Je ne suis probablement pas le meilleur lecteur pour introduire cette série dans la base. En effet je n'ai pas de smartphone et je n'utilise jamais les emoji. Toutefois le phénomène de communication que représentent ces petits pictogrammes souvent amusants méritait bien une production BD. Le scénariste néophyte en BD, propose une construction dans un documentaire à la fois bien documenté, complété par une grosse bibliographie sur chacun des chapitres évoqués : historique, droit, le consortium unicode, la linguistique et d'autres anecdotes moins signifiantes. Pour rendre le récit moins didactique David Groison introduit comme fil rouge la tentative d'introduction d'un nouvel Emoji, une éolienne.
C'est le côté tendance écologique du récit. Mouais là je vais encore pousser un coup de gueule. En effet comment rendre crédible cette aspiration à la sensibilisation au réchauffement climatique avec une journaliste qui passe sa vie en avion pour des interviews très facilement réalisables à distance. Le récit nous propose un Paris-Tokyo-LA-Paris puis un A/R Paris-LA et un autre Paris-Le Caire pour nous vendre de la lutte contre les gaz à effet de serre sans sourciller et en toute bonne conscience. Cette contradiction interne au récit m'a beaucoup déplu tellement c'est ridicule à mes yeux.
Le graphisme de Paul Rey est très lisible dans un style simple et fluide. Cela me semble destiné à un large public avec une gamme de couleurs assez douces. L'expressivité est minimale mais cela donne une lecture sans souci.
Une thématique peu abordée avec des points intéressants mais une approche écologique que je n'ai pas pu m'approprier, une grosse faiblesse et une contradiction à mes yeux. Un petit 3
L'Horloge est la première grande BD de José Roosevelt et elle porte tous les germes de ce qui composera ses œuvres suivantes. Peintre surréaliste à l'origine, Roosevelt s'inspire essentiellement de Dali mais aussi de Bosch et Brueghel. Dans L'Horloge, il intègre ses tableaux comme des éléments à part entière de l'intrigue. C'est aussi pour lui l'occasion de créer la galerie de personnages qui vont peupler toutes ses BD ultérieures, jouant chaque fois des rôles sensiblement différents, à la manière d'une Commedia dell'Arte façonnant peu à peu son univers artistique et narratif.
Cette série constitue donc la première brique de cet univers, déjà extrêmement riche en symbolisme, ésotérisme et références érudites. Elle dégage une atmosphère onirique séduisante au départ, mais devient vite confuse, voire étouffante.
Suite à l'assassinat mystérieux d'un peintre aux allures de prophète, le canard anthropomorphe Juanalberto et le couple de jeunes faunes, Vi et Ian, quittent leur vallée paisible pour partir vers l'Est à la recherche d'on ne sait trop quoi : un message, une rencontre avec d'hypothétiques hérétiques, ou encore un sens au rêve que le peintre leur a transmis. Leur quête est structurée en 12 chapitres, comme autant d'heures d'une horloge, mais aussi comme autant d'étapes ésotériques liées au zodiaque, aux saisons, aux anges et à d'autres symboles mystiques.
Graphiquement, on oscille entre le splendide et l'approximatif : les peintures sont remarquables, mais le dessin des personnages ou certains choix de couleurs peuvent sembler maladroits, voire rebutants. On sent qu'il s'agit des débuts de l'auteur en BD, notamment dans la raideur de Juanalberto, qui deviendra plus tard son personnage fétiche, quasi avatar. Les couleurs de l'édition Paquet ne sont pas mauvaises mais portent la marque de la colorisation informatique de la fin des années 1990 (la même qui avait momentanément défiguré L'Incal de Moebius). 25 ans plus tard, la réédition en intégrale aux Éditions du Canard a repris ces couleurs dans des teintes monochromatiques plus élégantes, qui mettent bien mieux en valeur les peintures.
J'ai apprécié l'ambiance mystérieuse et certaines planches où les peintures à l'huile s'intègrent parfaitement au récit, apportant un supplément d'âme et de mystère. Les premiers chapitres intriguent grâce à leurs idées originales et à des décors intéressants. Malheureusement, la suite s'alourdit : tirades pompeuses, personnages absurdes ou mal exploités, et développements scénaristiques qui tiennent souvent du raccourci ou du fourre-tout. Les intrigues se perdent dans des allusions bibliques, littéraires ou philosophiques qui brouillent le propos au lieu de l'éclairer. Certains monologues sont franchement rébarbatifs. Le travail symbolique, lui, reste intéressant : chaque chapitre s'ancre dans une ambiance et des motifs ésotériques qui seront explicités à la fin du troisième tome par un tableau symbolique récapitulatif. Mais là encore, aucune explication véritable n'est donnée sur leur signification. On notera également un clin d'œil appuyé à l'œuvre de Carl Barks à la fin de ce même tome.
