C'est un fait qu'en vieillissant, j'apprécie de plus en plus les romans graphiques, peut-être parce que certains d'entre eux me parlent de choses qui me tiennent à coeur.
C'est le cas avec "l'Heure la plus sombre...", dont le titre vient d'une chanson de Bob Dylan. Une chanson qu'écoute régulièrement Jean-Claude sur son lecteur de CD, dans son bahut. Mais aussi le point de départ de toute l'histoire, puisque c'est à ce moment qu'il soustrait Nouria à son salopard d'employeur. La suite est une histoire entre deux êtres qui ne se sont croisés qu'à de rares reprises, et qui vont lier leur destin de façon indéfectible... ou pas. Moynot chronique donc l'ordinaire, la vie des petites gens, mais sans misérabilisme, s'attachant plus aux pensées de ses deux protagonistes, dans un chassé-croisé plutôt pas mal vu. Il les amène à proximité de Bordeaux, où il vit, dans la riante ville de Lormont (non je rigole, c'est une cité-dortoir chiante à mourir, croyez sur parole un local).
Ca m'a plu.
Mais ce qui m'a plu le plus, c'est la fin de l'histoire, une fin à laquelle on ne s'attendait pas forcément, mais qui pourtant devenait inévitable vue la tournure des (non-) évènements.
Attention, c'est du roman graphique pur et dur, et ceux qui voudraient de l'action en seront pour leurs frais. Ceux qui recherchent des histoires simples, ordinaires, mais bien racontées, devraient apprécier.
Comme le dit Etienne Davodeau lui-même, ce n'est pas un documentaire, mais dans une sorte de roman graphique au plus proche de la vérité. Impossible de différencier réellement ces deux facettes de l'auteur angevin, tant le traitement est proche, et le résultat toujours de qualité.
Ici Davodeau nous permet de suivre Lulu, une quadra désoeuvrée qui décide de prendre un "congé" et finalement découvre la vie... 45 000 adultes disparaissent chaque année en France, certains volontairement comme notre Lulu. On peut donc parler de phénomène de société. Et notre sociologue préféré du 9ème art se penche sur le cas pour nous livrer une histoire très sensible, très bien écrite. Il n'y a aucun lieu de décrit (mis à part Angers, et la côte la plus proche, soit probablement l'Atlantique en Vendée ou dans le sud de la Loire-Atlantique), pour nous montrer la portée universelle de son histoire.
"Lulu Femme Nue" a une portée symbolique pour Davodeau. Cet album a été réalisé 10 ans après Quelques jours avec un menteur, qui mettait en scène des trentenaires. Ici les protagonistes ont 10 ans de plus. Les personnages ne sont pas les mêmes, mais la parenté est évidente.
L'histoire de Lulu aurait pu être racontée par la principale intéressée, mais Davodeau nous met dans la peau de Xavier, un de ses amis, qui la cherche et la trouve, et décide de l'observer dans cette parenthèse qu'elle s'est accordée. Il y a donc plusieurs niveaux de narration, surtout que le narrateur va changer dans le second volet de ce diptyque. Un ton différent pour ces deux phases donc...
Le second et dernier tome continue sur le même ton, fait de sensibilité, de crédibilité, et surtout un sens du rythme remarquable, Davodeau entrecoupant son récit par des passages se passant sur la terrasse de Lulu, des pauses bienvenues pour ne pas perdre de vue que quelque chose de dramatique s'est passé peu avant. Et bien sûr, le style Davodeau réserve un retournement de situation presque magistral aux deux tiers de cette seconde partie. A noter d'ailleurs que Davodeau, consciemment ou pas, construit différemment son découpage selon la situation : narration du passé ou présent, gaufrier ou bandes plus larges. Bien sûr ce n'est pas une règle absolue, mais j'ai pu remarquer cette différenciation en particulier sur le second tome. Et bien sûr, des personnages sympathiques, pas de méchants, juste des gens ordinaires, qui ont une vie ordinaire, mais peuvent avoir envie, un jour, de la bousculer...
