Lax est un maître conteur en humanité ! Je ne sais pas si sa formidable histoire d'Amédée Fario est pure fiction ou possède un fond de réalité mais peu importe.
Mon premier avis sur le site était dédié à Marathon, c'est dire si l'effort solitaire avec un dépassement de soi gratuit m'attire. Même si mes légendes sont plutôt Zatopek, Mimoun ou Abebe Bikila, j'ai aussi rêvé sur les noms de Gaul, Coppi, Bahamontes Thévenet ou Hinault.
Petit-Breton est un nom que l'on se transmettait de génération en génération comme le trésor d'un patrimoine sportif historique qu'il ne faut pas oublier.
Merci à Lax de nous rendre ce patrimoine en images si belles. Au-delà de la belle histoire d'Amédée, c'est la formidable histoire des premiers Tours que l'auteur fait revivre.
Effort, solidarité, créativité de la technique et de l'hygiène sportive, vision des organisateurs sur l'impact populaire d'un grand événement sportif, il y a tous ces thèmes très bien mis en valeur dans l'ouvrage.
Evidemment, 1910,1911,1912,1913, le récit s'égraine comme une pendule tragique qui avance vers l'indicible. L'ombre portée de la guerre est toujours présent dans l'esprit du lecteur.
Toutes ces vies, ces histoires non écrites à cause de ces vieillards ventripotents et galonnés qui vont envoyer des millions d'Amédée à la mort et produire des monstres encore plus terrifiants. 100 ans après, j'en ai encore de l'amertume dans la bouche et un ouvrage comme celui de Lax nous rappelle ce monstrueux gâchis.
Je suis fan du dessin de Lax depuis ma lecture du Choucas. Lax ne nous vend pas de la Pin-up ou du BG body buildé (encore que Amédée est BG et Adeline à croquer) mais ses visages dans l'effort sont magnifiques.
Son trait presque caricatural se prête bien aux rictus grotesques qu'ont tous les sportifs (moi le premier) au bout de leurs forces.
Lax partage avec Cosey ses grandioses descriptions de montagne. Ici nous sommes gâtés. C'est dur, caillouteux, anguleux et froid mais c'est beau. Les teintes jaunes et bleutées sont piles dans les ambiances voulues.
Lax revient aussi sur le thème du handicap surmonté, probablement un hommage à son frère, cela enrichit aussi un récit qui n'a aucune faiblesse à mes yeux.
Pour finir, voilà une histoire qui crée de l'émotion, de l'empathie pour tous les personnages. Une lecture qui ne m'a pas laissé insensible.
J'ai vraiment pris une véritable claque graphique comme je me souviens pas en avoir pris dans de la BD franco-belge.
Ce n'est pas la première BD que je lis dessinée par Ledroit. J'avais lu "les Chroniques de la Lune Noire", sans finir, et j'étais pas fan, le dessin de Ledroit à l'époque était plutôt criard et brouillon. J'avais lu Sha (en entier) et commencé Requiem, Chevalier Vampire sans finir. Le dessin de Ledroit s'était grandement amélioré, c'était même bon, je trouve, mais pas vraiment dans mon style, car trop agressif.
Mais dans Wika, il a passé un énorme cap, je trouve que chaque planche est magnifique, ça donne l'impression de lire un artbook avec un scénario.
Même si le principal intérêt de cette BD est graphique, le scénario est pas mal. Normalement, j'apprécie quand les dessins servent bien le scénario, même c'est pour moi l'intérêt d'une BD comparée à un roman. Là c'est plutôt le contraire, le scénario sert bien les dessins. Il fait le boulot, même si c'est pas ce que retiendrai principalement de cette BD.
Pas besoin d’être un breton pour découvrir cet album magnifique. Pascal Bresson et Erwan Le Saëc ont su nous replonger dans l’affaire du Bugaled Breizh, chalutier qui a coulé mystérieusement en janvier 2004 dans les eaux britanniques au sud du Cap Lizard emportant 5 malheureux marins. A travers un journaliste sur le déclin mais fort en gueule, nous suivons l’enquête. Les incohérences sont nombreuses. C’est palpitant. Vous ne pouvez lire ce récit que d’une seule traite !
