Effectivement, il y a matière à se gausser du tas de clichés empilés dans certains films, et l’histoire du cinéma ne fait souvent qu’en ajouter une couche. Karibou a regroupé ici les plus récurrents, dans tous les genres (SF, western , polar, fantastique, horreur, etc.).
Il n’y a pas ici le vague parti pris scientifique et pédagogique qui habille certaines petites histoires assez proches de Marion Montaigne dans son « Tu mourras moins bête ». Non, il s’agit ici de mettre en lumière le cliché, et de le tourner ensuite en dérision, en l’exagérant, ou en décalant le thème.
Le principal problème vient du fait qu’une fois annoncer (en titre de chaque histoire – d’une à quatre pages le plus souvent), on a livré la chute, et qu’en suite il est plus difficile de « rebondir » : faire du grotesque sur du grotesque, faire du peu crédible sur du peu crédible, c’est difficile, à moins de partir dans de gros délires. Ce que ne fait pas forcément Karibou.
Du coup, je suis resté un peu sur ma faim. La majorité des histoires m’ont laissé avec un sourire à peine esquissé. Mais il y a quand même plusieurs histoires amusantes (les deux se déroulant dans un univers western par exemple – un duel surprenant, et un desperado aux airs d’enquêteurs pour un magazine de voyage, ou alors « Le miracle de Noël », qui amène une chute amusante et bien vue). Ce sont ces histoires qui me font arrondir aux trois étoiles (note réelle 2,5/5).
Bien que le sujet de l’histoire soit une enquête, j’aurais du mal à vraiment considérer cette bande-dessinée comme un récit policier tel qu'on l'entend habituellement.
En fait, je n’ai pas du tout eu l’impression que l’œuvre cherchait vraiment à établir un mystère ou à nous donner des indices subtilement cachés dans des détails. Les personnages meurent les uns après les autres sans vraiment être bien définis et on ne fait que suivre l’histoire sans vraiment s’y investir je trouve. Les évènements et découvertes s’enchaînent tellement vite qu’on a l’impression qu’ils ont été improvisés
Par exemple (attention, ici je vais spoiler un peu), l’inspectrice a une révélation capitale sur l’enquête aux deux tiers de l’album et ça sort un peu de nulle part. À part le fait que la productrice de l’émission jouait les charmeuses avec l’un de nos protagonistes, je ne vois vraiment pas ce qui a permis à l’inspectrice de réaliser qu’elle était une croqueuse d’hommes… Certes, il y a aussi le fait que tous les précédents gagnants de son émission soient des hommes, mais je doute vraiment que l’hégémonie masculine dans les hautes sphères du monde culinaire permette d’arriver à cette conclusion.
De l’adaptation du roman d’Agatha Christie (car oui, c’est une adaptation d’Ils étaient dix), il ne reste que le huis-clos et les dix personnages jouant les victimes/suspects. Les victimes/futures victimes ne mènent pas l’enquête elles-mêmes, le meurtrier et son mobile sont différents, la conclusion l’est donc tout autant…
Bref, cela tient plus du clin d'œil qu'à une adaptation pure et dure.
Il n’empêche que la bande-dessinée se laisse lire et que les dessins de Carrère sont bons.
Ça reste tout de même dispensable.
Peut-être que si cela était devenu une série cela aurait pu s’étoffer, qui sait.
(Note réelle 2,5)
Joann Sfar livre un gros carnet sur la situation depuis les événements du 7 octobre 2023.
On a droit à toutes ses réflexions durant cette période et on parle de nombreux sujets : l'histoire de sa famille dont certains sont liés à Israël, des faits historiques que tout le monde semble vouloir oublier, le choc des juifs depuis l'attaque du Hamas et la montée de l'antisémitisme dans le monde (qui paradoxalement donne raison à la création d'Israël !), les exaltations de l'extrême-droite israélienne... C'est vraiment le genre d'album qui donne envie de déprimer sur l'état de notre monde.
En seconde partie, Sfar se rends en Israël et rencontre des gens pour avoir un pouls sur la situation actuelle. C'est intéressant, même si Sfar prend souvent tout ce qu'on lui dit pour argent comptant. Disons qu'il n'a pas la rigueur d'un Joe Sacco qui lui-même lors de son reportage à Gaza fait remarquer qu'il faut prendre les témoignages avec des pincettes. D'ailleurs à deux reprises Sfar fait une correction sur des grosses conneries que lui disent ses interlocuteurs. Un truc décevant est qu'au final Sfar va pouvoir peu parler avec des arabes israéliens vu que la plupart se taisent depuis l'attaque du Hamas.
Au final, un livre avec des réflexions intéressantes, même si je ne suis pas toujours d'accord avec l'auteur, mais qui comporte beaucoup de longueurs et comme c'est basé sur un événement d'actualité, l'album semble déjà un peu daté vu qu'il y en a des choses qui se sont passé depuis que Sfar l'a terminé en février 2024. Ce qui n'aide pas c'est que le dessin et le texte en lettre attachés n'est pas toujours facile à déchiffrer.
Noter un Manara, que voila une tâche bien ardue, j'avoue être un peu déçu par ce diptyque, comme le disait un avis précédent nous avons ici une très bonne adaptation du film de JJ Annaud, et donc forcément beaucoup moins foisonnante que le roman. S'il avait fallu adapter le roman c'est trois ou quatre tomes qu'il aurait fallu.
En fait ce qui m'embête le plus ici c'est la propreté de la chose, le dessin est beau, mais ne retranscrit pas vraiment le côté cradingue de cette abbaye et de ces habitants. Le dessin de Manara est léché, trop à mon goût, à la fin du premier tome nous n'échappons pas à la scène de cul où l'auteur excelle ( c'est sa marque de fabrique ), mais là encore je n'ai pas vibré.
Je n'irais pas jusqu'à dire que je regrette mon achat, mais pas loin, sans doute une BD que je ne relirais pas de sitôt, préférons les autres oeuvres de Manara.
Déçu moi
J'ai eu de l'intérêt, malgré quelques réserves, à la lecture de cette série militante de Jérôme Ruillier. La thématique de l'immigration clandestine (ou pas) est vraiment fondamentale. Ainsi les projections démographiques sont telles que les parcours identiques au "héros" de l'auteur ne peuvent que se multiplier.
La construction du récit est vraiment originale. Les pays de départ et d'arrivée ne sont jamais nommés ce qui donne un caractère d'universalité au récit. On pourrait ergoter que cela évacue le passé colonialiste du lien entre les pays puisque les deux pays n'ont pas la même langue ce qui reste encore un facteur fort du choix de migration (intercontinentale).
