Jamais roman graphique n'aura mieux porté son nom. Bien que je ne sois pas sûr que l'échange épistolaire entre Anna et Jules soit du domaine du roman. C'est tout de même bien écrit et agréable à lire même si j'ai eu du mal parfois avec le ton nostalgique un peu mielleux. De toute façon l'épistolaire n'est pas un genre que j'apprécie trop. J'ai toujours l'impression de m 'immiscer dans une relation intime qui m'est étrangère. La lecture est très rapide dans un ton très consensuel dans cette période de colonisation brutale. Evidemment le scénario qui met en scène ce couple de routards bobos, chevalet au dos n'est qu'un prétexte pour mettre en valeur les très belles illustrations d'Emmanuel Lepage. On y découvre plusieurs fois un thème en construction de l'esquisse jusqu'à l'aquarelle aboutie. Cela donne de très belles doubles pages très bien travaillées. Si l'histoire est très superficielle et convenue le graphisme est très beau malgré un petit côté carte postale par moment ( c'est probablement voulu).
Une lecture dépaysante et agréable qui ne m'a pas bouleversé autre que la maîtrise technique picturale.
Je n’ai malheureusement pas grand chose à dire sur ma lecture. Une œuvre sympathique, on lit l’album sans déplaisir mais c’est un peu tout.
Une chronique sociale où l’on suivra 3 « couples » de différents âges. Au programme tracas de la vie, reconstruction, questionnement … c’est fait avec un certain talent, le coup des animaux anime un peu l’ensemble.
Sauf que je n’ai pas réellement succombé à la magie du récit, je reconnais l’envie et les belles idées mais je suis resté neutre niveau émotion.
Les aventuriers de l’étrange publient pas mal d’auteurs roumains, que je découvre donc grâce à eux. C’est encore le cas ici avec ce conte (que j’ai lu dans sa première version, dans un format plus petit donc que la réédition chez le même éditeur).
L’histoire est classique dans ses grandes lignes. Plusieurs frères se disputent le futur héritage d’un royaume, deux fourbes et un « gentil » qu’ils veulent éliminer – et qui bien sûr va finalement triompher de ses frères, après l’avoir fait de nombreuses épreuves intermédiaires.
C’est dans ces épreuves, ces « missions » qui lui sont confiées que réside l’originalité. L’ensemble est plaisant en tout cas, en mêlant en plus à un univers indéfini mais globalement médiéval certains aspects plus modernes (des machines volantes un tout petit peu steampunk, quelques robots, et une vision acerbe de l’exploitation de puits de pétrole avec ses conséquences environnementales, etc.).
Le dessin est un peu naïf (ce qui convient à ce type de récit de toute façon), et j’ai bien aimé le rendu, la colorisation assez grasse.
Une petite lecture tous publics ma foi sympathique.
Note réelle 3,5/5.
Bussi est de plus en plus adapté en BD (je n’ai encore lu aucun de ses romans). Ici, c’est une histoire bien huilée, même si le lecteur est quand même prié d’accepter quelques petites (ou grandes) facilités scénaristiques.
Il y a quand même pas mal de « hasards » heureux dans cette histoire, et j’ai trouvé que le personnage de Malvina (sa personne et son comportement, ainsi que le fait qu’elle semble échapper à toute poursuite) manquait de crédibilité. Je n’ai pas non plus vraiment compris pourquoi le détective Crédule Grand-Duc (quels nom et prénom !?) voulait se suicider en début d’intrigue.
Voilà pour les bémols. Pour le reste, c’est une mécanique bien huilée donc, un polar qui se laisse lire une fois acceptées les remarques précédentes. Les indices et rebondissements sont distillés régulièrement pour entretenir suspens et intérêt (je trouve juste le happy-end final inutile).
Le dessin est fluide et lisible. Mais, là aussi, j’y ai trouvé quelques défauts. D’abord personnages et accessoires et véhicules semblent un peu trop dessinés au cordeau, cela manque d’aspérité. Ça fait un peu artificiel, et la colorisation (là pour le coup je ne l’ai pas vraiment aimée) accentuant cela. Voir en particulier les libellules, qui ressemblent plus à des drones artificiels qu’à de jolis insectes.