Encore une fois cet auteur fait mouche.
Un 4/5 bien mérité. Davodeau fait partie des grands.
Billy Brouillard inaugure une nouvelle collection des éditions Soleil, la collection Métamorphose qui sera amenée à regrouper des oeuvres d'inspiration gothique, des contes noirs faussement enfantins comme sait en produire Tim Burton. Et au vu de cette première série, ce pourrait bien être une vraie réussite.
C'est un beau gros album aux teintes ocres à la manière d'un livre ancien.
Le graphisme de Guillaume Bianco m'a beaucoup plu, d'autant qu'il ne se limite pas à un seul style. Ses planches de bandes dessinées sont finement ciselées, simples et détaillées à la fois. Elles sont aussi belles qu'efficaces.
Il nous offre également d'autres types de support narratif. Des extraits de journaux fictifs, des notices explicatives sur des jeux ou encore sur des animaux étranges issus tout droit de son imagination.
L'ensemble est un peu inclassable : mélange de récit d'enfant, d'humour, de cruauté et de poésie. L'auteur fait preuve d'une belle imagination et l'on ne peut que sourire devant ses créatures ou encore ses explications de pourquoi il ne faut surtout pas manger des épinards. J'ai été particulièrement séduit par le long récit-poème sur la Princesse de la Flaque d'Eau.
En même temps, les histoires sont parfois assez dures, tellement cruelles ou réalistes face à la mort que j'hésite à considérer cette BD comme "tous publics" tant elle pourrait marquer l'esprit d'enfants un peu fragiles, au même niveau qu'un récit de Tim Burton est à la fois beau et un peu dérangeant.
Quoiqu'il en soit, j'ai vraiment été charmé. La qualité est au rendez-vous à tous points de vue, qu'il s'agisse de la beauté du dessin, de l'originalité de la présentation, de la fluidité narrative, de la finesse de l'humour et de la poésie qui se dégage de cet imaginaire débridé.
C'est un bel ouvrage qui mérite son prix un peu élevé.
C'est dans des moments comme celui-là que je suis content que BDthèque existe. Sans ce site, je n'aurais jamais découvert et lu cette bande dessinée. Merci mille fois au créateur de BDthèque !
Revenons à la série. C'est un excellent conte et une satire sociale très réussie sur le pouvoir et plus précisément sur la quête du pouvoir. Les personnages sont très réussis autant au niveau graphique que psychologique. L'univers du château me fait penser à Alice au pays des merveilles, mais en beaucoup plus sombre et pessimiste. La seule ombre au tableau c'est la fin. Je la trouve excellente, mais elle est un peu trop facile à deviner.
Le premier tome de la série est vraiment excellent. Si les autres tomes sont du même niveau, c'est un 5/5 assuré ! J'ai adoré suivre les aventures de Kaos, un pauvre homme condamné à l'exil sur une planète horrible.
Le début de l'histoire est très étrange, mais s'est parce, pour le moment, on ne sait rien sur ce qui se passe. SPOILER : Pourquoi des gens voulaient que Kaos soit assassiné par son meilleur ami ? Pourquoi la petite amie du meilleur ami en question a un clone ? Pourquoi le clone a emmené Kaos sur une autre planète ? Pourquoi lorsque Kaos revient sur Terre, 10 ans se sont écoulés ? FIN DU SPOILER. J'espère que les réponses à ces questions seront excellentes.
Le développement du récit est lui aussi excellent. Je ne me suis pas ennuyé une seule seconde et surtout pas à la fin. Le tome s'arrête exactement où il ne fallait pas ! J'ai hâte de lire la suite, mais les gens de chez Cornélius ne semblent pas vouloir me la donner.
Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas vu un scénario aussi bien peaufiné pour décrire la manière dont on peut nous manipuler : un vrai bonheur !
