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Couverture de la série Sur la route de West
Sur la route de West

Un road trip assez prenant entre deux femmes, toutes deux fuyant quelque chose, chacune cherchant un peu à retrouver son chemin avec l'autre. Comme souvent dans ce genre de récits, le sujet central est l'âme humaine, les propos de fond sont durs et viscéraux, on se permet de beaux moments de silence et de contemplation, et surtout on laisse une grande part à l'imagination. Ici encore davantage, d'ailleurs, car le récit prend rapidement un tournant très imagé, métaphorique et poétique, avec cet étrange chat qu'il faut ramener à une ville qui n'existe pas et ces routes semblant symboliser la liberté et les chemins de vie de manière un peu plus concrète que prévu. La forme est fluide et agréable, les trois cents pages se lisent très vite, le texte est plutôt bien trouvé et le dessin est simple mais beau. J'aime beaucoup les jeux d'ombrages et d'éclairages dans cette mise en scène, il y a des beaux jeux de contrastes par moments. Les road trips ne sont pas nécessairement mon genre narratif préféré et les grands espaces américains me laissent sincèrement de marbre, mais le propos de l'œuvre a su m'atteindre. L'histoire est dure, belle et réflexive, j'ai passé une très bonne lecture, quand bien même je suis sûre qu'une partie non négligeable de la métaphore finale m'a échappée (frustration, quand tu me tiens...). Je recommande chaudement la lecture, mais je me sens obligée de mettre en garde car je pense que ce récit ne plaira certainement pas à tout le monde.

12/03/2025 (modifier)
Couverture de la série L'Université des Chèvres
L'Université des Chèvres

Au travers de cette histoire, Lax rend hommage aux passeurs de connaissances. Dans les montagnes françaises au XIXème siècle, puis dans celles de l’Afghanistan au siècle suivant, nous suivons deux hommes qui luttent contre l’obscurantisme (singulièrement essentiellement religieux à chaque fois) et cherchent à émanciper les populations en apportant l’école, les livres ou les lettres, dans des régions reculées. Le propos est noble, et Lax nous brosse le portrait d’obscurs héros, avec pour faire le lien entre ces deux personnages une femme, descendante du premier, et amie du second. Et quelque autres sujets abordés (comme le rôle de la NRA aux États-Unis). Comme d’habitude, le dessin de Lax est beau et très agréable. Il accompagne très bien ce récit que j’ai bien aimé. Un récit qui se déroule sur un rythme assez lent. Mais on ne s’ennuie jamais. Une lecture très recommandable ! Et qui résonne aujourd’hui plus fort, à l’heure où les Talibans rendent impossible toute émancipation par l’enseignement libre en Afghanistan. Ou alors que Donald Trump supprime des milliers de postes dans le ministère de l’éducation américain (tout en renforçant la censure de milliers d’ouvrages). Le message véhiculé par l’album de Lax est hélas encore nécessaire à défendre.

12/03/2025 (modifier)
Couverture de la série Super Sourde
Super Sourde

L'album nous raconte la jeunesse de son autrice, Cece Bell, qui a perdu l'audition suite à une méningite. L'histoire est celle de son rapport au monde, de ses liens avec ses proches, de son besoin affectif et de la réapropriation de l'image qu'elle renvoie aux autres. Le récit est très personnel (normal vous me direz, il s'agit d'une autobiographie), les situations et émotions complexes que vit (subit même) Cece sont rendues de façon très facilement compréhensible et touchent. L'ostracisation presque inconsciente des gens à son égard, les questions et commentaires déplacés, les efforts et contraintes qu'elle s'impose dans le simple but de se faire accepter/de rentrer dans le moule, la peur d'être perçu-e comme différent-e et d'être rejeté-e, la grande difficulté pour trouver des ami-e-s sincères qui lui veulent du bien, la discrimination positive, ... tous ça sont des problèmes quasiment universels pour toutes les personnes étant touchées par un handicap dans nos sociétés (et facilement compréhensible par toute personne douée d'empathie basique). L'album m'a touché. D'une part parce que, même sans être sourde, j'ai personnellement vécu des situations similaires à la jeune Cece, mon enfance et mon adolescence ayant été une successions de tentatives de relations amicales catastrophiques et d'ostracisation au mieux maladroite par mes camarades de classe (que voulez-vous, les gens n'ont qu'à naître comme tout le monde) ; d'autre part car ma sœur a été hospitalisée il y a tout juste trois mois pour une méningite et qu'elle a failli y passer, donc apprendre un peu plus sur les séquelles dramatiques que peut produire cette maladie m'intéresse et me terrifie sincèrement. J'ai beaucoup aimé que l'album déconstruise certains mythes autour de la surdité, comme le fait que la lecture sur les lèvres n'est en réalité pas un superpouvoir mais une capacité très faillible dépendant énormément de l'articulation de la personne et surtout de la bonne visibilité des lèvres (sans oublier le fait que beaucoup de sons se ressemblent), ou encore rappelle que les appareils auditifs coûtent cher (surtout aux États-Unis) et que les personnes non-concernées devraient particulièrement en prendre soin (si l'appareil casse, c'est l'autonomie de la personne qui se retrouve impactée). Le dessin est simple, peut-être simpliste pour certain-e-s, mais je trouve que ce style relativement enfantin marche pour illustrer cette histoire sur l'enfance. Une lecture conseillée, surtout pour quiconque aimerait en apprendre davantage sur l'expérience au quotidien de jeunes personnes touchées par la surdité. (Note réelle 3,5)

