Une très belle illustration de l’ineptie du capitalisme à hauteur d’enfant.
C’est simple, très court, mais cela sait amener sa morale avec justesse, par une simple remarque à la fin. Même si elle se voit venir quand on est adulte, l’ironie finale reste drôle.
Idéal pour ouvrir la discussion avec des enfants.
Le dessin d’Emile Bravo est, comme toujours, très beau.
C'est en écrivant mon avis que je viens de découvrir le prix gagné par l'autrice Yoon-sun Park à Angoulême. Cela me fait plaisir car j'ai aimé la lecture de ce conte coréen modernisé. Pourtant cela reste assez classique avec une JF,Bang élevée comme un garçon jusqu'à la mort de ses parents et qui préfère garder cette identité malgré les remontrances de sa fidèle servante, madame Ju. Evidemment Bang fera tout mieux que le hommes grâce à son éducation et son intelligence. La trame est donc très convenue mais l'autrice réussie à donner beaucoup de dynamisme à son récit. Les trouvailles pour faire durer la supercherie sont amusantes et le triangle Bang-Bing -Mme Ju bien équilibré dans un humour assez tonique . On trouve même une pointe de fantastique qui donne un peu de piment au récit. Le découpage se fait en petit chapitre se qui permet aux jeunes lecteurs de bien cloisonner leur lecture.
Le graphisme est très intéressant avec un trait fin et dynamique qui donne beaucoup de mouvements au visuel. Il y a une abondance de couleurs qui permettent aux enfants de bien s'approprier la série.
Concernant la conclusion je pense que l'on peut avoir plusieurs niveau de lecture avec ce coming out de Bang. Une lecture enfantine conduit probablement à accepter son identité profonde de fille vers un bonheur plus maternel alors qu'une lecture adulte me fait penser à une thématique plus moderne à travers une sorte de mariage Gay. La thématique est d'ailleurs en filigrane puisque mme Ju rouspète en disant que " … dans la nature, un bébé a une maman et un papa." On pourrait épiloguer longtemps sur cette vision mais comme le souligne Ro , l'abord du Genre n'est pas si visible pour les enfants. C'est le côté aventure qui domine.
A noter qu'il n'y a pas de pages marquées ce qui peut rendre la lecture un peu difficile si l'on cherche des références.
Cette série a aussi l'avantage d'ouvrir les enfants sur un univers coréen pas forcément dans leurs lectures habituelles.
Je pousse un peu ma note mais la lecture reste plaisante. 3.5
Aussi peu d'avis pour cette série pleine de poésie et de douceur, cela me fait un peu mal au cœur. Je suis un grand fan de Renaud Dillies et de la production des éditions de la Gouttière. Une fois encore cette série est une grande réussite en direction d'un jeune lectorat mais aussi de leurs parents. Perso je ne me lasse pas de lire et relire cet auteur.
Un épouvantail est fait pour terroriser comme beaucoup de choses qui nous entourent. Mais voilà la nécessité ou l'amour peuvent rapprocher ce qui semble inconciliable et créent un esprit de paix et de bonheur. C'est toute la poésie que transmet un texte à la fois simple et fluide sans aucune mièvrerie trop facile.
L'excellent graphisme de l'auteur participe à cette ambiance de douceur poétique tournée vers ce bonheur.
Une vraie belle lecture originale à partager dans un format idéal pour les enfants.
Les attentes : le démon caché dans toute âme enthousiaste.
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Ce tome contient une approche biographique de la vie de la sculptrice Camille Claudel (1864-1943), également sœur du dramaturge Paul Claudel (1868-1955), et collaboratrice du sculpteur Auguste Rodin (1840-1917). Son édition originale date de 2022 en Italie, et de 2023 en France. Il a été réalisé par Monica Foggia pour le scénario et Martina Marzadori pour les dessins et la mise en couleurs, traduit de l’italien par Jérôme Nicolas. Il comporte cent-dix pages de bandes dessinées. Il se termine avec une postface de cinq pages, rédigée par la scénariste, revenant sur la relation entre la sculptrice et Rodin, sur son internement et la notion d’hystérie à l’époque, sur le fait qu’elle était considérée inadaptée pour exercer un métier réservé aux hommes, et sur l’inspiration de l’écoute de La mer de Claude Debussy pour son écriture. Viennent ensuite une page de remerciements, et une dernière page avec la bibliographie recensant sept ouvrages, le film de Bruno Nuytten dans lequel Sophie Marceau incarne la sculptrice, et deux sites internet.
Une petite fille de bonne famille. La souffrance de la beauté qui déchire la roche, la met en pièces pour dominer sa forme. En 1876, dans la campagne de Montfavet, devant un rocher appelé géant de Montpreux, Camille Claudel est en train de façonné une petite statue de terre, son petit frère posant devant elle et commençant à fatiguer. Il finit par s’allonger dans l’herbe. Louise-Athanaïse, leur mère, les appelle, exigeant qu’ils viennent ici tout de suite. Elle admoneste sa fille qui devrait avoir honte : les demoiselles de bonne famille ne se salissent pas, et la robe de Camille est maculée de terre. Cette dernière répond que pour créer, il faut se salir, Dieu l’a fait. Montfavet en 1921 : Camille regarde par la fenêtre, elle observe un oiseau donner la becquée à ses oisillons. Une dame l’appelle : un paquet est arrivé pour elle. Il contient de la terre à modeler.
À Villeneuve-sur-Fère en 1878, dans la maison familiale des Claudel, la jeune Camille indique à sa mère qu’elle a une grande envie de faire son portrait, elle ajoute que papa serait content. Après un mouvement de refus, sa mère accepte à condition que sa fille essaye de la mettre en valeur. La fille emmène la mère dans le jardin et cette dernière s’assied dans un fauteuil, sous l’ombre d’un feuillage. Camille se met au dessin en pensant que pour mettre sa mère en valeur, elle a dû déchirer le voile que sa mère avait elle-même tissé. Des grands yeux de sa mère, Camille a saisi la douleur secrète. De son corps, l’esprit de la résignation. De ses mains l’abnégation complète. Camille a toujours pensé que sa mère la détestait parce que sa fille n’avait pas voulu se soumettre comme sa mère l’avait fait. Mais avec le temps, elle a compris qu’au fond sa mère l’enviait parce que Camille n’était pas comme elle. Au temps présent de 1921, Camille se demande où est ce portrait à présent. Il doit être perdu, comme sa mère. Elle se rappelle comme sa mère détestait ses outils d’artiste, elle les aurait volontiers jetés au feu, et sa fille avec.