Ce que je trouve vraiment subtil, c'est que l'histoire entremêle énormément de thèmes politiques et polémiques (religion, pédophilie, sectarisme, pauvreté, politicards...) et des thèmes traditionnels qui font une bonne BD (amour, fraternité, couple, crime...).
En plus l'auteur a le talent pour les développer de manière originale.
Le story-board est construit avec des allers-retours dans la trame chronologique ce qui rend l'histoire complexe et captivante mais cet entremêlement est progressif ce qui permet au lecteur de rentrer facilement dans l'histoire.
De nombreux personnages sont développés et de manière touchante. J'aurais aimé moins de manichéisme dans le traitement de certains personnages secondaires.
Le gros hic c'est la couleur : je la trouve très laide et mal assortie à l'ambiance générale.
Du coup j'ai du mal à apprécier la qualité du dessin pur. Je pense qu'en crayonné le dessin vaudrait le coup.
J'attends avec impatience de lire le troisième tome pour savoir si je note culte ou pas. Vu l'excellence de la fin dans Le Pouvoir des innocents, je suis très optimiste...
Rien à ajouter à propos de 'L'Art Invisible'. Tout à déjà été dit. C'est un excellent ouvrage sur la bande dessinée que chaque bédéphile doit lire au moins une fois dans sa vie.
En ce qui concerne 'Faire de la bande dessinée', c'est un très bon album, mais il s'adresse qu'à ceux qui veulent faire de la bande dessinée. Les autres risquent de s'ennuyer en lisant tous les trucs techniques de Scott McCLoud. On apprend pleins de choses du genre comment ne pas mettre trop de détails dans une case ou comment garder l'attention du lecteur pendant sa lecture.
J'espère que Delcourt va rééditer un jour 'Réinventer la bande dessinée'. J'aimerais bien le lire.
Après lecture des 2 tomes, j'avoue ressentir une étrange sensation (de manque peut-être), ce récit n'est pas banal et après avoir fermée la dernière page, le puzzle construit au fil de ces minis histoires me revient en tête et tout s'imbrique parfaitement.
C'est tout sauf une B.D vite lue vite oubliée, au contraire la vie de cette galerie de personnages qui errent dans leur banlieue (allemande mais ça pourrait être dans n'importe quel pays occidental finalement) me reste longuement en tête.
Ce qui est sûr, c'est que cette histoire ne laisse personne indifférent et amène des réactions assez tranchées, soit on adore, soit on déteste, signe que ce récit n'est pas insipide en tout cas.
Il y a un côté très noir, voir dérangeant, beaucoup de cynisme et même de la folie chez certains personnages. Mais de toute cette noirceur, ressort un humour incroyable et finalement une part d'humanité malgré tous les défauts de nos héros du quotidien.
Cette histoire permet également de réaliser un fantasme, en effet qui n'a jamais rêvé d'être une petite souris, pour s'immiscer dans les moments les plus privés de la vie des gens. Non seulement nous sommes cette petite souris, mais en plus nous avons accès à leurs pensées les plus intimes...
Enfin, pour parler rapidement du dessin, quand j'ai feuilleté l'album la première fois ça ne m'a pas franchement emballé, mais après lecture je ne peux pas imaginer un autre type de dessin, tellement celui ci colle parfaitement à l'histoire.
En conclusion, une oeuvre superbe, dérangeante, qui nous questionne et que l'on n'oublie pas. Je sais déjà que je la relirais avec plaisir et je suis sûr que je la redécouvrirais sous un jour nouveau encore, tant elle est dense et sujette à réflexion.
Je n'ai jamais été fan de Lewis Trondheim. Ce n'est pas faute d'avoir essayé, mais j'ai toujours eu du mal avec son dessin. Mais j'aime beaucoup la personne, notamment suite à un long entretien diffusé sur Arte il y a... pffiou... longtemps... concernant l'adaptation de sa Mouche au Japon.