12/03/2025 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série La Ville des mauvais rêves - Urani
La Ville des mauvais rêves - Urani

Europe ne comprend pas grand-chose à tout cela. - Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Sa première édition date de 2000. Il a été réalisé par David B. (Pierre-François Beauchard) et Joann Sfar qui ont réalisé le scénario à quatre mains, ainsi que les dessins. Les couleurs ont été réalisées par Brigitte Findakly & Delphine Chedru. Il compte quarante-six planches de bande dessinée. Chapitre un : le dompteur effacé. Un cirque installé sur une grande place de la ville d’Urani, capitale d’un pays des confins de l’Europe pris entre les empires allemand et russe. Le professeur Odin, en habit de dompteur, dit au revoir aux tigres dans la cage. Il leur explique que c’est fini, que les tueurs de l’Ermite ont retrouvé sa trace, il doit les quitter. Il partirait bien en leur laissant la porte ouverte, mais ça ne se fait pas. Odin retourne dans sa roulotte où se trouvent d’étranges appareils technologiques. Dans son for intérieur, il se dit qu’il n’a pas le temps de cacher tout ça. Ce n’est pas grave : personne n’arrivera jamais à faire fonctionner ses inventions, il dépasse les meilleurs savants de plusieurs cerveaux. Il a dû sacrifier un œil pour acquérir la connaissance. Il décide que le temps est venu pour lui de disparaître, littéralement. Grâce à un objet mécanique, il commence par effacer son ombre. Puis il efface son reflet dans le miroir, ce qui lui fait quand même une sale impression. Enfin, il se rend invisible et il s’en va. Dans la cage, un des tigres se redresse sur ses antérieurs, et il décide d’aller voir ce qui passe, tout en collant une mandale à un autre tigre qui est sur son passage. En humant l’air, il se rend compte que la roulotte est vide. Il voit arriver un groupe de gens louches, il se cache, et il s’en va discrètement après les avoir laissé passer. Il a reconnu les tueurs au service de l’Ermite. Chapitre deux : Le Diable Ermite. Dans sa planque, l’Ermite converse avec son second Igor, attablé et s’apprêtant un manger un poulet. L’Ermite a compris : il ne sort plus, plus de boîtes, plus de cercle de jeu, plus de grosses voitures, ni de prostituées à chaque bras. Il occupe son temps à réfléchir. Il réfléchit sur le mal. C’est fascinant le mal. Il explore le mal. Un peu plus chaque jour et il n’en revient pas. Depuis qu’il s’est retiré du monde, les affaires tournent toutes seules. Personne ne le voit plus mais on sait qu’il est là. Il fait encore plus peur. On l’a surnommé le Diable Ermite. Un homme de main remarque qu’Europe, une grande femme à la peau jaune, est entrée dans le bar. Il la menace avec son pistolet. Elle indique à l’Ermite qu’il n’était pas bien caché, tout en avançant. Elle flanque un grand coup dans le menton du porte-flingue, lui brisant la nuque. Puis elle déchire la gorge d’Igor d’un grand coup d’ongle, et elle avance sur l’Ermite. Celui est resté calmement attablé. Il s’adresse à Europe en lui disant que si elle le voulait mort, il le serait déjà. Il se rend, elle peut appeler la police. Il plaisante : veut-elle de la monnaie pour le téléphone ? Ermite répond qu’ils sont déjà en route. Le commissaire apprend à Europe que la police a coffré une des équipes de l’Ermite au cirque de l’Est, et qu’ils ont raconté une histoire bizarre : Odin le savant se cachait au cirque dans la peau d’un dompteur. Une couverture composite mettant en avant les deux personnages principaux, le professeur Odin et Europe, l’un avec un pistolet à la main, l’autre peut-être dépourvue de vêtement, un groupe de gugusses patibulaires, et des bâtiments d’inspiration Europe de l’est. Le lecteur peut penser à un une série richement peuplée, intitulée La ville des mauvais rêves, dont le premier tome serait Urani. Le récit est découpé en quatorze chapitres plus un interlude, de longueur variable entre deux et quatre pages. Le lecteur peut noter des différences graphiques entre des chapitres : les contours un peu plus arrondis à la fois des formes et des aplats de noir pour David B., le trait plus rugueux et nerveux de Joann Sfar donnant l’impression d’aplats de noir déchiquetés. S’il y éprouve de l’intérêt, il peut ainsi attribuer tel chapitre à tel créateur et tel autre au second. Il se dit que chaque auteur a réalisé l’ensemble de ses chapitres : dessins et scénario. Il remarque également une différence de traitement dans la mise en couleurs : Brigitte Findakly utilise plus volontiers des teintes vives avec de très forts contrastes, Delphine Chedru développe une palette de couleurs plus proches entre elles. Dans un premier temps, il apparaît que chaque auteur met en scène un personnage principalement : le professeur Odin pour David B., et Europe pour Joann Sfar, les personnages secondaires comme Le Tigre et l’Ermite pouvant passer d’un fil narratif à l’autre. Tout commence avec un professeur inventeur de génie qui fuit un cirque dans une ville