Le récit des mésaventures administratives du bon gros nounours de Ruillier est parsemé de situations qui exhalent le vécu. L'universalité du récit de Ruillier possède sa limite puisqu'il existe des parcours de réussite. Ruillier préfère travailler sur l'absurde de certaines situations et le positionnement ambigu de fonctionnaires qui sont pris entre des procédures rigides issues du politique et la réalité humaine d'une détresse côtoyée au quotidien. Ainsi j'ai bien aimé le discours du policier qui préfère sa mission en interpellant des braqueurs qu'en remplissant des quotas conjoncturels.
Tout le récit transpire cette transposition de témoignages de migrants, de fonctionnaires ou d'associatifs assemblés pour en faire un récit fluide, cohérent avec une belle tension dramatique.
Toutefois mon avis ne sera pas totalement sans réserve.
J'ai eu du mal à accrocher au dessin trop minimaliste et le côté animalier m'a perturbé.
Enfin je ne comprends pas pourquoi Ruillier fait rentrer son personnage avec des faux papiers. Cela met de facto son personnage en position de tricheur difficilement défendable dans tous les pays.
Cela reste une lecture ( rapide) très intéressante. Un bon 3
J'ai trouvé pas mal de qualités à cette série même si, in fine, elle ne m'a pas fait vibrer. Il faut reconnaître que JVH maîtrise parfaitement une construction qui mixte le discontinu des époques avec des flash back, pas trop intrusifs, qui permettent de donner du liant et du mystère entre les personnages. La série part sur les chapeaux de roue avec deux épisodes Charles et Margrit qui lancent la série de façon très convaincante. La suite est moins égale. JVH colle classiquement la destinée de la famille Steenfort aux grands événements de leur époque mais ne se disperse pas et reste focalisé sur l'évolution du marché et de la fabrication de la bière.
J'ai toutefois une réserve sur un texte parfois un peu lourd qui se perd dans des querelles de conseils d'administration et des trahisons assez convenues.
Le graphisme de Francis Vallès est très classique pour ce type de récit qui travaille sur le côté historique de la série. Les personnages en mode semi réaliste sont bien travaillés avec de belles expressions. Vallès apporte un soin particulier aux extérieurs, paysages et costumes qui permettent de se plonger dans les ambiances des différentes époques.
Une lecture plaisante qui a un peu vieilli mais reste divertissante. 3.5
Avant de l’abattre, il faut parler avec l’arbre !! C’est important…
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Ce tome est compilation de gags en une page, indépendante de tout autre. Sa première parution date de 2024. Il a été réalisé par Tronchet (Didier Vasseur) pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il compte cinquante-quatre pages de bande dessinée. Le couple central de ces histoires est déjà apparu dans Les Catastrophobes (2021).
Enfin : Madame & Monsieur arrivent descendent de voiture : ils sont arrivés devant leur nouvelle demeure, une belle maison avec un étage, à la campagne. Elle s’exclame, en ouvrant grand les bras : Ça y est, ils ont réussi ! Ils ont fait le grand saut ! Finis la ville, la pollution, le stress !! Ils vont bâtir ici une nouvelle vie, ne plus dépendre du système, travailler dur pour être autonomes. Il intervient pour poser une question : Heu, l’idée, c’était pas une année sabbatique ?? Elle commence à répondre, mais il consulte un dictionnaire en ligne pour la définition de sabbatique : Congé qui permet au salarié de prendre une année de repos. Il s’étonne de ne pas voir les transats. – Isolement : Madame a un plan dans la main et elle le commente pour monsieur : La maison est là, idéalement située, totalement isolée. Au bout d’un chemin où personne ne passe et au milieu de la forêt. Il demande une précision : Personne ne peut savoir qu’ils habitent ici ? Elle répond que non, même du ciel on ne les voit pas. Elle continue : ils sont indépendants, ils ne doivent rien à personne, ils ne vivent que du fruit de leur travail. Il répond que ça l’embête un peu, il aimerait bien qu’on retrouve leurs cadavres… Ben comme elle a dit qu’ils allaient vivre du fruit de leur travail…
Évacuation : devant leur maison, Madame constate que leur nouvelle demeure a tout ce qu’il faut : la toiture est saine, les mur épais, solides, les portes et fenêtres ferment bien. Elle se sent protégée. Elle demande à Monsieur s’il aime. Il répond que oui, mais se demande si les normes de sécurité sont bien respectées. Il précise : Où est le plan avec les issues de secours et d’évacuation vers la ville en cas de danger. Déjà, le danger d’habiter ici ! – Souplesse : Elle lui fait remarquer qu’il faudrait qu’Il soit un peu plus souple. Il répond qu’il a l’intention d’être hyper souple pendant l’année sabbatique… Et après, ils rentrent. Elle l’informe que non, ils ne rentrent pas. Elle a vendu leur appartement en ville. Il fait un malaise et il est transporté à l’hôpital. Alors qu’il est conscient sur le lit d’hôpital avec une intraveineuse, elle constate qu’au moins ils savent maintenant qu’il y a un hôpital pas loin, ce qui doit le rassurer. Elle ajoute que ce n’était pas vrai : elle voulait tester sa souplesse. Elle ne peut pas vendre l’appartement sans sa signature, il aurait dû réfléchir. Elle continue en lui tendant un papier, et l’enjoignant à signer. - Table rase : ils sont devant leur voiture et elle lui montre qu’elle n’a emporté que deux bagages, la sobriété avant tout. Lui, il est venu les mains dans les poches… Il a tout commandé sur Amazon.
Sans surprise, l’auteur se moque de deux urbains, parisiens de surcroît qui tentent l’aventure d’habiter à la campagne, et de tenter l’autosuffisance, au moins alimentaire dans un premier temps. Il peut compter sur le bédéiste pour se montrer moqueur, avec un fond de tendresse vis-à-vis de ses personnages, si normaux, vaguement pathétiques. Pour commencer, il ne leur donne ni nom, ni prénom, juste une femme et un homme, madame et monsieur, peut-être quadragénaires, peut-être quinquagénaires, pas vraiment beaux, mais pas repoussants pour autant, généralement contents ou souvent souriants en tout cas, l’air gentiment satisfaits d’eux-mêmes, enfin surtout Madame, parce que Monsieur… L’artiste est en mode caricature, avec une simplification dans la représentation. Par exemple, les personnages n’ont que quatre doigts à chaque main, leur coiffure s’apparente à une sorte de touffe dressée sur la tête, ou encore ils sont affublés de pieds pointus, sans oublier le pantalon trop large et remonté trop haut de Monsieur. Cela donne une allure comique à Monsieur, teintée de dérision plutôt que de réelle moquerie. Son nez semble un peu écrasé, surtout comparé à celui pointu de son épouse, et il fait souvent des grands gestes, ou des moues exagérées. L’auteur s’en sert comme dispositif comique : au fond de lui opposé à l’idée de s’installer à la campagne, cherchant comment dénigrer cette expérience, essayant mollement de ruser pour retrouver Paris, régulièrement victime d’une conséquence plus ou moins grave de la vie à la campagne.