Les autrices ont choisi d’adopter le point de vue de Camille Claudel (1864-1943) du début jusqu’à la fin, présente dans chaque page. Il s’agit donc d’une histoire de femme, avec son point de vue, l’accès de temps à autre à ses pensées. Dans sa postface, la scénariste explicite son choix de ne pas insister dans ce roman graphique sur la maladie mentale qui affligea Camille : il est dicté par la nécessité de rendre justice à la femme, à la sculptrice, à la personne et à sa grandeur artistique. Elle évoque également le comportement de sa mère à son égard : froide et bigote, ne cessant de la rabaisser, et de tenter de brider sa vocation artistique. Elle indique que son père, à l’inverse, était parfaitement conscient du talent de sa fille aînée : il la soutint jusqu’à la fin de ses jours. Le sculpteur Alfred Boucher (1850-1934) a évalué et reconnu son talent. Son frère Paul Claudel (1868-1955) l’a également soutenue. Auguste Rodin l’a encouragée : elle est devenue sa plus proche collaboratrice, sa modèle et sa maîtresse. Elle dû vivre avec son infidélité, la possible appropriation de ses œuvres par Rodin, un avortement, la réaction d’une société patriarcale contre le mouvement d’émancipation des femmes, en particulier le recours abusif au diagnostic d’hystérie. Pour autant, ces faits sont évoqués comme les autres événements de sa vie, sans que la bande dessinée ne prenne les formes d’un pamphlet féministe ou anti-patriarcat, les autrices se focalisant sur les moments essentiels dans la vie artistique de cette créatrice.
Le lecteur découvre Camille Claudel avant l’adolescence en train de modeler la terre pour sculpter son petit frère. Les cases sont dépourvues de bordure tracée, alignées en bande, quelques-unes biseautées en trapèze. L’absence de bordure introduit une forme de douceur, confortée par la mise en couleurs, comme réalisée au crayon, et estompée. De prime abord, la narration visuelle dégage une impression d’art naïf avec des visages simplifiés, des expressions parfois un peu enfantines, un regard qui s’attache plus à certains éléments de l’environnement qu’à d’autres. Dans le même temps, la composition des pages et la variété des découpages correspondent à une narration adulte, avec une quinzaine d’illustrations en pleine page, trois en double page, des pages où un personnage est représenté à plusieurs reprises dans des positions diverses dans une seule image, des cases avec uniquement un personnage et des accessoires sans arrière-plan, quelques magnifiques paysages ou intérieurs. Par exemple, le très bel effet de la lumière du soleil dans le feuillage à la fenêtre de la chambre de Camille à Montfavet, les motifs abstraits des tapis, une double page consacrée à une vue d’une rue de Paris avec son animation nocturne, les étudiants en train de s’affairer sur leur sculpture dans l’atelier de l’Académie Colarossi, la grande salle d’un théâtre parisien, les falaises de l’ile Wight, un quai en bord de Seine à Paris, une vue en extérieur du bâtiment de l’asile de Montfavet, etc.
À plusieurs reprises, la narration visuelle saisit un moment fugace ou complexe, avec une grande sensibilité. Le lecteur ressent pleinement ce qui se joue entre la mère et la fille quand cette dernière demande à la dessiner, par les expressions de visages, les mouvements. Dans la scène suivante quand la mère fait obstacle à la volonté du père d’emmener leur fille à Paris pour qu’elle puisse étudier dans un atelier, le lecteur éprouve l’impression que le jeu des acteurs est forcé : il se dit que l’artiste représente les réactions du père et de la mère comme vues par les yeux d’enfants de Camille, ce qui explique ces émotions plus brutes. Il en a la confirmation en voyant l’entrain avec lequel la demoiselle prépare sa valise, tellement heureuse que son père ait emporté la décision. Lorsqu’elle rencontre Rodin pour la première fois, le lecteur voit qu’elle est devenue une jeune femme, consciente du désir. Plus tard, il peut comparer le comportement de Camille avec Claude Debussy (1862-1918), à son comportement avec Rodin : les deux jeunes gens apparaissent plus insouciants, plus gais, sans le poids de l’âge de Rodin, de vingt-quatre ans l’aîné de Camille. En page cent-onze, la sculptrice se retrouve devant un peloton d’exécution, une métaphore de la condamnation que la société fait peser sur elle, du fait de sa vie émancipée, que ce soit pour l’exercice d’un métier d’homme, ou pour la liberté de sa vie amoureuse.
Du fait du mode narratif, le lecteur éprouve une empathie pleine et entière pour Camille Claudel, voyant sa vie par ses yeux, au travers de ses émotions. Il ressent le besoin de créer, la vocation sans doute possible pour sculpter. Il ressent son élan de bonheur quand elle apprend que son père a pu faire en sorte qu’elle étudie dans un atelier. Il ressent son assurance quand elle répond à Filippo Colarossi (1841-1906) qui estime qu’elle a un style viril, sans rien de mièvre, ni de décoratif, car l’œuvre qu’il contemple à un style incisif. Elle le reprend devant tous les autres étudiants et étudiantes, en lui enjoignant de ne pas confondre ce qui est masculin avec ce qui est expressif et profond, une femme aussi est capable d’exprimer cela. Il s’enthousiasme avec elle quand elle accueille Jessie Lipscomb (1861-1952). Il apprécie une deuxième fois sa confiance quand elle répond à Auguste Rodin que le style de ce dernier n’est pas celui à elle. Les autrices savent faire vivre Camille Claudel, par ses envies, ses convictions, ses émotions, son travail. Elles évoquent la nature de son talent, sans aller jusqu’à se livrer à une analyse de son apport à la sculpture. Elles dressent le portrait d’un être humain grandissant en faisant avec les caractéristiques de la société de l’époque, ballotée entre sa vocation, ses amours, la manière dont elle est traitée par son amant.