A chaque sortie d'un nouveau Trondheim, j'ai donc toujours envie d'aimer sa nouvelle création... mais j'ai presque toujours du mal. Je dois être maso, et j'aime ça ^_^
Sauf qu'un jour, je suis tombé sur son blog et que j'ai de suite accroché à ces tranches de vie, souvent anecdotiques, mais toujours très sympathiques.
Je me rue donc à chaque fois sur les volumes des Petits Riens , que je (re)lis avec grand plaisir. Et c'est avec le sourire aux lèvres que je repose à chaque fois chaque tome. Un bonheur simple de BDphile.
Note : un 4,5, qui se transforme en 4/5 + coup de cœur.
Petit message à l'auteur : Lewis, si tu me lis, j'ai vraiment du mal à aimer la plupart de ce que tu dessines (je me permets de te tutoyer) et pourtant je suis un fan. C'est une sensation très curieuse que tu es le seul à me procurer. Félicitations !
Pietrolino n'est ni un récit historique ni même une biographie, c'est simplement un hommage au mime Marceau qui l'a inspiré, et à la passion qu'il vouait de son art. C'est un joli conte, une belle histoire qu'on nous murmure doucement au creux de l'oreille…. Jodorowsky nous offre ici une œuvre très troublante.
Tout doucement au fil des pages, on ne voit plus que Pietrolino, sa passion, sa colère et sa souffrance. On rentre petit à petit dans un monde de silence, monde pourtant inondé de bruits, celui des armes, des applaudissements, de la foule et des rires, mais curieusement ce silence persiste… Les couleurs explosives se battent constamment en duel, entre violence et gaieté, dans la même planche ces deux sentiments sont intimement liés. Une indicible tristesse doucement nous assaille, on voudrait la chasser mais on est comme envoûté, on la subit pour finalement s'en délecter.
Les décors sont assez dépouillés et certaines proportions parfois approximatives, comme si cela était secondaire, comme pour mieux mettre en valeur les acteurs de ce conte. Une certaine magie passe au travers de tout ce petit monde et surtout de Pietrolino, auquel Boiscommun, son talent et ses pinceaux ont insufflé la vie.
Pietrolino est doux, violent, caressant, envoûtant, triste… Pietrolino c'est l'âme du mime Marceau.
PS : je retire une étoile à cette bd et l'option d'achat, car emportée par l'enthousiasmant dessin et l'attachant personnage, j'ai mis de côté le fait que Pietrolino tombe amoureux de la gamine qu'il a élevé... c'est assez gênant, voire même très dérangeant.
En France, les livres sont au même prix partout. C'est la loi !
Avec BDfugue, vous payez donc le même prix qu'avec les géants de la vente en ligne mais pour un meilleur service :
des promotions et des goodies en permanence
des réceptions en super état grâce à des cartons super robustes
une équipe joignable en cas de besoin
2. C'est plus avantageux pour nous
Si BDthèque est gratuit, il a un coût.
Pour financer le service et le faire évoluer, nous dépendons notamment des achats que vous effectuez depuis le site. En effet, à chaque fois que vous commencez vos achats depuis BDthèque, nous touchons une commission. Or, BDfugue est plus généreux que les géants de la vente en ligne !
3. C'est plus avantageux pour votre communauté
En choisissant BDfugue plutôt que de grandes plateformes de vente en ligne, vous faites la promotion du commerce local, spécialisé, éthique et indépendant.
Meilleur pour les emplois, meilleur pour les impôts, la librairie indépendante promeut l'émergence des nouvelles séries et donc nos futurs coups de cœur.
Chaque commande effectuée génère aussi un don à l'association Enfance & Partage qui défend et protège les enfants maltraités. Plus d'informations sur bdfugue.com
Pourquoi Cultura ?
Indépendante depuis sa création en 1998, Cultura se donne pour mission de faire vivre et aimer la culture.