Un polar globalement plaisant, mais sur lequel je ne reviendrai pas.
Déroutant, sans doute clivant, du Blutch quoi.
Ici dans le bel écrin des éditions 2024 (couverture et papier épais, avec une colorisation qui fait volontairement un peu vieillot), Blutch nous propose quelque chose d’original. Avec son dessin caractéristique, moderne, proche de l’esquisse parfois, sans jamais paraitre négligé ou bâclé.
L’histoire quant à elle est très loufoque, absurde, emprunte allègrement les chemins du surréalisme. Et ce dès l’entame, qui voit une sorte de cow-boy arriver dans un train à vapeur au sommet des montagnes où se trouve Bruxelles (avec vue sur la mer !). Les péripéties qui s’ensuivent s’écartent tout autant du réalisme et du déroulé classique des BD franco-belges, les dialogues ne cherchant pas non plus à ramener le lecteur vers quelque chose de cartésien.
Quoi que, au final, Blutch nous y ramène presque. Qui rêvait quoi ? Qui était dans le rêve de l’autre ? « En vérité, lequel de nous eux rêve ici ? » dit la femme à l’homme étendue devant elle dans le dernier dialogue. Et si c’était le lecteur qui rêvait ?
Étonnant, jusqu’aux informations habituelles de l’éditeur, qui ne clôturent pas du tout l’album, puisqu’elles sont suivies de 8 pages concluant « l’histoire ».
Une lecture agréable, mais aussi énigmatique, une petite curiosité.
Jaime Martin est un auteur que j’aime bien. En particulier dans ses séries à la fois autobiographiques et historiques. Mais cette histoire m’a quand même moins intéressé.
Elle se laisse lire, et Martin nous montre bien l’âpreté de la vie de ses montagnards, enclavés, soumis à la pression d’un Église extrémiste et rétrograde, aux qu’en dira-t-on : une Espagne où l’on vit à la fin du XIXème siècle comme quelques siècles auparavant.
Un peu d’arrière-plan fantastique, autour de ce mal, de ces loups, avec la rage qui menace la communauté villageoise, m’a moyennement convaincu. J’ai été un peu plus intéressé par ces rebouteuses (appelées ici « trementinaires »), à la fois demandées et craintes, admirées et haïes.
Mais c’est le récit qui est ancré dans l’histoire des régions isolées d’Espagne, manque un peu de rythme et de surprise.
Quant au dessin de Martin, il est comme à l’habitude très lisible, avec un trait gras agréable, même si les décors – montagnards en particulier – sont un peu trop escamotés à mon goût.
Les 2 premiers m’avaient fait bonne impression lors de leur découverte, mais ce n’est que tout récemment que j’ai pu lire le tome 3.
Ce dernier clôture les aventures de notre gaulois mais sans que ça soit si évident. En fait, je trouve même ce final loupé, j’ai quitté notre Barbare avec un sentiment de ah ouais ?! bah bof alors.
Les 1ers tomes restent cool à mes yeux, un truc un peu dans la veine de Conan, facile vu la carrure de Coax ;) En plus, les récits sont équilibrés et la partie graphique envoie du lourd.
Franchement sympa.
Puis vient ce dernier tome qui m’a déçu, le graphisme ne m’a plus ébouriffé. L’histoire se perdant (avis personnel) dans une trop grande véracité historique, l’aventure est plus politique et raconte un moment charnière de Rome. Honnêtement pourquoi pas ? Mais ce n’est pas vraiment ce que j’attendais avec ce type de héros. C’est tout de suite beaucoup moins fun et surtout je n’y ai pas cru.
Bref je suis passé à côté de ce finish mais à essayer.
