche de la couverture et la possibilité qu’il s’agisse du dernier modèle de l’artiste. Le début du récit permet de rapidement comprendre la situation : Stéphane est un jeune artiste qui doit réaliser une commande pour remplir la commande d’une exposition de ses œuvres. Il va rencontrer plusieurs de ses amies qui vont accepter de poser nues pour lui, avec le même manteau, alors qu’il les filme, pour pouvoir décider dans son appartement de la posture dans laquelle il les représentera. C’est ainsi qu’il se rend chez Florence, Cécile et Solène, les deux premières habitant chez leurs parents. Sa petite amie Élise accepte également de poser pour lui. Et l’exposition a bien lieu, ses parents faisant le déplacement pour le voir. Les caractéristiques visuelles des cases de l’artiste sont identiques à celle de la couverture qui est d’ailleurs une image en pleine page, extraite de la page vingt-six. Le dessinateur utilise un trait de contour fin, comme un peu tremblé ou hésitant, peut-être avec le crayon à papier qu’il tient à la main dans la première planche. Il nourrit ces contours assez aérés avec des lavis de gris pour apporter des reliefs, parfois souligner une texture ou un ombrage. Il ajuste le nombre de cases par page au moment raconté, parfois avec deux ou trois cases pour une page, parfois plus. Il n’accorde pas une grande importance à la représentation des décors, parfois quelques traits pour un angle de mur, parfois absents. Le lecteur constate rapidement qu’il s’agit d’une bande dessinée qui se lit à un rythme rapide. La première séance de pose débute en page six et Florence se dénude en page huit, dans un dessin en pleine page. Le lecteur constate que cela n’a rien de sexuel. Stéphane n’indique pas combien de refus il a essuyé, ni même s’il y en a eu un seul. Les séances de pose vont de soi : l’artiste arrive sur place, et la jeune femme se déshabille, ne portant déjà plus aucun vêtement. Elles n’exposent par leur motivation. La séance se déroule avec prise de vue par un caméscope qui permettra à Stéphane de trouver l’instant où la pose est la plus parlante, la plus intéressante sur le plan artistique. Les termes et les conditions sont convenus hors champ, hors page du récit. Les paroles échangées sont limitées : quelques propos de circonstances, quelques directives données par l’artiste quant à ce qu’il recherche, ce dont il a besoin pour pouvoir réaliser ses dessins, une réaction ou deux. Une séance interrompue par l’arrivée inopinée de la mère du modèle, une fatigue à la fin d’une séance. Le lecteur en déduit que ces moments sont dépourvus de toute tension sexuelle, de toute forme de séduction. Aucune ambiguïté, aucune tentation, un consentement explicite, une forme d’activité de nature purement professionnelle pour lui, et d’aide apportée à un ami pour elles. Les séances de pose occupent dix-sept pages de la bande dessinée, le visionnage des prises de vue deux pages, et, pour être complet, Stéphane a une relation sexuelle avec Élise pendant quatre pages, sans rapport avec une séance de pose. Le reste de l’ouvrage, c’est-à-dire sa majeure partie, est consacré au quotidien banal de Stéphane : se rendre chez ses amies, se rendre à la galerie Atome, réaliser les dessins qui seront exposés, discuter avec sa copine, se rendre à l’hospice pour aller voir Monette, se rendre chez ses parents en banlieue, et bien sûr participer au vernissage de son exposition. La narration visuelle présente une grande facilité de lecture. La bande dessinée comprend quarante-cinq pages muettes, et vingt-cinq dessins en pleine page. Les dessins appartiennent à un registre descriptif et réaliste, avec un rendu éloigné de la représentation photographique du fait de la grande simplification des traits, de la fluctuation entre des formes uniquement détourées, c’est-à-dire du noir & blanc, et des formes rehaussées par les lavis de gris. Les caractéristiques de la représentation, les cadrages, le choix de ce qui est montré rendent compte du regard subjectif de l’auteur, de ce sur quoi se porte son attention, les êtres humains, leur posture et certains éléments de son environnement. Pour autant, il se passe bien d’autres choses. En y repensant après coup, le lecteur se souvient de moments et de visions aussi disparates que : une grande affiche publicitaire pour l’Amer Picon, l’enseigne d’un Leader Price, la tête d’un cheval, une silhouette en train de courir évoquant Giacometti, un robinet de baignoire qui fuit, un petit carton au contenu mystérieux posé dans une immense pièce entièrement vide, un jardin à la française, une bibliothèque en verre (en pleine page), un exercice d’équilibre de yoga sur une seule jambe, le cadavre d’un petit oiseau dans la cuvette des WC, une main tenant un