J'ai beaucoup apprécié cette fiction documentaire rappelant l'histoire du bidonville de Nanterre. J'aurais presque pu croiser les enfants de Kader à l'école puisque j'habitais Courbevoie qui est tout proche de Nanterre. La construction du site de la Défense, les jeux dans les terrains vagues (encore nombreux à l'époque), me rappelle des souvenirs d'enfances. Bien sûr nous connaissions l'existence du grand bidonville de Nanterre sans y avoir jamais pénétrer mais nous pouvions le voir de la route et cette image est restée gravée dans ma mémoire. Laurent Maffre reprend le témoignage de Monique Hervo qui est intervenu pendant dix ans pour aider (aide scolaire, écrivaine public, conseil et accompagnement humain) auprès de ce public très vulnérable. Je troue que l'auteur réussit très bien à traduire les paradoxes de cette époque. En effet le scénario met bien en valeur la complexité d'une situation où la population était officiellement Française ( jusqu'en 62), travailleuse et discrète et officieusement perçue comme un ennemi ( FLN, 17 octobre 61). Le récit se veut non polémique (Papon n'est jamais cité) et se veut très optimiste sans tomber dans l'angélisme. La narration est fluide malgré quelques flash back pour insérer quelques éléments historiques qui, expliquent le contexte ( guerre en Algérie, manif du 17 octobre). Les auteurs préfèrent minimiser le racisme ambiant pour honorer les Français aidants . Monique Hervo est ainsi mis en scène sous les traits de Françoise. Ce récit-témoignage est à mes yeux très important 60 ans plus tard dans un contexte où les relations Franco Algériennes sont toujours compliquées.
Le graphisme en N&B de Maffre amplifie le côté reportage du récit. Le trait est épuré avec une belle recherche sur les visages masculins. J'ai eu un peu plus de mal sur les visages féminins. Surtout j'ai admiré le travail pour transcrire les détails du bidonville. A la fois dans ces extérieurs et pour la vie intime les atmosphères décrites sont très crédible. J'ai vraiment été impressionné.
Une lecture qui traverse de nombreuses thématiques: historique, sociale, sociétale qui mérite la lecture d'un public large.
Perso un très bon 4
Ah oui quand même ! Si j'ai été de suite séduit par le dessin (et le sujet) de cette BD au point d'en faire l'acquisition, j'avoue que je ne m'attendais pas à un être atteint à ce point. J'imaginais quelque chose d'assez drôle et finalement léger. Or drôle, ça l'est, mais il s'y lit quelque chose de bien plus profond. Quelque chose qui chez moi résonne avec la série italienne Anna, vue récemment. Quelque chose qui interroge sur le type même d'êtres humains que nous sommes actuellement en train de "lâcher dans la nature".
Notre auteur à la gomme nous embarque dans son expérience aussi aisément qu'un toboggan. Très vite, il plante le contexte : profondément secoué par la mort de Samuel Paty, il décide de prendre les armes par les cornes et de monter au front. En quelques mois, il passe le concours et devient prof, avec la volonté farouche d'accomplir son devoir du mieux possible. Il se heurte rapidement aux discours ineptes du système éducatif et son imbitable catalogue d'acronymes, mais surtout à la réalité du terrain. Et c'est là que Fred Leclerc dresse une carte des opérations proprement glaçante. Il se passe manifestement quelque chose de grave dans la jeunesse d'aujourd'hui, et l'Education Nationale se révèle totalement incapable d'agir. Ce à quoi le lecteur assiste ici, c'est au sauvetage désespéré des enfants par des professeurs qui font tout ce qu'ils peuvent.
Tout cela, Fred nous le raconte avec une franchise sans reproche. Il nous expose ses faiblesses et comment il a fini par renoncer devant cette tâche herculéenne qui consiste aujourd'hui à éduquer les enfants dans les zones délaissées. Au cours de la lecture, on passe par tous les états du spectre émotionnel. On partage ses ironies face aux discours, ses colères devant l'impuissance, et derrière tout ça, l'amour pour ses élèves, malgré tout. Mais au passage, Leclerc n'oublie pas d'être drôle. S'il use de quelques ressorts comiques très sattoufiens, on ne lui en tient pas rigueur. Journal d'un prof à la gomme est un petit condensé vif d'une situation, une chronique vivante et honnête. Ca ne donne aucune leçon, c'est humble, mais c'est dit ! Et montré.