de l’Europe de l’Est, sans date précise. L’interlude présente la ville d’Urani : Capitale d’un pays des confins de l’Europe, pris entre les empires allemand et russe, impliqué dans toutes les guerres du passé. La présentation continue : Depuis que le pays a adhéré à la Communauté européenne et à l’Otan, Urani a pris une importance stratégique, la population de la ville est à dominante balte, mais il y a également beaucoup de Slaves et de Scandinaves, son port sur la baltique connaît un regain d’activités. Les auteurs évoquent ses bas-fonds, la présence d’organisations criminelles du monde entier, de nombreux services de renseignements, les souterrains qui se déroulent à infini comme les entrailles d’un organisme, et le fait que c’est la seule capitale au monde à avoir un cimetière comme centre-ville : il paraît que cela a une influence sur la mentalité de ses habitants, les mauvais rêves y seraient plus fréquents qu’ailleurs. Le lecteur se dit que les scénaristes ont conçu un cadre permettant de développer toute une série, la ville assurant le rôle de personnage récurrent. Pour autant, il s’agit d’un album contenant une histoire complète pour elle-même, sans suite. Au vu des éléments de genre de ce récit et de l’ambiance entre thriller policier et onirisme mythologique, le lecteur peut le rapprocher d’un hommage ultérieur de David B. : Nick Carter et André Breton - Une enquête surréaliste (2019). Cette bande dessinée raconte une histoire au premier degré : un inventeur de génie qui a conçu et construit un robot humanoïde, destiné à devenir le premier d’une armée de supersoldats, et qui a décidé de disparaître lorsqu’il a compris l’usage qui en serait fait. Plusieurs groupes d’intérêts différents sont à sa poursuite pour le convaincre ou le contraindre à travailler pour eux. En parallèle, Europe, son invention, sa créature, est à sa recherche de manière indirecte. S’il s’attache à cette intrigue, le lecteur risque de rester sur sa faim car sa résolution semble être mise de côté : il se demande si les deux scénaristes ont travaillé en construisant une idée de départ, un principe pour la dynamique du récit, puis ont écrit sous une forme itérative, chacun écrivant son chapitre après avoir lu le précédent, sans plan d’ensemble préalable, en recourant pour partie à une forme d’écriture automatique déclenchée par la partie précédente et canalisée dans une forme narrative d’aventure. Il s’en trouve d’autant plus impressionné que la sensibilité narrative des deux auteurs s’avère très proche, en phase, que ce soit pour le mélange de polar et d’onirisme, ou pour la narration visuelle. À l’évidence, ils se sont coordonnés sur l’apparence des personnages qui passent d’un fil narratif à l’autre, pour les deux personnages principaux, pour l’Ermite, un peu moins pour le Gitan. La ville d’Urani dégage la même sensibilité sous le crayon de l’un comme l’autre, une belle cohérence sophistiquée, conservant des caractéristiques propres à l’un et à l’autre. Le lecteur se laisse emporter par la dynamique de la fuite en avant pour Odin, et de l’enquête pour Europe. Il apprécie cet équilibre très complexe des dessins, entre naïveté et représentations crues. Cela permet de laisser planer le doute sur la nature réelle du Tigre : vraisemblablement pas un être humain au vu de son anatomie, mais un tigre anthropomorphe, ce qui est cohérent avec la présence d’autres individus aux caractéristiques chimériques. D’ailleurs, il y a en douze autres de représentés sur la deuxième de couverture et la page en vis-à-vis. Urani semble associer des spécificités de ville de la partie Est de l’Europe centrale et des éléments romanesques tels que des repères secrets souterrains. Le récit s’apparente ainsi à un conte : une réalité fantasmagorique, peuplée d’individus chimériques, entre métaphores et allégories. Les auteurs font également des références mythologiques : le nom du professeur Odin et celui-ci explique d’ailleurs qu’il a sacrifié un œil pour acquérir la connaissance, ou encore le thème du créateur et de sa créature comme le monstre de Frankenstein. Ils jouent aussi bien avec une spécificité du pénis du tigre, qu’avec la licence artistique des contes (cette école pour filles dans les bois). Cela donne un récit très riche, déconcertant par ses rapprochements inattendus et ses éléments parfois superflus à l’intrigue, une saveur classique de conte, des situations adultes, le tout propice aussi bien à des instants poétiques, qu’à des prises de conscience métaphysiques. Une bande dessinée particulière, associant le talent de deux créateurs singuliers : le tout s’avère être au moins égal à la somme des parties. Le lecteur plonge dans un récit entre policier et fantastique, teinté d’onirisme, la narration visuelle portant chacune de ces composantes de manière harmonieuse. Une aventure associant une trame à l’apparence cartésienne à des événements pouvant s’avérer arbitraires, surnaturels ou parfaitement logiques. Une aventure singulière.

