Pas grand-chose à dire de cet album. Ça se laisse lire, c’est dynamique, on ne s’ennuie pas, mais c’est aussi vite oublié je pense, je n’y reviendrai sans doute pas.
Disons que tout est bien fait, mais ça ne m’a pas emballé plus que ça. Cette sorte d’agence constituée uniquement de femmes, toutes sexy et super entrainées, capable de déjouer les molosses, les pièges les plus vicieux, et les méchants les plus haineux, je trouve que ça perd en crédibilité ce que ça a gagné en action. On a donc un produit de consommation qui répond à pas mal de cahiers des charges, mais ça n’est pas ma came.
Je suis en tout cas moins enthousiaste que mes prédécesseurs. Même si je reconnais encore que Terry Moore (que j’avais quand même préféré sur Serial) connait son affaire, en nous proposant de l’action bien huilée (jusqu’au final avec les Chinois).
Le dessin est sans fioriture, mais efficace.
Une lecture d’emprunt, pour amateurs du genre ne recherchant pas trop de surprises.
Un album très vite lu, car quasiment muet (deux ou trois « ah » seulement ponctuent cette histoire). C’est d’ailleurs ce qui peut frustrer un lecteur adulte – ça a été un peu mon cas.
Les plus jeunes apprécieront sans doute davantage ce conte, que j’ai cru un temps avoir une fin très triste. Mais en fait non, la dernière case dégage poésie et joie posthume et conclut de façon positive un récit un peu linéaire, mais agréable à suivre.
Car dessin et colorisation sont simples et chouettes.
Une lecture sympathique, mais à réserver je pense à un très jeune lectorat (c’est en fonction de ce lectorat cible que je lui attribue les trois étoiles – mon ressenti personnel étant 2,5/5.).
C'est la première série d'Osamu Tezuka que je lis. C'est une œuvre intéressante car bâtie sur un scénario aux thématiques nombreuses (trop?) dans un espace assez resserré(3 tomes) et une temporalité assez longue (20 ans). L'avantage de cette construction est de proposer une narration très dynamique mais son inconvénient est de souvent survoler certain thèmes voire d'introduire une discontinuité qui laisse le lecteur seul face à la situation.
J'ai beaucoup aimé le tome 1 centré sur la personnalité très sombre de Jiro. Dans un Tokyo de 1949 l'auteur, dans un registre de contre espionnage, charge la présence américaine en multipliant les scènes d'interrogatoire quasi gestapistes d'une armée d'occupation voulant anéantir la classe ouvrière cheminote japonaise. j'ai tiqué plusieurs fois à cette construction. En effet je ne crois avoir jamais lu l'équivalent sur la présence américaine en RFA. Cela m'a d'autant plus gêné que cela est introduit après un vide sur l'histoire antérieure de l'armée impériale en Corée ( armée d'occupation pas trop sympa) et ailleurs dans le Pacifique. La réforme agraire est expédiée en quelques cases. Cela donne un aspect documentaire historique pas déplaisant mais un peu juste pour y puiser une réelle connaissance approfondie de l'histoire socio-économique du Japon d'après guerre. Rien sur la reconstruction du pays, rien sur sa réorganisation politique, Tezuka se contente de mettre en scène des officiers sup américains de façon caricaturale et grotesque. Cette thématique se conclut sur une histoire assez rocambolesque de chemise ensanglantée qu'il aurait été si facile de faire disparaître. D'ailleurs il a été plus facile à Jiro de disparaître des griffes de la police , des services secrets américains voire des yeux des lecteurs en faisant de courtes réapparitions inexpliquées. La piste policière un peu entretenue en fin de T1 disparaissant totalement en T2 pendant 20 ans.
Il reste donc la saga sur laquelle est centrée l'insupportable séquestration d'Ayako qui représente une véritable charge contre une société traditionnelle patriarcale de type médiévale. Tezuka s'enfonce à l'envie dans le glauque et le nauséeux, multipliant les viols, les incestes, les coups, les injustices pour chaque membre masculin de la famille Tengé. Si la fin du T1 porte son effet dramatique dans un ignominieux conseil de famille, les surcouches introduites par la suite virent à la lourdeur et au voyeurisme. Il a fallu le saut temporel de 1971 en fin de t2 pour que je ne lâche pas l'affaire en mi T2.
Le graphisme est très surprenant. Je le vois comme le produit d'une équipe assez inégale tellement il y a des différences d'une case à l'autre. On passe d'extérieurs paysagés très ciselés et travaillés avec une grande précision à des décors urbains rectilignes corrects mais sans âme. Que dire des visages et des silhouettes? Des caricatures déformées au long cous de girafes, des visages mangas lisses et occidentalisés, des proportions aléatoires, des visages de soldats afro-américains aux stéréotypes douteux (T2 p70), des femmes typées poupées potiches ou des scènes traditionnelles de deuil ou de fêtes admirablement travaillées. Je n'ai toujours pas compris la volonté visuelle de l'auteur,
C'est dire si une fois le choc émotionnel du T1 passé même le calvaire d'Ayako dans une pauvre idée du mythe de la caverne m'a de plus en plus laissé froid.
Une lecture pas déplaisante mais sans plus. 2.5
J'avoue avoir été assez déçu de la lecture, surtout au vu des nombreux avis élogieux. Il faut dire que c'est une histoire dans laquelle certains détails sont assez gros et m'ont fait sortir du récit, malgré un rythme excellent.
Et déjà j'en ai dit assez, puisque cette BD est un thriller qui prend place dans les montagnes du Vercors, où un bus se retrouve coincé par un éboulement. La suite n'est pas importante à connaitre, puisque le récit est à découvrir à chaque page. Et je suis assez triste d'avoir peu aimé puisque je le trouve très équilibré dans sa tension. C'est constant, sans relâchement, le tout porté par des personnages simples mais efficaces dans les archétypes. D'autre part le dessin est vraiment excellent, avec les décors vides d'humains et cette présence d'une nature qui cache le danger. Le dessin contribue jusqu'à la dernière page, accentuant les visages et les émotions, faisant comprendre sans avoir besoin d'exprimer.