D’un côté, l’auteur raconte des morceaux choisis de cette année sabbatique, chaque page racontant un gag se suffisant à lui-même. De temps à autre, Tronchet file une note humoristique, le principe de parler aux arbres ou à un objet par exemple, la tentation du recours à Amazon pour se faire livrer des objets de grande consommation contre les principes de sa femme, qui, elle, ne semble pas reconnaître la banane, c’est-à-dire le logo de cette enseigne de vente en ligne. D’un autre côté, le lecteur peut aussi envisager l’album comme un tout : différents moments vécus lors de cette année sabbatique, ce couple faisant l’expérience de différents points de passage attendus. Madame et Monsieur vont commencer par apprécier l’isolement de leur maison, l’effet de sevrage de la société de consommation, les risques liés aux travaux manuels (enfin un bobo minime avant même de commencer), un changement d’approche dans le rapport aux choses (il faut parler aux arbres), un voisin à la communication un peu particulière (il faut parler à sa tronçonneuse), le silence aussi assourdissant qu’aliénant, l’importance des vers de terre, la visite d’amis de la ville, le plaisir tout relatif du feu de cheminée, les toilettes sèches et l’avantage de tout récupérer, etc.
Comme l’indique l’énumération ci-dessus, les scènes se suivent et ne se ressemblent pas. Elles donnent l’occasion au dessinateur de diversifier les visuels : les arbres, la maison vue de l’extérieur, quelques pièces à l’intérieur, une chambre d’hôpital, l’abattage d’un arbre à la hache, une clairière, le jardin potager, le garage et l’automobile, les toilettes sèches, etc. Le lecteur contemple également de nombreux accessoires : une pelle et un râteau, un ordinateur, un crapaud, une tronçonneuse, un caddie de supermarché, une ruche, une brouette, un taille-haie, des valises. En termes de mise en scène, le bédéiste a choisi un format reposant sur les dialogues entre Madame et Monsieur, ou l’un de deux avec un interlocuteur invisible au téléphone, avec des invités, avec leurs enfants, et même avec deux inspecteurs du service de l’hygiène. D’un côté, il lui arrive régulièrement de faire l’économie de l’arrière-plan, ou de reproduire le même décor en fond de case ; de l’autre côté, les personnages sont toujours en train de vaquer à une occupation, souvent différente. Cela nourrit la richesse de la narration visuelle qui présente toujours un intérêt, renforcée par les mouvements des personnages, leurs postures et leurs mimiques.
Le lecteur constate rapidement que la charge humoristique reste dans un registre gentil : Madame s’avère déterminée, se livrant, l’une après l’autre, aux activités de base pour essayer d’aller vers l’autonomie : le jardinage sous différentes formes le sevrage au consumérisme, l’abandon d’habitudes citadines. Monsieur se livre, à contrecœur et de mauvaise grâce, ou au moins en râlant, à des activités de plein air comme couper du bois ou jardiner lui aussi. S’il espère glaner des conseils pour aller vers l’autosuffisance en mettant en œuvre la permaculture, le lecteur s’est trompé d’ouvrage. Ça ne va pas plus loin que l’importance des vers de terre, l’évocation de panneaux solaires, la culture de ses légumes et la mise en place de toilettes sèches. Les effets comiques naissent des pitreries de Monsieur et de sa réticence latente exprimée plus ou moins ouvertement, de son décalage de ressenti d’avec celui de son épouse, de son absence totale de motivation. L’auteur file un ou deux effets comiques : le voisin un peu particulier qui recommande de parler aux arbres, puis à la tronçonneuse, ou encore Madame qui n’identifie le sigle en forme de banane d’un géant de la vente en ligne.
Dans le même temps, ces scénettes ne constituent pas une suite de gags tièdes et inoffensifs. En passant, sans avoir l’air d’y toucher, sans approche moralisatrice, l’auteur évoque l’omni-disponibilité des biens de consommation livrés dans des délais d’une brièveté redoutable, le partage des richesses, le risque d’isolement à la campagne, le puits sans fond de connaissances d’internet, la nécessité de disposer d’une voiture, la violence de l’abattage des animaux d’élevage et les ravages de l’élevage intensif, l’investissement à faire en efforts pour un résultat pas toujours à la hauteur en qualité mais aussi en quantité, les conséquences de la surconsommation, le partage de ce mode de vie pour donner envie à d’autres en devenant influenceur. Dans le même temps, le constat reste lucide : ce couple n’a aucune chance d’être auto-suffisant dans un proche avenir, ou même à moyen terme. En page dix, Monsieur fait même observer à madame qu’ils vont pouvoir tout produire… à condition d’avoir sur place une usine de transformation, des fours industriels et un hangar réfrigéré, un troupeau de mille têtes et une chaîne d’abattage. Comme Adam Smith (1723-1790) avant lui, il a pleinement conscience que nul être humain est en mesure d’être autosuffisant et de produire les biens manufacturés indispensables à la satisfaction de se besoins primaires.
Aaaah, se mettre au vert… Un beau projet écoresponsable, un choix de vie pour l’avenir de la planète, une aventure enrichissante et formatrice. Tronchet choisit un mode humoristique doux et gentil, sans railler ni les urbains et leur frénésie mortifère de consommation, ni les urbains incompétents et contre-productifs qui s’improvisent campagnards. Il réalise une cinquantaine de gags avec des dessins caricaturant un peu les êtres humains, expressifs et très juste, montrant cette maison accueillante et tranquille, une nature plutôt évoquée, et un couple avec Madame pleine de bonne volonté, et Monsieur rétif. Au fil des gags sympathiques, le lecteur ressent en filigrane la remise en question d’un mode de vie destructeur, et le désemparement d’êtres humains dépassés par l’ampleur de la situation.
Je possède plusieurs séries de cet auteur (dont Sombres ténèbres), visiblement peu connu, si j’en crois le peu d’avis le concernant. Je commence donc par ce « Spoty et la lune alphane », pas encore enregistrée sur le site, et l’une de ses premières publications en album (sa première en solo peut-être – je ne compte pas la rarissime Patte de mouche –, car il n’avait je crois fait auparavant qu’accompagner au dessin Ouin ou Bocquet).
Les histoires regroupées dans l’album ont pour la plupart fait l’objet d’une publication dans Métal Hurlant. Le fait de les regrouper ici donne forcément un rendu différent par rapport à leur espacement (dans le temps entre autres) au milieu d’autres productions dans une revue.
Le personnage principal, Spoty, est un robot. Seul ou accompagné d’autres robots (les seuls « êtres » qu’il côtoie), il vit des aventures – cela va de la simple exploration d’une planète à la participation à une guerre – durant lesquelles il est confronté à divers peuples extraterrestres, et quelques bestioles. Si pour ses éventuels compagnons ça ne finit pas toujours très bien, Spoty lui s’en sort généralement.