En entamant la biographie d’une artiste, le lecteur ne sait pas toujours qu’elle en sera la nature, plutôt biographique axée sur les moments de vie personnelle, ou avec un accent plus important sur la carrière avec une analyse de l’œuvre. Ici, les autrices ont choisi la première approche, montrant avant tout un être humain faisant tout son possible pour exercer sa vocation, pour faire aboutir sa vision artistique, tout en composant avec les contraintes imposées par la société. La narration visuelle s’avère formidable par sa douceur, et par sa sensibilité, très adulte même si l’apparence des dessins peut évoquer certains aspects de l’art naïf.
3.5
Second volume de la collection portant sur les récits courts très noirs de Tezuka.
On retrouve principalement des récits fantastiques ou de science-fiction, mais aussi un à l'ambiance de polar et une autre qui est plus un récit d'aventure. C'est un vrai pot-pourri avec comme liens le fait que se sont des récits sombres et horribles destiné aux adultes. Enfin, il y a quand même le récit La montagne du démon qui m'a semblé s'adresser à un public plus jeune avec son jeune héros bien gentil comme Tezuka en fabriquait à la douzaine dans la presse jeunesse des années 40-60 et de plus cela finit sur une note très optimiste avec une morale bien gentille pour les enfants. C'est un des deux récits de l'album que j'ai trouvé faible avec le récit Immaculée Conception qui est prévisible du début jusqu'à la fin.
Le reste de l'album est bon quoique j'aurais préféré que l'histoire se passant dans le taxi dure plus longtemps parce que j'aime bien l'ambiance de ce récit et aussi je trouve qu'il s'arrête un peu trop brutalement. C'est donc un recueil d'histoires courtes globalement solide dont les fins souvent surprenante rappelle les comics d'EC Comics (mention spécial pour celle du sauvetage dans l'espace qui semble cousu de fil blanc...jusqu'au retournement de situation bien horrible). On retrouve des thèmes chers à l'auteur comme la dénonciation de l'horreur de la guerre.
C'est sur que pour aimer il faut ne pas avoir peur du manga rétro qui semblent désuet maintenant et ne pas être allergique à Tezuka, mais si vous être fan de l'auteur c'est à lire.
J’ai adoré cet album.
Les dessins sont magnifiques, très colorés et tout en rondeurs. Les thèmes abordés, bien que simples dans leur traitement, me parlent énormément. Le personnage principal est très attachant. La lecture a été on ne peut plus agréable et c’est un gros coup de cœur pour moi.
Bref, sur le papier, je mettrais 4 étoiles et un coup de cœur sans état d’âme et puis basta.
Mais voilà, l’œuvre souffre tout de même d’un défaut : le rythme du récit est très lent.
Un peu normal vu que nous suivons l’évolution d’un personnage, de sa perception de soi et du monde qui l’entoure, sur plusieurs années, mais là c’est quand-même un chouïa trop lent.
Le récit reste une histoire feel good sur la découverte et l’épanouissement personnel d’individus en marge de la société, donc un rythme lent qui installe son récit est bienvenu, mais là on a parfois l’impression que le récit se met en pause par moment.
Bref, un rythme parfois ballant.
Mis à part ça, l’album reste une très bonne lecture.
L’histoire qui nous est racontée est celle d’un enfant albinos rejeté par son village (et son propre père) qui va finir par croiser la route de Viviana, une « sorcière » vivant seule dans la forêt suite à la perte d’un être cher.
Autour de cette base simple, les autrices traitent de l’exclusion, de l’acceptation de soi, du besoin d’être entouré et soutenu lorsque le plus grand nombre nous veut du mal, et également du genre.
L’album tourne beaucoup autour de la question du genre.
Du genre féminin, tout d’abord, puisque nous suivons des personnages évoluant pour la majorité dans une sororité de « sorcières ». La figure de la sorcière est ici utilisée, comme souvent, pour représenter les individues en marge de la société, les parias des bonnes gens et surtout la figure féminine sortant des carcans imposés par une société patriarcale. Ici, je précise, tous les hommes sont des gros cons. Certains regretteront sans doute le manque de nuance, je l’excuse facilement car le récit cherche davantage à s’adresser à la figure de la sorcière, des rejetées, plutôt qu’à celle du bourreau. Clairement, la BD n’avait pas pour cible les « Not all men » et c’est tout à son honneur.
Mais alors, si tous les hommes sont cruels et violents dans cette histoire, comment notre protagoniste, présenté comme un garçon, peut-il rejoindre cette sororité au cœur du récit ?
Eh bien par un petit twist très simple : en se révélant ne pas être un garçon.
En effet, Rebis n’est pas que le titre de l’album, c’est également le nom que prendra la jeune fille suite à sa renaissance. Renaissance d’ailleurs symbolisée par la petite larve d’insecte qu’elle a sauvée et protégée des années avant qu’elle ne finisse par éclore et s’envoler. Scène d’envol où elle apprend à sa sœur son changement (l’échange est sous-entendu mais on la verra bien la genrer au féminin par la suite). D’ailleurs, mis à part les brutes du village, tout le monde genre Rebis au féminin après ça.
Je ne sais pas si je pourrais qualifier Rebis de femme transgenre, ne serait-ce que parce que rapporter des notions modernes à des personnages ayant vécu dans une société différente est casse-gueule, mais l’histoire ayant été écrite par des autrices contemporaines c’est comme ça que je l’ai interprétée. Après tout, si le personnage principal et l’œuvre portent tout deux le nom de Rebis (mot issu du lexique alchimique pour désigner un corps hermaphrodite) ce n’est sans doute pas pour rien.
Bref, je déblatère, je déblatère…
Rebis est une très bonne histoire traitant de sujets qui me parlent beaucoup, donc je vais essayer de remonter un peu sa note.