Maintenant, comme souligné au début, j'ai trouvé plusieurs passages quelque peu invraisemblables. Si chaque personnage a sa propre motivation, il y a pour autant des moments qui m'ont sorti du récit. Trop invraisemblable, trop spectaculaire aussi parfois (je préfère ne pas développer pour éviter de dévoiler). Et de fait, je me suis dit plusieurs fois devant le récit que c'était gros mais que "Allez, ça passe". Sauf que je me suis rendu compte lorsque j'ai refermé la BD que je n'avais pas envie de la relire et que son récit ne restait pas spécialement en mémoire. De fait, je ne suis pas plus emballé que ça et j'oublierai sans doute l'histoire d'ici quelques mois. Dommage !
Voilà un album primé cette année aux Eisner Awards (catégorie "Best new serie", étrange pour un oneshot...) qui me donnait bien envie.
"Somna" nous propose une petit détour par l'Amérique puritaine du 17e siècle où la chasse aux sorcières était un sport national. Pas de chance pour Ingrid, la femme du bailli (l'inquisiteur local pourrait-on dire), car le peu d’égard de son mari à son encontre couplé à ses absences, la plonge dans des rêveries sulfureuses. En effet, Morphée a la fâcheuse tendance a venir accompagné... Une sorte de démon/entité tentatrice lui apparait l'enjoignant à laisser cours à ses désirs et plaisirs personnels. Ajoutez à cela un meurtre au sein de leur petite communauté de villageois et vous avez là une parfaite petite marmite prête à entrer en ébullition...
C'est plutôt bien mené, avec cette particularité que nos deux autrices sont aussi bien partie prenante au scénario qu'au dessin. Chacune conserve son style graphique propre, alternant avec justesse entre les délires oniriques et sulfureux d'Ingrid et son quotidien. C'est aussi surprenant qu'efficace, et moi qui ne suis pas spécialement fan de ce genre de procédé, j'avoue que ça fonctionne ici très bien.
Pour autant, malgré cette double intrigue, point de surprise au final, même si l'histoire est cohérente et met en lumière cette tragique période pour les femmes qui ne rentraient pas dans le moule.
(3.5/5)
Régis, j’ai passé une super journée avec toi !
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Ce tome contient une histoire complète, indépendante de tout autre. Son édition originale date de 2017. Il a été réalisé par Didier Tronchet pour le scénario, les dessins et la mise en couleurs. Il comprend quatre-vingts pages de bande dessinée.
Quelque part en Ardèche, les époux Lemaire sont montés en voiture, en partance pour leurs vacances. Régis Lemaire conduit et il est en train de répondre au téléphone à un client. Il explique à son prospect que leurs tarifs incluent toutes les taxes. Il continue tout en conduisant : Ce qui n’exclut pas une remise clientèle en cas de commande groupée de matériel forestier ou travaux publics. Il précise qu’il sera à l’heure pour la démonstration, il est en route, il sera là dans dix minutes sur le chantier à la sortie de Mont-Regard. Pendant ce temps-là, son épouseValérie regarde par la fenêtre mi lassée, mi résignée. Son mari raccroche et lui assure qu’après, ils seront en vacances ! Il continue : il va quitter sa cravate et sa veste de croque-mort. Et hop, il enfilera sa chemise de vacances, avec les palmiers, car les palmiers ça fait vacances, c’est la femme de ménage qui la lui a rapportée de Gambie. Et ensuite, il la rassure : tout est bien organisé, elle le connaît. Il a les réservations de tous les hôtels pour chaque nuit, avec les adresses et les téléphones, il a tout mis dans la pochette jaune. Il doit y avoir aussi tous les papiers d’identité, assurances et permis de conduire. Il lui demande si elle a bien pris la pochette jaune. Elle réfléchit et lui répond que non. Il s’en trouve tout dépité : il a passé des heures à tout préparer, elle ne respecte pas son travail. Elle le reprend : son travail, mais elle croyait qu’ils étaient en vacances.
Valérie change de conversation et demande à s’arrêter car elle a soif. Il répond que non : ils roulent, ils roulent. Toutefois il a prévu quelques rafraîchissements dans la glacière, où est-elle d’ailleurs la glacière ? Son épouse répond qu’elle doit être avec la pochette jaune. Qu’importe, on ne le prend pas au dépourvu : il a un plan B. Là, dans la boîte à gants : il y a une bouteille avec une paille. Il lui indique que c’est de la grenadine. Elle lui répond qu’elle sait ce que c’est que de la grenadine, il ne faut pas la prendre pour une idiote. Il se reprend : d’accord, mais elle n’en a pas bu depuis combien de temps ? Depuis l’enfance, non ? Pour lui, la grenadine, c’est comme la madeleine de Proust, un parfum d’hier. Il a l’impression que quand on boit de la grenadine, on retourne immédiatement à l’enfance. Il s’interrompt brusquement et regarde à côté de lui sur le siège passager. Il fait un écart de route vers la gauche, redresse trop brutalement vers la droite, et va légèrement heurter le talus sur le côté. Il s’arrête. Il descend de voiture, et il fait quelques pas devant. Il revient et va ouvrir la portière côté passager. Il demande à la passagère qui elle est. Une jeune demoiselle, d’une dizaine d’années, lui répond que c’est elle, Valérie. Régis Lemaire éprouve toutes les peines du monde à comprendre.