C'est aussi à ce moment de la lecture que l'on croit toucher enfin aux révélations, que l'intrigue semble s'ordonner et promet de tout éclairer... sauf que l'œuvre s'arrête brusquement, comme s'il manquait une ultime page de révélation ou au moins de retrouvailles. Effet sans doute volontaire d'un auteur qui souhaite laisser libre cours à l'interprétation du lecteur, mais le résultat est frustrant et laisse un goût d'inachevé.
En définitive, malgré quelques fulgurances visuelles et une vraie ambition intellectuelle, j'ai trouvé cette lecture plus frustrante qu'enrichissante. Elle m'a donné le sentiment d'une œuvre pleine d'intentions et de symbolisme, mais mal aboutie. J'ai parfois été captivé, mais bien souvent aussi perdu en route.
J'avais découvert le travail de Sandra Hernandez dans la belle adaptation d'une œuvre de Jean Giono L'Homme qui plantait des arbres.
Ses peintures "naïves" façon Douanier Rousseau correspondaient bien à l'esprit ensoleillé et optimiste du conte de Giono. Je suis moins convaincu par l'exercice dans cette atmosphère fantastique bien plus sombre. La discontinuité très marquée de la composition graphique correspond bien à l'esprit du roman mais rend la lecture aride.
L'autrice espagnole respecte bien le récit de Mary Shelley. La transformation de docteur en doctoresse n'apporte pas grand chose au récit sauf à le féminiser au goût du jour. C'est une transformation quelque peu superficielle à mes yeux. De plus je ne suis pas amateur du récit fantastique de Shelley que je trouve simpliste dans la psychologie du "monstre".
Une lecture à laquelle j'ai eu du mal a accrocher sauf pour le côté original du graphisme. 2.5
Je n'ai pas été surpris par cette œuvre de Jiro Taniguchi. On retrouve la thématique de la relation au père qu'il a beaucoup travaillé et qui l'a rendu célèbre. Le récit est classique avec le transfert de "l'âme" dans un autre corps puis le conflit interne dans ce corps.
Les conflits sont très soft que ce soit au sein des familles ou dans le corps de Takuya. Il y a beaucoup de retenues dans les personnages ce qui conduit plus à l'introspection qu'à la révolte. Le rythme est assez lent malgré le compte à rebours imposé par le scénario. Le final parachuté accentue ce côté soft qui contredit la thématique du deuil violent imposée par la première scène. N'étant pas spécialement nostalgique de nature, je suis resté entre deux chaises avec ces deux positions extrêmes entre la brutalité d'une mort violente et cet esprit cool grâce à cette présence sage vécue comme un cadeau post mortem.
Le dessin de Taniguchi est toujours aussi élégant même si j'ai trouvé moins de profusion dans les détails et des personnages trop stéréotypés ou rigides.
Une lecture classique qui ne m'a pas remué plus que cela.
Cet album ne révolutionne rien, mais les amateurs de polar poisseux classique y trouveront une histoire globalement sympathique – malgré quelques facilités – agrémentée d’un dessin adapté à ce style de récit.
En effet, Risso est un vieil habitué du genre. Son Noir et Blanc tranché donne un rendu assez chouette (il a déjà pas mal accompagné Trillo sur des récits du même acabit).
L’histoire n’est pas inoubliable, mais c’est quand même bien mené, en restant bien ancré dans du classique. A commencer par le héros, Jonny Double (pas génial comme nom de héros, mais bon…), détective privé, ancien flic, sans client et peinant à payer son loyer, etc. Azzarello évite quand même le cliché de la bombasse et de la secrétaire pin-up amoureuse de son patron.
Outre le dessin de Risso, l’autre atout est le rythme donné au récit, on ne s’ennuie pas. Une fois accepté quelque facilités (comme le braquage de l’héritage bancaire d’Al Capone ! ou la chute un peu facile), on est embarqué dans une histoire poisseuse et sanglante.