La création de Cultura repose sur une vision de la culture, accessible et contributive. Nous avons ainsi considéré depuis toujours notre responsabilité sociétale, et par conviction, développé les pratiques durables et sociales. C’est maintenant au sein de notre stratégie de création de valeur et en accord avec les Objectifs de Développement Durable que nous déployons nos actions. Nous traitons avec lucidité l’impact de nos activités, avec une vision de long terme. Mais agir en responsabilité implique d’aller bien plus loin, en contribuant positivement à trois grands enjeux de développement durable.
Nos enjeux environnementaux
Nous sommes résolument engagés dans la réduction de notre empreinte carbone, pour prendre notre part dans la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la planète.
Nos enjeux culturels et sociétaux
La mission de Cultura est de faire vivre et aimer la culture. Pour cela, nous souhaitons stimuler la diversité des pratiques culturelles, sources d’éveil et d’émancipation.
Nos enjeux sociaux
Nous accordons une attention particulière au bien-être de nos collaborateurs à la diversité, l’inclusion et l’égalité des chances, mais aussi à leur épanouissement, en encourageant l’expression des talents artistiques.
Votre vote
L'Heure la plus sombre vient toujours avant l'aube
C'est un fait qu'en vieillissant, j'apprécie de plus en plus les romans graphiques, peut-être parce que certains d'entre eux me parlent de choses qui me tiennent à coeur. C'est le cas avec "l'Heure la plus sombre...", dont le titre vient d'une chanson de Bob Dylan. Une chanson qu'écoute régulièrement Jean-Claude sur son lecteur de CD, dans son bahut. Mais aussi le point de départ de toute l'histoire, puisque c'est à ce moment qu'il soustrait Nouria à son salopard d'employeur. La suite est une histoire entre deux êtres qui ne se sont croisés qu'à de rares reprises, et qui vont lier leur destin de façon indéfectible... ou pas. Moynot chronique donc l'ordinaire, la vie des petites gens, mais sans misérabilisme, s'attachant plus aux pensées de ses deux protagonistes, dans un chassé-croisé plutôt pas mal vu. Il les amène à proximité de Bordeaux, où il vit, dans la riante ville de Lormont (non je rigole, c'est une cité-dortoir chiante à mourir, croyez sur parole un local). Ca m'a plu. Mais ce qui m'a plu le plus, c'est la fin de l'histoire, une fin à laquelle on ne s'attendait pas forcément, mais qui pourtant devenait inévitable vue la tournure des (non-) évènements. Attention, c'est du roman graphique pur et dur, et ceux qui voudraient de l'action en seront pour leurs frais. Ceux qui recherchent des histoires simples, ordinaires, mais bien racontées, devraient apprécier.
Lulu Femme Nue
Comme le dit Etienne Davodeau lui-même, ce n'est pas un documentaire, mais dans une sorte de roman graphique au plus proche de la vérité. Impossible de différencier réellement ces deux facettes de l'auteur angevin, tant le traitement est proche, et le résultat toujours de qualité. Ici Davodeau nous permet de suivre Lulu, une quadra désoeuvrée qui décide de prendre un "congé" et finalement découvre la vie... 45 000 adultes disparaissent chaque année en France, certains volontairement comme notre Lulu. On peut donc parler de phénomène de société. Et notre sociologue préféré du 9ème art se penche sur le cas pour nous livrer une histoire très sensible, très bien écrite. Il n'y a aucun lieu de décrit (mis à part Angers, et la côte la plus proche, soit probablement l'Atlantique en Vendée ou dans le sud de la Loire-Atlantique), pour nous montrer la portée universelle de son histoire. "Lulu Femme Nue" a une portée symbolique pour Davodeau. Cet album a été réalisé 10 ans après Quelques jours avec un menteur, qui mettait en scène des trentenaires. Ici les protagonistes ont 10 ans de plus. Les personnages ne sont pas les mêmes, mais la parenté est évidente. L'histoire