Je découvre cet auteur avec ce voyage de Renn. Effectivement, je rejoins PAco, les dessins sont une des forces indéniables de cet album. Les traits des animaux sont soignés. Ils ont un aspect réalistes très réussi. On reconnait les espèces en un coup d'oeil. Les détails sont là, poils, plumes, museaux, regards, tout est maitrisé. Mais au delà de cet aspect réaliste, ils sont personnifié avec justesse. On peut avoir une troupe de Rennes et reconnaitre les individus entre eux. Ils ont chacun leurs caractéristiques qui les rendent identifiables immédiatement. Et pour ne rien gâcher, ils ont globalement des bonnes bouilles, ça les rend sympas et attachants. Bref, bel équilibre entre réalisme et fiction, pas facile a priori, mais Christian Paty s'en sort avec mention.
Coté scénario, on a droit à une histoire plutôt attendrissante, avec une touche humoristique. Notre ours, adopté par un couple de rennes, va vivre des problématiques bien humaine, sur fond d'intégration au sein d'une communauté dont il n'est pas sensé faire partie. Ça fonctionne plutôt bien. Sa quête initiatique, guidé par la shamane de la bande m'a paru trop onirique et moins percutante, même si bien sur cela permet de boucler la boucle.
Le coté humour est gentillet mais fonctionne plutôt bien lui aussi. Cet aspect est souvent incarné par la triplette de singes japonais qui racontent pas mal de bêtises, fourchent sur les mots, ou tente de faire des rimes. On sourit de bon coeur lors de leurs interventions.
Un album original qui se distingue par un visuel fort agréable.
Je pense que je n'avais jamais encore lu de BD chinoise. Je voulais un peu de voyage et j'ai bien été transporté dans un ailleurs. On est ici plongés dans une ruelle hors du temps, où les histoires se croisent et s’entrelacent avec une poésie qui oscille entre douceur et mélancolie.
Les dessins jouent un rôle clé, avec un trait fin et des couleurs douces, comme passées par le temps. On sent que tout est pensé pour créer une cohérence, une unité qui fait de cette ruelle un personnage à part entière.
Les contes, eux, sont inégaux. Certains marquent par leur poésie ou leur originalité, d’autres semblent plus rapides, presque anecdotiques. Mais l’ensemble fonctionne, porté par cette ambiance qui donne envie de ralentir, de prendre le temps de regarder les détails. Les pavés, les murs, les fenêtres racontent presque autant que les personnages eux-mêmes.
Un album qui m'a fait spontanément baisser le rythme pour l'appréhender sans précipitation, et qui laisse un sentiment de calme. Pas un chef-d’œuvre, mais une belle lecture qui sait capter l’attention sans en faire trop. Une ruelle qu’on aurait envie de retrouver, pour s’y perdre un peu plus longtemps. En tous cas je suis sûr que j'y reviendrai.
Assez jolie BD dystopique de Corbeyran et Colline.
L'idée principale est de poser une tonalité légère et décalée sur un scénario dystopique sombre très balisé "à la 1984".
Visuellement, Colline s'appuie sur une rondeur rétro davantage attendue du côté de la BD jeunesse, tandis que Corbeyran glisse des éléments à la naïveté poétique, généralement charmants (l'invisibilité, les romances, la surprise dans le quartier général du pouvoir...), parfois maladroits (l'apologie du tabac, le discours globalement misogyne).
Le revers de cette touche jeunesse est naturellement de manquer d'ambition et de subversion. Ainsi les propos sur le travail, la surveillance, l'écologie, le militantisme... n'offusqueront personne tant ils ne s'appliquent qu'à cet univers dystopique. La conclusion est sur ce point aussi géniale que décevante : charmante et inoffensive à souhait, aboutissant à la même conclusion que le nihilisme absolu de La Route, mais via un mécanisme inverse, à de la dystopie ne dénonçant plus rien à force de s'offrir comme purement dystopique, creuse et détachée du réel.
L'efficacité du récit et l'originalité de la vision permettent de passer un bon moment, qui font passer la colère sourde de voir détourné et relativisé tout contre-discours.