La question sous-jacente que pose cet album… pouvons-nous avoir foi aveuglement en l’état et à son armée ? On peut en douter. 18 ans après ce drame, les familles de ces marins sont toujours en attente, afin de comprendre ce qui s’est passé réellement. Deux scénarios s’affrontent. Celui d’un malheureux accident ou plus certainement d’un accrochage avec un sous-marin au cours d’un exercice militaire. Ne serions-nous pas devant un mensonge d’Etat ? Difficile de comprendre pourquoi si nous étions sur un banal accident, certains éléments sont toujours classés secret défense ! Les zones d’ombres sont nombreuses.
Au-delà du scénario parfaitement maitrisé, je suis subjugué par le graphisme d’Erwan Le Saëc. Le trait est précis et fin. Les paysages et les scènes maritimes sont sublissimes. L’effet wahou est là ! Un plaisir pour les yeux cet album. Et que dire de la couverture avec son océan de sang et une ombre inquiétante ! c’est admirable.
BD a vous procurer en urgence car malheureusement toujours d’actualité. Un gros coup de coeur.
Gros coup de cœur pour ce récit que je trouve à la fois touchant, intelligent et instructif.
Déjà l’idée de départ : nous raconter l’histoire d’un chien d’aveugle… lui-même frappé de cécité. Voilà qui est original et, surtout, qui va provoquer pas mal de choses chez le lecteur. Tout d’abord, il est difficile de ne pas s’attacher à cette boule de poils loyale, intelligente et dévouée à son maître. Ensuite, lorsque Ours (c’est son nom) se retrouve aveugle, les spécificités de sa race (canine) ouvrent des champs d’exploration sensorielle (ouïe, odorat) qui permettent au lecteur de mieux appréhender l’univers d’une personne aveugle. C’est intelligent, instructif et si ce livre se destine prioritairement aux enfants, il est tout sauf infantilisant !
Ensuite, le fil du récit, qui va mener Ours dans un périple dangereux avec pour espoir de retrouver la vue. Son amitié avec un véritable ours, la manière dont le dessinateur illustre ce que « voit » Ours, les différentes rencontres, tout incite constamment à poursuivre la lecture tout en surprenant avec intelligence. A nouveau, ce déroulé offre aux auteurs bien des moments durant lesquels ils peuvent nous apprendre certaines choses sur les chiens d’aveugles, les aveugles, les chiens, les ours, les chauves-souris, les ratons-laveurs… tout ça sans jamais que ce ne devienne lourd car l’aventure reste au centre du récit.
Enfin, le happy-end final, bien en accord avec un récit jeunesse. Bourré de bons sentiments mais sans mièvrerie inutile…
A titre personnel, je peux vous assurer que j’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce récit mais aussi que j’ai moi-même appris pas mal de choses et pris conscience d’autres alors même que ce livre est parfaitement adapté à son lectorat (8-10 ans, me semble-t-il) ! Franchement, dans le genre « jeunesse », c’est une belle réussite.
Miroslav Sekulic-Struja a réalisé quelques années auparavant ce diptyque détonnant et sombre qu'est Pelote dans la fumée, injustement ignoré du grand public, et puis plus rien. Nous étions alors en 2013. Neuf ans, rendez-vous compte ! Entre temps, l'homme semble s'être consacré à sa carrière de peintre, délaissant temporairement le 9eme art. Il revient avec ce pavé réjouissant (et un peu moins sombre).