de Lulu aurait pu être racontée par la principale intéressée, mais Davodeau nous met dans la peau de Xavier, un de ses amis, qui la cherche et la trouve, et décide de l'observer dans cette parenthèse qu'elle s'est accordée. Il y a donc plusieurs niveaux de narration, surtout que le narrateur va changer dans le second volet de ce diptyque. Un ton différent pour ces deux phases donc... Le second et dernier tome continue sur le même ton, fait de sensibilité, de crédibilité, et surtout un sens du rythme remarquable, Davodeau entrecoupant son récit par des passages se passant sur la terrasse de Lulu, des pauses bienvenues pour ne pas perdre de vue que quelque chose de dramatique s'est passé peu avant. Et bien sûr, le style Davodeau réserve un retournement de situation presque magistral aux deux tiers de cette seconde partie. A noter d'ailleurs que Davodeau, consciemment ou pas, construit différemment son découpage selon la situation : narration du passé ou présent, gaufrier ou bandes plus larges. Bien sûr ce n'est pas une règle absolue, mais j'ai pu remarquer cette différenciation en particulier sur le second tome. Et bien sûr, des personnages sympathiques, pas de méchants, juste des gens ordinaires, qui ont une vie ordinaire, mais peuvent avoir envie, un jour, de la bousculer... Encore une fois cet auteur fait mouche. Un 4/5 bien mérité. Davodeau fait partie des grands.
Billy Brouillard
Billy Brouillard inaugure une nouvelle collection des éditions Soleil, la collection Métamorphose qui sera amenée à regrouper des oeuvres d'inspiration gothique, des contes noirs faussement enfantins comme sait en produire Tim Burton. Et au vu de cette première série, ce pourrait bien être une vraie réussite. C'est un beau gros album aux teintes ocres à la manière d'un livre ancien. Le graphisme de Guillaume Bianco m'a beaucoup plu, d'autant qu'il ne se limite pas à un seul style. Ses planches de bandes dessinées sont finement ciselées, simples et détaillées à la fois. Elles sont aussi belles qu'efficaces. Il nous offre également d'autres types de support narratif. Des extraits de journaux fictifs, des notices explicatives sur des jeux ou encore sur des animaux étranges issus tout droit de son imagination. L'ensemble est un peu inclassable : mélange de récit d'enfant, d'humour, de cruauté et de poésie. L'auteur fait preuve d'une belle imagination et l'on ne peut que sourire devant ses créatures ou encore ses explications de pourquoi il ne faut surtout pas manger des épinards. J'ai été particulièrement séduit par le long récit-poème sur la Princesse de la Flaque d'Eau. En même temps, les histoires sont parfois assez dures, tellement cruelles ou réalistes face à la mort que j'hésite à considérer cette BD comme "tous publics" tant elle pourrait marquer l'esprit d'enfants un peu fragiles, au même niveau qu'un récit de Tim Burton est à la fois beau et un peu dérangeant. Quoiqu'il en soit, j'ai vraiment été charmé. La qualité est au rendez-vous à tous points de vue, qu'il s'agisse de la beauté du dessin, de l'originalité de la présentation, de la fluidité narrative, de la finesse de l'humour et de la poésie qui se dégage de cet imaginaire débridé. C'est un bel ouvrage qui mérite son prix un peu élevé.
Monsieur Noir
C'est dans des moments comme celui-là que je suis content que BDthèque existe. Sans ce site, je n'aurais jamais découvert et lu cette bande dessinée. Merci mille fois au créateur de BDthèque ! Revenons à la série. C'est un excellent conte et une satire sociale très réussie sur le pouvoir et plus précisément sur la quête du pouvoir. Les personnages sont très réussis autant au niveau graphique que psychologique. L'univers du château me fait penser à Alice au pays des merveilles, mais en beaucoup plus sombre et pessimiste. La seule ombre au tableau c'est la fin. Je la trouve excellente, mais elle est un peu trop facile à deviner.
