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Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Batman - Année Un (Year One)
Batman - Année Un (Year One)

Tout en nuances - Fin des années 80, juste après Crisis on Infinite Earths , DC Comics décide de relancer les séries de ses principaux héros. John Byrne redémarre Superman avec la minisérie The Man of Steel et George Pérez redémarre Wonder Woman avec Wonder Woman: Gods and Mortals . Le cas de Batman est un peu à part car les éditeurs sont persuadés qu'il n'y a pas besoin de recommencer à zéro, juste de disposer d'un récit plus récent des origines du personnages. La tâche est confiée à Frank Miller qui vient d'achever The Dark Knight Returns. Celui-ci accepte sous réserve que les illustrations soient confiées à David Mazzucchelli (ils ont également fait ensemble l'excellent Born again, de Daredevil). L'histoire tout le monde la connaît : Bruce Wayne revient de ses années de formation à l'étranger pour combattre le crime dans Gotham City. Ce qui rend cette version de ses origines remarquable et indispensable c'est la combinaison de deux talents exceptionnels au sommet de leur art. Frank Miller à l'idée géniale de mettre en vis à vis les tribulations d'un Batman tâtonnant avec l'arrivée de James Gordon dans la police de Gotham. Cette histoire suit les deux hommes pendant la première année de leur retour à Gotham. Bruce Wayne expérimente pour trouver le modus operandi le plus efficace pour lutter contre la criminalité (costume, relations avec la police, tactiques…) et James Gordon se heurte de plein fouet à la corruption et à la responsabilité de devenir père dans une ville peu hospitalière. Frank Miller déroule l'histoire à partir du point de vue de ses deux principaux personnages. Les informations complémentaires sont délivrées par le biais de flashs d'informations télé (astuce déjà utilisée dans Dark Knight, mais ici beaucoup mieux maîtrisée). C'est histoire constitue la preuve du talent de Miller : elle est parue en 1986 dans quatre épisodes (Batman 404 à 407) et elle contient toutes les bases du mythe tel qu'il est toujours valable aujourd'hui dans la continuité. Avec ce seul volume, vous pourrez enfin connaître les relations entre Selina Kyle et Holly Hunter, Catwoman et Batman, Sarah Essen et James Gordon, Harvey Dent et Bruce Wayne. Du début jusqu'à la fin, Frank Miller déroule un scénario très ramassé sur un mode narratif sans aucun temps mort et avec une empathie complète avec ses personnages. Le choix de David Mazzucchelli est d'une pertinence exceptionnelle. Par opposition au Dark Knight qui est un récit flamboyant et jusqu'au-boutiste, Year One est très terre à terre et factuel. Il s'agit presque d'articles de presse relatant des faits divers. Le style détaillé et réaliste de Mazzucchelli est en parfaite adéquation avec le ton du récit. Chaque personnage est reconnaissable et crédible, chaque décor est pensé à la manière d'un décorateur ou d'un urbaniste. Le choix d'un style appliqué et tout en retenu plutôt que démonstratif sert admirablement l'histoire. Le regard est frappé par la vraisemblance des intérieurs (les meubles ne sont pas disposés au petit bonheur, mais comme dans un intérieur ordinaire). Le travail du dessinateur est admirablement complété par la mise en couleurs de Richmond Lewis. Les couleurs ont été refaites à l'occasion de la première édition en tradepaperback. Richmond Lewis utilise une palette volontairement limitée à quelques couleurs neutres qu'elle décline en de subtiles nuances. L'objectif est le même que celui du style des illustrations : privilégier cette sensation très ordinaire, et fuir le grand spectacle. Elle ne s'autorise qu'à de rares reprises à montrer l'étendue de son talent : un tapis par ci et une superbe paire de draps par là (dernière image du troisième épisode). Tous ces atouts font de Year One un récit subtil et nuancé à l'opposé d'un film à gros budget et grand spectacle. L'humanité de chaque personnage et ses motivations s'en trouvent magnifiées. Chaque relecture (j'en ai une dizaine au compteur) transporte à nouveau et à chaque fois dans les difficultés et les choix cornélien de ces héros (Wayne et Gordon) très humains. La version Deluxe car elle contient quelques pages du script de Miller, les crayonnés de quelques pages et les différentes mises en couleurs de quelques pages (version comics mensuelle, pages avec uniquement les couleurs et résultat final).