12/03/2025 (modifier)
Couverture de la série Hotel Particulier
Hotel Particulier

Après avoir été littéralement envouté par le magnifique Bluebells wood, j'ai décidé de rattraper mon retard sur l'œuvre de Guillaume Sorel en m'attelant à la lecture de ce one shot. Ma lecture m'a confirmé tout d'abord que je suis véritablement fan du trait de cet auteur. On sent que Sorel prend plaisir à dessiner les personnages, notamment féminins, et jouent des très belles courbes de l'héroïne et de la transparence de sa courte chemise. La mise en en couleurs monochrome tirant sur le brun est également très originale et colle parfaitement avec la thématique de l’œuvre. Du point de vue du scénario, si je suis resté légèrement sur ma faim, on ne peut que saluer l'originalité et la poésie de cette histoire de fantôme bloqué dans l"hôtel qui a vu se réaliser son funeste destin. Agrémentée d'extraits de poèmes ou de romans de Rimbaud, Baudelaire ou Caroll, Sorel nous livre différentes scènes à mesure que l'héroïne passe d'un étage à l'autre et s'invite dans la vie des occupants de l'hôtel, passant de scènes tantôt coquasses (la femme et son mari voyeur) tantôt plus macabres (la voisine dévorée par les chats du quartier) voire teintées de fantastique (la jeune fille disparue prise au piège dans une pièce sans issue ou le voisin festoyant avec les personnages imaginaires des romans qu'il possède). L'ensemble reste malgré tout cohérent, avec en fil conducteur, l'histoire du jeune peintre sans le sou dont notre héroïne s'éprend à mesure qu'elle l'observe. Cette histoire matinée de fantastique, dans la lignée de certaines nouvelles telles que le Horla (que Sorel a d'ailleurs adaptée en bande dessinée) rend ainsi un bel hommage à certains textes de poètes que l'auteur affectionne. Une œuvre originale à lire voire à posséder si on est fan comme moi du dessin de Guillaume Sorel. SCENARIO (Originalité, Histoire, personnages) : 7/10 GRAPHISME (Dessin, colorisation) : 9/10 NOTE GLOBALE : 16/20