Enfin, last but not least, tout cela est emballé par un formidable petit coup de crayon. Franchement !
Lu après La Route, je ne peux qu'ajouter une belle note à cette adaptation du roman de Claudel que j'ai lu il y a un paquet d'années maintenant mais qui m'avait marqué. Une histoire de la cruauté et de la lâcheté humaine que Larcenet retranscrit dans certaines images choc. Les nazis sont figurés plus comme des animaux que des humains.
Très beau travail graphique indéniable, un noir et blanc proche de la gravure dont on admire chaque page, des animaux par exemple d'un beau niveau de détail. Le format paysage permet de voir les choses en format cinéma avec souvent peu de textes. D'ailleurs dans le premier tome on a presque l'impression qu'il se passe peu de choses. Quel est ce fameux événement et qui est cet étranger venu dans le village isolé à propos duquel Brodeck doit rédiger un rapport ?
On le découvre dans le tome 2 qui révèle l'injustice subie par Brodeck et sa famille, on peut le trouver étonnamment passif de continuer à vivre dans ce village avec ces lourds souvenirs.
« Phantom Road » est une nouvelle série fantastique/horreur de Jeff Lemire, et le moins qu’on puisse dire c’est que ce premier tome est scotchant !
L’histoire s’emballe après à peine 7 pages, et ne lâche rien pendant les 130 pages de ce premier tome, que j’ai englouti en un temps record. L’intrigue est prenante et enjouée, et parle de mondes parallèles, d’agents du FBI, de monstres bizarres et d’un objet mystérieux (et magique ?) devant être transporté par nos 2 compagnons d’infortune… ces derniers sont attachants et bien définis, grâce à une narration en flashbacks nous montrant leur passé. Les deux dernières pages introduisent un personnage qui m’a laissé dubitatif, mais je lirai quand-même la suite, en espérant que l’auteur réussisse à contenir son histoire et son univers.
Gabriel Hernandez Walta avait déjà bossé avec Lemire sur Sentient, et propose ici une mise en image classique mais efficace. Les couleurs de Jordie Bellaire (qui n’en est plus à son coup d’essai) participent grandement à l’ambiance inquiétante du récit, tout en contribuant directement à la narration (les tons sont différents pour les deux « mondes »).
Un premier tome prenant au possible, vivement la suite !
MAJ après lecture du tome 2 : pas de surprise, l’histoire continue sur sa lancée et reste scotchante, même si je déplore le manque de réponses après 2 tomes, on nage toujours en plein mystère, clairement les auteurs vont développer l’intrigue sur la longue… je lirai la suite, c’est sûr !
Je viens (enfin !) d'achever la lecture de cet album si singulier. Il se démarque réellement de ce qu'on peut lire actuellement. Il marche en dehors des sentiers battus tout en étant de facture classique; ce n'est d'ailleurs pas le seul paradoxe de L'ORFEVRE.
Ce qui m'a le plus subjugué, c'est le soin extraordinaire accordé au dessin. C'est stupéfiant de précision. Aucun décor n'est laissé au hasard ni abandonné à l'esquisse. Avec un souci extrême, Lozes prend la peine d'aller jusqu'à distinguer chacune des matières qu'il dessine. C'est un travail pharaonique. Le titre de l'album n'est-il pas en fait l'écho du travail fourni par le dessinateur, un véritable travail d'orfèvre ?
Le récit, en dépit de quelques défauts mineurs par instants, se révèle passionnant, émaillé de quelques scènes marquantes comme celle du cinéma Gaumont Palace. Ce n'est pas tant l'enquête qui nous tient en haleine que l'ambiance étrange liée à la succession inexorable d'événements nous conduisant à une spectaculaire boucle temporelle. Nous savons que nous assistons à un exercice de style et nous guettons sans cesse tous les détails pour s'assurer que les engrenages se calent parfaitement. Le parcours initiatique qui se déroule devant nos yeux alors que nous savons bien où il va nous mener, ce parcours nous oblige à développer une attention soutenue à l'égard de la structure même du récit. Nous restons tout du long un lecteur vigilant. C'est le tour de force de cet album que de nous nous rendre pleinement conscient de chaque détail qui se présente à nous; nous tentons constamment de trouver le sens de chaque chose et sa place dans la mécanique générale du récit.
Au final c'est un album terriblement attachant que j'ai refermé à regret et que je relirai avec plaisir à n'en pas douter.