05/10/2024 (modifier)
Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Sourire 58
Sourire 58

Quoi de plus naïf qu'une hôtesse ? - Ce tome est le premier de la série consacrée à Kathleen Van Overstraeten, en termes d’ordre de parution, mais le deuxième, à ce jour, par ordre chronologique de sa vie, après Bruxelles 43 (2020). Il a été réalisé par Patrick Weber pour le scénario, Baudouin Deville pour les dessins, l'encrage et la mise en couleurs, Bérengère Marquebreucq pour la mise en lumière uniquement de la couverture, c’est-à-dire la même équipe que celle des quatre autres albums de la série : Bruxelles 43 (paru en 2020), Léopoldville 60 (paru en 2019), Berlin 61 (paru en 2023), Innovation 67 (paru en 2021). Ce tome comporte cinquante-deux pages de bande dessinée. Il se termine avec un dossier de huit pages, agrémenté de photographies, intitulé Souvenirs d’Expo, découpé en plusieurs articles : Derrière l’Expo d’autres expos, Un monde meilleur grâce à l’Expo ?, L’Expo invente le pays du sourire, L’Atomium star de l’Expo, Les pavillons les plus courus de l’Expo, L’Expo consacre le style Atome, À l’Expo cette drôle de Belgique joyeuse, Après l’Expo une autre Belgique ?, et une interview d’une page de Jacqueline Mens de Fernig, la fille du baron Georges Moens de Fernig (1899-1978). Viennent enfin deux pages sur lesquelles sont listées les centaines de personnes ayant contribué à la campagne de financement participatif. Bruxelles, 1957, chantier de l’Atomium. Deux ouvriers discutent en se rendant dans la cabane de chantier pour prendre leurs affaires. Pol de Mesmaeker récrimine contre le rythme qui leur est imposé, sans compter que ce bazar à boules ne tiendra jamais debout. Son collègue verra bien qu’ils finiront par avoir des accidents sur ce chantier de fous. L’autre le chambre en lui rétorquant qu’il se demande si son collègue ne serait pas en train de virer rouge. Si ça ne lui plaît pas, il n’a qu’à postuler au pavillon de l’U.R.S.S. Ayant revêtu leur bleu de travail, ils ressortent, mais le téléphone sonne. Mesmaeker retourne dans la cabane de chantier. Il est poignardé et l’assassin s’empare de son laisser-passer. Quatre mois plus tard, des dizaines de jeunes femmes se présentent pour s’inscrire et passer les tests d’hôtesse. Parmi elles, se trouvent Kathleen Overstraeten et son amie Monique. Tout le groupe est reçu par madame Jacqueline Devriendt, responsable du recrutement des hôtesses. Elle prend à parti une d’entre elles et lui demande si elle veut devenir une hôtesse de l’exposition universelle. La réponse étant positive, elle lui demande ensuite si elle connaît la définition du mot Sourire. Et elle hausse le ton pour lui demander de la mettre en pratique. Elle désigne ensuite Kathleen pour la prendre comme exemple : elle est le parfait exemple de ce qui est attendu, un sourire offert au monde, le sourire 58 ! Elle emmène ensuite les postulantes retenues pour aller voir l’Atomium en construction. Puis pendant quatre mois, les futures hôtesses sont astreintes à une formation accélérée. Elles assistent à des conférences données par des journalistes, des professeurs d’université et des architectes de jardins. La culture générale passe aussi par des visites d’usines et de musées. Premier tome de la série, le lecteur en découvre les caractéristiques : reconstitution historique, belgitude, intrigue d’aventure (ici espionnage), féminisme sous-jacent. Les auteurs ont choisi un événement historique dans l’histoire de la Belgique : une exposition universelle qui a fait date, à la fois pour son monument passé à la postérité, l’Atomium à Laecken sur le plateau du Heysel, à la fois pour le style Atome reconnu par les historiens de l’art et du stylisme. Il est immédiatement évident que les auteurs ont procédé à de solides recherches pour bâtir leur projet. La lecture du récit s’avère fluide, tout en intégrant de nombreuses références historiques. Les caractéristiques de l’Expo : la présence de André Waterkeyn (1917-2005) ingénieur et concepteur de l’Atomium, Lucien de Roeck (1915-2002) graphiste et créateur du logotype de l’exposition universelle de 1958. L’héroïne croise d’autres personnages historiques comme Daniel Gélin (1921-2002), Romy Schneider (1938-1982), Lilli Palmer (1914-1986), Sidney Bechet (1897-1959) et son orchestre, et même Herbert Hoover (1874-1964) le trente-et-unième président des États-Unis. Le lecteur se rend compte que le scénariste dispose même de trop d’éléments et qu’il ne peut pas tout développer, en particulier quand Monique évoque le fait que le pavillon du Congo est un lieu sensible, certains voulant faire fermer le village des indigènes (authentique). Dès la première page, le lecteur peut mesurer la qualité de la minutie de la reconstitution historique sur le plan visuel avec cette représentation de l’Atomium en