11/03/2025 (modifier)
Par pol
Note: 4/5
Couverture de la série Dix Secondes
Dix Secondes

Il y a un peu plus de 10 ans Max De Radiguès publiait Orignal un album racontant le quotidien d'un adolescent persécuté par des camarades de classe. Un petit album au format souple qui ne payait pas de mine, mais dont l'histoire m'avait marqué. L'auteur avait excellé dans sa façon de raconter une histoire banale, une histoire de tous les jours, et de la rendre touchante. Dix Secondes présente quelques points communs, et ne le cachons pas, c'est plutôt agréable. Il est ici question de Marco, un adolescent qui ne fout absolument rien au lycée, ses seules préoccupations sont comment faire le mur pour sortir en douce, zoner avec ses potes et surtout trouver des trucs à fumer ou à boire pour tuer le temps. C'est ça le sujet de cette histoire : le quoditien d'un adolescent à priori sans problème, qui ne vit pas dans un quartier difficile, mais qui trompe son ennui en se défonçant la gueule. Et qui met le doigt dans un engrenage où il lui faut de moins en moins suivre ce que lui dicte les adultes, et de plus en plus de paradis artificiels pour sortir de son quotidien. Et Max De Radigues est très fort pour raconter cela. Il ne se passe finalement pas trop de chose dans cette histoire, mais pourtant on ne s'ennuie jamais. La façon dont elle est racontée, et la façon dont elle est dessinée la rende interessante et plaisante à lire. Parfois c'est amusant, que ce soit par des dialogues ou des situations. Parfois c'est attendrissant. Souvent cela arrache un petit sourire, surtout si on a grandi dans les années 90, de nombreux clins d'oeil à cette époque sont distillés tout au long de l'album. Tout ça fait que ce récit se lit d'une traite, juste avec la curiosité de voir où tout cela va mener Marco. La fin était prévisible mais ce n'est nullement gênant. Un album très agréable à lire, il lui manque peut être juste un coté un plus émouvant pour en faire un livre aussi marquant qu'Orignal l'avait été en son temps.

11/03/2025 (modifier)
Par Ro
Note: 4/5
Couverture de la série Chicou Chicou
Chicou Chicou

Ah ! Bouffée de souvenirs en tombant sur cette BD puisque je lisais assidument le blog de Chicou-Chicou au moment où il était publié en ligne. Celui-ci était un cadavre exquis réalisé à huit puis dix mains par des auteurs qui ont initialement masqué leur identité sous celle de leurs avatars fictifs qui ne leur ressemblait pas forcément. Il s'agissait de Boulet, Aude Picault, Lisa Mandel, Domitille Collardey et Erwann Surcouf qui avait donné vie à Ella, Claude, Frédé, Juan et Fern en leur inventant des aventures du quotidien dans leur petite ville de Château-Gontier, une série d’histoires aussi décalées que divertissantes. L'album papier, lui, ne contenait que la seconde saison de ce blog, qui se déroulait quelques années après la première, comme des retrouvailles des personnages après une longue séparation. On évite ainsi les quelques balbutiements des débuts de la première saison qui se cherchait encore, mais on rate aussi quelques très bons moments de celles-ci, une fraicheur que la seconde saison a un peu perdu. Le concept de relayer l’histoire à chaque auteur apporte des rebondissements inattendus et un style graphique unique à chaque chapitre, ce qui rend l’ensemble jubilatoire, même si la transition entre les styles peut parfois sembler un peu chaotique. J'y ai tout de même une nette préférence pour le graphisme de Boulet et d'Aude Picault, de même que pour leurs personnages d'Ella et de Claude qui sont les plus attachants et hauts en couleur. A l'inverse, j'ai moins aimé les personnages masculins, en particulier Fern qui m'exaspère dans son rôle de séducteur. Et je dois dire certaines blagues tombent parfois à plat. Toutefois, malgré quelques incohérences, l'esprit d'expérimentation et d'humour se maintient, et l’on se laisse emporter par le délice de ce projet collectif. A l'image de La Maison Close qui poussait le concept de blog cadavre exquis encore plus loin, ce recueil, bien que partiellement incomplet, est un régal pour les amateurs de BD débridée et pleine de créativité. Note : 3,5/5

11/03/2025 (modifier)
Par Cacal69
Note: 4/5
Couverture de la série UN3 - Urgence Niveau 3
UN3 - Urgence Niveau 3