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Les Voyages d'Anna
Jamais roman graphique n'aura mieux porté son nom. Bien que je ne sois pas sûr que l'échange épistolaire entre Anna et Jules soit du domaine du roman. C'est tout de même bien écrit et agréable à lire même si j'ai eu du mal parfois avec le ton nostalgique un peu mielleux. De toute façon l'épistolaire n'est pas un genre que j'apprécie trop. J'ai toujours l'impression de m 'immiscer dans une relation intime qui m'est étrangère. La lecture est très rapide dans un ton très consensuel dans cette période de colonisation brutale. Evidemment le scénario qui met en scène ce couple de routards bobos, chevalet au dos n'est qu'un prétexte pour mettre en valeur les très belles illustrations d'Emmanuel Lepage. On y découvre plusieurs fois un thème en construction de l'esquisse jusqu'à l'aquarelle aboutie. Cela donne de très belles doubles pages très bien travaillées. Si l'histoire est très superficielle et convenue le graphisme est très beau malgré un petit côté carte postale par moment ( c'est probablement voulu). Une lecture dépaysante et agréable qui ne m'a pas bouleversé autre que la maîtrise technique picturale.
Nos rives partagées
Je n’ai malheureusement pas grand chose à dire sur ma lecture. Une œuvre sympathique, on lit l’album sans déplaisir mais c’est un peu tout. Une chronique sociale où l’on suivra 3 « couples » de différents âges. Au programme tracas de la vie, reconstruction, questionnement … c’est fait avec un certain talent, le coup des animaux anime un peu l’ensemble. Sauf que je n’ai pas réellement succombé à la magie du récit, je reconnais l’envie et les belles idées mais je suis resté neutre niveau émotion.
Au cœur des terres ensorcelées
Les aventuriers de l’étrange publient pas mal d’auteurs roumains, que je découvre donc grâce à eux. C’est encore le cas ici avec ce conte (que j’ai lu dans sa première version, dans un format plus petit donc que la réédition chez le même éditeur). L’histoire est classique dans ses grandes lignes. Plusieurs frères se disputent le futur héritage d’un royaume, deux fourbes et un « gentil » qu’ils veulent éliminer – et qui bien sûr va finalement triompher de ses frères, après l’avoir fait de nombreuses épreuves intermédiaires. C’est dans ces épreuves, ces « missions » qui lui sont confiées que réside l’originalité. L’ensemble est plaisant en tout cas, en mêlant en plus à un univers indéfini mais globalement médiéval certains aspects plus modernes (des machines volantes un tout petit peu steampunk, quelques robots, et une vision acerbe de l’exploitation de puits de pétrole avec ses conséquences environnementales, etc.). Le dessin est un peu naïf (ce qui convient à ce type de récit de toute façon), et j’ai bien aimé le rendu, la colorisation assez grasse. Une petite lecture tous publics ma foi sympathique. Note réelle 3,5/5.
Un avion sans elle
Bussi est de plus en plus adapté en BD (je n’ai encore lu aucun de ses romans). Ici, c’est une histoire bien huilée, même si le lecteur est quand même prié d’accepter quelques petites (ou grandes) facilités scénaristiques. Il y a quand même pas mal de « hasards » heureux dans cette histoire, et j’ai trouvé que le personnage de Malvina (sa personne et son comportement, ainsi que le fait qu’elle semble échapper à toute poursuite) manquait de crédibilité. Je n’ai pas non plus vraiment compris pourquoi le détective Crédule Grand-Duc (quels nom et prénom !?) voulait se suicider en début d’intrigue. Voilà pour les bémols. Pour le reste, c’est une mécanique bien huilée donc, un polar qui se laisse lire une fois acceptées les remarques précédentes. Les indices et rebondissements sont distillés régulièrement pour entretenir suspens et intérêt (je trouve juste le happy-end final inutile). Le dessin est fluide et lisible. Mais, là aussi, j’y ai trouvé quelques défauts. D’abord personnages et accessoires et véhicules semblent un peu trop dessinés au cordeau, cela manque d’aspérité. Ça fait un peu artificiel, et la colorisation (là pour le coup je ne l’ai pas vraiment aimée) accentuant cela. Voir en particulier les libellules, qui ressemblent plus à des drones artificiels qu’à de jolis insectes. Un polar globalement plaisant, mais sur lequel je ne reviendrai pas.