Le ton oscille entre de l’aventure simple dans un univers SF à l’humour. En relisant d’un trait l’album, je reste un peu sur ma faim. L’humour est inégal et pas assez percutant je trouve. Mais Spoty est attachant, et la lecture n’est pas désagréable. Dispersées dans des numéros de Métal hurlant, ces pastilles (la plupart des histoires ne s’étendent que sur quelques pages, certaines ne font qu’une page – l’une d’elle n’en fait même que la moitié) devaient procurer une vision rafraichissante de la SF (loin de certaines envolées d’autres auteurs proches des Humanos de l’époque).
Note réelle 2,5/5.
Loin d’être désagréable (et sans mauvais jeu de mot), « Loin » constitue par excellence la lecture d’été idéale, mais est aussi une BD « feel-good » qu’on peut lire à tout moment, comme on se plaît souvent à le répéter dans une époque toujours plus anxiogène. Une senteur d’iode et de sable fin infuse le récit de façon câline, avec à la clé des questionnements sur un sujet sociétal pas anodin : qu’est-ce que le couple aujourd’hui et le schéma traditionnel « collé-serré » est-il encore viable aujourd’hui ? Alicia Jaraba, jeune autrice espagnole talentueuse, a choisi l’angle de la légèreté pour aborder la question, et elle a eu bien raison !
Le récit tout entier est traversé par les questionnements d’Aimée et Ulysse sur leur relation, leurs aspirations. Bien sûr, ils vivent ensemble depuis un bon paquet d’années (ils se sont connus au lycée !), mais cela prouve-t-il qu’ils soient vraiment faits l’un pour l’autre ? Quelques chamailleries liées à divers contretemps au début du voyage vont amener les deux jeunes gens à s’interroger. Aimée, elle, est en plein stress. En effet, elle attend une confirmation d’embauche dans un laboratoire suisse et doit rester connectée en permanence pour ne pas louper cette opportunité qu’elle juge essentielle pour sa carrière. Et puis d’une manière générale, elle déteste l’imprévu, toujours encline à imaginer le pire. Aimée adore faire des listes et reste très attachée à son petit confort. Ulysse, c’est un peu l’inverse. Epuisé par ses quatre années de thèse, il veut vivre avec un grand V, et l’inconnu ne l’effraie pas. Ces vacances, qui devaient lui permettre de faire un stage de plongée sous-marine, il les a désirées ardemment et tant pis si le programme est bousculé à cause de son van tombé en panne. Maintenant, il est prêt à camper dans la forêt, nager dans les lacs et chercher des « poissons-lunes ».
En contrepoint de cette histoire, un personnage va faire irruption, tel un bon samaritain aux intentions quelque peu équivoques. Prénommé Paco, ce sexagénaire, accablé par ailleurs par le départ précipité de sa femme, va proposer à Aimée et Ulysse de l’accompagner chez lui pour récupérer la voiture qu’il dit ne pas avoir le droit de conduire, et l’emmener ensuite à un congrès d’ornithologues exactement là où le couple doit se rendre. Si cela fait les affaires d’Ulysse, Aimée est beaucoup plus circonspecte… mais une fois tombées les barrières de la méfiance, ce personnage se révélera essentiel dans la relation des deux tourtereaux au bord de la rupture.
Le scénario, basé davantage sur l’exploration des sentiments humains, bénéficie d’une belle fluidité, sans surcharge émotionnelle inutile. Dans ce one-shot aux faux airs de comédie légère, Alicia Jaraba nous montre des personnages qui nous ressemblent, avec une bienveillance empreinte de tendresse. Si l’on pouvait craindre une conclusion convenue et un peu mièvre, il n’en est rien. Ce que l’on pourrait qualifier ici de parcours initiatique se termine sur une fin ouverte, en nous évitant le psychodrame de rigueur, les protagonistes ayant visiblement opté pour une approche concertée et rationnelle.
Le dessin semi-réaliste de Jarabia dégage une douceur « sous-marine » des plus plaisantes, nous livrant un bon aperçu de son talent. La poésie est très présente, avec un recours récurrent à la métaphore de la plongée dans les fonds marins en lien avec les états d’âme des personnages. Plutôt attachants avec leurs doutes et leurs fêlures, ceux-ci sont à la fois expressifs d’un point de vue graphique mais également bien campés.
« Loin » serait incontestablement le livre du moment à conseiller à celles et ceux qui rencontrent des problèmes de couple voire qui estiment qu’une vie à deux n’est possible qu’avec l’âme sœur, le prince ou la princesse charmante. Si ce modèle sociétal traditionnel implique de trouver des compromis, faut-il pour autant sacrifier ses propres envies ou tenter d’atteindre un équilibre ? Doit-on nécessairement être un couple fusionnel ? On ne trouvera bien sûr pas de réponse toute faite dans l’ouvrage d’Alicia Jarabia (pour cela, il y a des écrits publiés par d’éminents sociologues et psychologues), mais celui-ci reste tout à fait inspirant sans être trop dense, et pourra à coup sûr livrer quelques pistes aux âmes en peine.
Sympathique album sur un récit choral où se croisent des histoires d'amour à trois âges. C'est pétri de bon sentiment, clairement, parfois un peu trop à mon gout, et je trouve que l'ensemble reste malheureusement dans une zone sympathique mais sans grand plus.
Le récit mélange plusieurs choses, notamment des considérations sur la destruction des écosystèmes (qui font assez saugrenue, je dois bien dire même si je vois l'idée) et trois façons d'envisager les relations amoureuses. C'est aussi six personnes se posant différentes questions à différents âges avec ce que ça peut comporter de situations parfois drôles et souvent non. J'aime bien les récits de ce genre, mais je dois avouer que là ça m'a laissé pas mal sur ma faim. Déjà parce qu'il n'y a pas réellement de conclusion vis-à-vis de son récit. Enfin, si, mais au-delà de ce qu'on peut sentir arriver, rien ne vient réellement conclure le mélange entre le fantastique et les différentes histoires personnelles. Qui d'ailleurs se mélangent très peu, même si les personnages se croisent. Je trouve qu'il manque un peu de liant entre tout ça, qui ne soit pas juste des petits moment de passage. J'aurais bien aimé de réels échanges entre les générations (de mémoire il n'y a qu'une seule scène où deux générations différentes discutent réellement).
Pour le reste, le récit est lent avec son mélange des genres, le fantastique des bêtes apportant de bons mots mais aussi quelques réflexions sur le monde. C'est bien dessiné, plaisant à lire, mais pour le coup je pense que je ne garderais pas l'histoire en mémoire. Par rapport à un récit du même genre (je pense à Échecs) il n'y a pas de surprise dans la tournure du récit ou un bon mot final qui reste en mémoire. Même s'il y a bien une sentence finale, je ne la trouve pas inoubliable. Et c'est un peu l'avis que j'ai sur la BD.