Une lecture détente pas désagréable.
Il faut selon moi bien du courage, et un soupçon d'inconscience, pour mettre en scène sa vie très privée et l'offrir à la vision de tous.
Aurélia AURITA n'en manque donc pas en nous offrant ainsi les émois de sa relation avec Frédéric BOILET
Ainsi dans le tome 1 nous sommes plongés dans les débuts de leur relation et ce, sans fausse pudeur et autre hypocrisie puritaine.
C'est tout naturellement que nous passons plus de temps couchés que debout. Nous assistons à un amour naissant sans tabou et avec des expériences que je pense nombre d'entre nous a pu essayer dans son intimité (miroir, sextoys, …). La différence d'âge marquée entre Aurélia et Fréderic, une vingtaine d'année, ne nous plonge pas pour autant dans un rapport maître/élève, ce qui selon moi marque une forme de respect entre eux.
Le tome 2 est très différent car beaucoup moins orienté pratiques sexuelles. Ici on partage le quotidien d'Aurélia dans sa nouvelle vie de couple avec toutes ses interrogations, ses peurs. Pour la peine je le trouve beaucoup plus personnel que le premier.
Concernant le dessin c'est assez minimaliste et semble quand même bien loin de ce que l'autrice est réellement capable de faire (voir le portrait de Frédéric au milieu du tome 1). Cela évite selon moi une trop grande projection sur nos deux protagonistes.
Le ton juste avec une histoire vraie, ni trop sage ni trop hard.
Une histoire étrange, qui m’a au final laissé un peu perplexe, même si elle se laisse lire facilement, et agréablement.
Couverture et début d’intrigue me laissaient penser à un récit où l’écologie allait prendre le dessus, et où les éléments naturels déchainés allaient faire monter la tension (il est en permanence question de « méga-marées » ayant forcé les habitants de la côte écossaise à se retirer plus loin dans les terres). En fait il n’en est rien.
Le récit bascule petit à petit vers une sorte de polar. Mais, là aussi, tout semble presque adouci. Il y a bien deux morts, mais la fatalité semble responsable. Il y a bien quelques excès de violence, mais ils sont atténués (comme cette scène où un protagoniste est attaqué par un chien, qui se finit trop tranquillement à mon goût).
Finalement, c’est presque plus une ambiance que développe Lépingle, dans les landes côtières écossaises. Si le récit manque sans doute d’aspérité, et d’un véritable méchant, il se laisse lire. Mais je reste quand même un peu sur ma faim, aussi à cause d’une conclusion qui laisse en suspens certaines choses (d’où vient ce stock de métaux rares ? Quelle est la cause réelle de la mort de Wyatt ?).
Si la lecture est plaisante, c’est aussi que le dessin de Lépingle – une ligne claire un peu grasse – est agréable (je suis juste moins convaincu par les yeux des personnages).
Une BD avec du bon et du moins bon. Dans le bon, il y a l'aspect société dystopique et déshumanisée qui finit par s'entretenir inutilement, ce qui est bien retranscrit. De même l'asservissement des femmes par l'image, la question écologique, la logique productiviste ... Tout est assez bien retranscrit, dans une histoire qui permet de glisser des messages pas subtils mais salutaire. D'ailleurs les citations éclairent clairement sur les intentions des auteurs (et j'ai été étonné de certains noms). D'autre part, il faut souligner que certains messages explicites dans les bulles sont clairement pour la décroissance et contre la logique capitaliste, ce qui est une bonne chose.
Maintenant, dans le moins bon, il y a le dessin que je ne connaissais pas mais qui m'a gêné. En effet, il y a deux trois détails notamment le fait que les têtes aient tendance à être souvent identique (notamment pour les femmes) ce qui masque les émotions. Plusieurs fois je me demandais si c'était volontaire mais d'autres personnages ont des évolutions plus marquées, ce qui m'a dérangé. Dans les détails moins bon, j'ai aussi un gros grief envers la représentation de la clope comme une émancipation positive (vantée d'ailleurs) surtout quand on sait que la cigarette et le capitalisme, c'est un bon ménage !
La BD ose des choses, et j'apprécie ça, mais je dois dire que le dessin m'a pas mal bloqué. C'est une BD en demi-teinte pour moi même si je pense que le positif restera en mémoire.