(Note réelle : 3,5)
Cette série me semble injustement méconnue. Comme Spooky et PseudoRandom75, je suis tombé sous le charme de cette série. Formidable dit même Spooky et je suis bien d'accord. J'ai un faible pour les série qui traitent du Handicap avec justesse. Ici Jak et Geg y ajoutent un environnement de cité à la fois drôle, caustique et souvent touchant. J'ai beaucoup aimé que l'on montre cette cité du Val Fleuri sous un jour bien meilleur que les traditionnels reportages. Cette cité se trouve à Mantes la Jolie dans les Yvelines, elle a été sous le feu des projecteurs plusieurs fois et qu'une série humoristique la mette au centre de son récit me semble une bonne chose. Toutefois les auteurs ne versent pas dans un angélisme béat et si ils reprennent une vision Black Blanc Beur qui s'essoufflait c'est avec beaucoup d'humour soutenu par un texte d'une très bonne qualité avec des gags presque toujours drôles. C'est parfois caustique avec une belle galerie de portraits beaufs qui feraient pâlir d'envie les versions originales.
Le graphisme est simple et correspond aux codes des récits humoristiques traditionnels. C'est dynamique à la fois au texte et au visuel.
Un formidable esprit traverse cette série. Tient j'ai dit formidable.
Je suis raccord avec les précédents aviseurs pour apporter une louange de plus à cette brillante série pour enfants.
Il y a beaucoup d'intelligence dans ce récit qui peut être lu comme un conte éthique. D'ailleurs le titre de la nouvelle d'Heinrich Böll (prix Nobel de littérature) dont Bernard Friot adapte la nouvelle parle d"Arbeitsmorale" que l'on traduit par l'éthique du travail.
Friot actualise cette nouvelle de 1963 en mettant l'accent sur la bêtise d'un capitalisme sauvage, d'une course insensée au profit avec un sous-entendu fort sur l'impact écologique d'un tel comportement. En 1963 cette dernière vision était probablement peu sensible car la mer était alors considérée comme une ressource inépuisable. Le récit est donc d'une modernité qui nous accable. La trentaine de pages d'un récit qui nous capture de plus en plus à la manière d'une Pierrette avec son pot de lait ne présente aucun temps mort. C'est au niveau des jeunes lecteurs comme des adultes.
L'excellence de cette série est amplifiée par le formidable graphisme d'Emile Bravo dont je suis un grand fan. L'auteur reprend un dessin qui rappelle beaucoup Les Sept Ours Nains avec un côté décalé voire caustique dans l'attitude d'un touriste à la Fantasio très envahissant face à un vieux loup de mer qui nous rappelle ce bon capitaine Haddock.
Ma seule réserve tient à la couverture qui oublie le nom de Bernard Friot.
Une excellente lecture pour initier les petits à la réflexion intelligente.
Peter Pan avant Peter Pan.
Je ne connaissais pas trop les différentes ébauches/versions du personnages et de l’univers concoctées par Barrie (tout est bien présenté dans une introduction), mais cette histoire, sans avoir la profondeur du texte ultérieur plus connu (c’est plus court, ça se déroule sur un laps de temps plus restreint, et il n’y a pas la foule de personnage secondaires qui accompagneront ensuite Peter dans ses rêves – même si le capitaine Crochet apparait le temps d’une case), se révèle – en tout cas dans cette adaptation, très plaisante.
Le dessin de Munuera – et sa colorisation aussi d’ailleurs ! – sont vraiment très bons et très beaux. C’est simple, mais il arrive parfaitement à retranscrire ce mélange d’onirisme, d’enfantillages et de questionnements philosophiques en images. Le rendu est très chouette. Sans doute moins âpre et noire que la version de Loisel, mais franchement agréable à regarder.
L’histoire en elle-même est assez simple. Le temps d’une soirée et d’une nuit, nous suivons Peter et Maimie, gamine en peu perdue, dans un jardin londonien, celui de Kensington donc. On y croise des fées, une reine sosie miniature de Victoria, un corbeau qui parle. Et bien sûr Peter qui vole, qui règne dans cet univers poétique où l’imagination est au pouvoir.
L’album se laisse lire agréablement, très rapidement, et complète la superbe série de Loisel en donnant à l’univers de Barrie une tonalité moins angoissante et noire.
Cet album est un double hommage de l’auteur, rappelé dans une élégante préface, à sa mère, décédée aux commandes de son avion, et à Kara Hultgreen, première femme pilote de chasse. Mais l’objet principal de ce récit est bien sûr le F-14 « Tomcat », emblème de la guerre froide.
J’avoue avoir été assez déstabilisé par l’incipit de cette aventure, je ne suis pas en effet fan des albums se conjuguant à la première personne lorsqu’il s’agit d’objet ou de machine (à l’instar de La Bombe d’Alcante, Bollée et Rodier). J’ai appris beaucoup à la lecture de ce one-shot, qui est en fait plus une bande dessinée documentaire qu’un récit d’aventure : ce qui a inspiré « Top Gun », mais surtout le destin extraordinaire de Kara Hultgreen. Comme certains je pense, j’ai fait des recherches sur internet pour en savoir plus sur cette pilote de chasse que je ne connaissais pas du tout.
Mais ce qui fait la force de cet album réside dans le dessin de Romain Hugault qui s’est surpassé ici. Une véritable claque visuelle ! Les planches présentées viennent, il faut l’avouer, combler un scénario assez classique, même si le découpage choisi est assez surprenant (une partie sur le Tomcat et l’autre sur Kara Hultgreen). Je crois n’avoir raté aucun album de ce dessinateur depuis ses débuts mais je suis sûr de le relire plusieurs fois rien que pour la beauté des planches. Il faut dire que j’ai acheté la version grand format (déjà épuisée chez le distributeur) limitée à 3000 exemplaires et qui en met pleins la vue au lecteur. Une véritable réussite et Romain Hugault a fait le bon choix de s’associer avec une nouvelle scénariste pour se renouveler. En effet,le scénario du dernier album co-signé avec Yann (" Anything Goes" de la série Angel Wings), volait vraiment très bas ! Seul le dessin avait sauvé l’album, à mon avis.
Je recommande vivement la lecture de récit, qui s’achève de manière émouvante.