Voilà un album que j'ai adoré.
Je ne connaissais pas Romain Dutreix, dorénavant je vais guetter ses futures productions avec beaucoup d'attention.
Il y très longtemps que je ne m'étais amusé autant à lire une bande dessinée. Il y a même des moments franchement hilarants. L'histoire est prenante et merveilleusement racontée. Dutreix a un sens du rythme infaillible.
Le dessin est épatant, avec une stylisation remarquable et un sens extraordinaire pour représenter les expressions des visages et les postures des corps des personnages. C'est vivant au possible. La mise en couleur est elle aussi très réussie.
Bref les parties graphique et scénaristique sont de haut niveau et concourent à offrir un album de bande dessinée populaire et grand public de premier ordre. Et je dois avouer que l'annonce d'une suite en fin d'album m'enchante littéralement.
note: 4,5/5
C'est à nouveau un très bel album de Jérémie Moreau.
Dans cet ouvrage au format agréable (pratiquement un carré de petite taille), on suit le périple d'un jeune batricien, qui, comme son père l'avait fait avant lui, cherche la terre promise, une mare, un écrin de verdure qui permettra peut-être à sa progéniture de s'épanouir et de perpétuer à son tour le cycle de la vie. Alyte, petit orphelin miraculé, va faire des rencontres qui le marqueront et lui permettront de trouver le courage suffisant pour affronter la terrifiante " Léthalyte ", cette bande grise mortifère qui recrache impitoyablement ses victimes.
Pour peindre cette ode à la nature et au monde animal, J. Moreau utilise comme il le fait depuis un certain temps une palette aux couleurs très vives, pop, acidulées, mais comme il le dit lui-même, cet univers est " faussement mignon " et souvent sans concession car la vie, comme le rappelle chaque péripétie d'Alyte, demeure incertaine, plus que jamais fragile, car les dangers qui la menacent se multiplient désormais sous l'effet de l'activité humaine et du réchauffement climatique.
Les images de Moreau sont puissantes. Nul doute qu'elles marqueront également durablement les jeunes enfants qui découvriront ce joli conte écologique et poétique. Comme dans son " Discours de la panthère ", la nature est vue à hauteur d'animaux. Mais " Alyte " me semble plus homogène que Le Discours de la panthère (qui était composé d'histoires courtes parfois inégales). Le récit de ce dernier ouvrage est sans temps morts, moins sentencieux que celui de son grand-frère peut-être et il finit en beauté avec une rencontre particulièrement bien amenée entre notre crapaud héroïque et un personne dont je vous laisse découvrir l'identité !
Au fil de cette odyssée, j'ai également pensé à Miyasaki, il me semble en effet voir une filiation entre le célèbre auteur japonais de " Nausicaa " et Jérémie Moreau, à la fois dans les thèmes abordés et dans la représentation de la nature avec les eaux qui jaillissent, les arbres qui bruissent et la vie animale qui résiste tant bien que mal aux coups de boutoir d'hommes insensés.
Pour moi, c'est ni plus ni moins un indispensable de cette année 2024 (!) et un coup de coeur bien sûr !
J'ai beaucoup apprécié cette lecture. J'ai trouvé beaucoup d'inventivité dans le scénario de Vehlmann . Un scénario très tonique avec cette fausse structure en histoires courtes qui donnent beaucoup de tonus et d'angles différents. La thématique centrale de l'album m'a fait pensé à la biographie uchronique que Pierre Emmanuel Schmidt avait imaginé avec un Adolf Hithler artiste peintre aux Beaux-Arts de Vienne. Velhman reprend avec brio cette manière qui ouvre de nombreuses possibilités dans l'uchronie potentielle et la SF base de l'album.
Les auteurs y ajoutent une forte touche d'humour qui rend la lecture très agréable.
J'aime beaucoup le travail de Gazzotti. Son trait est un peu moins arrondi que pour ses autres séries phares mais la cohérence avec le dessin de Meyer est parfaite à telle point qu'il est difficile de voir la différence. Un beau travail d'équipe.
Une lecture récréative très agréable avec une belle créativité.