cours de construction et les véhicules d’époque. Tout au long de ces cinquante-deux pages, l’artiste s’investit sans compter pour représenter cette époque, ces lieux, cet événement. Le lecteur ouvre grand les yeux pour ne pas en perdre une miette : les dernières traces de chantier, l’Atomium presque achevé (plus qu’une seule sphère de ce cristal de fer à finir de construire), les étoiles de De Roeck décorant les allées sur des mâts, le pavillon des États-Unis, le pavillon du Vatican, celui de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques (U.R.S.S.), un plan de masse de l’exposition, le pavillon du Congo, le téléphérique de l’exposition, la grande allée, les mâts de signalétiques, etc. L’artiste se montre tout aussi précis et exact dans les représentations de Bruxelles à cette époque : une très belle brasserie, la grand-place de Bruxelles, sans oublier une magnifique vue du pavillon d’accueil de l’exposition, avec une vue générale de la place de Brouckère et la fontaine Anspach, les tramways, l’hôtel Continental avec son enseigne pour une célèbre marque de soda, l’hôtel Metropol, etc. Le lecteur ne perd pas non plus une seule représentation de voiture, et même du tricycle motorisé pour parcourir les allées de l’exposition, ou encore un side-car dans la scène de poursuite finale. L’attention prêtée au détail ne présente aucun défaut, jusqu’à l’emballage des barres chocolatées Dessert 58 de Côte d’Or. Les auteurs se sont également, à l’évidence concerté, pour parsemer des éléments culturels belges comme la visite d’Annie Cordy (1928-2020), les fraises de Wépion ou encore un cornet de frites ou deux. Les caractéristiques des dessins relèvent de la ligne claire, dans une veine réaliste et descriptive, très agréable à la lecture. Le lecteur éprouve la sensation d’évoluer aux côtés des personnages, pouvant porter son intérêt sur les lieux, sur les tenues vestimentaires, sur leur comportement, leurs gestes. Le dessinateur conserve son haut degré d’investissement pour toutes les pages, toutes les cases, les arrière-plans comprenant de nombreuses informations visuelles. Les discussions bénéficient de plans de prise de vue dynamique, montrant l’environnement dans lesquelles elles se déroulent, les actions des interlocuteurs, les individus qui passent à proximité. L’avant-dernière séquence correspond à une course-poursuite avec prise d’otage, le lecteur ressentant le mouvement des déplacements, ainsi que la tension du fugitif et de son otage. En effet, cette bande dessinée raconte bien une histoire, une aventure de type Espionnage, en relation organique avec le contexte historique de l’époque et la tenue de l’exposition universelle en pleine Guerre froide, à quelques semaines de la crise de Berlin avec l’ultimatum de Nikita Khrouchtchev sommant les occidentaux de trouver une solution au statut de cette ville. La pauvre Kathleen Overstraeten se retrouve donc prise dans les intrigues de plusieurs individus aux enjeux secrets : Jean-Marc Spruyt (belge, ressemblant à Cary Grant), Ronald Amber (responsable du protocole du pavillon des États-Unis), Fra Matteo (journaliste de l’Ossvervatore Romano, le journal du Vatican) et Nicolas Soukine (officiel du pavillon soviétique). Bien vite, Kathleen Ovesrtraeten est dépassée par les événements : le vol de sa sacoche pendant une visite guidée, les avances insistantes de Spruyt, le vol de l’œuvre d’art Le Christ décalé de l’artiste Svoboda dans le pavillon du Vatican, un globe terrestre qui se décroche et tombe avec fracas dans le pavillon de l’U.R.S.S., et la police qui s’intéresse de près à cette jeune femme qui était présente sur les lieux à chaque incident. Le lecteur se sent tout aussi perdu que l’héroïne et l’admire pour sa capacité à encaisser et à essayer de prendre des initiatives, bien que son emploi d’hôtesse soit en jeu. De ce point de vue, elle incarne à la fois une obligation de conformisme pour être belle et sourire afin de se montrer compétente dans son emploi, à la fois une forme d’émancipation car elle rit au nez de sa mère qui se demande si sa fille sera bonne à marier et elle ne se cantonne pas au rôle de victime que les événements semblent vouloir lui imposer. Par l’exemple, elle incarne une émancipation sous-jacente, une femme indépendante, un signe avant-coureur du féminisme. Le dossier en fin d’ouvrage s’avère fort intéressant, venant développer certains points, comme le fait que l’Expo inventa même un nouveau métier, celui d’hôtesse au sol. Le lecteur ressort enchanté de cette bande dessinée : une immersion touristique et historique dans l’exposition universelle de Bruxelles en 1958, une aventure d’espionnage bien ficelée, un personnage principal attachant et crédible, avec une réelle personnalité déstabilisant les espions mâles ne voyant en elle qu’une belle plante. Formidable.