Avec cet album très épais, Yslaire rend un hommage appuyé à Baudelaire, son œuvre. Mais aussi à ce qui a pu l’inspirer, à commencer par sa muse, Jeanne Duval, évoquée dans certains poèmes, et mise en lumière ici (c’est à elle en tout cas qu’Yslaire veut donner la priorité, c’est aussi là que sa "marge de manœuvre" d’auteur est plus grande, étant données les zones d’ombre concernant Jeanne). C’est aussi un hommage à une sorte de bohème littéraire et artistique – on croise nombre de contemporains, amis ou collègues de Baudelaire dans cet album.
Si l’album se laisse lire, j’ai trouvé que ça s’étirait un peu trop, que certaines longueurs auraient pu être évitées.
Esthétiquement, c’est plutôt agréable. Yslaire réussit très bien à rendre l’époque, dessin et colorisation sont à la fois plaisant et raccord avec le sujet.
Un peu longuet parfois, mais un sujet plaisant et globalement une bonne restitution de l’esprit de l’époque, même si le Baudelaire aigri de la fin (celui des « Fusées » ou de « Mon cœur mis à nu ») est évacué.
Je ne connais pas trop l'œuvre de Mittei même si je l'ai rencontré au détours de séries des années 70 pour lesquelles il collaborait.
Comme on est de son enfance ce style graphique me convient parfaitement surtout avec cette mise en couleur. Sans être un grand nostalgique, j'aime bien retrouvé ces sensations de lectures enfantines et paisibles. Ce côté lumineux, pétillant où la bonne humeur est toujours présente correspond bien aux récits d'Alphonse Daudet. Bien que Nîmois, Daudet a surtout vécu à Paris. Cela ne l'a pas empêché de saisir l'esprit du Sud de la France lors de ses voyages . Peut être à cause de son état de santé défaillant ses récits débordent de chaleur humaine, d'aspiration à la vie à travers la bonne chère, la liberté, la lumière. C'est exactement ce que réussit à transmettre Mittei sans prise de tête et pour le plaisir de tous. On retrouve une foule de ses petits personnages habituels au banquet de Noël, Mittei n'oubliant pas de faire des apparitions pour célébrer cette poésie de la vie.
Une lecture pour tous bien rafraichissante.
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Je ne suis probablement pas le meilleur lecteur pour introduire cette série dans la base. En effet je n'ai pas de smartphone et je n'utilise jamais les emoji. Toutefois le phénomène de communication que représentent ces petits pictogrammes souvent amusants méritait bien une production BD. Le scénariste néophyte en BD, propose une construction dans un documentaire à la fois bien documenté, complété par une grosse bibliographie sur chacun des chapitres évoqués : historique, droit, le consortium unicode, la linguistique et d'autres anecdotes moins signifiantes. Pour rendre le récit moins didactique David Groison introduit comme fil rouge la tentative d'introduction d'un nouvel Emoji, une éolienne. C'est le côté tendance écologique du récit. Mouais là je vais encore pousser un coup de gueule. En effet comment rendre crédible cette aspiration à la sensibilisation au réchauffement climatique avec une journaliste qui passe sa vie en avion pour des interviews très facilement réalisables à distance. Le récit nous propose un Paris-Tokyo-LA-Paris puis un A/R Paris-LA et un autre Paris-Le Caire pour nous vendre de la lutte contre les gaz à effet de serre sans sourciller et en toute bonne conscience. Cette contradiction interne au récit m'a beaucoup déplu tellement c'est ridicule à mes yeux. Le graphisme de Paul Rey est très lisible dans un style simple et fluide. Cela me semble destiné à un large public avec une gamme de couleurs assez douces. L'expressivité est minimale mais cela donne une lecture sans souci. Une thématique peu abordée avec des points intéressants mais une approche écologique que je n'ai pas pu m'approprier, une grosse faiblesse et une contradiction à mes yeux. Un petit 3
L'Horloge