L’auteur a commencé sa carrière dans le début des années 1980, époque à laquelle il a lancé des séries comme Raymond Calbuth, Les damnés de la terre, puis Jean-Claude Tergal. Le lecteur appréciant son œuvre s’intéresse tout naturellement à un nouvel album, la couverture intrigante (un homme sous l’influence d’une femme), avec des caractéristiques graphiques, comme une mise en couleurs expressionnistes, une utilisation narquoise d’un plan en contreplongée pour accentuer la dramatisation, et une façon très particulière de représenter les visages pour l’homme. Pas de doute, c’est du Tronchet. Malgré l’exagération et la simplification des formes propre à ce bédéiste, le lecteur constate rapidement qu’il plonge dans une narration à la veine réaliste, racontant une histoire, un événement après l’autre, dans un enchaînement basique et très C’est comme ça. L’histoire repose uniquement sur deux personnages principaux, les époux Lemaire, avec très peu de seconds rôles, le patron monsieur Bolivar et l’ami Alain qui n’apparaît jamais dans une case, qui brille surtout par le fait qu’il ne réponde pas au téléphone. La mise en couleurs se situe dans un registre plutôt agréable et coloré : des jaunes clairs pour la belle luminosité du soleil, associés avec les verts de la végétation, et le bleu de l’ombre. Deux passages dérogent à cette palette : du rose pour des courses dans un supermarché, et une teinte ocre pour la visite chez le docteur Patrick Perrin. Enfin, l’auteur situe clairement son récit : dans la région de Saint-Agrève, une commune française de l’Ardèche, d’une population d’environ deux mille trois cents habitants.
Le lecteur accepte bien volontiers de faire le voyage avec Valérie et Régis : deux époux pas désagréables, ayant bien réussi leur vie. Lui est chef de vente dans les machines-outils, avec une proposition de promotion par son patron, littéralement en cours de route, pour prendre la tête du service prospection ; elle est responsable de communication dans un grand groupe pharmaceutique. Ils n’ont pas d’enfant et donc pas les responsabilités qui accompagnent cet état : ils peuvent jouir de la vie comme bon leur semble. Elle donne l’impression d’être une belle femme, simple avec son teeshirt à rayures bleues horizontales, une belle chevelure noire, un visage fin et doux, malgré son air discrètement résigné, regrettant on ne sait quoi. La silhouette de monsieur est plus solidement charpentée, un beau gaillard. Son visage présente des particularités graphiques fortes : un nez épaté, une bouche qui va d’un côté du visage à l’autre, avec des dents apparentes entre les lèvres, des yeux très écartés du nez, un menton aussi large que le front, une coiffure improbable avec une mèche d’un volume tout aussi peu probable. Le lecteur retrouve également la propension de l’artiste à donner des gros doigts boudinés à ses personnages, voire des bouts de doigt carrés. Des yeux qui ne tiennent pas tout à fait dans l’ovale du visage, des tout petits pieds, des nez trop allongés pour les hommes (le père de Valérie, le docteur Patrick Perrin, les deux policiers). Et pourtant ces libertés prises avec l’anatomie s’amalgament pour former un tout harmonieux, ou en tout cas cohérent et expressif.
L’artiste aborde les décors et les accessoires avec la même approche personnelle : hétéroclite si le lecteur s’essaye à considérer chaque élément d’une case un par un, très cohérente s’il absorbe l’ensemble de chaque case. Dans le dessin en pleine page d’ouverture, la voiture semble représentée de manière naïve, les maisons pas tout à fait assez détaillées, les arbres tracées à gros traits ; pour autant le lecteur ressent bien cette atmosphère particulière de route de campagne, la douce chaleur, une zone boisée. Dans les pages suivantes, la voiture ressemble encore plus à une petite voiture jouet pour enfant d’un modèle un peu grossier. Il n’y a pas de marquage au sol sur la chaussée. Pour autant, le lecteur éprouve bien l’impression d’être sur la route avec les clôtures de fil de fer barbelé et leurs piquets, les grandes étendues d’herbe, les arbres en bordure de route ou dans le lointain, le paysage vallonné, etc., puis les vaches. Il ne pense même pas à s’étonner de l’absence de fossé sur les bas-côtés. Lors des passages en zone urbaine, il identifie aussi bien les fermes en campagne, que les maisons en ville. Les rayonnages du supermarché présentent des formes grossières, et en même temps il se dit qu’il pourrait pousser son caddie dans ces allées pour choisir ses produits. Il en va de même pour la pharmacie. Le chapiteau de la fête américaine apparaît tout aussi plausible, avec les dizaines de voitures stationnées sur les pelouses. Le bord du lac comprend aussi bien des piqueniqueurs que des plagistes, ou encore des canoës à louer et des pédalos. L’artiste fait tout aussi fort quand Valérie et Régis s’arrêtent au bord de la route pour piqueniquer, avec des arbres représentés à l’aquarelle en fond, uniquement la forme globale l’arbre et des coups de pinceau en vert plus foncé pour le tronc et les branches principales.
Le lecteur suit donc ce couple dans une succession de scènes s’enchaînant de manière quasi enfantine, une situation chassant la précédente, au cours d’une unique journée. Valérie se désaltère avec la grenadine, ce qui provoque un événement fantastique, et toute la journée bien programmée de Régis déraille. Le voilà obligé de gérer une enfant, ce dont il n’a aucune expérience. Il ne sait comment faire face à ses envies, à ses facéties, à ses caprices. Ses obligations professionnelles s’en trouvent malmenées et impossibles à honorer. Les autres adultes le soupçonnent du pire en constatant qu’il ne sait pas s’occuper de cette enfant, qui ne doit donc pas être la sienne. Il ne parvient pas à établir une communication constructive avec elle, totalement à la merci de ses sautes d’humeur et de ses revirements. Par la force des choses, il ne peut que céder et essayer de la contenter de son mieux, en renonçant au déroulement de ce qu’il avait prévu avec des préparatifs rigoureux. Le lecteur peut prendre le récit au premier degré, comme un adulte se confrontant à l’entrain et à la fougue d’un enfant, ce qui l’oblige à se remettre en question, à renoncer à la voie toute tracée qu’il a lui-même bâtie. Il peut aussi envisager cette histoire comme un conte : voilà que Régis Lemaire est devenu un parent d’un instant à l’autre, et qu’il doit faire l’apprentissage express de la responsabilité d’une fillette, et dans le même temps renoncer à une vie planifiée, une route tracée d’avance, pour s’adapter à l’imprévu et l’apprécier.