05/10/2024 (modifier)
Par Emka
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série L'Homme gribouillé
L'Homme gribouillé

Wow, quel dessin, j'adore ! Dès le début, on est plongé dans un Paris sous la pluie, un décor oppressant, magnifiquement rendu par le noir et blanc de Peeters. Il maîtrise à merveille l'art du clair-obscur, avec ses ambiances lourdes. Les décors sont vivants, qu'il s'agisse d'un Paris sous une pluie constante ou de paysages plus naturels, presque fantastiques. Il y a aussi une certaine économie dans les détails, mais chaque trait compte. L'ensemble est mis en relief par des cadrages recherchés sans en faire trop, qui servent très bien le récit. Là franchement, bravo Mr Peeters. Le scénario de Lehman n'est pas en reste, il monte en puissance, avec cette lente progression vers le mystique. Au départ, on suit des histoires de famille, des non-dits qui pèsent sur trois générations de femmes. Puis, petit à petit, le fantastique s’invite, sans forcer, tout ça s’intègre naturellement dans l’histoire. J'ai beaucoup aimé cette frontière floue entre le réel et l’imaginaire, qui n’est jamais clairement tranchée. Si je devais lui trouver un défaut, je dirais que la fin va un peu vite, mais une fin plus longue aurait elle apporté le même équilibre global ? Un one shot qui fait fort, très fort, autant par son récit que par son ambiance visuelle.