J’avais lu il y a quelques temps après sa sortie le premier tome, n’avais fait que feuilleter brièvement le suivant, et je me suis remis à cette série avec le troisième et dernier, « Mon vrai visage ». Et le fait est que s’il n’use pas d’un jeu de mot moqueur et agressif dans son titre comme les deux précédents, c’est que ce titre annonce une petite surprise. En effet, il révèle une supercherie (dans un texte en fin d’album), puisque le chauffeur de taxi dont les strips – publiés sur le net – sont ici repris, n’a en fait jamais existé. Je fais partie de ceux (tous les lecteurs sans doute ?) qui se sont laissés prendre à ce canular – il est vrai peu dommageable (même la mairie de Paris a attribué un prix à Michel de la Teigne !). Connaitre la véritable identité des auteurs ne change rien à l’intérêt ou non des strips (même si ça leur enlève le côté « témoignage véridique, de terrain »).
Chaque strip est généralement suivi d’une page de texte, où notre prétendu chauffeur de taxi un peu aigri, mais surtout revendicatif, précise ce qu’il pense du genre de spécimen qu’il vient de convoyer. Chaque client est donc pour notre taximan (pour Rémi Amy donc) l’occasion de se lâcher, durant le strip BD d’abord, de façon plus posé et incisive dans le texte ensuite, contre tout ce qu’ils (La Teigne et Amy donc) vomissent : les racistes, le libéralisme, les assureurs, les supporters, les prénoms à la con, la religion, les people, les sondeurs, etc.
Si l’ensemble est inégal, je l’ai trouvé globalement à la fois amusant (parfois franchement drôle, en particulier lorsque le chauffeur devient outrancier) et intéressant. Sous couvert d’humour, pas mal de messages « engagés » passent. Et passent très bien me concernant ! (Voir en particulier le texte « Prise d’otages » dans les premières pages du troisième album)
Une lecture recommandée en tout cas.
Note réelle 3,5/5.
Une très bonne lecture !
Si elle peut surprendre à première vue, la forme (superpositions et incrustations d'éléments avec un rendu 3D) n'est finalement pas du tout un souci, c'est même plutôt réussi je trouve (mention particulière pour les vues extérieures des vaisseaux). Quant à l'intrigue, elle est captivante (un grand auteur de BD est décidément avant tout pour moi un conteur de talent). Je n'avais rien lu auparavant sur l'histoire et c'est très important à mon avis (voire indispensable) pour apprécier cet album de S.F relativement classique mais à la tension grandissante. A ce sujet, je viens de parcourir les autres avis très pertinents de mes camarades et je vous conseille de lire celui de Blueboy APRES votre découverte de cet album. Quoi qu'il en soit, je comprends mieux désormais le titre qui peut d'ailleurs avoir plusieurs significations.
L'auteur a donc vraiment fait du bon travail et si la fin n'est peut-être pas à la hauteur de mes espérances, j'ai été happé par ma lecture jusqu'à la dernière page.
Pour l'achat, comme l'intérêt de ce récit repose essentiellement sur les révélations successives, à vous de voir, mais je n'oublierai pas ma lecture de si tôt. Après un début d'année un peu décevant, voici un autre album marquant de 2024 !
Je n'avais fait que feuilleter Jean Doux et le Mystère de la Disquette Molle et j'avais trouvé que l'humour tombait souvent à plat, mais il faudra à l'occasion que je regarde ça de plus près.
En France, les livres sont au même prix partout. C'est la loi !
Avec BDfugue, vous payez donc le même prix qu'avec les géants de la vente en ligne mais pour un meilleur service :
des promotions et des goodies en permanence
des réceptions en super état grâce à des cartons super robustes
une équipe joignable en cas de besoin
2. C'est plus avantageux pour nous
Si BDthèque est gratuit, il a un coût.
Pour financer le service et le faire évoluer, nous dépendons notamment des achats que vous effectuez depuis le site. En effet, à chaque fois que vous commencez vos achats depuis BDthèque, nous touchons une commission. Or, BDfugue est plus généreux que les géants de la vente en ligne !
3. C'est plus avantageux pour votre communauté
En choisissant BDfugue plutôt que de grandes plateformes de vente en ligne, vous faites la promotion du commerce local, spécialisé, éthique et indépendant.
Meilleur pour les emplois, meilleur pour les impôts, la librairie indépendante promeut l'émergence des nouvelles séries et donc nos futurs coups de cœur.
Chaque commande effectuée génère aussi un don à l'association Enfance & Partage qui défend et protège les enfants maltraités. Plus d'informations sur bdfugue.com
Pourquoi Cultura ?