D’un côté, la magie de la narration visuelle fonctionne à plein, les différentes idiosyncrasies et libertés avec une représentation académique formant un tout harmonieux, et générant des ressentis authentiques chez le lecteur. En outre, le déroulement linéaire du récit permet d’obtenir de plein gré, le surplus de suspension d’incrédulité consentie du lecteur. D’un autre côté, la linéarité et la tonalité prosaïque et premier degré peuvent déstabiliser le lecteur s’apparentant à de la fadeur ou du simplisme. L’intention apparaît progressivement, peut-être un peu trop simple, avec un potentiel de développement pas entièrement réalisé.
Comme j'avais la version "Simon et Louise" qui regroupe les deux histoires mises en miroir, je me suis résolu à lire les "trépidantes" aventures de la JF. Je dois reconnaître que c'est une bonne idée d'avoir regroupé les deux récits. Cela donne une perspective bien plus piquante au récit. Ensuite j'ai bien plus accroché au récit de Louise en terme de crédibilité et de richesse du personnage. Simon était un personnage infantile qui agit sous le coup de l'émotion en se mettant en danger sans qu'aucun adulte ne lui explique la réalité de la situation. Louise est bien plus mûre dans son comportement. Légitimement influencée par sa cousine et l'ambiance festive, elle sait faire valoir son authenticité loin d'un schéma sexuel imposé par d'autres. Si Simon reste dans un schéma infantile fantasmé de héros de littérature , Louise est dans un schéma bien plus adulte. Elle sait refaire ses propres choix et garder sa cohérence psychologique alors que Simon est toujours un enfant qui est balloté au gré des rencontres plus ou moins bienveillantes.
C'est dommage de séparer les deux lectures qui prennent du volume dans leur complémentarité. Je dirais qu'ici 1+1 n'est pas égal à deux mais à plus par un effet de synergie.
Au global j'ai été déçu par le passage Simon seul mais je trouve l'ensemble de la série un bon pas mal même si le graphisme n'est pas mon truc.
Nouvelle version de l’histoire de Calamity Jane, celle-ci se démarque par l’emploi de passages semblant directement issus de feuilletons illustrés de l’époque. Cet emploi est une très bonne idée à mes yeux puisqu’il permet à Calamity Jane d’évoquer sa propre légende. Nous, lecteurs, naviguons ainsi entre la réalité historique et les actes héroïques tels que Martha Jane Cannary les avaient elle-même racontés (ou aurait pu les raconter).
Pour le reste, il n’y a pas grand-chose à en dire. Tout est propre, bien écrit, bien dessiné dans le style réaliste classique très grand public cher à l’éditeur, et peut s’appuyer sur une solide documentation. Calamity Jane y est décrite avec ses faiblesses, ses forces, mais surtout avec beaucoup d’humanité. Le personnage est attachant car les auteures parviennent à montrer la vulnérabilité et les doutes qu’elle camouflait derrière sa grande gueule.
Une lecture pas déplaisante du tout. Un peu courte pour une biographie vraiment exhaustive et immersive mais l’astuce scénaristique décrite ci-dessus permet aux auteures de sauter d’un fait à un autre sans que le récit ne deviennent trop syncopé pour la cause. Pas mal, quoi.
El Diablo m’a fait l’effet d’un moteur de R5 dans une Bentley. Il était chouette, le moteur de la R5, plutôt vif, sympa, dynamique. Elles sont magnifiques, les Bentley, raffinées jusque dans les moindres détails, confortables. Mais les deux ensemble, ça risque de marcher moyen moyen…
Et bien, c’est exactement mon ressenti à la lecture. Le dessin est splendide, chaque case est un tableau et on est littéralement plongés dans un superbe recueil d’illustrations. La représentation du marsupilami est aussi étonnante que réussie. Les décors de jungle, les navires, les pyramides inca, tout accroche l’œil.
Le scénario est assez basique mais fourmille de rebondissements, n’est pas dénué de références tant historiques que directement liées à l’univers du marsupilami et convient parfaitement à un jeune public. L’histoire se lit d’ailleurs très vite si on ne s’attarde pas sur le dessin car les dialogues sont peu nombreux et la mise en page est très aérée. Le scénario, par sa naïveté, se destine plutôt aux enfants. Un adulte, lui, s'étonnera par exemple qu'un jeune mousse, naturellement habitué à monter aux mâts de sa frégate, panique quelque peu à l'idée de grimper à un arbre qui semble ne pas dépasser les 4 mètres de haut. Exemple parmi d'autres de la naïveté du scénario concocté par Trondheim, une naïveté qui ravira le jeune lecteur qui pourra plus facilement s'identifier au jeune héros et rire de quelques facéties faciles (comme ces membres d'équipages maltraités par le marsupilami).
Associés, ces deux éléments mettent bien plus en avant les lacunes de l’un et de l’autre que leurs qualités. Le dessin devient statique, le scénario devient enfantin. C’est gentil, c’est pas mal… mais c’est quand même décevant devant le potentiel des auteurs (même si je demeure peu sensible à Trondheim).
Pour moi, c’est juste un petit pas mal, sans plus.
Un véritable OVNI qui m'a moyennement convaincu.
Au dessin, j'ai trouvé que le travail était absolument superbe et que la mise en scène était dynamique et bien maitrisé. Visuellement, c'est du plaisir pour les yeux ! Malheureusement, le scénario m'a semblé moyen. C'est assez décousu alors au début j'étais un peu perdu. De plus, les différents récits ne m'ont pas particulièrement marqué et les personnages ne m'ont pas intéressé.
Donc voilà le dessin est excellent, mais c'est pratiquement le seul élément que j'ai vraiment aimé. Cela reste tout de même une lecture pour les amateurs de bandes dessinées qui sortent de l'ordinaire, mais je recommande plus un emprunt.