L'Horloge est la première grande BD de José Roosevelt et elle porte tous les germes de ce qui composera ses œuvres suivantes. Peintre surréaliste à l'origine, Roosevelt s'inspire essentiellement de Dali mais aussi de Bosch et Brueghel. Dans L'Horloge, il intègre ses tableaux comme des éléments à part entière de l'intrigue. C'est aussi pour lui l'occasion de créer la galerie de personnages qui vont peupler toutes ses BD ultérieures, jouant chaque fois des rôles sensiblement différents, à la manière d'une Commedia dell'Arte façonnant peu à peu son univers artistique et narratif. Cette série constitue donc la première brique de cet univers, déjà extrêmement riche en symbolisme, ésotérisme et références érudites. Elle dégage une atmosphère onirique séduisante au départ, mais devient vite confuse, voire étouffante. Suite à l'assassinat mystérieux d'un peintre aux allures de prophète, le canard anthropomorphe Juanalberto et le couple de jeunes faunes, Vi et Ian, quittent leur vallée paisible pour partir vers l'Est à la recherche d'on ne sait trop quoi : un message, une rencontre avec d'hypothétiques hérétiques, ou encore un sens au rêve que le peintre leur a transmis. Leur quête est structurée en 12 chapitres, comme autant d'heures d'une horloge, mais aussi comme autant d'étapes ésotériques liées au zodiaque, aux saisons, aux anges et à d'autres symboles mystiques. Graphiquement, on oscille entre le splendide et l'approximatif : les peintures sont remarquables, mais le dessin des personnages ou certains choix de couleurs peuvent sembler maladroits, voire rebutants. On sent qu'il s'agit des débuts de l'auteur en BD, notamment dans la raideur de Juanalberto, qui deviendra plus tard son personnage fétiche, quasi avatar. Les couleurs de l'édition Paquet ne sont pas mauvaises mais portent la marque de la colorisation informatique de la fin des années 1990 (la même qui avait momentanément défiguré L'Incal de Moebius). 25 ans plus tard, la réédition en intégrale aux Éditions du Canard a repris ces couleurs dans des teintes monochromatiques plus élégantes, qui mettent bien mieux en valeur les peintures. J'ai apprécié l'ambiance mystérieuse et certaines planches où les peintures à l'huile s'intègrent parfaitement au récit, apportant un supplément d'âme et de mystère. Les premiers chapitres intriguent grâce à leurs idées originales et à des décors intéressants. Malheureusement, la suite s'alourdit : tirades pompeuses, personnages absurdes ou mal exploités, et développements scénaristiques qui tiennent souvent du raccourci ou du fourre-tout. Les intrigues se perdent dans des allusions bibliques, littéraires ou philosophiques qui brouillent le propos au lieu de l'éclairer. Certains monologues sont franchement rébarbatifs. Le travail symbolique, lui, reste intéressant : chaque chapitre s'ancre dans une ambiance et des motifs ésotériques qui seront explicités à la fin du troisième tome par un tableau symbolique récapitulatif. Mais là encore, aucune explication véritable n'est donnée sur leur signification. On notera également un clin d'œil appuyé à l'œuvre de Carl Barks à la fin de ce même tome. C'est aussi à ce moment de la lecture que l'on croit toucher enfin aux révélations, que l'intrigue semble s'ordonner et promet de tout éclairer... sauf que l'œuvre s'arrête brusquement, comme s'il manquait une ultime page de révélation ou au moins de retrouvailles. Effet sans doute volontaire d'un auteur qui souhaite laisser libre cours à l'interprétation du lecteur, mais le résultat est frustrant et laisse un goût d'inachevé. En définitive, malgré quelques fulgurances visuelles et une vraie ambition intellectuelle, j'ai trouvé cette lecture plus frustrante qu'enrichissante. Elle m'a donné le sentiment d'une œuvre pleine d'intentions et de symbolisme, mais mal aboutie. J'ai parfois été captivé, mais bien souvent aussi perdu en route.