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Effectivement, il y a matière à se gausser du tas de clichés empilés dans certains films, et l’histoire du cinéma ne fait souvent qu’en ajouter une couche. Karibou a regroupé ici les plus récurrents, dans tous les genres (SF, western , polar, fantastique, horreur, etc.). Il n’y a pas ici le vague parti pris scientifique et pédagogique qui habille certaines petites histoires assez proches de Marion Montaigne dans son « Tu mourras moins bête ». Non, il s’agit ici de mettre en lumière le cliché, et de le tourner ensuite en dérision, en l’exagérant, ou en décalant le thème. Le principal problème vient du fait qu’une fois annoncer (en titre de chaque histoire – d’une à quatre pages le plus souvent), on a livré la chute, et qu’en suite il est plus difficile de « rebondir » : faire du grotesque sur du grotesque, faire du peu crédible sur du peu crédible, c’est difficile, à moins de partir dans de gros délires. Ce que ne fait pas forcément Karibou. Du coup, je suis resté un peu sur ma faim. La majorité des histoires m’ont laissé avec un sourire à peine esquissé. Mais il y a quand même plusieurs histoires amusantes (les deux se déroulant dans un univers western par exemple – un duel surprenant, et un desperado aux airs d’enquêteurs pour un magazine de voyage, ou alors « Le miracle de Noël », qui amène une chute amusante et bien vue). Ce sont ces histoires qui me font arrondir aux trois étoiles (note réelle 2,5/5).
Les Savoureuses enquêtes d'Hercule Poireau et du commissaire Magret
Bien que le sujet de l’histoire soit une enquête, j’aurais du mal à vraiment considérer cette bande-dessinée comme un récit policier tel qu'on l'entend habituellement. En fait, je n’ai pas du tout eu l’impression que l’œuvre cherchait vraiment à établir un mystère ou à nous donner des indices subtilement cachés dans des détails. Les personnages meurent les uns après les autres sans vraiment être bien définis et on ne fait que suivre l’histoire sans vraiment s’y investir je trouve. Les évènements et découvertes s’enchaînent tellement vite qu’on a l’impression qu’ils ont été improvisés Par exemple (attention, ici je vais spoiler un peu), l’inspectrice a une révélation capitale sur l’enquête aux deux tiers de l’album et ça sort un peu de nulle part. À part le fait que la productrice de l’émission jouait les charmeuses avec l’un de nos protagonistes, je ne vois vraiment pas ce qui a permis à l’inspectrice de réaliser qu’elle était une croqueuse d’hommes… Certes, il y a aussi le fait que tous les précédents gagnants de son émission soient des hommes, mais je doute vraiment que l’hégémonie masculine dans les hautes sphères du monde culinaire permette d’arriver à cette conclusion. De l’adaptation du roman d’Agatha Christie (car oui, c’est une adaptation d’Ils étaient dix), il ne reste que le huis-clos et les dix personnages jouant les victimes/suspects. Les victimes/futures victimes ne mènent pas l’enquête elles-mêmes, le meurtrier et son mobile sont différents, la conclusion l’est donc tout autant… Bref, cela tient plus du clin d'œil qu'à une adaptation pure et dure. Il n’empêche que la bande-dessinée se laisse lire et que les dessins de Carrère sont bons. Ça reste tout de même dispensable. Peut-être que si cela était devenu une série cela aurait pu s’étoffer, qui sait. (Note réelle 2,5)
Nous vivrons - Enquête sur l'avenir des Juifs
Joann Sfar livre un gros carnet sur la situation depuis les événements du 7 octobre 2023. On a droit à toutes ses réflexions durant cette période et on parle de nombreux sujets : l'histoire de sa famille dont certains sont liés à Israël, des faits historiques que tout le monde semble vouloir oublier, le choc des juifs depuis l'attaque du Hamas et la montée de l'antisémitisme dans le monde (qui paradoxalement donne raison à la création d'Israël !), les exaltations de l'extrême-droite israélienne... C'est vraiment le genre d'album qui donne envie de déprimer sur l'état de notre monde. En seconde partie, Sfar se rends en Israël et rencontre des gens pour avoir un pouls sur la situation actuelle. C'est intéressant, même si Sfar prend souvent tout ce qu'on lui dit pour argent comptant. Disons qu'il n'a pas la rigueur d'un Joe Sacco qui lui-même lors de son reportage à Gaza fait remarquer qu'il faut prendre les témoignages avec des pincettes. D'ailleurs à deux reprises Sfar fait une correction sur des grosses conneries que lui disent ses interlocuteurs. Un truc décevant est qu'au final Sfar va pouvoir peu parler avec des arabes israéliens vu que la plupart se taisent depuis l'attaque du Hamas. Au final, un livre avec des réflexions intéressantes, même si je ne suis pas toujours d'accord avec l'auteur, mais qui comporte beaucoup de longueurs et comme c'est basé sur un événement d'actualité, l'album semble déjà un peu daté vu qu'il y en a des choses qui se sont passé depuis que Sfar l'a terminé en février 2024. Ce qui n'aide pas c'est que le dessin et le texte en lettre attachés n'est pas toujours facile à déchiffrer.