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Parker Girls
Pas grand-chose à dire de cet album. Ça se laisse lire, c’est dynamique, on ne s’ennuie pas, mais c’est aussi vite oublié je pense, je n’y reviendrai sans doute pas. Disons que tout est bien fait, mais ça ne m’a pas emballé plus que ça. Cette sorte d’agence constituée uniquement de femmes, toutes sexy et super entrainées, capable de déjouer les molosses, les pièges les plus vicieux, et les méchants les plus haineux, je trouve que ça perd en crédibilité ce que ça a gagné en action. On a donc un produit de consommation qui répond à pas mal de cahiers des charges, mais ça n’est pas ma came. Je suis en tout cas moins enthousiaste que mes prédécesseurs. Même si je reconnais encore que Terry Moore (que j’avais quand même préféré sur Serial) connait son affaire, en nous proposant de l’action bien huilée (jusqu’au final avec les Chinois). Le dessin est sans fioriture, mais efficace. Une lecture d’emprunt, pour amateurs du genre ne recherchant pas trop de surprises.
Pétales
Un album très vite lu, car quasiment muet (deux ou trois « ah » seulement ponctuent cette histoire). C’est d’ailleurs ce qui peut frustrer un lecteur adulte – ça a été un peu mon cas. Les plus jeunes apprécieront sans doute davantage ce conte, que j’ai cru un temps avoir une fin très triste. Mais en fait non, la dernière case dégage poésie et joie posthume et conclut de façon positive un récit un peu linéaire, mais agréable à suivre. Car dessin et colorisation sont simples et chouettes. Une lecture sympathique, mais à réserver je pense à un très jeune lectorat (c’est en fonction de ce lectorat cible que je lui attribue les trois étoiles – mon ressenti personnel étant 2,5/5.).
Ayako
C'est la première série d'Osamu Tezuka que je lis. C'est une œuvre intéressante car bâtie sur un scénario aux thématiques nombreuses (trop?) dans un espace assez resserré(3 tomes) et une temporalité assez longue (20 ans). L'avantage de cette construction est de proposer une narration très dynamique mais son inconvénient est de souvent survoler certain thèmes voire d'introduire une discontinuité qui laisse le lecteur seul face à la situation. J'ai beaucoup aimé le tome 1 centré sur la personnalité très sombre de Jiro. Dans un Tokyo de 1949 l'auteur, dans un registre de contre espionnage, charge la présence américaine en multipliant les scènes d'interrogatoire quasi gestapistes d'une armée d'occupation voulant anéantir la classe ouvrière cheminote japonaise. j'ai tiqué plusieurs fois à cette construction. En effet je ne crois avoir jamais lu l'équivalent sur la présence américaine en RFA. Cela m'a d'autant plus gêné que cela est introduit après un vide sur l'histoire antérieure de l'armée impériale en Corée ( armée d'occupation pas trop sympa) et ailleurs dans le Pacifique. La réforme agraire est expédiée en quelques cases. Cela donne un aspect documentaire historique pas déplaisant mais un peu juste pour y puiser une réelle connaissance approfondie de l'histoire socio-économique du Japon d'après guerre. Rien sur la reconstruction du pays, rien sur sa réorganisation politique, Tezuka se contente de mettre en scène des officiers sup américains de façon caricaturale et grotesque. Cette thématique se conclut sur une histoire assez rocambolesque de chemise ensanglantée qu'il aurait été si facile de faire disparaître. D'ailleurs il a été plus facile à Jiro de disparaître des griffes de la police , des services secrets américains voire des yeux des lecteurs en faisant de courtes réapparitions inexpliquées. La piste policière un peu entretenue en fin de T1 disparaissant totalement en T2 pendant 20 ans. Il reste donc la saga sur laquelle est centrée l'insupportable séquestration d'Ayako qui représente une véritable charge contre une société traditionnelle patriarcale de type médiévale. Tezuka s'enfonce à l'envie dans le glauque et le nauséeux, multipliant les viols, les incestes, les coups, les injustices pour chaque membre masculin de la famille Tengé. Si la fin du T1 porte son effet dramatique dans un ignominieux conseil de famille, les surcouches introduites par la suite virent à la lourdeur et au voyeurisme. Il a fallu le saut temporel de 1971 en fin de t2 pour que je ne lâche pas l'affaire en mi T2. Le graphisme est très surprenant. Je le vois comme le produit d'une équipe assez inégale tellement il y a des différences d'une case à l'autre. On passe d'extérieurs paysagés très ciselés et travaillés avec une grande précision à des décors urbains rectilignes corrects mais sans âme. Que dire des visages et des silhouettes? Des caricatures déformées au long cous de girafes, des visages mangas lisses et occidentalisés, des proportions aléatoires, des visages de soldats afro-américains aux stéréotypes douteux (T2 p70), des femmes typées poupées potiches ou des scènes traditionnelles de deuil ou de fêtes admirablement travaillées. Je n'ai toujours pas compris la volonté visuelle de l'auteur, C'est dire si une fois le choc émotionnel du T1 passé même le calvaire d'Ayako dans une pauvre idée du mythe de la caverne m'a de plus en plus laissé froid. Une lecture pas déplaisante mais sans plus. 2.5
Clapas
J'avoue avoir été assez déçu de la lecture, surtout au vu des nombreux avis élogieux. Il faut dire que c'est une histoire dans laquelle certains détails sont assez gros et m'ont fait sortir du récit, malgré un rythme excellent. Et déjà j'en ai dit assez, puisque cette BD est un thriller qui prend place dans les montagnes du Vercors, où un bus se retrouve coincé par un éboulement. La suite n'est pas importante à connaitre, puisque le récit est à découvrir à chaque page. Et je suis assez triste d'avoir peu aimé puisque je le trouve très équilibré dans sa tension. C'est constant, sans relâchement, le tout porté par des personnages simples mais efficaces dans les archétypes. D'autre part le dessin est vraiment excellent, avec les décors vides d'humains et cette présence d'une nature qui cache le danger. Le dessin contribue jusqu'à la dernière page, accentuant les visages et les émotions, faisant comprendre sans avoir besoin d'exprimer. Maintenant, comme souligné au début, j'ai trouvé plusieurs passages quelque peu invraisemblables. Si chaque personnage a sa propre motivation, il y a pour autant des moments qui m'ont sorti du récit. Trop invraisemblable, trop spectaculaire aussi parfois (je préfère ne pas développer pour éviter de dévoiler). Et de fait, je me suis dit plusieurs fois devant le récit que c'était gros mais que "Allez, ça passe". Sauf que je me suis rendu compte lorsque j'ai refermé la BD que je n'avais pas envie de la relire et que son récit ne restait pas spécialement en mémoire. De fait, je ne suis pas plus emballé que ça et j'oublierai sans doute l'histoire d'ici quelques mois. Dommage !