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La Leçon de Pêche
Une très belle illustration de l’ineptie du capitalisme à hauteur d’enfant. C’est simple, très court, mais cela sait amener sa morale avec justesse, par une simple remarque à la fin. Même si elle se voit venir quand on est adulte, l’ironie finale reste drôle. Idéal pour ouvrir la discussion avec des enfants. Le dessin d’Emile Bravo est, comme toujours, très beau.
L'Incroyable Mademoiselle Bang
C'est en écrivant mon avis que je viens de découvrir le prix gagné par l'autrice Yoon-sun Park à Angoulême. Cela me fait plaisir car j'ai aimé la lecture de ce conte coréen modernisé. Pourtant cela reste assez classique avec une JF,Bang élevée comme un garçon jusqu'à la mort de ses parents et qui préfère garder cette identité malgré les remontrances de sa fidèle servante, madame Ju. Evidemment Bang fera tout mieux que le hommes grâce à son éducation et son intelligence. La trame est donc très convenue mais l'autrice réussie à donner beaucoup de dynamisme à son récit. Les trouvailles pour faire durer la supercherie sont amusantes et le triangle Bang-Bing -Mme Ju bien équilibré dans un humour assez tonique . On trouve même une pointe de fantastique qui donne un peu de piment au récit. Le découpage se fait en petit chapitre se qui permet aux jeunes lecteurs de bien cloisonner leur lecture. Le graphisme est très intéressant avec un trait fin et dynamique qui donne beaucoup de mouvements au visuel. Il y a une abondance de couleurs qui permettent aux enfants de bien s'approprier la série. Concernant la conclusion je pense que l'on peut avoir plusieurs niveau de lecture avec ce coming out de Bang. Une lecture enfantine conduit probablement à accepter son identité profonde de fille vers un bonheur plus maternel alors qu'une lecture adulte me fait penser à une thématique plus moderne à travers une sorte de mariage Gay. La thématique est d'ailleurs en filigrane puisque mme Ju rouspète en disant que " … dans la nature, un bébé a une maman et un papa." On pourrait épiloguer longtemps sur cette vision mais comme le souligne Ro , l'abord du Genre n'est pas si visible pour les enfants. C'est le côté aventure qui domine. A noter qu'il n'y a pas de pages marquées ce qui peut rendre la lecture un peu difficile si l'on cherche des références. Cette série a aussi l'avantage d'ouvrir les enfants sur un univers coréen pas forcément dans leurs lectures habituelles. Je pousse un peu ma note mais la lecture reste plaisante. 3.5
L'Emouvantail
Aussi peu d'avis pour cette série pleine de poésie et de douceur, cela me fait un peu mal au cœur. Je suis un grand fan de Renaud Dillies et de la production des éditions de la Gouttière. Une fois encore cette série est une grande réussite en direction d'un jeune lectorat mais aussi de leurs parents. Perso je ne me lasse pas de lire et relire cet auteur. Un épouvantail est fait pour terroriser comme beaucoup de choses qui nous entourent. Mais voilà la nécessité ou l'amour peuvent rapprocher ce qui semble inconciliable et créent un esprit de paix et de bonheur. C'est toute la poésie que transmet un texte à la fois simple et fluide sans aucune mièvrerie trop facile. L'excellent graphisme de l'auteur participe à cette ambiance de douceur poétique tournée vers ce bonheur. Une vraie belle lecture originale à partager dans un format idéal pour les enfants.
Camille Claudel - La création comme espace de liberté
Les attentes : le démon caché dans toute âme enthousiaste. - Ce tome contient une approche biographique de la vie de la sculptrice Camille Claudel (1864-1943), également sœur du dramaturge Paul Claudel (1868-1955), et collaboratrice du sculpteur Auguste Rodin (1840-1917). Son édition originale date de 2022 en Italie, et de 2023 en France. Il a été réalisé par Monica Foggia pour le scénario et Martina Marzadori pour les dessins et la mise en couleurs, traduit de l’italien par Jérôme Nicolas. Il comporte cent-dix pages de bandes dessinées. Il se termine avec une postface de cinq pages, rédigée par la scénariste, revenant sur la relation entre la sculptrice et Rodin, sur son internement et la notion d’hystérie à l’époque, sur le fait qu’elle était considérée inadaptée pour exercer un métier réservé aux hommes, et sur l’inspiration de l’écoute de La mer de Claude Debussy pour son écriture. Viennent ensuite une page de remerciements, et une dernière page avec la bibliographie recensant sept ouvrages, le film de Bruno Nuytten dans lequel Sophie Marceau incarne la sculptrice, et deux sites internet. Une petite fille de bonne famille. La souffrance de la beauté qui déchire la roche, la met en pièces pour dominer sa forme. En 1876, dans la campagne de Montfavet, devant un rocher appelé géant de Montpreux, Camille Claudel est en train de façonné une petite statue de terre, son petit frère posant devant elle et commençant à fatiguer. Il finit par s’allonger dans l’herbe. Louise-Athanaïse, leur mère, les appelle, exigeant qu’ils viennent ici tout de suite. Elle admoneste sa fille qui devrait avoir honte : les demoiselles de bonne famille ne se salissent pas, et la robe de Camille est maculée de terre. Cette dernière répond que pour créer, il faut se salir, Dieu l’a fait. Montfavet en 1921 : Camille regarde par la fenêtre, elle observe un oiseau donner la becquée à ses oisillons. Une dame l’appelle : un paquet est arrivé pour elle. Il contient de la terre à modeler. À Villeneuve-sur-Fère en 1878, dans la maison familiale des Claudel, la jeune Camille indique à sa mère qu’elle a une grande envie de faire son portrait, elle ajoute que papa serait content. Après un mouvement de refus, sa mère accepte à condition que sa fille essaye de la mettre en valeur. La fille emmène la mère dans le jardin et cette dernière s’assied dans un fauteuil, sous l’ombre d’un feuillage. Camille se met au dessin en pensant que pour mettre sa mère en valeur, elle a dû déchirer le voile que sa mère avait elle-même tissé. Des grands yeux de sa mère, Camille a saisi la douleur secrète. De son corps, l’esprit de la résignation. De ses mains l’abnégation complète. Camille a toujours pensé que sa mère la détestait parce que sa fille n’avait pas voulu se soumettre comme sa mère l’avait fait. Mais avec le temps, elle a compris qu’au fond sa mère l’enviait parce que Camille n’était pas comme elle. Au temps présent de 1921, Camille se demande où est ce portrait à présent. Il doit être perdu, comme sa mère. Elle se rappelle comme sa mère détestait ses outils d’artiste, elle les aurait volontiers