Frankenstein (Hernandez)
J'avais découvert le travail de Sandra Hernandez dans la belle adaptation d'une œuvre de Jean Giono L'Homme qui plantait des arbres. Ses peintures "naïves" façon Douanier Rousseau correspondaient bien à l'esprit ensoleillé et optimiste du conte de Giono. Je suis moins convaincu par l'exercice dans cette atmosphère fantastique bien plus sombre. La discontinuité très marquée de la composition graphique correspond bien à l'esprit du roman mais rend la lecture aride. L'autrice espagnole respecte bien le récit de Mary Shelley. La transformation de docteur en doctoresse n'apporte pas grand chose au récit sauf à le féminiser au goût du jour. C'est une transformation quelque peu superficielle à mes yeux. De plus je ne suis pas amateur du récit fantastique de Shelley que je trouve simpliste dans la psychologie du "monstre". Une lecture à laquelle j'ai eu du mal a accrocher sauf pour le côté original du graphisme. 2.5
Un ciel radieux
Je n'ai pas été surpris par cette œuvre de Jiro Taniguchi. On retrouve la thématique de la relation au père qu'il a beaucoup travaillé et qui l'a rendu célèbre. Le récit est classique avec le transfert de "l'âme" dans un autre corps puis le conflit interne dans ce corps. Les conflits sont très soft que ce soit au sein des familles ou dans le corps de Takuya. Il y a beaucoup de retenues dans les personnages ce qui conduit plus à l'introspection qu'à la révolte. Le rythme est assez lent malgré le compte à rebours imposé par le scénario. Le final parachuté accentue ce côté soft qui contredit la thématique du deuil violent imposée par la première scène. N'étant pas spécialement nostalgique de nature, je suis resté entre deux chaises avec ces deux positions extrêmes entre la brutalité d'une mort violente et cet esprit cool grâce à cette présence sage vécue comme un cadeau post mortem. Le dessin de Taniguchi est toujours aussi élégant même si j'ai trouvé moins de profusion dans les détails et des personnages trop stéréotypés ou rigides. Une lecture classique qui ne m'a pas remué plus que cela.
Jonny Double
Cet album ne révolutionne rien, mais les amateurs de polar poisseux classique y trouveront une histoire globalement sympathique – malgré quelques facilités – agrémentée d’un dessin adapté à ce style de récit. En effet, Risso est un vieil habitué du genre. Son Noir et Blanc tranché donne un rendu assez chouette (il a déjà pas mal accompagné Trillo sur des récits du même acabit). L’histoire n’est pas inoubliable, mais c’est quand même bien mené, en restant bien ancré dans du classique. A commencer par le héros, Jonny Double (pas génial comme nom de héros, mais bon…), détective privé, ancien flic, sans client et peinant à payer son loyer, etc. Azzarello évite quand même le cliché de la bombasse et de la secrétaire pin-up amoureuse de son patron. Outre le dessin de Risso, l’autre atout est le rythme donné au récit, on ne s’ennuie pas. Une fois accepté quelque facilités (comme le braquage de l’héritage bancaire d’Al Capone ! ou la chute un peu facile), on est embarqué dans une histoire poisseuse et sanglante. Une lecture détente pas désagréable.
Fraise et Chocolat
Il faut selon moi bien du courage, et un soupçon d'inconscience, pour mettre en scène sa vie très privée et l'offrir à la vision de tous. Aurélia AURITA n'en manque donc pas en nous offrant ainsi les émois de sa relation avec Frédéric BOILET Ainsi dans le tome 1 nous sommes plongés dans les débuts de leur relation et ce, sans fausse pudeur et autre hypocrisie puritaine. C'est tout naturellement que nous passons plus de temps couchés que debout. Nous assistons à un amour naissant sans tabou et avec des expériences que je pense nombre d'entre nous a pu essayer dans son intimité (miroir, sextoys, …). La différence d'âge marquée entre Aurélia et Fréderic, une vingtaine d'année, ne nous plonge pas pour autant dans un rapport maître/élève, ce qui selon moi marque une forme de respect entre eux. Le tome 2 est très différent car beaucoup moins orienté pratiques sexuelles. Ici on partage le quotidien d'Aurélia dans sa nouvelle vie de couple avec toutes ses interrogations, ses peurs. Pour la peine je le trouve beaucoup plus personnel que le premier. Concernant le dessin c'est assez minimaliste et semble quand même bien loin de ce que l'autrice est réellement capable de faire (voir le portrait de Frédéric au milieu du tome 1). Cela évite selon moi une trop grande projection sur nos deux protagonistes. Le ton juste avec une histoire vraie, ni trop sage ni trop hard.
Submersion
Une histoire étrange, qui m’a au final laissé un peu perplexe, même si elle se laisse lire facilement, et agréablement. Couverture et début d’intrigue me laissaient penser à un récit où l’écologie allait prendre le dessus, et où les éléments naturels déchainés allaient faire monter la tension (il est en permanence question de « méga-marées » ayant forcé les habitants de la côte écossaise à se retirer plus loin dans les terres). En fait il n’en est rien. Le récit bascule petit à petit vers une sorte de polar. Mais, là aussi, tout semble presque adouci. Il y a bien deux morts, mais la fatalité semble responsable. Il y a bien quelques excès de violence, mais ils sont atténués (comme cette scène où un protagoniste est attaqué par un chien, qui se finit trop tranquillement à mon goût). Finalement, c’est presque plus une ambiance que développe Lépingle, dans les landes côtières écossaises. Si le récit manque sans doute d’aspérité, et d’un véritable méchant, il se laisse lire. Mais je reste quand même un peu sur ma faim, aussi à cause d’une conclusion qui laisse en suspens certaines choses (d’où vient ce stock de métaux rares ? Quelle est la cause réelle de la mort de Wyatt ?). Si la lecture est plaisante, c’est aussi que le dessin de Lépingle – une ligne claire un peu grasse – est agréable (je suis juste moins convaincu par les yeux des personnages).