La Mer à boire
Déroutant, sans doute clivant, du Blutch quoi. Ici dans le bel écrin des éditions 2024 (couverture et papier épais, avec une colorisation qui fait volontairement un peu vieillot), Blutch nous propose quelque chose d’original. Avec son dessin caractéristique, moderne, proche de l’esquisse parfois, sans jamais paraitre négligé ou bâclé. L’histoire quant à elle est très loufoque, absurde, emprunte allègrement les chemins du surréalisme. Et ce dès l’entame, qui voit une sorte de cow-boy arriver dans un train à vapeur au sommet des montagnes où se trouve Bruxelles (avec vue sur la mer !). Les péripéties qui s’ensuivent s’écartent tout autant du réalisme et du déroulé classique des BD franco-belges, les dialogues ne cherchant pas non plus à ramener le lecteur vers quelque chose de cartésien. Quoi que, au final, Blutch nous y ramène presque. Qui rêvait quoi ? Qui était dans le rêve de l’autre ? « En vérité, lequel de nous eux rêve ici ? » dit la femme à l’homme étendue devant elle dans le dernier dialogue. Et si c’était le lecteur qui rêvait ? Étonnant, jusqu’aux informations habituelles de l’éditeur, qui ne clôturent pas du tout l’album, puisqu’elles sont suivies de 8 pages concluant « l’histoire ». Une lecture agréable, mais aussi énigmatique, une petite curiosité.
Un sombre manteau
Jaime Martin est un auteur que j’aime bien. En particulier dans ses séries à la fois autobiographiques et historiques. Mais cette histoire m’a quand même moins intéressé. Elle se laisse lire, et Martin nous montre bien l’âpreté de la vie de ses montagnards, enclavés, soumis à la pression d’un Église extrémiste et rétrograde, aux qu’en dira-t-on : une Espagne où l’on vit à la fin du XIXème siècle comme quelques siècles auparavant. Un peu d’arrière-plan fantastique, autour de ce mal, de ces loups, avec la rage qui menace la communauté villageoise, m’a moyennement convaincu. J’ai été un peu plus intéressé par ces rebouteuses (appelées ici « trementinaires »), à la fois demandées et craintes, admirées et haïes. Mais c’est le récit qui est ancré dans l’histoire des régions isolées d’Espagne, manque un peu de rythme et de surprise. Quant au dessin de Martin, il est comme à l’habitude très lisible, avec un trait gras agréable, même si les décors – montagnards en particulier – sont un peu trop escamotés à mon goût.
L'Espion de César
Les 2 premiers m’avaient fait bonne impression lors de leur découverte, mais ce n’est que tout récemment que j’ai pu lire le tome 3. Ce dernier clôture les aventures de notre gaulois mais sans que ça soit si évident. En fait, je trouve même ce final loupé, j’ai quitté notre Barbare avec un sentiment de ah ouais ?! bah bof alors. Les 1ers tomes restent cool à mes yeux, un truc un peu dans la veine de Conan, facile vu la carrure de Coax ;) En plus, les récits sont équilibrés et la partie graphique envoie du lourd. Franchement sympa. Puis vient ce dernier tome qui m’a déçu, le graphisme ne m’a plus ébouriffé. L’histoire se perdant (avis personnel) dans une trop grande véracité historique, l’aventure est plus politique et raconte un moment charnière de Rome. Honnêtement pourquoi pas ? Mais ce n’est pas vraiment ce que j’attendais avec ce type de héros. C’est tout de suite beaucoup moins fun et surtout je n’y ai pas cru. Bref je suis passé à côté de ce finish mais à essayer.