jetés au feu, et sa fille avec. Les autrices ont choisi d’adopter le point de vue de Camille Claudel (1864-1943) du début jusqu’à la fin, présente dans chaque page. Il s’agit donc d’une histoire de femme, avec son point de vue, l’accès de temps à autre à ses pensées. Dans sa postface, la scénariste explicite son choix de ne pas insister dans ce roman graphique sur la maladie mentale qui affligea Camille : il est dicté par la nécessité de rendre justice à la femme, à la sculptrice, à la personne et à sa grandeur artistique. Elle évoque également le comportement de sa mère à son égard : froide et bigote, ne cessant de la rabaisser, et de tenter de brider sa vocation artistique. Elle indique que son père, à l’inverse, était parfaitement conscient du talent de sa fille aînée : il la soutint jusqu’à la fin de ses jours. Le sculpteur Alfred Boucher (1850-1934) a évalué et reconnu son talent. Son frère Paul Claudel (1868-1955) l’a également soutenue. Auguste Rodin l’a encouragée : elle est devenue sa plus proche collaboratrice, sa modèle et sa maîtresse. Elle dû vivre avec son infidélité, la possible appropriation de ses œuvres par Rodin, un avortement, la réaction d’une société patriarcale contre le mouvement d’émancipation des femmes, en particulier le recours abusif au diagnostic d’hystérie. Pour autant, ces faits sont évoqués comme les autres événements de sa vie, sans que la bande dessinée ne prenne les formes d’un pamphlet féministe ou anti-patriarcat, les autrices se focalisant sur les moments essentiels dans la vie artistique de cette créatrice. Le lecteur découvre Camille Claudel avant l’adolescence en train de modeler la terre pour sculpter son petit frère. Les cases sont dépourvues de bordure tracée, alignées en bande, quelques-unes biseautées en trapèze. L’absence de bordure introduit une forme de douceur, confortée par la mise en couleurs, comme réalisée au crayon, et estompée. De prime abord, la narration visuelle dégage une impression d’art naïf avec des visages simplifiés, des expressions parfois un peu enfantines, un regard qui s’attache plus à certains éléments de l’environnement qu’à d’autres. Dans le même temps, la composition des pages et la variété des découpages correspondent à une narration adulte, avec une quinzaine d’illustrations en pleine page, trois en double page, des pages où un personnage est représenté à plusieurs reprises dans des positions diverses dans une seule image, des cases avec uniquement un personnage et des accessoires sans arrière-plan, quelques magnifiques paysages ou intérieurs. Par exemple, le très bel effet de la lumière du soleil dans le feuillage à la fenêtre de la chambre de Camille à Montfavet, les motifs abstraits des tapis, une double page consacrée à une vue d’une rue de Paris avec son animation nocturne, les étudiants en train de s’affairer sur leur sculpture dans l’atelier de l’Académie Colarossi, la grande salle d’un théâtre parisien, les falaises de l’ile Wight, un quai en bord de Seine à Paris, une vue en extérieur du bâtiment de l’asile de Montfavet, etc. À plusieurs reprises, la narration visuelle saisit un moment fugace ou complexe, avec une grande sensibilité. Le lecteur ressent pleinement ce qui se joue entre la mère et la fille quand cette dernière demande à la dessiner, par les expressions de visages, les mouvements. Dans la scène suivante quand la mère fait obstacle à la volonté du père d’emmener leur fille à Paris pour qu’elle puisse étudier dans un atelier, le lecteur éprouve l’impression que le jeu des acteurs est forcé : il se dit que l’artiste représente les réactions du père et de la mère comme vues par les yeux d’enfants de Camille, ce qui explique ces émotions plus brutes. Il en a la confirmation en voyant l’entrain avec lequel la demoiselle prépare sa valise, tellement heureuse que son père ait emporté la décision. Lorsqu’elle rencontre Rodin pour la première fois, le lecteur voit qu’elle est devenue une jeune femme, consciente du désir. Plus tard, il peut comparer le comportement de Camille avec Claude Debussy (1862-1918), à son comportement avec Rodin : les deux jeunes gens apparaissent plus insouciants, plus gais, sans le poids de l’âge de Rodin, de vingt-quatre ans l’aîné de Camille. En page cent-onze, la sculptrice se retrouve devant un peloton d’exécution, une métaphore de la condamnation que la société fait peser sur elle, du fait de sa vie émancipée, que ce soit pour l’exercice d’un métier d’homme, ou pour la liberté de sa vie amoureuse. Du fait du mode narratif, le lecteur éprouve une empathie pleine et entière pour Camille Claudel, voyant sa vie par ses yeux, au travers de ses émotions. Il ressent le besoin de créer, la vocation sans doute possible pour sculpter. Il ressent son élan de bonheur quand elle apprend que son père a pu faire en sorte qu’elle étudie dans un atelier. Il ressent son assurance quand elle répond à Filippo Colarossi (1841-1906) qui estime qu’elle a un style viril, sans rien de mièvre, ni de décoratif, car l’œuvre qu’il contemple à un style incisif. Elle le reprend devant tous les autres étudiants et étudiantes, en lui enjoignant de ne pas confondre ce qui est masculin avec ce qui est expressif et profond, une femme aussi est capable d’exprimer cela. Il s’enthousiasme avec elle quand elle accueille Jessie Lipscomb (1861-1952). Il apprécie une deuxième fois sa confiance quand elle répond à Auguste Rodin que le style de ce dernier n’est pas celui à elle. Les autrices savent faire vivre Camille Claudel, par ses envies, ses convictions, ses émotions, son travail. Elles évoquent la nature de son talent, sans aller jusqu’à se livrer à une analyse de son apport à la sculpture. Elles dressent le portrait d’un être humain grandissant en faisant avec les caractéristiques de la société de l’époque, ballotée entre sa vocation, ses amours, la manière dont elle est traitée par son amant. En entamant la biographie d’une artiste, le lecteur ne sait pas toujours qu’elle en sera la nature, plutôt biographique axée sur les moments de vie personnelle, ou avec un accent plus important sur la carrière avec une analyse de l’œuvre. Ici, les autrices ont choisi la première approche, montrant avant tout un être humain faisant tout son possible pour exercer sa vocation, pour faire aboutir sa vision artistique, tout en composant avec les contraintes imposées par la société. La narration visuelle s’avère formidable par sa douceur, et par sa sensibilité, très adulte même si l’apparence des dessins peut évoquer certains aspects de l’art naïf.