Le Nom de la Rose
Noter un Manara, que voila une tâche bien ardue, j'avoue être un peu déçu par ce diptyque, comme le disait un avis précédent nous avons ici une très bonne adaptation du film de JJ Annaud, et donc forcément beaucoup moins foisonnante que le roman. S'il avait fallu adapter le roman c'est trois ou quatre tomes qu'il aurait fallu. En fait ce qui m'embête le plus ici c'est la propreté de la chose, le dessin est beau, mais ne retranscrit pas vraiment le côté cradingue de cette abbaye et de ces habitants. Le dessin de Manara est léché, trop à mon goût, à la fin du premier tome nous n'échappons pas à la scène de cul où l'auteur excelle ( c'est sa marque de fabrique ), mais là encore je n'ai pas vibré. Je n'irais pas jusqu'à dire que je regrette mon achat, mais pas loin, sans doute une BD que je ne relirais pas de sitôt, préférons les autres oeuvres de Manara. Déçu moi
L'Étrange
J'ai eu de l'intérêt, malgré quelques réserves, à la lecture de cette série militante de Jérôme Ruillier. La thématique de l'immigration clandestine (ou pas) est vraiment fondamentale. Ainsi les projections démographiques sont telles que les parcours identiques au "héros" de l'auteur ne peuvent que se multiplier. La construction du récit est vraiment originale. Les pays de départ et d'arrivée ne sont jamais nommés ce qui donne un caractère d'universalité au récit. On pourrait ergoter que cela évacue le passé colonialiste du lien entre les pays puisque les deux pays n'ont pas la même langue ce qui reste encore un facteur fort du choix de migration (intercontinentale). Le récit des mésaventures administratives du bon gros nounours de Ruillier est parsemé de situations qui exhalent le vécu. L'universalité du récit de Ruillier possède sa limite puisqu'il existe des parcours de réussite. Ruillier préfère travailler sur l'absurde de certaines situations et le positionnement ambigu de fonctionnaires qui sont pris entre des procédures rigides issues du politique et la réalité humaine d'une détresse côtoyée au quotidien. Ainsi j'ai bien aimé le discours du policier qui préfère sa mission en interpellant des braqueurs qu'en remplissant des quotas conjoncturels. Tout le récit transpire cette transposition de témoignages de migrants, de fonctionnaires ou d'associatifs assemblés pour en faire un récit fluide, cohérent avec une belle tension dramatique. Toutefois mon avis ne sera pas totalement sans réserve. J'ai eu du mal à accrocher au dessin trop minimaliste et le côté animalier m'a perturbé. Enfin je ne comprends pas pourquoi Ruillier fait rentrer son personnage avec des faux papiers. Cela met de facto son personnage en position de tricheur difficilement défendable dans tous les pays. Cela reste une lecture ( rapide) très intéressante. Un bon 3
Les Maîtres de l'Orge
J'ai trouvé pas mal de qualités à cette série même si, in fine, elle ne m'a pas fait vibrer. Il faut reconnaître que JVH maîtrise parfaitement une construction qui mixte le discontinu des époques avec des flash back, pas trop intrusifs, qui permettent de donner du liant et du mystère entre les personnages. La série part sur les chapeaux de roue avec deux épisodes Charles et Margrit qui lancent la série de façon très convaincante. La suite est moins égale. JVH colle classiquement la destinée de la famille Steenfort aux grands événements de leur époque mais ne se disperse pas et reste focalisé sur l'évolution du marché et de la fabrication de la bière. J'ai toutefois une réserve sur un texte parfois un peu lourd qui se perd dans des querelles de conseils d'administration et des trahisons assez convenues. Le graphisme de Francis Vallès est très classique pour ce type de récit qui travaille sur le côté historique de la série. Les personnages en mode semi réaliste sont bien travaillés avec de belles expressions. Vallès apporte un soin particulier aux extérieurs, paysages et costumes qui permettent de se plonger dans les ambiances des différentes époques. Une lecture plaisante qui a un peu vieilli mais reste divertissante. 3.5
Tous à la campagne !
Avant de l’abattre, il faut parler avec l’arbre !! C’est important… - Ce tome est compilation de gags en une page, indépendante de tout autre. Sa première parution date de 2024. Il a été réalisé par Tronchet (Didier Vasseur) pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il compte cinquante-quatre pages de bande dessinée. Le couple central de ces histoires est déjà apparu dans Les Catastrophobes (2021). Enfin : Madame & Monsieur arrivent descendent de voiture : ils sont arrivés devant leur nouvelle demeure, une belle maison avec un étage, à la campagne. Elle s’exclame, en ouvrant grand les bras : Ça y est, ils ont réussi ! Ils ont fait le grand saut ! Finis la ville, la pollution, le stress !! Ils vont bâtir ici une nouvelle vie, ne plus dépendre du système, travailler dur pour être autonomes. Il intervient pour poser une question : Heu, l’idée, c’était pas une année sabbatique ?? Elle commence à répondre, mais il consulte un dictionnaire en ligne pour la définition de sabbatique : Congé qui permet au salarié de prendre une année de repos. Il s’étonne de ne pas voir les transats. – Isolement : Madame a un plan dans la main et elle le commente pour monsieur : La maison est là, idéalement située, totalement isolée. Au bout d’un chemin où personne ne passe et au milieu de la forêt. Il demande une précision : Personne ne peut savoir qu’ils habitent ici ? Elle répond que non, même du ciel on ne les voit pas. Elle continue : ils sont indépendants, ils ne doivent rien à personne, ils ne vivent que du fruit de leur travail. Il répond que ça l’embête un peu, il aimerait bien qu’on retrouve leurs cadavres… Ben comme elle a dit qu’ils allaient vivre du fruit de leur travail… Évacuation : devant leur maison, Madame constate que leur nouvelle demeure a tout ce qu’il faut : la toiture est saine, les mur épais, solides, les portes et fenêtres ferment bien. Elle se sent protégée. Elle demande à Monsieur s’il aime. Il répond que oui, mais se demande si les normes de sécurité sont bien respectées. Il précise : Où est le plan avec les issues de secours et d’évacuation vers la ville en cas de danger. Déjà, le danger d’habiter ici ! – Souplesse : Elle lui fait remarquer qu’il faudrait qu’Il soit un peu plus souple. Il répond qu’il a l’intention d’être hyper souple pendant l’année sabbatique… Et après, ils rentrent. Elle l’informe que non, ils ne rentrent pas. Elle a vendu leur appartement en ville. Il fait un malaise et il est transporté à l’hôpital. Alors qu’il est conscient sur le lit d’hôpital avec une intraveineuse, elle constate qu’au moins ils savent maintenant qu’il y a un hôpital pas loin, ce qui doit le rassurer. Elle ajoute que ce n’était pas vrai : elle voulait tester sa souplesse. Elle ne peut pas vendre l’appartement sans sa signature, il aurait dû réfléchir. Elle continue en lui tendant un papier, et l’enjoignant à signer. - Table rase : ils sont devant leur voiture et elle lui montre qu’elle n’a emporté que deux bagages, la sobriété avant tout. Lui, il est venu les mains dans les poches… Il a tout commandé sur Amazon. Sans surprise, l’auteur se moque de deux urbains, parisiens de surcroît qui tentent l’aventure d’habiter à la campagne, et de tenter l’autosuffisance, au moins alimentaire dans un premier temps. Il peut compter sur le bédéiste pour se montrer moqueur, avec un fond de tendresse vis-à-vis de ses personnages, si normaux, vaguement pathétiques. Pour commencer, il ne leur donne ni nom, ni prénom, juste une femme et un homme, madame et monsieur, peut-être quadragénaires, peut-être quinquagénaires, pas vraiment beaux, mais pas repoussants pour autant, généralement contents ou souvent souriants en tout cas, l’air gentiment satisfaits d’eux-mêmes, enfin surtout Madame, parce que Monsieur… L’artiste est en mode caricature, avec une simplification dans la représentation. Par exemple, les personnages n’ont que quatre doigts à chaque main, leur coiffure s’apparente à une sorte de touffe dressée sur la tête, ou encore ils sont affublés de pieds pointus, sans oublier le pantalon trop large et remonté trop haut de