05/10/2024 (modifier)
Par Linette
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Rosa
Rosa

Coup de coeur pour moi. J'ai tellement été touché par rosa. Une sacrée femme ! A cette époque où la femme reste bien inférieure à l'homme, elle a su faire entendre sa voix, elle a pu découvrir son pouvoir face à des hommes qui pensent que la virilité ne tient qu'à la brutalité et la force. Elle est devenue maîtresse de chacun d'eux, découvrant leur fragilité et leurs âmes d'enfants. Mais ce qui est le plus beau dans cette histoire, c'est qu'elle a pu se découvrir elle-même et goûter la Liberté la vraie, celle dont peu de femmes de cette époque pouvaient soupçonner l'existence...

05/10/2024 (modifier)
Par Emka
Note: 5/5
Couverture de la série Julius Corentin Acquefacques
Julius Corentin Acquefacques

Un monument de la BD, une spirale de réflexions sur la réalité et la fiction. Dans chaque album, Marc-Antoine Mathieu joue avec les codes de la bande dessinée, prenant un malin plaisir à déconstruire le médium, tout en piégeant son lecteur dans une série d’énigmes visuelles et narratives. Peut-on encore parler d’auteur de BD pour Marc Antoine Mathieu ? Il joue tellement avec le medium que je le qualifierais de plasticien. Le personnage de Julius, fonctionnaire d’un ministère du rêve, est perpétuellement coincé dans des situations surréalistes et kafkaïennes. L’univers de la série est sombre, oppressant, avec une atmosphère qui rappelle les méandres d’un cauchemar éveillé. Ce qui frappe, c’est la précision du trait en noir et blanc, tout en contrastes et en volumes. Magnifique. Les jeux sur la mise en page, les effets de mise en abyme et les trompe-l’œil rendent la lecture unique. On se retrouve souvent à observer chaque case pour dénicher les indices cachés. La série regorge d’humour noir, mais aussi de moments philosophiques qui interrogent notre rapport au réel et à l’imaginaire. Certains albums, comme L’Origine, sont particulièrement marquants par leurs idées vertigineuses : une histoire où Julius oublie de fermer un tiroir et en subit des conséquences disproportionnées, ou encore cet ascenseur qui traverse les murs de son appartement à des horaires stricts, accentuant le sentiment d’écrasement par des règles absurdes. Un univers visuel original, audacieux, inventif. Une série exigeante, captivante, qui fait réfléchir sur les limites de la bande dessinée en tant qu’art et médium narratif

04/10/2024 (modifier)
Par Emka
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Donjon Zenith
Donjon Zenith

Zénith, c’est pour moi le pilier de l’univers de Donjon. L’humour absurde s’impose comme la marque de fabrique de cette époque, avec des personnages aussi improbables qu’attachants. Herbert, l’anti-héros parfait, et Marvin, le dragon végétarien, évoluent dans un monde bourré de clins d’œil aux jeux de rôle et à l’heroic fantasy, tout en renversant les clichés habituels du genre. Le style graphique, au départ minimaliste avec Trondheim, a pris un tournant avec l’arrivée de Boulet qui a su apporter un souffle nouveau tout en restant fidèle à l’esprit de la série. L’évolution des personnages, bien qu’inscrite dans un univers volontairement décalé, donne une véritable consistance à leurs aventures. Les tomes successifs, s’ils gardent ce ton léger et parodique, apportent une vraie profondeur à l’intrigue, notamment avec les ramifications entre les différentes époques de l’univers Donjon. En fait, Donjon Zénith n’est pas qu’une simple parodie : sous l’apparence légère, il y a un vrai savoir-faire narratif. Tout simplement un incontournable, que ce soit pour ses personnages inoubliables ou son humour singulier. Ce n’est peut-être pas toujours aussi surprenant qu’à ses débuts, mais l’univers reste solide et attachant, un must pour les amateurs de fantasy et de BD d’aventure.