Somna
Voilà un album primé cette année aux Eisner Awards (catégorie "Best new serie", étrange pour un oneshot...) qui me donnait bien envie. "Somna" nous propose une petit détour par l'Amérique puritaine du 17e siècle où la chasse aux sorcières était un sport national. Pas de chance pour Ingrid, la femme du bailli (l'inquisiteur local pourrait-on dire), car le peu d’égard de son mari à son encontre couplé à ses absences, la plonge dans des rêveries sulfureuses. En effet, Morphée a la fâcheuse tendance a venir accompagné... Une sorte de démon/entité tentatrice lui apparait l'enjoignant à laisser cours à ses désirs et plaisirs personnels. Ajoutez à cela un meurtre au sein de leur petite communauté de villageois et vous avez là une parfaite petite marmite prête à entrer en ébullition... C'est plutôt bien mené, avec cette particularité que nos deux autrices sont aussi bien partie prenante au scénario qu'au dessin. Chacune conserve son style graphique propre, alternant avec justesse entre les délires oniriques et sulfureux d'Ingrid et son quotidien. C'est aussi surprenant qu'efficace, et moi qui ne suis pas spécialement fan de ce genre de procédé, j'avoue que ça fonctionne ici très bien. Pour autant, malgré cette double intrigue, point de surprise au final, même si l'histoire est cohérente et met en lumière cette tragique période pour les femmes qui ne rentraient pas dans le moule. (3.5/5)
Sortie de Route (Tronchet)
Régis, j’ai passé une super journée avec toi ! - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de tout autre. Son édition originale date de 2017. Il a été réalisé par Didier Tronchet pour le scénario, les dessins et la mise en couleurs. Il comprend quatre-vingts pages de bande dessinée. Quelque part en Ardèche, les époux Lemaire sont montés en voiture, en partance pour leurs vacances. Régis Lemaire conduit et il est en train de répondre au téléphone à un client. Il explique à son prospect que leurs tarifs incluent toutes les taxes. Il continue tout en conduisant : Ce qui n’exclut pas une remise clientèle en cas de commande groupée de matériel forestier ou travaux publics. Il précise qu’il sera à l’heure pour la démonstration, il est en route, il sera là dans dix minutes sur le chantier à la sortie de Mont-Regard. Pendant ce temps-là, son épouseValérie regarde par la fenêtre mi lassée, mi résignée. Son mari raccroche et lui assure qu’après, ils seront en vacances ! Il continue : il va quitter sa cravate et sa veste de croque-mort. Et hop, il enfilera sa chemise de vacances, avec les palmiers, car les palmiers ça fait vacances, c’est la femme de ménage qui la lui a rapportée de Gambie. Et ensuite, il la rassure : tout est bien organisé, elle le connaît. Il a les réservations de tous les hôtels pour chaque nuit, avec les adresses et les téléphones, il a tout mis dans la pochette jaune. Il doit y avoir aussi tous les papiers d’identité, assurances et permis de conduire. Il lui demande si elle a bien pris la pochette jaune. Elle réfléchit et lui répond que non. Il s’en trouve tout dépité : il a passé des heures à tout préparer, elle ne respecte pas son travail. Elle le reprend : son travail, mais elle croyait qu’ils étaient en vacances. Valérie change de conversation et demande à s’arrêter car elle a soif. Il répond que non : ils roulent, ils roulent. Toutefois il a prévu quelques rafraîchissements dans la glacière, où est-elle d’ailleurs la glacière ? Son épouse répond qu’elle doit être avec la pochette jaune. Qu’importe, on ne le prend pas au dépourvu : il a un plan B. Là, dans la boîte à gants : il y a une bouteille avec une paille. Il lui indique que c’est de la grenadine. Elle lui répond qu’elle sait ce que c’est que de la grenadine, il ne faut pas la prendre pour une idiote. Il se reprend : d’accord, mais elle n’en a pas bu depuis combien de temps ? Depuis l’enfance, non ? Pour lui, la grenadine, c’est comme la madeleine de Proust, un parfum d’hier. Il a l’impression que quand on boit de la grenadine, on retourne immédiatement à l’enfance. Il s’interrompt brusquement et regarde à côté de lui sur le siège passager. Il fait un écart de route vers la gauche, redresse trop brutalement vers la droite, et va légèrement heurter le talus sur le côté. Il s’arrête. Il descend de voiture, et il fait quelques pas devant. Il revient et va ouvrir la portière côté passager. Il demande à la passagère qui elle est. Une jeune demoiselle, d’une dizaine d’années, lui répond que c’est elle, Valérie. Régis Lemaire éprouve toutes les peines du monde à comprendre. L’auteur a commencé sa carrière dans le début des années 1980, époque à laquelle il a lancé des séries comme Raymond Calbuth, Les damnés de la terre, puis Jean-Claude Tergal. Le lecteur appréciant son œuvre s’intéresse tout naturellement à un nouvel album, la couverture intrigante (un homme sous l’influence d’une femme), avec des caractéristiques graphiques, comme une mise en couleurs expressionnistes, une utilisation narquoise d’un plan en contreplongée pour accentuer la dramatisation, et une façon très particulière de représenter les visages pour l’homme. Pas de doute, c’est du Tronchet. Malgré l’exagération et la simplification des formes propre à ce bédéiste, le lecteur constate rapidement qu’il plonge dans une narration à la veine réaliste, racontant une histoire, un événement après l’autre, dans un enchaînement basique et très C’est comme ça. L’histoire repose uniquement sur deux personnages principaux, les époux Lemaire, avec très peu de seconds rôles, le patron monsieur Bolivar et l’ami Alain qui n’apparaît jamais dans une case, qui brille surtout par le fait qu’il ne réponde pas au téléphone. La mise en couleurs se situe dans un registre plutôt agréable et coloré : des jaunes clairs pour la belle luminosité du soleil, associés avec les verts de la végétation, et le bleu de l’ombre. Deux passages dérogent à cette palette : du rose