La création de Cultura repose sur une vision de la culture, accessible et contributive. Nous avons ainsi considéré depuis toujours notre responsabilité sociétale, et par conviction, développé les pratiques durables et sociales. C’est maintenant au sein de notre stratégie de création de valeur et en accord avec les Objectifs de Développement Durable que nous déployons nos actions. Nous traitons avec lucidité l’impact de nos activités, avec une vision de long terme. Mais agir en responsabilité implique d’aller bien plus loin, en contribuant positivement à trois grands enjeux de développement durable.
Nos enjeux environnementaux
Nous sommes résolument engagés dans la réduction de notre empreinte carbone, pour prendre notre part dans la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la planète.
Nos enjeux culturels et sociétaux
La mission de Cultura est de faire vivre et aimer la culture. Pour cela, nous souhaitons stimuler la diversité des pratiques culturelles, sources d’éveil et d’émancipation.
Nos enjeux sociaux
Nous accordons une attention particulière au bien-être de nos collaborateurs à la diversité, l’inclusion et l’égalité des chances, mais aussi à leur épanouissement, en encourageant l’expression des talents artistiques.
Votre vote
Demain, demain
J'ai beaucoup apprécié cette fiction documentaire rappelant l'histoire du bidonville de Nanterre. J'aurais presque pu croiser les enfants de Kader à l'école puisque j'habitais Courbevoie qui est tout proche de Nanterre. La construction du site de la Défense, les jeux dans les terrains vagues (encore nombreux à l'époque), me rappelle des souvenirs d'enfances. Bien sûr nous connaissions l'existence du grand bidonville de Nanterre sans y avoir jamais pénétrer mais nous pouvions le voir de la route et cette image est restée gravée dans ma mémoire. Laurent Maffre reprend le témoignage de Monique Hervo qui est intervenu pendant dix ans pour aider (aide scolaire, écrivaine public, conseil et accompagnement humain) auprès de ce public très vulnérable. Je troue que l'auteur réussit très bien à traduire les paradoxes de cette époque. En effet le scénario met bien en valeur la complexité d'une situation où la population était officiellement Française ( jusqu'en 62), travailleuse et discrète et officieusement perçue comme un ennemi ( FLN, 17 octobre 61). Le récit se veut non polémique (Papon n'est jamais cité) et se veut très optimiste sans tomber dans l'angélisme. La narration est fluide malgré quelques flash back pour insérer quelques éléments historiques qui, expliquent le contexte ( guerre en Algérie, manif du 17 octobre). Les auteurs préfèrent minimiser le racisme ambiant pour honorer les Français aidants . Monique Hervo est ainsi mis en scène sous les traits de Françoise. Ce récit-témoignage est à mes yeux très important 60 ans plus tard dans un contexte où les relations Franco Algériennes sont toujours compliquées. Le graphisme en N&B de Maffre amplifie le côté reportage du récit. Le trait est épuré avec une belle recherche sur les visages masculins. J'ai eu un peu plus de mal sur les visages féminins. Surtout j'ai admiré le travail pour transcrire les détails du bidonville. A la fois dans ces extérieurs et pour la vie intime les atmosphères décrites sont très crédible. J'ai vraiment été impressionné. Une lecture qui traverse de nombreuses thématiques: historique, sociale, sociétale qui mérite la lecture d'un public large. Perso un très bon 4
Journal d'un prof à la gomme
Ah oui quand même ! Si j'ai été de suite séduit par le dessin (et le sujet) de cette BD au point d'en faire l'acquisition, j'avoue que je ne m'attendais pas à un être atteint à ce point. J'imaginais quelque chose d'assez drôle et finalement léger. Or drôle, ça l'est, mais il s'y lit quelque chose de bien plus profond. Quelque chose qui chez moi résonne avec la série italienne Anna, vue récemment. Quelque chose qui interroge sur le type même d'êtres humains que nous sommes actuellement en train de "lâcher dans la nature". Notre auteur à la gomme nous embarque dans son expérience aussi aisément qu'un toboggan. Très vite, il plante le contexte : profondément secoué par la mort de Samuel Paty, il décide de prendre les armes par les cornes et de monter au front. En quelques mois, il passe le concours et devient prof, avec la volonté farouche d'accomplir son devoir du mieux possible. Il se heurte rapidement aux discours ineptes du système éducatif et son imbitable catalogue d'acronymes, mais surtout à la réalité du terrain. Et c'est là que Fred Leclerc dresse une carte des opérations proprement glaçante. Il se passe manifestement quelque chose de grave dans la jeunesse d'aujourd'hui, et l'Education Nationale se révèle totalement incapable d'agir. Ce à quoi le lecteur assiste ici, c'est au sauvetage désespéré des enfants par des professeurs qui font tout ce qu'ils peuvent. Tout cela, Fred nous le raconte avec une franchise sans reproche. Il nous expose ses faiblesses et comment il a fini par renoncer devant cette tâche herculéenne qui consiste aujourd'hui à éduquer les enfants dans les zones délaissées. Au cours de la lecture, on passe par tous les états du spectre émotionnel. On partage ses ironies face aux discours, ses colères devant l'impuissance, et derrière tout ça, l'amour pour ses élèves, malgré tout. Mais au passage, Leclerc n'oublie pas d'être drôle. S'il use de quelques ressorts comiques très sattoufiens, on ne lui en tient pas rigueur. Journal d'un prof à la gomme est un petit condensé vif d'une situation, une chronique vivante et honnête. Ca ne donne aucune leçon, c'est humble, mais c'est dit ! Et montré. Enfin, last but not least, tout cela est emballé par un formidable petit coup de crayon. Franchement !