Pomme Mécanique
3.5 Second volume de la collection portant sur les récits courts très noirs de Tezuka. On retrouve principalement des récits fantastiques ou de science-fiction, mais aussi un à l'ambiance de polar et une autre qui est plus un récit d'aventure. C'est un vrai pot-pourri avec comme liens le fait que se sont des récits sombres et horribles destiné aux adultes. Enfin, il y a quand même le récit La montagne du démon qui m'a semblé s'adresser à un public plus jeune avec son jeune héros bien gentil comme Tezuka en fabriquait à la douzaine dans la presse jeunesse des années 40-60 et de plus cela finit sur une note très optimiste avec une morale bien gentille pour les enfants. C'est un des deux récits de l'album que j'ai trouvé faible avec le récit Immaculée Conception qui est prévisible du début jusqu'à la fin. Le reste de l'album est bon quoique j'aurais préféré que l'histoire se passant dans le taxi dure plus longtemps parce que j'aime bien l'ambiance de ce récit et aussi je trouve qu'il s'arrête un peu trop brutalement. C'est donc un recueil d'histoires courtes globalement solide dont les fins souvent surprenante rappelle les comics d'EC Comics (mention spécial pour celle du sauvetage dans l'espace qui semble cousu de fil blanc...jusqu'au retournement de situation bien horrible). On retrouve des thèmes chers à l'auteur comme la dénonciation de l'horreur de la guerre. C'est sur que pour aimer il faut ne pas avoir peur du manga rétro qui semblent désuet maintenant et ne pas être allergique à Tezuka, mais si vous être fan de l'auteur c'est à lire.
Rebis
J’ai adoré cet album. Les dessins sont magnifiques, très colorés et tout en rondeurs. Les thèmes abordés, bien que simples dans leur traitement, me parlent énormément. Le personnage principal est très attachant. La lecture a été on ne peut plus agréable et c’est un gros coup de cœur pour moi. Bref, sur le papier, je mettrais 4 étoiles et un coup de cœur sans état d’âme et puis basta. Mais voilà, l’œuvre souffre tout de même d’un défaut : le rythme du récit est très lent. Un peu normal vu que nous suivons l’évolution d’un personnage, de sa perception de soi et du monde qui l’entoure, sur plusieurs années, mais là c’est quand-même un chouïa trop lent. Le récit reste une histoire feel good sur la découverte et l’épanouissement personnel d’individus en marge de la société, donc un rythme lent qui installe son récit est bienvenu, mais là on a parfois l’impression que le récit se met en pause par moment. Bref, un rythme parfois ballant. Mis à part ça, l’album reste une très bonne lecture. L’histoire qui nous est racontée est celle d’un enfant albinos rejeté par son village (et son propre père) qui va finir par croiser la route de Viviana, une « sorcière » vivant seule dans la forêt suite à la perte d’un être cher. Autour de cette base simple, les autrices traitent de l’exclusion, de l’acceptation de soi, du besoin d’être entouré et soutenu lorsque le plus grand nombre nous veut du mal, et également du genre. L’album tourne beaucoup autour de la question du genre. Du genre féminin, tout d’abord, puisque nous suivons des personnages évoluant pour la majorité dans une sororité de « sorcières ». La figure de la sorcière est ici utilisée, comme souvent, pour représenter les individues en marge de la société, les parias des bonnes gens et surtout la figure féminine sortant des carcans imposés par une société patriarcale. Ici, je précise, tous les hommes sont des gros cons. Certains regretteront sans doute le manque de nuance, je l’excuse facilement car le récit cherche davantage à s’adresser à la figure de la sorcière, des rejetées, plutôt qu’à celle du bourreau. Clairement, la BD n’avait pas pour cible les « Not all men » et c’est tout à son honneur. Mais alors, si tous les hommes sont cruels et violents dans cette histoire, comment notre protagoniste, présenté comme un garçon, peut-il rejoindre cette sororité au cœur du récit ? Eh bien par un petit twist très simple : en se révélant ne pas être un garçon. En effet, Rebis n’est pas que le titre de l’album, c’est également le nom que prendra la jeune fille suite à sa renaissance. Renaissance d’ailleurs symbolisée par la petite larve d’insecte qu’elle a sauvée et protégée des années avant qu’elle ne finisse par éclore et s’envoler. Scène d’envol où elle apprend à sa sœur son changement (l’échange est sous-entendu mais on la verra bien la genrer au féminin par la suite). D’ailleurs, mis à part les brutes du village, tout le monde genre Rebis au féminin après ça. Je ne sais pas si je pourrais qualifier Rebis de femme transgenre, ne serait-ce que parce que rapporter des notions modernes à des personnages ayant vécu dans une société différente est casse-gueule, mais l’histoire ayant été écrite par des autrices contemporaines c’est comme ça que je l’ai interprétée. Après tout, si le personnage principal et l’œuvre portent tout deux le nom de Rebis (mot issu du lexique alchimique pour désigner un corps hermaphrodite) ce n’est sans doute pas pour rien. Bref, je déblatère, je déblatère… Rebis est une très bonne histoire traitant de sujets qui me parlent beaucoup, donc je vais essayer de remonter un peu sa note. (Note réelle : 3,5)
La Bande à Ed
Cette série me semble injustement méconnue. Comme Spooky et PseudoRandom75, je suis tombé sous le charme de cette série. Formidable dit même Spooky et je suis bien d'accord. J'ai un faible pour les série qui traitent du Handicap avec justesse. Ici Jak et Geg y ajoutent un environnement de cité à la fois drôle, caustique et souvent touchant. J'ai beaucoup aimé que l'on montre cette cité du Val Fleuri sous un jour bien meilleur que les traditionnels reportages. Cette cité se trouve à Mantes la Jolie dans les Yvelines, elle a été sous le feu des projecteurs plusieurs fois et qu'une série humoristique la mette au centre de son récit me semble une bonne chose. Toutefois les auteurs ne versent pas dans un angélisme béat et si ils reprennent une vision Black Blanc Beur qui s'essoufflait c'est avec beaucoup d'humour soutenu par un texte d'une très bonne qualité avec des gags presque toujours drôles. C'est parfois caustique avec une belle galerie de portraits beaufs qui feraient pâlir d'envie les versions originales. Le graphisme est simple et correspond aux codes des récits humoristiques traditionnels. C'est dynamique à la fois au texte et au visuel. Un formidable esprit traverse cette série. Tient j'ai dit formidable.