pour des courses dans un supermarché, et une teinte ocre pour la visite chez le docteur Patrick Perrin. Enfin, l’auteur situe clairement son récit : dans la région de Saint-Agrève, une commune française de l’Ardèche, d’une population d’environ deux mille trois cents habitants. Le lecteur accepte bien volontiers de faire le voyage avec Valérie et Régis : deux époux pas désagréables, ayant bien réussi leur vie. Lui est chef de vente dans les machines-outils, avec une proposition de promotion par son patron, littéralement en cours de route, pour prendre la tête du service prospection ; elle est responsable de communication dans un grand groupe pharmaceutique. Ils n’ont pas d’enfant et donc pas les responsabilités qui accompagnent cet état : ils peuvent jouir de la vie comme bon leur semble. Elle donne l’impression d’être une belle femme, simple avec son teeshirt à rayures bleues horizontales, une belle chevelure noire, un visage fin et doux, malgré son air discrètement résigné, regrettant on ne sait quoi. La silhouette de monsieur est plus solidement charpentée, un beau gaillard. Son visage présente des particularités graphiques fortes : un nez épaté, une bouche qui va d’un côté du visage à l’autre, avec des dents apparentes entre les lèvres, des yeux très écartés du nez, un menton aussi large que le front, une coiffure improbable avec une mèche d’un volume tout aussi peu probable. Le lecteur retrouve également la propension de l’artiste à donner des gros doigts boudinés à ses personnages, voire des bouts de doigt carrés. Des yeux qui ne tiennent pas tout à fait dans l’ovale du visage, des tout petits pieds, des nez trop allongés pour les hommes (le père de Valérie, le docteur Patrick Perrin, les deux policiers). Et pourtant ces libertés prises avec l’anatomie s’amalgament pour former un tout harmonieux, ou en tout cas cohérent et expressif. L’artiste aborde les décors et les accessoires avec la même approche personnelle : hétéroclite si le lecteur s’essaye à considérer chaque élément d’une case un par un, très cohérente s’il absorbe l’ensemble de chaque case. Dans le dessin en pleine page d’ouverture, la voiture semble représentée de manière naïve, les maisons pas tout à fait assez détaillées, les arbres tracées à gros traits ; pour autant le lecteur ressent bien cette atmosphère particulière de route de campagne, la douce chaleur, une zone boisée. Dans les pages suivantes, la voiture ressemble encore plus à une petite voiture jouet pour enfant d’un modèle un peu grossier. Il n’y a pas de marquage au sol sur la chaussée. Pour autant, le lecteur éprouve bien l’impression d’être sur la route avec les clôtures de fil de fer barbelé et leurs piquets, les grandes étendues d’herbe, les arbres en bordure de route ou dans le lointain, le paysage vallonné, etc., puis les vaches. Il ne pense même pas à s’étonner de l’absence de fossé sur les bas-côtés. Lors des passages en zone urbaine, il identifie aussi bien les fermes en campagne, que les maisons en ville. Les rayonnages du supermarché présentent des formes grossières, et en même temps il se dit qu’il pourrait pousser son caddie dans ces allées pour choisir ses produits. Il en va de même pour la pharmacie. Le chapiteau de la fête américaine apparaît tout aussi plausible, avec les dizaines de voitures stationnées sur les pelouses. Le bord du lac comprend aussi bien des piqueniqueurs que des plagistes, ou encore des canoës à louer et des pédalos. L’artiste fait tout aussi fort quand Valérie et Régis s’arrêtent au bord de la route pour piqueniquer, avec des arbres représentés à l’aquarelle en fond, uniquement la forme globale l’arbre et des coups de pinceau en vert plus foncé pour le tronc et les branches principales. Le lecteur suit donc ce couple dans une succession de scènes s’enchaînant de manière quasi enfantine, une situation chassant la précédente, au cours d’une unique journée. Valérie se désaltère avec la grenadine, ce qui provoque un événement fantastique, et toute la journée bien programmée de Régis déraille. Le voilà obligé de gérer une enfant, ce dont il n’a aucune expérience. Il ne sait comment faire face à ses envies, à ses facéties, à ses caprices. Ses obligations professionnelles s’en trouvent malmenées et impossibles à honorer. Les autres adultes le soupçonnent du pire en constatant qu’il ne sait pas s’occuper de cette enfant, qui ne doit donc pas être la sienne. Il ne parvient pas à établir une communication constructive avec elle, totalement à la merci de ses sautes d’humeur et de ses revirements. Par la force des choses, il ne peut que céder et essayer de la contenter de son mieux, en renonçant au déroulement de ce qu’il avait prévu avec des préparatifs rigoureux. Le lecteur peut prendre le récit au premier degré, comme un adulte se confrontant à l’entrain et à la fougue d’un enfant, ce qui l’oblige à se remettre en question, à renoncer à la voie toute tracée qu’il a lui-même bâtie. Il peut aussi envisager cette histoire comme un conte : voilà que Régis Lemaire est devenu un parent d’un instant à l’autre, et qu’il doit faire l’apprentissage express de la responsabilité d’une fillette, et dans le même temps renoncer à une vie planifiée, une route tracée d’avance, pour s’adapter à l’imprévu et l’apprécier. D’un côté, la magie de la narration visuelle fonctionne à plein, les différentes idiosyncrasies et libertés avec une représentation académique formant un tout harmonieux, et générant des ressentis authentiques chez le lecteur. En outre, le déroulement linéaire du récit permet d’obtenir de plein gré, le surplus de suspension d’incrédulité consentie du lecteur. D’un autre côté, la linéarité et la tonalité prosaïque et premier degré peuvent déstabiliser le lecteur s’apparentant à de la fadeur ou du simplisme. L’intention apparaît progressivement, peut-être un peu trop simple, avec un potentiel de développement pas entièrement réalisé.