Les Yeux doux
Une BD avec du bon et du moins bon. Dans le bon, il y a l'aspect société dystopique et déshumanisée qui finit par s'entretenir inutilement, ce qui est bien retranscrit. De même l'asservissement des femmes par l'image, la question écologique, la logique productiviste ... Tout est assez bien retranscrit, dans une histoire qui permet de glisser des messages pas subtils mais salutaire. D'ailleurs les citations éclairent clairement sur les intentions des auteurs (et j'ai été étonné de certains noms). D'autre part, il faut souligner que certains messages explicites dans les bulles sont clairement pour la décroissance et contre la logique capitaliste, ce qui est une bonne chose. Maintenant, dans le moins bon, il y a le dessin que je ne connaissais pas mais qui m'a gêné. En effet, il y a deux trois détails notamment le fait que les têtes aient tendance à être souvent identique (notamment pour les femmes) ce qui masque les émotions. Plusieurs fois je me demandais si c'était volontaire mais d'autres personnages ont des évolutions plus marquées, ce qui m'a dérangé. Dans les détails moins bon, j'ai aussi un gros grief envers la représentation de la clope comme une émancipation positive (vantée d'ailleurs) surtout quand on sait que la cigarette et le capitalisme, c'est un bon ménage ! La BD ose des choses, et j'apprécie ça, mais je dois dire que le dessin m'a pas mal bloqué. C'est une BD en demi-teinte pour moi même si je pense que le positif restera en mémoire.
Mademoiselle Baudelaire
Avec cet album très épais, Yslaire rend un hommage appuyé à Baudelaire, son œuvre. Mais aussi à ce qui a pu l’inspirer, à commencer par sa muse, Jeanne Duval, évoquée dans certains poèmes, et mise en lumière ici (c’est à elle en tout cas qu’Yslaire veut donner la priorité, c’est aussi là que sa "marge de manœuvre" d’auteur est plus grande, étant données les zones d’ombre concernant Jeanne). C’est aussi un hommage à une sorte de bohème littéraire et artistique – on croise nombre de contemporains, amis ou collègues de Baudelaire dans cet album. Si l’album se laisse lire, j’ai trouvé que ça s’étirait un peu trop, que certaines longueurs auraient pu être évitées. Esthétiquement, c’est plutôt agréable. Yslaire réussit très bien à rendre l’époque, dessin et colorisation sont à la fois plaisant et raccord avec le sujet. Un peu longuet parfois, mais un sujet plaisant et globalement une bonne restitution de l’esprit de l’époque, même si le Baudelaire aigri de la fin (celui des « Fusées » ou de « Mon cœur mis à nu ») est évacué.
Les Lettres de mon Moulin
Je ne connais pas trop l'œuvre de Mittei même si je l'ai rencontré au détours de séries des années 70 pour lesquelles il collaborait. Comme on est de son enfance ce style graphique me convient parfaitement surtout avec cette mise en couleur. Sans être un grand nostalgique, j'aime bien retrouvé ces sensations de lectures enfantines et paisibles. Ce côté lumineux, pétillant où la bonne humeur est toujours présente correspond bien aux récits d'Alphonse Daudet. Bien que Nîmois, Daudet a surtout vécu à Paris. Cela ne l'a pas empêché de saisir l'esprit du Sud de la France lors de ses voyages . Peut être à cause de son état de santé défaillant ses récits débordent de chaleur humaine, d'aspiration à la vie à travers la bonne chère, la liberté, la lumière. C'est exactement ce que réussit à transmettre Mittei sans prise de tête et pour le plaisir de tous. On retrouve une foule de ses petits personnages habituels au banquet de Noël, Mittei n'oubliant pas de faire des apparitions pour célébrer cette poésie de la vie. Une lecture pour tous bien rafraichissante.