Monsieur. Cela donne une allure comique à Monsieur, teintée de dérision plutôt que de réelle moquerie. Son nez semble un peu écrasé, surtout comparé à celui pointu de son épouse, et il fait souvent des grands gestes, ou des moues exagérées. L’auteur s’en sert comme dispositif comique : au fond de lui opposé à l’idée de s’installer à la campagne, cherchant comment dénigrer cette expérience, essayant mollement de ruser pour retrouver Paris, régulièrement victime d’une conséquence plus ou moins grave de la vie à la campagne. D’un côté, l’auteur raconte des morceaux choisis de cette année sabbatique, chaque page racontant un gag se suffisant à lui-même. De temps à autre, Tronchet file une note humoristique, le principe de parler aux arbres ou à un objet par exemple, la tentation du recours à Amazon pour se faire livrer des objets de grande consommation contre les principes de sa femme, qui, elle, ne semble pas reconnaître la banane, c’est-à-dire le logo de cette enseigne de vente en ligne. D’un autre côté, le lecteur peut aussi envisager l’album comme un tout : différents moments vécus lors de cette année sabbatique, ce couple faisant l’expérience de différents points de passage attendus. Madame et Monsieur vont commencer par apprécier l’isolement de leur maison, l’effet de sevrage de la société de consommation, les risques liés aux travaux manuels (enfin un bobo minime avant même de commencer), un changement d’approche dans le rapport aux choses (il faut parler aux arbres), un voisin à la communication un peu particulière (il faut parler à sa tronçonneuse), le silence aussi assourdissant qu’aliénant, l’importance des vers de terre, la visite d’amis de la ville, le plaisir tout relatif du feu de cheminée, les toilettes sèches et l’avantage de tout récupérer, etc. Comme l’indique l’énumération ci-dessus, les scènes se suivent et ne se ressemblent pas. Elles donnent l’occasion au dessinateur de diversifier les visuels : les arbres, la maison vue de l’extérieur, quelques pièces à l’intérieur, une chambre d’hôpital, l’abattage d’un arbre à la hache, une clairière, le jardin potager, le garage et l’automobile, les toilettes sèches, etc. Le lecteur contemple également de nombreux accessoires : une pelle et un râteau, un ordinateur, un crapaud, une tronçonneuse, un caddie de supermarché, une ruche, une brouette, un taille-haie, des valises. En termes de mise en scène, le bédéiste a choisi un format reposant sur les dialogues entre Madame et Monsieur, ou l’un de deux avec un interlocuteur invisible au téléphone, avec des invités, avec leurs enfants, et même avec deux inspecteurs du service de l’hygiène. D’un côté, il lui arrive régulièrement de faire l’économie de l’arrière-plan, ou de reproduire le même décor en fond de case ; de l’autre côté, les personnages sont toujours en train de vaquer à une occupation, souvent différente. Cela nourrit la richesse de la narration visuelle qui présente toujours un intérêt, renforcée par les mouvements des personnages, leurs postures et leurs mimiques. Le lecteur constate rapidement que la charge humoristique reste dans un registre gentil : Madame s’avère déterminée, se livrant, l’une après l’autre, aux activités de base pour essayer d’aller vers l’autonomie : le jardinage sous différentes formes le sevrage au consumérisme, l’abandon d’habitudes citadines. Monsieur se livre, à contrecœur et de mauvaise grâce, ou au moins en râlant, à des activités de plein air comme couper du bois ou jardiner lui aussi. S’il espère glaner des conseils pour aller vers l’autosuffisance en mettant en œuvre la permaculture, le lecteur s’est trompé d’ouvrage. Ça ne va pas plus loin que l’importance des vers de terre, l’évocation de panneaux solaires, la culture de ses légumes et la mise en place de toilettes sèches. Les effets comiques naissent des pitreries de Monsieur et de sa réticence latente exprimée plus ou moins ouvertement, de son décalage de ressenti d’avec celui de son épouse, de son absence totale de motivation. L’auteur file un ou deux effets comiques : le voisin un peu particulier qui recommande de parler aux arbres, puis à la tronçonneuse, ou encore Madame qui n’identifie le sigle en forme de banane d’un géant de la vente en ligne. Dans le même temps, ces scénettes ne constituent pas une suite de gags tièdes et inoffensifs. En passant, sans avoir l’air d’y toucher, sans approche moralisatrice, l’auteur évoque l’omni-disponibilité des biens de consommation livrés dans des délais d’une brièveté redoutable, le partage des richesses, le risque d’isolement à la campagne, le puits sans fond de connaissances d’internet, la nécessité de disposer d’une voiture, la violence de l’abattage des animaux d’élevage et les ravages de l’élevage intensif, l’investissement à faire en efforts pour un résultat pas toujours à la hauteur en qualité mais aussi en quantité, les conséquences de la surconsommation, le partage de ce mode de vie pour donner envie à d’autres en devenant influenceur. Dans le même temps, le constat reste lucide : ce couple n’a aucune chance d’être auto-suffisant dans un proche avenir, ou même à moyen terme. En page dix, Monsieur fait même observer à madame qu’ils vont pouvoir tout produire… à condition d’avoir sur place une usine de transformation, des fours industriels et un hangar réfrigéré, un troupeau de mille têtes et une chaîne d’abattage. Comme Adam Smith (1723-1790) avant lui, il a pleinement conscience que nul être humain est en mesure d’être autosuffisant et de produire les biens manufacturés indispensables à la satisfaction de se besoins primaires. Aaaah, se mettre au vert… Un beau projet écoresponsable, un choix de vie pour l’avenir de la planète, une aventure enrichissante et formatrice. Tronchet choisit un mode humoristique doux et gentil, sans railler ni les urbains et leur frénésie mortifère de consommation, ni les urbains incompétents et contre-productifs qui s’improvisent campagnards. Il réalise une cinquantaine de gags avec des dessins caricaturant un peu les êtres humains, expressifs et très juste, montrant cette maison accueillante et tranquille, une nature plutôt évoquée, et un couple avec Madame pleine de bonne volonté, et Monsieur rétif. Au fil des gags sympathiques, le lecteur ressent en filigrane la remise en question d’un mode de vie destructeur, et le désemparement d’êtres humains dépassés par l’ampleur de la situation.
Spoty et la lune alphane
Je possède plusieurs séries de cet auteur (dont Sombres ténèbres), visiblement peu connu, si j’en crois le peu d’avis le concernant. Je commence donc par ce « Spoty et la lune alphane », pas encore enregistrée sur le site, et l’une de ses premières publications en album (sa première en solo peut-être – je ne compte pas la rarissime Patte de mouche –, car il n’avait je crois fait auparavant qu’accompagner au dessin Ouin ou Bocquet). Les histoires regroupées dans l’album ont pour la plupart fait l’objet d’une publication dans Métal Hurlant. Le fait de les regrouper ici donne forcément un rendu différent par rapport à leur espacement (dans le temps entre autres) au milieu d’autres productions dans une revue. Le personnage principal, Spoty, est un robot. Seul ou accompagné d’autres robots (les seuls « êtres » qu’il côtoie), il vit des aventures – cela va de la simple exploration d’une planète à la participation à une guerre – durant lesquelles il est confronté à divers peuples extraterrestres, et quelques bestioles. Si pour ses éventuels compagnons ça ne finit pas toujours très bien, Spoty lui s’en sort généralement. Le ton oscille entre de l’aventure simple dans un univers SF à l’humour. En relisant d’un trait l’album, je reste un peu sur ma faim. L’humour est inégal et pas assez percutant je trouve. Mais Spoty est attachant, et la lecture n’est pas désagréable. Dispersées dans des numéros de Métal hurlant, ces pastilles (la plupart des histoires ne s’étendent que sur quelques pages, certaines ne font qu’une page – l’une d’elle n’en fait même que la moitié) devaient procurer une vision rafraichissante de la SF (loin de certaines envolées d’autres auteurs proches des Humanos de l’époque). Note réelle 2,5/5.