04/10/2024 (modifier)
Par Emka
Note: 5/5
Couverture de la série Les Formidables Aventures de Lapinot
Les Formidables Aventures de Lapinot

Suis-je encore objectif quand j'avise des BD de Trondheim ? Je ne suis pas fan absolu mais très sensible à son humour et sa vision des choses c'est certain. Trondheim propose un univers où tout paraît simple, voire minimaliste, que ce soit dans le dessin ou dans la narration. Alors oui, Trondheim n'est pas le meilleur dans le dessin et c'est ce qui m'a fait hésiter pour aller jusqu'au 5. Mais sous cette surface simple voire simpliste, on découvre un regard plus acéré sur les interactions humaines. Les tomes contemporains sont ceux qui m'ont le plus accroché, avec un humour fin et des dialogues qui ne tombent jamais dans la facilité. On y parle du quotidien, des relations, des petites galères qui résonnent fort. Ce qui est intéressant, c’est cette alternance entre les histoires ancrées dans la vie actuelle et celles qui emmènent Lapinot et ses amis dans des contextes décalés (western, fantastique). On y retrouve un sens de l’absurde qui fait mouche à chaque page, sans jamais trop forcer. Le ton est assez sobre, les personnages sont rarement héroïques, mais c’est ce qui en fait toute la singularité. Pas besoin de surcharger, l’essentiel passe. Et si certains trouvent cela un peu léger, ça participe à la cohérence de l’ensemble. Chaque tome apporte son lot de réflexions cachées sous l’humour, et c’est ce que je trouve le plus marquant chez Trondheim : il n’y a rien d’écrasant, mais tout résonne subtilement. À découvrir pour ceux qui aiment les histoires simples avec beaucoup de profondeur en arrière-plan. Clairement dans mon top des séries, que je prends plaisir à relire.

04/10/2024 (modifier)
Par Emka
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série La Bombe
La Bombe

Une belle et bonne surprise. On peut se dire qu’un sujet aussi lourd que la création de la première bombe atomique peut vite devenir indigeste, et pourtant, à aucun moment on n’est noyé sous les faits historiques. Les auteurs ont réussi à rendre cette histoire captivante, presque cinématographique, sans tomber dans le documentaire rigide. L’énormité du sujet est traitée avec finesse, sans excès ni emphase. C’est l’histoire de l’Histoire, mais racontée à hauteur d’hommes et de femmes, à travers ceux qui l’ont faite et subie. Le dessin, est simple, précis, très efficace. Il capte bien la tension croissante à mesure que l’on s’approche de l’explosion finale. Ce choix graphique minimaliste fait que rien ne détourne notre attention de l’essentiel : l’humanité derrière la technologie destructrice. On suit le cheminement qui mène à Hiroshima, sans jugement direct, juste un constat implacable de la mécanique qui se met en place. Ce que j’ai apprécié dans La Bombe, c’est la manière dont chaque acteur de cette course nucléaire est humanisé. Oppenheimer, bien sûr, mais aussi les physiciens moins connus, les politiciens, et même les citoyens de Hiroshima. Pas de super-héros ici, juste des individus face à des choix impossibles. La BD évite le manichéisme, ce qui la rend encore plus intéressante. Le rythme est bien maîtrisé, alternant entre explications techniques, scènes de vie, et moments de tension. On n’est jamais submergé par la complexité scientifique, tout est fluide, accessible. Et même si on sait comment ça finit, la lecture reste prenante jusqu’à la dernière page. En bref, La Bombe est une réussite. Un ouvrage dense, mais qui se lit avec une vraie fluidité, où la complexité du sujet n’étouffe jamais la narration.