Toi, moi, n'oublions pas que nous sommes des privilégiés. UN3 est une œuvre de fiction basée sur des interviews et des recherches effectuées par les auteurs pendant des voyages en Irak, au Soudan du Sud et au Tchad entre 2014 et 2016. Un comics engagé, même si un certain merchandising s'en dégage, le logo de la WFP (programme alimentaire mondial) est largement représenté. Une intervention d'urgence de niveau 3 est le niveau de crise humanitaire le plus grave et de la plus grande ampleur. Et c'est à travers trois histoires que l'on va suivre le travail de ces femmes et de ces hommes qui se battent pour sauver des vies. Des urgences de niveau 3 qui découlent de conflits et du déplacement des populations. Un premier chapitre sur la guerre civile Kurde irakienne de 2014, un second sur la guerre civile sud-soudanaise en 2016 et enfin un dernier chapitre sur la guerre civile au Tchad en 2007. Des récits qui ne qui ne s'attardent pas sur les origines des conflits, mais sur le sort des personnes déplacées, mais aussi sur les membres du WFP qui se démènent pour acheminer de la nourriture et de relayer les informations aux médias. Des récits qui ne ménagent pas le lecteur, difficile de rester insensible devant tant de cruauté. Pas de misérabilisme, du factuel, rien que du factuel. Terrifiant ! Des aides humanitaires toujours nécessaires hélas... J'ai aimé le trait réaliste d'Alberto Ponticelli, il dégage beaucoup d'émotions. Par contre le style plus académique de Pat Massioni m'a laissé de marbre. En conclusion un 4 étoiles pour les deux premiers chapitres réalisés par Dysart-Ponticelli et un 3 étoiles pour celui du duo Dumont-Massioni. Lecture conseillée.

11/03/2025 (modifier)
Par C.GUEGAN
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
Couverture de la série La Bibliothèque des Vampires
La Bibliothèque des Vampires

Je trouve ce livre très captivant et vraiment marrant car les deux filles sont meilleures amies depuis la première minute qu’ elles passent dans cette école de magie. La BD est 100% originale (de mon point de vue), c'est un livre parfait pour les 10/13 ans et je le recommande fortement(car j’ai 12 ans et c'est ma bande dessinée préférée). Bonne lecture !!! ?

11/03/2025 (modifier)
Par Présence
Note: 4/5
Couverture de la série Les Crieurs du crime
Les Crieurs du crime