Kaos
Le premier tome de la série est vraiment excellent. Si les autres tomes sont du même niveau, c'est un 5/5 assuré ! J'ai adoré suivre les aventures de Kaos, un pauvre homme condamné à l'exil sur une planète horrible. Le début de l'histoire est très étrange, mais s'est parce, pour le moment, on ne sait rien sur ce qui se passe. SPOILER : Pourquoi des gens voulaient que Kaos soit assassiné par son meilleur ami ? Pourquoi la petite amie du meilleur ami en question a un clone ? Pourquoi le clone a emmené Kaos sur une autre planète ? Pourquoi lorsque Kaos revient sur Terre, 10 ans se sont écoulés ? FIN DU SPOILER. J'espère que les réponses à ces questions seront excellentes. Le développement du récit est lui aussi excellent. Je ne me suis pas ennuyé une seule seconde et surtout pas à la fin. Le tome s'arrête exactement où il ne fallait pas ! J'ai hâte de lire la suite, mais les gens de chez Cornélius ne semblent pas vouloir me la donner.
Le Sourire du clown
Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas vu un scénario aussi bien peaufiné pour décrire la manière dont on peut nous manipuler : un vrai bonheur ! Ce que je trouve vraiment subtil, c'est que l'histoire entremêle énormément de thèmes politiques et polémiques (religion, pédophilie, sectarisme, pauvreté, politicards...) et des thèmes traditionnels qui font une bonne BD (amour, fraternité, couple, crime...). En plus l'auteur a le talent pour les développer de manière originale. Le story-board est construit avec des allers-retours dans la trame chronologique ce qui rend l'histoire complexe et captivante mais cet entremêlement est progressif ce qui permet au lecteur de rentrer facilement dans l'histoire. De nombreux personnages sont développés et de manière touchante. J'aurais aimé moins de manichéisme dans le traitement de certains personnages secondaires. Le gros hic c'est la couleur : je la trouve très laide et mal assortie à l'ambiance générale. Du coup j'ai du mal à apprécier la qualité du dessin pur. Je pense qu'en crayonné le dessin vaudrait le coup. J'attends avec impatience de lire le troisième tome pour savoir si je note culte ou pas. Vu l'excellence de la fin dans Le Pouvoir des innocents, je suis très optimiste...
L'Art Invisible
Rien à ajouter à propos de 'L'Art Invisible'. Tout à déjà été dit. C'est un excellent ouvrage sur la bande dessinée que chaque bédéphile doit lire au moins une fois dans sa vie. En ce qui concerne 'Faire de la bande dessinée', c'est un très bon album, mais il s'adresse qu'à ceux qui veulent faire de la bande dessinée. Les autres risquent de s'ennuyer en lisant tous les trucs techniques de Scott McCLoud. On apprend pleins de choses du genre comment ne pas mettre trop de détails dans une case ou comment garder l'attention du lecteur pendant sa lecture. J'espère que Delcourt va rééditer un jour 'Réinventer la bande dessinée'. J'aimerais bien le lire.