Loin
Loin d’être désagréable (et sans mauvais jeu de mot), « Loin » constitue par excellence la lecture d’été idéale, mais est aussi une BD « feel-good » qu’on peut lire à tout moment, comme on se plaît souvent à le répéter dans une époque toujours plus anxiogène. Une senteur d’iode et de sable fin infuse le récit de façon câline, avec à la clé des questionnements sur un sujet sociétal pas anodin : qu’est-ce que le couple aujourd’hui et le schéma traditionnel « collé-serré » est-il encore viable aujourd’hui ? Alicia Jaraba, jeune autrice espagnole talentueuse, a choisi l’angle de la légèreté pour aborder la question, et elle a eu bien raison ! Le récit tout entier est traversé par les questionnements d’Aimée et Ulysse sur leur relation, leurs aspirations. Bien sûr, ils vivent ensemble depuis un bon paquet d’années (ils se sont connus au lycée !), mais cela prouve-t-il qu’ils soient vraiment faits l’un pour l’autre ? Quelques chamailleries liées à divers contretemps au début du voyage vont amener les deux jeunes gens à s’interroger. Aimée, elle, est en plein stress. En effet, elle attend une confirmation d’embauche dans un laboratoire suisse et doit rester connectée en permanence pour ne pas louper cette opportunité qu’elle juge essentielle pour sa carrière. Et puis d’une manière générale, elle déteste l’imprévu, toujours encline à imaginer le pire. Aimée adore faire des listes et reste très attachée à son petit confort. Ulysse, c’est un peu l’inverse. Epuisé par ses quatre années de thèse, il veut vivre avec un grand V, et l’inconnu ne l’effraie pas. Ces vacances, qui devaient lui permettre de faire un stage de plongée sous-marine, il les a désirées ardemment et tant pis si le programme est bousculé à cause de son van tombé en panne. Maintenant, il est prêt à camper dans la forêt, nager dans les lacs et chercher des « poissons-lunes ». En contrepoint de cette histoire, un personnage va faire irruption, tel un bon samaritain aux intentions quelque peu équivoques. Prénommé Paco, ce sexagénaire, accablé par ailleurs par le départ précipité de sa femme, va proposer à Aimée et Ulysse de l’accompagner chez lui pour récupérer la voiture qu’il dit ne pas avoir le droit de conduire, et l’emmener ensuite à un congrès d’ornithologues exactement là où le couple doit se rendre. Si cela fait les affaires d’Ulysse, Aimée est beaucoup plus circonspecte… mais une fois tombées les barrières de la méfiance, ce personnage se révélera essentiel dans la relation des deux tourtereaux au bord de la rupture. Le scénario, basé davantage sur l’exploration des sentiments humains, bénéficie d’une belle fluidité, sans surcharge émotionnelle inutile. Dans ce one-shot aux faux airs de comédie légère, Alicia Jaraba nous montre des personnages qui nous ressemblent, avec une bienveillance empreinte de tendresse. Si l’on pouvait craindre une conclusion convenue et un peu mièvre, il n’en est rien. Ce que l’on pourrait qualifier ici de parcours initiatique se termine sur une fin ouverte, en nous évitant le psychodrame de rigueur, les protagonistes ayant visiblement opté pour une approche concertée et rationnelle. Le dessin semi-réaliste de Jarabia dégage une douceur « sous-marine » des plus plaisantes, nous livrant un bon aperçu de son talent. La poésie est très présente, avec un recours récurrent à la métaphore de la plongée dans les fonds marins en lien avec les états d’âme des personnages. Plutôt attachants avec leurs doutes et leurs fêlures, ceux-ci sont à la fois expressifs d’un point de vue graphique mais également bien campés. « Loin » serait incontestablement le livre du moment à conseiller à celles et ceux qui rencontrent des problèmes de couple voire qui estiment qu’une vie à deux n’est possible qu’avec l’âme sœur, le prince ou la princesse charmante. Si ce modèle sociétal traditionnel implique de trouver des compromis, faut-il pour autant sacrifier ses propres envies ou tenter d’atteindre un équilibre ? Doit-on nécessairement être un couple fusionnel ? On ne trouvera bien sûr pas de réponse toute faite dans l’ouvrage d’Alicia Jarabia (pour cela, il y a des écrits publiés par d’éminents sociologues et psychologues), mais celui-ci reste tout à fait inspirant sans être trop dense, et pourra à coup sûr livrer quelques pistes aux âmes en peine.
Nos rives partagées
Sympathique album sur un récit choral où se croisent des histoires d'amour à trois âges. C'est pétri de bon sentiment, clairement, parfois un peu trop à mon gout, et je trouve que l'ensemble reste malheureusement dans une zone sympathique mais sans grand plus. Le récit mélange plusieurs choses, notamment des considérations sur la destruction des écosystèmes (qui font assez saugrenue, je dois bien dire même si je vois l'idée) et trois façons d'envisager les relations amoureuses. C'est aussi six personnes se posant différentes questions à différents âges avec ce que ça peut comporter de situations parfois drôles et souvent non. J'aime bien les récits de ce genre, mais je dois avouer que là ça m'a laissé pas mal sur ma faim. Déjà parce qu'il n'y a pas réellement de conclusion vis-à-vis de son récit. Enfin, si, mais au-delà de ce qu'on peut sentir arriver, rien ne vient réellement conclure le mélange entre le fantastique et les différentes histoires personnelles. Qui d'ailleurs se mélangent très peu, même si les personnages se croisent. Je trouve qu'il manque un peu de liant entre tout ça, qui ne soit pas juste des petits moment de passage. J'aurais bien aimé de réels échanges entre les générations (de mémoire il n'y a qu'une seule scène où deux générations différentes discutent réellement). Pour le reste, le récit est lent avec son mélange des genres, le fantastique des bêtes apportant de bons mots mais aussi quelques réflexions sur le monde. C'est bien dessiné, plaisant à lire, mais pour le coup je pense que je ne garderais pas l'histoire en mémoire. Par rapport à un récit du même genre (je pense à Échecs) il n'y a pas de surprise dans la tournure du récit ou un bon mot final qui reste en mémoire. Même s'il y a bien une sentence finale, je ne la trouve pas inoubliable. Et c'est un peu l'avis que j'ai sur la BD.