04/10/2024 (modifier)
Par Emka
Note: 5/5
Couverture de la série C'était la guerre des tranchées
C'était la guerre des tranchées

Un album marquant, qui montre avec sobriété et précision l’horreur de la Première Guerre mondiale. Pas de héros ou de personnages principaux ici, Tardi ne suit pas un individu mais une série de soldats anonymes, chacun perdu dans l’absurdité de la guerre. On plonge dans des fragments de vie, des histoires courtes où la mort est omniprésente, souvent brutale, toujours dénuée de sens. C’est cette simplicité qui rend le récit puissant : pas de discours moralisateur ou de mise en scène dramatique, juste des faits froids et cruels. Le dessin caractéristique de Tardi ne plait pas à tout le monde, moi j'aime beaucoup et le trouve parfaitement adapté à ce type de récit. Chaque case nous transporte dans les tranchées, entre boue, froid et cadavres. Sans chercher à en faire trop, Tardi parvient à créer une atmosphère lourde, où chaque page rappelle la souffrance quotidienne des soldats. Le dessin, avec son trait épais et ses visages marqués, renforce l’idée de vies broyées par la guerre. Ce qui ressort surtout de l’album, c’est l’absurdité de cette guerre. Les soldats, qu’ils soient français ou allemands, sont tous pris dans une machine qui les dépasse, envoyés au front sans comprendre vraiment pourquoi. Les dialogues sont simples, souvent désabusés, et reflètent bien le sentiment d’impuissance qui régnait à l’époque. Le message est clair : cette guerre, comme toutes les guerres, n’a fait que détruire des vies pour des gains dérisoires. Un album qui ne cherche pas à choquer, ne fait pas dans le grandiloquent mais qui cherche juste à montrer la réalité telle qu’elle était. Et c’est cette approche directe, sans embellissement, qui rend l’album si fort. Il n’y a pas de moments de gloire ou de victoires héroïques, seulement la brutalité quotidienne d’une guerre où la mort était banalisée. Une BD qui marque, un grand et bon classique.

04/10/2024 (modifier)
Par Emka
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série Calvin et Hobbes
Calvin et Hobbes

Calvin et Hobbes, c’est le premier cadeau que je me suis fait avec mon premier salaire : l'intégrale d'occasion. J'avais évidemment eu l'occasion de les lire avant mais comme pour beaucoup ici, c'est un peu la madeleine de Proust. Avec cette série, Bill Watterson a réussi à capturer une sorte de magie de l’enfance, tout en y insufflant une bonne dose de philosophie et d’humour. Chaque strip est une petite tranche de vie où l’imaginaire débordant de Calvin nous transporte dans des aventures folles, toujours accompagné de son fidèle tigre Hobbes, qui, selon les moments, est soit une simple peluche, soit un tigre plus vrai que nature. Ce qui est très bon avec Calvin et Hobbes, c’est la justesse des dialogues et des situations. Calvin est un gamin infernal, avec des réflexions d’adulte souvent cyniques, mais toujours drôles et pertinentes. Il questionne le monde, la société, les adultes, avec cette insolence propre aux enfants. Hobbes, de son côté, est un parfait contrepoint, plus sage, plus réfléchi, mais toujours partant pour une bonne bagarre ou une escapade dans la nature. J'adore aussi le dessin de Watterson : simple mais super expressif et qui peut partir en live dans la mise en page quand Calvin part dans ses rêves. Le dessinateur n'est pas beaucoup plus sage que celui qu'il dessine. Ce qui rend cette série aussi intemporelle, c’est l’équilibre parfait entre l’humour absurde, parfois cartoonesque, et des moments beaucoup plus tendres, voire mélancoliques. La relation entre Calvin et Hobbes est au cœur de tout ça. Hobbes représente cette part d’enfance qui ne veut jamais grandir, ce besoin de rêver, de s’évader, même quand le monde des adultes semble peser de plus en plus lourd sur les épaules de Calvin. Bien plus qu’une simple série de gags en strip. C’est un petit bijou qui parle de l’enfance, de l’amitié, et du monde avec une intelligence et une sensibilité rares. Une série qui vieillit très bien. Je ne regretterai jamais ce premier achat !

03/10/2024 (modifier)