Le Roi des Mouches
Après lecture des 2 tomes, j'avoue ressentir une étrange sensation (de manque peut-être), ce récit n'est pas banal et après avoir fermée la dernière page, le puzzle construit au fil de ces minis histoires me revient en tête et tout s'imbrique parfaitement. C'est tout sauf une B.D vite lue vite oubliée, au contraire la vie de cette galerie de personnages qui errent dans leur banlieue (allemande mais ça pourrait être dans n'importe quel pays occidental finalement) me reste longuement en tête. Ce qui est sûr, c'est que cette histoire ne laisse personne indifférent et amène des réactions assez tranchées, soit on adore, soit on déteste, signe que ce récit n'est pas insipide en tout cas. Il y a un côté très noir, voir dérangeant, beaucoup de cynisme et même de la folie chez certains personnages. Mais de toute cette noirceur, ressort un humour incroyable et finalement une part d'humanité malgré tous les défauts de nos héros du quotidien. Cette histoire permet également de réaliser un fantasme, en effet qui n'a jamais rêvé d'être une petite souris, pour s'immiscer dans les moments les plus privés de la vie des gens. Non seulement nous sommes cette petite souris, mais en plus nous avons accès à leurs pensées les plus intimes... Enfin, pour parler rapidement du dessin, quand j'ai feuilleté l'album la première fois ça ne m'a pas franchement emballé, mais après lecture je ne peux pas imaginer un autre type de dessin, tellement celui ci colle parfaitement à l'histoire. En conclusion, une oeuvre superbe, dérangeante, qui nous questionne et que l'on n'oublie pas. Je sais déjà que je la relirais avec plaisir et je suis sûr que je la redécouvrirais sous un jour nouveau encore, tant elle est dense et sujette à réflexion.
Les Petits Riens
Je n'ai jamais été fan de Lewis Trondheim. Ce n'est pas faute d'avoir essayé, mais j'ai toujours eu du mal avec son dessin. Mais j'aime beaucoup la personne, notamment suite à un long entretien diffusé sur Arte il y a... pffiou... longtemps... concernant l'adaptation de sa Mouche au Japon. A chaque sortie d'un nouveau Trondheim, j'ai donc toujours envie d'aimer sa nouvelle création... mais j'ai presque toujours du mal. Je dois être maso, et j'aime ça ^_^ Sauf qu'un jour, je suis tombé sur son blog et que j'ai de suite accroché à ces tranches de vie, souvent anecdotiques, mais toujours très sympathiques. Je me rue donc à chaque fois sur les volumes des Petits Riens , que je (re)lis avec grand plaisir. Et c'est avec le sourire aux lèvres que je repose à chaque fois chaque tome. Un bonheur simple de BDphile. Note : un 4,5, qui se transforme en 4/5 + coup de cœur. Petit message à l'auteur : Lewis, si tu me lis, j'ai vraiment du mal à aimer la plupart de ce que tu dessines (je me permets de te tutoyer) et pourtant je suis un fan. C'est une sensation très curieuse que tu es le seul à me procurer. Félicitations !
Pietrolino
Pietrolino n'est ni un récit historique ni même une biographie, c'est simplement un hommage au mime Marceau qui l'a inspiré, et à la passion qu'il vouait de son art. C'est un joli conte, une belle histoire qu'on nous murmure doucement au creux de l'oreille…. Jodorowsky nous offre ici une œuvre très troublante. Tout doucement au fil des pages, on ne voit plus que Pietrolino, sa passion, sa colère et sa souffrance. On rentre petit à petit dans un monde de silence, monde pourtant inondé de bruits, celui des armes, des applaudissements, de la foule et des rires, mais curieusement ce silence persiste… Les couleurs explosives se battent constamment en duel, entre violence et gaieté, dans la même planche ces deux sentiments sont intimement liés. Une indicible tristesse doucement nous assaille, on voudrait la chasser mais on est comme envoûté, on la subit pour finalement s'en délecter. Les décors sont assez dépouillés et certaines proportions parfois approximatives, comme si cela était secondaire, comme pour mieux mettre en valeur les acteurs de ce conte. Une certaine magie passe au travers de tout ce petit monde et surtout de Pietrolino, auquel Boiscommun, son talent et ses pinceaux ont insufflé la vie. Pietrolino est doux, violent, caressant, envoûtant, triste… Pietrolino c'est l'âme du mime Marceau. PS : je retire une étoile à cette bd et l'option d'achat, car emportée par l'enthousiasmant dessin et l'attachant personnage, j'ai mis de côté le fait que Pietrolino tombe amoureux de la gamine qu'il a élevé... c'est assez gênant, voire même très dérangeant.