D'abord, son dessin est encore meilleur. Le contraire eut été étonnant. Dans ce nouveau livre, l'essentiel est conservé, c'est à dire ce qui confère toute l'originalité à son œuvre. En effet, les personnages lunaires envahissent le récit, et le lecteur demeure dans un état de veille surréaliste, oscillant entre songe poisseux et doux cauchemar, si l'on peut dire, traversant des moment de pure rêverie. Parce que ce n'est pas exactement cauchemardesque, ou alors, un cauchemardesque poétique. Miroslav crée un vocabulaire imagé vraiment original qu'il est difficile de définir, comme si la violence de cette société post-moderniste qu'il dépeint lui était inhérente, mais que ses personnages débordant d'une grande tendresse l'évacuaient, refusant sa dictature. D'où, peut-être, cette impression étrange de naviguer parmi une foule de portraits déglingués et d'êtres qui se cherchent tout comme ils cherchent un endroit où vivre pleinement leur bohème, les entraînant inévitablement aux marges. Ainsi, ce sont deux mondes qui se côtoient : celui de cette réalité sordide imposée par les valeurs matérialistes bourgeoise, et à laquelle il est décidemment bien difficile d'échapper, et celui des aspirations à la liberté de tous les rêveurs du monde, dont la plupart constituent les hordes de sacrifiés peuplant les faubourgs oubliés de l'économie de marché, ceux que la bien-pensance nomme pudiquement "les marginaux".
On constate également au fil des pages que les ciels sont davantage travaillés, que les couleurs sont moins ternes, que les expressions des personnages sont mieux fixées. La mise en case varie un brin avec de grandes pages muettes et pleines ou des gaufriers irréguliers aux mouvements décomposés, ce qui renforce encore cette impression de fourmillement. Chaque case se savoure et nécessite d'être apprivoiser. C'est un plaisir pour les yeux, ce que j'attends avant tout d'une bonne bande dessinée.
Voilà bien une œuvre réellement atypique dans le paysage ! Objet pictural autant que bande dessinée, Petar & Liza est une immersion totale chez les paumés de l'ex-Yougoslavie, les punks, les révoltés, les invisibles, les cabossés de tous poils. Les dessins, pour ne pas dire les peintures, vous gobent tout entier. A mi-chemin entre les tableaux de Bruegel qui fourmillent de détails et ceux du Douanier Rousseau et leur style naïf, Petar & Liza est une ode à la vie, avec ses inévitables malheurs.
A quelques jours des élections, moi je mets mon billet à Miroslav Sekulic-Struja pour le prochain Fauve d'or...
Un des gros atouts de ce roman graphique tout à fait singulier, c’est d’abord de réussir à nous captiver dès la scène d’ouverture, où l’on assiste à l’accouchement de Samuel. Ou plutôt, c’est Samuel qui assiste à son propre accouchement — le parti-pris du livre étant une narration en vue subjective, par les yeux du personnage —, car déjà il semble assez éveillé pour le faire, mais déjà, à peine sorti du ventre de sa mère, il inquiète. Il ne poussera aucun cri comme le fait tout nouveau-né, et fixera sa génitrice en silence, allant même jusqu’à provoquer le malaise de cette dernière.
Cet enfant étrange, spectateur muet du monde qui l’entoure et ne le comprend pas, va ainsi grandir dans une solitude froide et acceptée, sans états d’âme (Souffre-t-il ? Est-il heureux ? en colère ? Impossible de le savoir…), contrairement à l’ensemble des vivants qui préfère masquer la peur qu’elle suscite par un verbiage souvent illusoire. Samuel apparaît ainsi comme un miroir renvoyant une image de l’humanité peu reluisante. Car Samuel voit tout, et son silence semble parfois plus éloquent que n’importe quel commentaire, plus impitoyable encore. Par les réactions d’incompréhension qu’il provoque, il met à jour la mesquinerie et la cupidité des adultes, notamment celles de ce père égoïste et absent. Mais les enfants n’échappent pas pour autant à son regard, se révélant souvent odieux, voire plus cruels encore. Trois personnages semblent trouver grâce à ses yeux, les seuls à ne pas être perturbés par son silence : sa mère (qui connaîtra une fin tragique), son ami Yacine et Judith, sa camarade de classe dont il est secrètement (évidemment) amoureux, n’exprimant son amour que par les portraits qu’il fait d’elle.