Le Rapport de Brodeck
Lu après La Route, je ne peux qu'ajouter une belle note à cette adaptation du roman de Claudel que j'ai lu il y a un paquet d'années maintenant mais qui m'avait marqué. Une histoire de la cruauté et de la lâcheté humaine que Larcenet retranscrit dans certaines images choc. Les nazis sont figurés plus comme des animaux que des humains. Très beau travail graphique indéniable, un noir et blanc proche de la gravure dont on admire chaque page, des animaux par exemple d'un beau niveau de détail. Le format paysage permet de voir les choses en format cinéma avec souvent peu de textes. D'ailleurs dans le premier tome on a presque l'impression qu'il se passe peu de choses. Quel est ce fameux événement et qui est cet étranger venu dans le village isolé à propos duquel Brodeck doit rédiger un rapport ? On le découvre dans le tome 2 qui révèle l'injustice subie par Brodeck et sa famille, on peut le trouver étonnamment passif de continuer à vivre dans ce village avec ces lourds souvenirs.
Phantom Road
« Phantom Road » est une nouvelle série fantastique/horreur de Jeff Lemire, et le moins qu’on puisse dire c’est que ce premier tome est scotchant ! L’histoire s’emballe après à peine 7 pages, et ne lâche rien pendant les 130 pages de ce premier tome, que j’ai englouti en un temps record. L’intrigue est prenante et enjouée, et parle de mondes parallèles, d’agents du FBI, de monstres bizarres et d’un objet mystérieux (et magique ?) devant être transporté par nos 2 compagnons d’infortune… ces derniers sont attachants et bien définis, grâce à une narration en flashbacks nous montrant leur passé. Les deux dernières pages introduisent un personnage qui m’a laissé dubitatif, mais je lirai quand-même la suite, en espérant que l’auteur réussisse à contenir son histoire et son univers. Gabriel Hernandez Walta avait déjà bossé avec Lemire sur Sentient, et propose ici une mise en image classique mais efficace. Les couleurs de Jordie Bellaire (qui n’en est plus à son coup d’essai) participent grandement à l’ambiance inquiétante du récit, tout en contribuant directement à la narration (les tons sont différents pour les deux « mondes »). Un premier tome prenant au possible, vivement la suite ! MAJ après lecture du tome 2 : pas de surprise, l’histoire continue sur sa lancée et reste scotchante, même si je déplore le manque de réponses après 2 tomes, on nage toujours en plein mystère, clairement les auteurs vont développer l’intrigue sur la longue… je lirai la suite, c’est sûr !