Un Eté en apnée (Simon & Louise)
Comme j'avais la version "Simon et Louise" qui regroupe les deux histoires mises en miroir, je me suis résolu à lire les "trépidantes" aventures de la JF. Je dois reconnaître que c'est une bonne idée d'avoir regroupé les deux récits. Cela donne une perspective bien plus piquante au récit. Ensuite j'ai bien plus accroché au récit de Louise en terme de crédibilité et de richesse du personnage. Simon était un personnage infantile qui agit sous le coup de l'émotion en se mettant en danger sans qu'aucun adulte ne lui explique la réalité de la situation. Louise est bien plus mûre dans son comportement. Légitimement influencée par sa cousine et l'ambiance festive, elle sait faire valoir son authenticité loin d'un schéma sexuel imposé par d'autres. Si Simon reste dans un schéma infantile fantasmé de héros de littérature , Louise est dans un schéma bien plus adulte. Elle sait refaire ses propres choix et garder sa cohérence psychologique alors que Simon est toujours un enfant qui est balloté au gré des rencontres plus ou moins bienveillantes. C'est dommage de séparer les deux lectures qui prennent du volume dans leur complémentarité. Je dirais qu'ici 1+1 n'est pas égal à deux mais à plus par un effet de synergie. Au global j'ai été déçu par le passage Simon seul mais je trouve l'ensemble de la série un bon pas mal même si le graphisme n'est pas mon truc.
Calamity Jane (Bardiaux-Vaïente)
Nouvelle version de l’histoire de Calamity Jane, celle-ci se démarque par l’emploi de passages semblant directement issus de feuilletons illustrés de l’époque. Cet emploi est une très bonne idée à mes yeux puisqu’il permet à Calamity Jane d’évoquer sa propre légende. Nous, lecteurs, naviguons ainsi entre la réalité historique et les actes héroïques tels que Martha Jane Cannary les avaient elle-même racontés (ou aurait pu les raconter). Pour le reste, il n’y a pas grand-chose à en dire. Tout est propre, bien écrit, bien dessiné dans le style réaliste classique très grand public cher à l’éditeur, et peut s’appuyer sur une solide documentation. Calamity Jane y est décrite avec ses faiblesses, ses forces, mais surtout avec beaucoup d’humanité. Le personnage est attachant car les auteures parviennent à montrer la vulnérabilité et les doutes qu’elle camouflait derrière sa grande gueule. Une lecture pas déplaisante du tout. Un peu courte pour une biographie vraiment exhaustive et immersive mais l’astuce scénaristique décrite ci-dessus permet aux auteures de sauter d’un fait à un autre sans que le récit ne deviennent trop syncopé pour la cause. Pas mal, quoi.
El Diablo
El Diablo m’a fait l’effet d’un moteur de R5 dans une Bentley. Il était chouette, le moteur de la R5, plutôt vif, sympa, dynamique. Elles sont magnifiques, les Bentley, raffinées jusque dans les moindres détails, confortables. Mais les deux ensemble, ça risque de marcher moyen moyen… Et bien, c’est exactement mon ressenti à la lecture. Le dessin est splendide, chaque case est un tableau et on est littéralement plongés dans un superbe recueil d’illustrations. La représentation du marsupilami est aussi étonnante que réussie. Les décors de jungle, les navires, les pyramides inca, tout accroche l’œil. Le scénario est assez basique mais fourmille de rebondissements, n’est pas dénué de références tant historiques que directement liées à l’univers du marsupilami et convient parfaitement à un jeune public. L’histoire se lit d’ailleurs très vite si on ne s’attarde pas sur le dessin car les dialogues sont peu nombreux et la mise en page est très aérée. Le scénario, par sa naïveté, se destine plutôt aux enfants. Un adulte, lui, s'étonnera par exemple qu'un jeune mousse, naturellement habitué à monter aux mâts de sa frégate, panique quelque peu à l'idée de grimper à un arbre qui semble ne pas dépasser les 4 mètres de haut. Exemple parmi d'autres de la naïveté du scénario concocté par Trondheim, une naïveté qui ravira le jeune lecteur qui pourra plus facilement s'identifier au jeune héros et rire de quelques facéties faciles (comme ces membres d'équipages maltraités par le marsupilami). Associés, ces deux éléments mettent bien plus en avant les lacunes de l’un et de l’autre que leurs qualités. Le dessin devient statique, le scénario devient enfantin. C’est gentil, c’est pas mal… mais c’est quand même décevant devant le potentiel des auteurs (même si je demeure peu sensible à Trondheim). Pour moi, c’est juste un petit pas mal, sans plus.
Monkey Meat
Un véritable OVNI qui m'a moyennement convaincu. Au dessin, j'ai trouvé que le travail était absolument superbe et que la mise en scène était dynamique et bien maitrisé. Visuellement, c'est du plaisir pour les yeux ! Malheureusement, le scénario m'a semblé moyen. C'est assez décousu alors au début j'étais un peu perdu. De plus, les différents récits ne m'ont pas particulièrement marqué et les personnages ne m'ont pas intéressé. Donc voilà le dessin est excellent, mais c'est pratiquement le seul élément que j'ai vraiment aimé. Cela reste tout de même une lecture pour les amateurs de bandes dessinées qui sortent de l'ordinaire, mais je recommande plus un emprunt.