Punir un crime par un crime, quelle idée aberrante. - Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Son édition originale date de 2024. Elle a été réalisée par Sylvain Venayre pour le scénario, et par Hugues Micol pour les dessins et la couleur. Il comprend cent-trente-huit pages de bande dessinée. Il se termine par trois pages de notes indiquant la source des éléments historiques et des opinions des personnages, que ce soit sur l’affaire Soleilland, l’histoire du journal Le Petit Parisien, (avec son slogan : Le plus fort tirage des journaux du monde entier), le développement du fait divers, des interviews et du scoop, l’affaire Dreyfus, l’apparition du terme Apache, la déconstruction de l’imaginaire de la traite des blanches, la place des femmes dans la police, les lois qui ont pour but d’atténuer les sévérités du code pénal, le service d’anthropométrie fondé par Alphonse Bertillon (1853-1914), l’affaire criminelle Menesclou, l’affaire Troppmann, l’invention des rotatives, la morgue de Paris, Bel-Ami de Guy de Maupassant, le débat sur l’abolition de la peine de mort et la grâce systématiquement accordée par le président Armand Fallières, le quartier parisien de la presse, etc. Lundi quatre février 1907, à Paris, dans le quartier de la gare de Lyon, les jeunes époux Valentin et Marguerite marchent dans la rue, bras dessus, bras dessous. Elle évoque le pont des soupirs pour leur lune de miel, et qu’ils pourront s’y embrasser en public, en pensant à tous les amoureux qui sont passés par là avant eux. Son mari la détrompe en expliquant que si elle avait lu le guide, elle saurait que le pont des Soupirs relie le palais des doges à la prison de Venise. Et que les soupirs de ce pont ont peu à voir avec les leurs, d’amoureux. En réalité, c’étaient les tristes soupirs de ceux qui avaient été condamnées par la justice des hommes. Les tourtereaux s’arrêtent car ils croisent Jean, un collègue journaliste de Valentin. Il leur apprend que Père Lachaise, leur rédacteur-en-chef, les attend, car il y a eu un drame du côté de Ba-ta-clan : un crime. Une fillette a disparu et elle a certainement été assassinée. Jean remet un mot du patron à Valentin, dans lequel Lachaise lui demande de renoncer momentanément à son voyage, et lui promet de réserver aux frais du journal sa chambre nuptiale au Danieli. Les deux journalistes se rendent chez le patron, et celui-ci leur expose l’affaire, et aussi ce qu’en pense le chef de la Sûreté : une fillette a disparu jeudi dernier, elle s’appelle Marthe Erbelding. Le jeudi 31 janvier dernier, à une heure de l’après-midi, un ami de la famille est venu pour emmener la fillette à un concert à Ba-ta-clan. Un certain Albert Soleilland. Il dit que la petite s’est absentée aux water-closets mais qu’elle n’est jamais revenue. Lui et la famille de la fillette l’ont cherchée partout aux alentours de Ba-ta-clan, dans les hôpitaux, à la morgue… Rien ! La couverture évoque les crieurs de crime avec l’image d’un jeune adulte brandissant un exemplaire d’un journal, un paquet d’autres exemplaires sous le bras, pour crier les informations se rapportant donc à un crime. Le lecteur suppose qu’il va suivre un crieur de journaux, ou qu’il va découvrir le traitement des faits divers sordides au travers de leur vente à l’unité dans la rue. La quatrième de couverture lui promet la mise en scène d’un débat public sur la peine de mort, entre abolitionnistes et rétentionnistes. Les premières pages exposent le dispositif narratif : les auteurs mettent en scène Valentin, journaliste ou plutôt reporter dans un des quatre grands quotidiens parisiens, avec autour de lui son épouse Marguerite, un collègue reporter Jean jouant un rôle très secondaire, ainsi que Léonie (dessinatrice de presse pour le même journal que Valentin) et Armand son époux médecin de profession. Valentin est missionné par son rédacteur-en-chef pour écrire des articles sur une meurtre sordide : celui de Marthe Erbelding, une fillette de onze ans, le 31 janvier 1907, par Albert Soleilland (1881-1920), une affaire criminelle réelle. Dans le cours de l’enquête, d’autres journalistes la comparent à l’affaire Menesclou, le viol et le meurtre atroce d'une fillette de quatre ans, perpétré par Louis Menesclou, le 15 avril 1880 rue de Grenelle. Pour autant, l’affaire suit son cours, sans que le personnage principal n’en devienne un acteur. Le lecteur comprend rapidement qu’il s’agit tout d’abord d’une reconstitution historique, focalisée sur l’évolution de la presse à sensation, en suivant à distance les différentes étapes d’une enquête. La forme peut s’avérer un peu déroutante puisque les informations sur l’affaire sont acquises de seconde main : par le rédacteur-en-chef, par des personnes qui étaient présentes lors de déclaration ou d’intervention de la police, sans accès direct à l’accusé ou même à des proches impliqués dans l’affaire. Dans le même temps, le scénariste utilise de nombreuses références qu’il explicite plus ou moins dans le cours de la bande dessinée, et dont il cite explicitement les sources dans les notes de fin. Il estime que le lecteur doit posséder un minimum de connaissances sur l’affaire Dreyfus, c’est-à-dire qu’il en a déjà entendu parler, et qu’il peut comprendre que l’affaire Menesclou était une autre affaire criminelle retentissante. En effet, la compréhension et l’appréciation du récit ne se trouvent pas obérées, ni