pistolet pointé à bout portant sur Stéphane, et un masque à gaz. En y repensant, les brefs échanges avec les modèles suffisent pour leur insuffler une personnalité, avec des réactions différentes qui s’ajoutent à l’absence de toute ambiguïté relationnelle. L’artiste apprend incidemment la réaction de deux modèles à l’exposition ce qui confirme qu’il s’agit d’êtres humains à la vie indépendante et autonome. D’ailleurs, le lecteur prend conscience que les situations qui lui sont présentées sont des moments choisis et triés à dessein, pour former un récit. Certainement, l’histoire s’apparente à une autofiction de la part de l’auteur, un regard jeté en arrière sur cette période de sa vie et sur ce projet. Le lecteur comprend qu’il découvre les souvenirs que Stéphane en a gardés, associés à une portion de son état d’esprit. Il évoque avec naturel ce projet artistique qui sort de l’ordinaire pour le commun des mortels, ainsi que sa relation avec Simone Frossard, surnommée Monette, et il y a cet élément fantastique qu’est un individu fantomatique portant un masque à gaz. En fonction des scènes et en fonction de sa sensibilité, le lecteur peut y voir un autre indistinct et silencieux, une présence de l’altérité, d’un être humain totalement étranger au projet de Stéphane, à sa vie d’artiste à ses aspirations et à ses ambitions, dont les traits du visage sont masqués. À la fois cela le rend anonyme et cela masque ses émotions, l’artiste se retrouvant en présence d’une personne sans réaction, totalement étrangère à son art, et possiblement totalement insensible également. Il peut aussi bien s’agir d’une métaphore sur le gouffre qui sépare l’artiste des personnes qui ne possèdent pas ce don, que la réalité diffuse de la masse chez laquelle son art ne suscite aucune réaction. Le lecteur peut également y voir une partie de la conscience de l’artiste qui n’est pas impliquée dans son activité, qui la considère avec détachement, avec recul sans être touché ou affecté, autrement que sur le plan matériel. Le dernier modèle : la promesse de participer à des séances de pose de nu, et aussi de vivre un moment déterminant dans la pratique artistique du personnage qui ne recourra plus à des modèles vivants (puisqu’il s’agit du dernier). La narration visuelle très personnelle séduit rapidement le lecteur par son accessibilité, sa facilité de lecture, et sa façon de montrer les personnes, leurs activités et les lieux. Le récit tient la promesse implicite de la couverture, tout en évoquant une phase très personnelle de la vie de l’auteur, son rapport à son activité artistique, son incidence sur ses amies et ses parents, sur Monette qui l’apprécie pour lui-même détaché de sa pratique artistique. Une réflexion tout en sous-entendu sur les relations de l’artiste avec les personnes de son entourage. Déconcertant.
Le Cercle des Intrépides
Au royaume d'Enégaur, la jeune Devane est chargée par son père forgeron de reforger l'épée légendaire du roi. Sauf que par la maladresse d'un de ses amis, un ptérodactyle idiot s'empare de l'épée. Devane et ses amis partent alors d'urgence à sa recherche avant que les gardes du roi ne se rendent compte de la disparition. Commence alors une suite d'aventures loufoques et mouvementées pour cette petite bande qui se fait appeler le Cercle des Intrépides. C'est une série jeunesse d'héroïc-fantasy humoristique. Le dessin de Massimo Di Leo est inspiré de l'animation et du jeu vidéo. Son style est burlesque, avec des personnages très expressifs aux allures parfois volontairement débiles. C'est un graphisme dynamique qui se prête bien autant à l'action qu'à l'humour. Son encrage épais et le peu de détails de ses planches et décors souvent vides laissent toutefois un léger sentiment qu'un format d'album plus réduit aurait mieux convenu. L'histoire est rythmée, prenante et pleine d'humour. Les auteurs ne se prennent pas au sérieux et il en découle une histoire échevelée, narrée par un troubadour qui n'hésite pas à s'insérer lui-même dans l'intrigue et à ajouter sa propre touche humoristique. Les personnages sont pleins de drôlerie, souvent loufoques comme ce fermier misanthrope radicalement idiot ou cette race de vers géants qui dansent le twist, et en même temps relativement crédibles comme la relation entre les trois héros. Il se passe plein de choses, le sourire est toujours présent et l'histoire a le bon goût de se terminer en un tome laissant espérer une suite d'aventures de ce type, entre humour et aventure. Je n'ai qu'un regret, c'est que l'abondance de loufoque empêche le fond de l'intrigue aventureuse de prendre totalement prise puisqu'on sait que de toute manière tout est pour de rire. Mais je me suis quand même bien amusé et j'en lirai davantage avec plaisir.