La Leçon de Pêche
Je suis raccord avec les précédents aviseurs pour apporter une louange de plus à cette brillante série pour enfants. Il y a beaucoup d'intelligence dans ce récit qui peut être lu comme un conte éthique. D'ailleurs le titre de la nouvelle d'Heinrich Böll (prix Nobel de littérature) dont Bernard Friot adapte la nouvelle parle d"Arbeitsmorale" que l'on traduit par l'éthique du travail. Friot actualise cette nouvelle de 1963 en mettant l'accent sur la bêtise d'un capitalisme sauvage, d'une course insensée au profit avec un sous-entendu fort sur l'impact écologique d'un tel comportement. En 1963 cette dernière vision était probablement peu sensible car la mer était alors considérée comme une ressource inépuisable. Le récit est donc d'une modernité qui nous accable. La trentaine de pages d'un récit qui nous capture de plus en plus à la manière d'une Pierrette avec son pot de lait ne présente aucun temps mort. C'est au niveau des jeunes lecteurs comme des adultes. L'excellence de cette série est amplifiée par le formidable graphisme d'Emile Bravo dont je suis un grand fan. L'auteur reprend un dessin qui rappelle beaucoup Les Sept Ours Nains avec un côté décalé voire caustique dans l'attitude d'un touriste à la Fantasio très envahissant face à un vieux loup de mer qui nous rappelle ce bon capitaine Haddock. Ma seule réserve tient à la couverture qui oublie le nom de Bernard Friot. Une excellente lecture pour initier les petits à la réflexion intelligente.
Peter Pan de Kensington
Peter Pan avant Peter Pan. Je ne connaissais pas trop les différentes ébauches/versions du personnages et de l’univers concoctées par Barrie (tout est bien présenté dans une introduction), mais cette histoire, sans avoir la profondeur du texte ultérieur plus connu (c’est plus court, ça se déroule sur un laps de temps plus restreint, et il n’y a pas la foule de personnage secondaires qui accompagneront ensuite Peter dans ses rêves – même si le capitaine Crochet apparait le temps d’une case), se révèle – en tout cas dans cette adaptation, très plaisante. Le dessin de Munuera – et sa colorisation aussi d’ailleurs ! – sont vraiment très bons et très beaux. C’est simple, mais il arrive parfaitement à retranscrire ce mélange d’onirisme, d’enfantillages et de questionnements philosophiques en images. Le rendu est très chouette. Sans doute moins âpre et noire que la version de Loisel, mais franchement agréable à regarder. L’histoire en elle-même est assez simple. Le temps d’une soirée et d’une nuit, nous suivons Peter et Maimie, gamine en peu perdue, dans un jardin londonien, celui de Kensington donc. On y croise des fées, une reine sosie miniature de Victoria, un corbeau qui parle. Et bien sûr Peter qui vole, qui règne dans cet univers poétique où l’imagination est au pouvoir. L’album se laisse lire agréablement, très rapidement, et complète la superbe série de Loisel en donnant à l’univers de Barrie une tonalité moins angoissante et noire.
Tomcat
Cet album est un double hommage de l’auteur, rappelé dans une élégante préface, à sa mère, décédée aux commandes de son avion, et à Kara Hultgreen, première femme pilote de chasse. Mais l’objet principal de ce récit est bien sûr le F-14 « Tomcat », emblème de la guerre froide. J’avoue avoir été assez déstabilisé par l’incipit de cette aventure, je ne suis pas en effet fan des albums se conjuguant à la première personne lorsqu’il s’agit d’objet ou de machine (à l’instar de La Bombe d’Alcante, Bollée et Rodier). J’ai appris beaucoup à la lecture de ce one-shot, qui est en fait plus une bande dessinée documentaire qu’un récit d’aventure : ce qui a inspiré « Top Gun », mais surtout le destin extraordinaire de Kara Hultgreen. Comme certains je pense, j’ai fait des recherches sur internet pour en savoir plus sur cette pilote de chasse que je ne connaissais pas du tout. Mais ce qui fait la force de cet album réside dans le dessin de Romain Hugault qui s’est surpassé ici. Une véritable claque visuelle ! Les planches présentées viennent, il faut l’avouer, combler un scénario assez classique, même si le découpage choisi est assez surprenant (une partie sur le Tomcat et l’autre sur Kara Hultgreen). Je crois n’avoir raté aucun album de ce dessinateur depuis ses débuts mais je suis sûr de le relire plusieurs fois rien que pour la beauté des planches. Il faut dire que j’ai acheté la version grand format (déjà épuisée chez le distributeur) limitée à 3000 exemplaires et qui en met pleins la vue au lecteur. Une véritable réussite et Romain Hugault a fait le bon choix de s’associer avec une nouvelle scénariste pour se renouveler. En effet,le scénario du dernier album co-signé avec Yann (" Anything Goes" de la série Angel Wings), volait vraiment très bas ! Seul le dessin avait sauvé l’album, à mon avis. Je recommande vivement la lecture de récit, qui s’achève de manière émouvante.