le plaisir de lecture diminué, si le lecteur découvre pour la première fois ces événements. Il peut satisfaire sa curiosité avec les notes, qui sont plus étoffées qu’une simple liste de titres avec des dates, car elles sont intégrées dans un texte rédigé, apportant des remarques supplémentaires. La narration visuelle porte une part prépondérante de la reconstitution historique en montrant les différents lieux, les tenues vestimentaires, les accessoires du quotidien et plusieurs activités spécifiques à l’époque. Dès la première page, le lecteur identifie aisément la gare de Lyon avec sa tour de l’Horloge, et il reconnaît bien les pavés parisiens. Au fil de l’album, il relève le modèle de banc (Alphand), l’église Saint-Ambroise (11e arrondissement), la préfecture de police sur l’île de la Cité, les bouquinistes des quais de Seine, Note-Dame-de-Paris, l’institut médico-légal, les toitures en zinc, et de nombreux troquets avec leur terrasse et leur intérieur. Au bout de quelques pages, le lecteur découvre une illustration en double page, pages 18 & 19, une vue de plain-pied dans une rue de Paris, une scène du quotidien avec des voitures à cheval, une automobile, des façades, des livraisons. C’est ainsi dix-sept illustrations en double page qui viennent installer le lecteur dans un instantané urbain du quotidien de l’époque : les double-pages 18 & 19, 30 & 31, 38 & 39, 46 & 47, 62 & 63, 72 & 73, 84 & 85, 96 & 97, 104 & 105, 116 & 117, 126 & 127, 130 & 131, 132 & 133, 134 & 135, 136 & 137, 138 & 139, 140 & 141. Ainsi les auteurs indiquent, voire insistent, que la localisation est essentielle dans cette histoire. Le lecteur peut considérer que Paris devient un personnage à part entière, ou plus simplement que le déroulement de ces événements est configuré par ces quartiers de Paris, qu’ils ne peuvent survenir qu’en ces lieux. La narration visuelle s’avère des plus agréables : des dessins réalisés en couleur directe, y compris les traits de contour. L’artiste met en œuvre une forme de simplification dans la représentation des personnages et des décors, tout en conservant une forte densité d’informations visuelles. Le scénariste a pris soin de varier les lieux et les situations, et le dessinateur utilise ses compétences de metteur en scène pour diriger ses personnages de manière naturaliste, sachant transmettre leurs émotions par leur expressions faciales, montrant leurs petits gestes et les activités auxquelles ils se livrent tout en discutant, en délivrant des informations, en échangeant des points de vue. Ainsi les images insufflent une vie aux personnages, les font se comporter en adulte, les montrent évoluant dans leur environnement habituel, faisant apparaître leur personnalité et leur caractère, ce qui rend leurs réactions et leur comportement compréhensibles. Ce qui rend également compte de l’animation des rues de Paris, et ce qui rend concret les limites de l’exercice du métier de reporter tel que l’exige le rédacteur-en-chef. L’intérêt du lecteur est ainsi éveillé pour les différents thèmes abordés. Au vu du titre et de la couverture, il s’attend au développement des aspects les moins reluisants de la presse à sensation… dès cette époque, en ce tout début du vingtième siècle. Il voit à l’œuvre des mécanismes toujours d’actualité, tels que la course au scoop, le nombre limité de sources d’informations pour les journaux en grand nombre, les techniques pour rendre chaque bribe d’information plus sensationnelle, dans le seul but d’augmenter les ventes, c’est-à-dire le chiffre d’affaires et le profit. Valentin fait observer au Père Lachaise que : il y a beau temps que les journaux ont renoncé à éduquer le peuple, que les annonces pour les pilules revigorantes ont autant de valeur que les débats politiques, et que d’ailleurs, souvent on ne distingue même pas les informations des annonces. Toute ressemblance avec le temps présent… Il serait aussi possible de rajouter la propension contemporaine à se placer dans le registre de l’opinion orientée, plutôt que dans le registre du journalisme. Éventuellement, le lecteur peut assouvir sa curiosité en allant chercher des informations complémentaires sur l’affaire Soleilland, sur l’affaire Menseclou, et sur l’affaire Troppmann. Il va également se renseigner plus avant pour comprendre le choix orthographique de Ba-ta-clan (avec des tirets entre chaque syllabe). En fonction de sa culture, il découvre l’existence du mouvement abolitionniste de la peine de mort à cette époque, la parade aux exécutions employée par le président de la République, la contre-parade mise en œuvre par les rétentionnistes, la politisation de l’affaire Soleilland dans cet enjeu. La belle époque du fait divers : un beau rapprochement entre la Belle Époque et la presse à sensation. La narration visuelle s’avère impeccable, de très belles reconstitutions du Paris d’époque, une façon discrète et sophistiquée de rendre compte de l’activité quotidienne dans la rue. Le scénario peut prendre au dépourvu au départ selon les attentes du lecteur. Le récit met en scène le développement des techniques de la chasse au scoop, y compris l’écriture orientée pour gonfler de maigres informations, dans le contexte d’un mouvement d’abolition de la peine de mort. Une reconstitution intéressante et enrichissante, mettant en lumière des constantes dans l’exercice du journalisme à sensation.

11/03/2025 (modifier)