L'Orfèvre (Lozes)
Je viens (enfin !) d'achever la lecture de cet album si singulier. Il se démarque réellement de ce qu'on peut lire actuellement. Il marche en dehors des sentiers battus tout en étant de facture classique; ce n'est d'ailleurs pas le seul paradoxe de L'ORFEVRE. Ce qui m'a le plus subjugué, c'est le soin extraordinaire accordé au dessin. C'est stupéfiant de précision. Aucun décor n'est laissé au hasard ni abandonné à l'esquisse. Avec un souci extrême, Lozes prend la peine d'aller jusqu'à distinguer chacune des matières qu'il dessine. C'est un travail pharaonique. Le titre de l'album n'est-il pas en fait l'écho du travail fourni par le dessinateur, un véritable travail d'orfèvre ? Le récit, en dépit de quelques défauts mineurs par instants, se révèle passionnant, émaillé de quelques scènes marquantes comme celle du cinéma Gaumont Palace. Ce n'est pas tant l'enquête qui nous tient en haleine que l'ambiance étrange liée à la succession inexorable d'événements nous conduisant à une spectaculaire boucle temporelle. Nous savons que nous assistons à un exercice de style et nous guettons sans cesse tous les détails pour s'assurer que les engrenages se calent parfaitement. Le parcours initiatique qui se déroule devant nos yeux alors que nous savons bien où il va nous mener, ce parcours nous oblige à développer une attention soutenue à l'égard de la structure même du récit. Nous restons tout du long un lecteur vigilant. C'est le tour de force de cet album que de nous nous rendre pleinement conscient de chaque détail qui se présente à nous; nous tentons constamment de trouver le sens de chaque chose et sa place dans la mécanique générale du récit. Au final c'est un album terriblement attachant que j'ai refermé à regret et que je relirai avec plaisir à n'en pas douter.
Mamie n'a plus toute sa tête
Voilà un album que j'ai adoré. Je ne connaissais pas Romain Dutreix, dorénavant je vais guetter ses futures productions avec beaucoup d'attention. Il y très longtemps que je ne m'étais amusé autant à lire une bande dessinée. Il y a même des moments franchement hilarants. L'histoire est prenante et merveilleusement racontée. Dutreix a un sens du rythme infaillible. Le dessin est épatant, avec une stylisation remarquable et un sens extraordinaire pour représenter les expressions des visages et les postures des corps des personnages. C'est vivant au possible. La mise en couleur est elle aussi très réussie. Bref les parties graphique et scénaristique sont de haut niveau et concourent à offrir un album de bande dessinée populaire et grand public de premier ordre. Et je dois avouer que l'annonce d'une suite en fin d'album m'enchante littéralement. note: 4,5/5
Alyte
C'est à nouveau un très bel album de Jérémie Moreau. Dans cet ouvrage au format agréable (pratiquement un carré de petite taille), on suit le périple d'un jeune batricien, qui, comme son père l'avait fait avant lui, cherche la terre promise, une mare, un écrin de verdure qui permettra peut-être à sa progéniture de s'épanouir et de perpétuer à son tour le cycle de la vie. Alyte, petit orphelin miraculé, va faire des rencontres qui le marqueront et lui permettront de trouver le courage suffisant pour affronter la terrifiante " Léthalyte ", cette bande grise mortifère qui recrache impitoyablement ses victimes. Pour peindre cette ode à la nature et au monde animal, J. Moreau utilise comme il le fait depuis un certain temps une palette aux couleurs très vives, pop, acidulées, mais comme il le dit lui-même, cet univers est " faussement mignon " et souvent sans concession car la vie, comme le rappelle chaque péripétie d'Alyte, demeure incertaine, plus que jamais fragile, car les dangers qui la menacent se multiplient désormais sous l'effet de l'activité humaine et du réchauffement climatique. Les images de Moreau sont puissantes. Nul doute qu'elles marqueront également durablement les jeunes enfants qui découvriront ce joli conte écologique et poétique. Comme dans son " Discours de la panthère ", la nature est vue à hauteur d'animaux. Mais " Alyte " me semble plus homogène que Le Discours de la panthère (qui était composé d'histoires courtes parfois inégales). Le récit de ce dernier ouvrage est sans temps morts, moins sentencieux que celui de son grand-frère peut-être et il finit en beauté avec une rencontre particulièrement bien amenée entre notre crapaud héroïque et un personne dont je vous laisse découvrir l'identité ! Au fil de cette odyssée, j'ai également pensé à Miyasaki, il me semble en effet voir une filiation entre le célèbre auteur japonais de " Nausicaa " et Jérémie Moreau, à la fois dans les thèmes abordés et dans la représentation de la nature avec les eaux qui jaillissent, les arbres qui bruissent et la vie animale qui résiste tant bien que mal aux coups de boutoir d'hommes insensés. Pour moi, c'est ni plus ni moins un indispensable de cette année 2024 (!) et un coup de coeur bien sûr !