Le Voyage de Renn
Je découvre cet auteur avec ce voyage de Renn. Effectivement, je rejoins PAco, les dessins sont une des forces indéniables de cet album. Les traits des animaux sont soignés. Ils ont un aspect réalistes très réussi. On reconnait les espèces en un coup d'oeil. Les détails sont là, poils, plumes, museaux, regards, tout est maitrisé. Mais au delà de cet aspect réaliste, ils sont personnifié avec justesse. On peut avoir une troupe de Rennes et reconnaitre les individus entre eux. Ils ont chacun leurs caractéristiques qui les rendent identifiables immédiatement. Et pour ne rien gâcher, ils ont globalement des bonnes bouilles, ça les rend sympas et attachants. Bref, bel équilibre entre réalisme et fiction, pas facile a priori, mais Christian Paty s'en sort avec mention. Coté scénario, on a droit à une histoire plutôt attendrissante, avec une touche humoristique. Notre ours, adopté par un couple de rennes, va vivre des problématiques bien humaine, sur fond d'intégration au sein d'une communauté dont il n'est pas sensé faire partie. Ça fonctionne plutôt bien. Sa quête initiatique, guidé par la shamane de la bande m'a paru trop onirique et moins percutante, même si bien sur cela permet de boucler la boucle. Le coté humour est gentillet mais fonctionne plutôt bien lui aussi. Cet aspect est souvent incarné par la triplette de singes japonais qui racontent pas mal de bêtises, fourchent sur les mots, ou tente de faire des rimes. On sourit de bon coeur lors de leurs interventions. Un album original qui se distingue par un visuel fort agréable.
Les Contes de la ruelle
Je pense que je n'avais jamais encore lu de BD chinoise. Je voulais un peu de voyage et j'ai bien été transporté dans un ailleurs. On est ici plongés dans une ruelle hors du temps, où les histoires se croisent et s’entrelacent avec une poésie qui oscille entre douceur et mélancolie. Les dessins jouent un rôle clé, avec un trait fin et des couleurs douces, comme passées par le temps. On sent que tout est pensé pour créer une cohérence, une unité qui fait de cette ruelle un personnage à part entière. Les contes, eux, sont inégaux. Certains marquent par leur poésie ou leur originalité, d’autres semblent plus rapides, presque anecdotiques. Mais l’ensemble fonctionne, porté par cette ambiance qui donne envie de ralentir, de prendre le temps de regarder les détails. Les pavés, les murs, les fenêtres racontent presque autant que les personnages eux-mêmes. Un album qui m'a fait spontanément baisser le rythme pour l'appréhender sans précipitation, et qui laisse un sentiment de calme. Pas un chef-d’œuvre, mais une belle lecture qui sait capter l’attention sans en faire trop. Une ruelle qu’on aurait envie de retrouver, pour s’y perdre un peu plus longtemps. En tous cas je suis sûr que j'y reviendrai.
Les Yeux doux
Assez jolie BD dystopique de Corbeyran et Colline. L'idée principale est de poser une tonalité légère et décalée sur un scénario dystopique sombre très balisé "à la 1984". Visuellement, Colline s'appuie sur une rondeur rétro davantage attendue du côté de la BD jeunesse, tandis que Corbeyran glisse des éléments à la naïveté poétique, généralement charmants (l'invisibilité, les romances, la surprise dans le quartier général du pouvoir...), parfois maladroits (l'apologie du tabac, le discours globalement misogyne). Le revers de cette touche jeunesse est naturellement de manquer d'ambition et de subversion. Ainsi les propos sur le travail, la surveillance, l'écologie, le militantisme... n'offusqueront personne tant ils ne s'appliquent qu'à cet univers dystopique. La conclusion est sur ce point aussi géniale que décevante : charmante et inoffensive à souhait, aboutissant à la même conclusion que le nihilisme absolu de La Route, mais via un mécanisme inverse, à de la dystopie ne dénonçant plus rien à force de s'offrir comme purement dystopique, creuse et détachée du réel. L'efficacité du récit et l'originalité de la vision permettent de passer un bon moment, qui font passer la colère sourde de voir détourné et relativisé tout contre-discours.