Des lendemains sans nuage
J'ai beaucoup apprécié cette lecture. J'ai trouvé beaucoup d'inventivité dans le scénario de Vehlmann . Un scénario très tonique avec cette fausse structure en histoires courtes qui donnent beaucoup de tonus et d'angles différents. La thématique centrale de l'album m'a fait pensé à la biographie uchronique que Pierre Emmanuel Schmidt avait imaginé avec un Adolf Hithler artiste peintre aux Beaux-Arts de Vienne. Velhman reprend avec brio cette manière qui ouvre de nombreuses possibilités dans l'uchronie potentielle et la SF base de l'album. Les auteurs y ajoutent une forte touche d'humour qui rend la lecture très agréable. J'aime beaucoup le travail de Gazzotti. Son trait est un peu moins arrondi que pour ses autres séries phares mais la cohérence avec le dessin de Meyer est parfaite à telle point qu'il est difficile de voir la différence. Un beau travail d'équipe. Une lecture récréative très agréable avec une belle créativité.
Journal de bord d'un taxi parisien
J’avais lu il y a quelques temps après sa sortie le premier tome, n’avais fait que feuilleter brièvement le suivant, et je me suis remis à cette série avec le troisième et dernier, « Mon vrai visage ». Et le fait est que s’il n’use pas d’un jeu de mot moqueur et agressif dans son titre comme les deux précédents, c’est que ce titre annonce une petite surprise. En effet, il révèle une supercherie (dans un texte en fin d’album), puisque le chauffeur de taxi dont les strips – publiés sur le net – sont ici repris, n’a en fait jamais existé. Je fais partie de ceux (tous les lecteurs sans doute ?) qui se sont laissés prendre à ce canular – il est vrai peu dommageable (même la mairie de Paris a attribué un prix à Michel de la Teigne !). Connaitre la véritable identité des auteurs ne change rien à l’intérêt ou non des strips (même si ça leur enlève le côté « témoignage véridique, de terrain »). Chaque strip est généralement suivi d’une page de texte, où notre prétendu chauffeur de taxi un peu aigri, mais surtout revendicatif, précise ce qu’il pense du genre de spécimen qu’il vient de convoyer. Chaque client est donc pour notre taximan (pour Rémi Amy donc) l’occasion de se lâcher, durant le strip BD d’abord, de façon plus posé et incisive dans le texte ensuite, contre tout ce qu’ils (La Teigne et Amy donc) vomissent : les racistes, le libéralisme, les assureurs, les supporters, les prénoms à la con, la religion, les people, les sondeurs, etc. Si l’ensemble est inégal, je l’ai trouvé globalement à la fois amusant (parfois franchement drôle, en particulier lorsque le chauffeur devient outrancier) et intéressant. Sous couvert d’humour, pas mal de messages « engagés » passent. Et passent très bien me concernant ! (Voir en particulier le texte « Prise d’otages » dans les premières pages du troisième album) Une lecture recommandée en tout cas. Note réelle 3,5/5.
L'Héritage fossile
Une très bonne lecture ! Si elle peut surprendre à première vue, la forme (superpositions et incrustations d'éléments avec un rendu 3D) n'est finalement pas du tout un souci, c'est même plutôt réussi je trouve (mention particulière pour les vues extérieures des vaisseaux). Quant à l'intrigue, elle est captivante (un grand auteur de BD est décidément avant tout pour moi un conteur de talent). Je n'avais rien lu auparavant sur l'histoire et c'est très important à mon avis (voire indispensable) pour apprécier cet album de S.F relativement classique mais à la tension grandissante. A ce sujet, je viens de parcourir les autres avis très pertinents de mes camarades et je vous conseille de lire celui de Blueboy APRES votre découverte de cet album. Quoi qu'il en soit, je comprends mieux désormais le titre qui peut d'ailleurs avoir plusieurs significations. L'auteur a donc vraiment fait du bon travail et si la fin n'est peut-être pas à la hauteur de mes espérances, j'ai été happé par ma lecture jusqu'à la dernière page. Pour l'achat, comme l'intérêt de ce récit repose essentiellement sur les révélations successives, à vous de voir, mais je n'oublierai pas ma lecture de si tôt. Après un début d'année un peu décevant, voici un autre album marquant de 2024 ! Je n'avais fait que feuilleter Jean Doux et le Mystère de la Disquette Molle et j'avais trouvé que l'humour tombait souvent à plat, mais il faudra à l'occasion que je regarde ça de plus près.