Et pour revenir au parti pris narratif en vue subjective, c’est la grande originalité de l’album qui fonctionne très bien par la fascination exercée sur le lecteur. Théo Grosjean va ainsi s’amuser de notre curiosité (malsaine ?) de voir à quoi ressemble Samuel, qui, c’est certain, ne peut qu’avoir l’apparence d’un monstre ! Bon prince, l’auteur consentira à nous dévoiler dans de rares passages le visage de son « spectateur » lorsqu’il se regardera dans la glace de la salle de bains. Une sorte de jeu de miroir entre sujet et objet, puisqu’avec ce récit, il est beaucoup question de réflexions, et ce dans tous les sens du terme…
Ce conte noir nous offre donc une vision assez désabusée de l’humanité, mais comme tout conte noir, il possède une part de merveilleux. Et la très belle présentation y contribue largement. D’abord par le choix d’une palette de verts à la fois sombres et lumineux, magnifiés par le cadrage noir. Avec sa belle ligne claire simplissime, à la fois très graphique et un brin naïve, assez proche du courant alternatif U.S., Théo Grosjean nous ramène au monde de l’enfance, tout en osant quelques digressions proches de l’abstraction, qui, par contraste, nous portent vers des territoires mystérieux, quasi-métaphysiques, évoquant des organismes traversés par des formes bizarres, entre cristaux et bactéries, comme peut-être une invitation à l’introspection. Quant au corbeau de la couverture, s’il constitue la part la plus inquiétante de Samuel, il ne les tue pourtant jamais, ne faisant que les conserver dans des boîtes, comme fasciné par leur décomposition. Un simple besoin, légitime chez l’enfant mais choquant pour l’adulte, celui d’approcher le mystère de la vie et de la mort.
D’un point de vue graphique encore, on retiendra quelques scènes magnifiques, celle notamment où Yacine emmène Samuel dans un endroit secret, sur les toits du Sacré-Cœur, ou encore celle du séjour à la montagne où le même Samuel admirera les étoiles en compagnie de Judith.
Si le livre se termine de façon si incongrue qu’on ne saurait décrire ce que l’on ressent, nous laissant avec nos questionnements sur la personnalité de Samuel et ses aspirations, il faut bien convenir que des explications n’auraient été ici que pure redondance. La scène finale, très suggestive, évoque des bouts de verres brisés, ou d’un miroir peut-être, celui franchi par Samuel, lien judicieux entre rêve et réalité. Ainsi, la boucle est bouclée, et l’on referme l’ouvrage en se disant que, oui, on est infiniment reconnaissant à son auteur de nous avoir fait partager les nobles et sublimes visions de son Spectateur, au milieu des brumes obscures de la condition humaine.
Oh en voilà une BD tout en fraicheur et en subtilité qui fait du bien !
Nous voilà propulsé en Irlande dans le petit village de Killkenny dans les années 30, où l'histoire locale veut que le seul pub du bled en question ait été construit à flanc d'église : le Pink Clovers. Forcément, un débit de boisson accolé à cet édifice religieux fait plus que débat depuis belle lurette au sein de la populace locale.
Toute les semaines le curé prépare son sermon à l'arrière de l'église, face au champ attenant où l'attendent religieusement un troupeau de moutons. Même si elles ne comprennent rien à cet humain bien bavard, elles attendent avec impatience les friandises qu'il distribue avec parcimonie à la fin de son sermon... Mais voilà qu'un beau matin, fidèle au rendez-vous, nos moutons se retrouvent bien embêtés : pas de curé (ni de friandises...) ! Tout ce petit monde se retrouve tout chamboulé, et c'est à travers la kyrielle d'animaux de la campagne environnante que "l'enquête" commence...
Crisse que je connaissais plus pour ses scénario SF ou fantasy nous propose ici un album humoristique champêtre d'une grande finesse et superbement illustré par Christian Patty. La campagne irlandaise, sa faune et ses habitants sont magnifiquement campés, c'est criant de vie, plein d'énergie, et le parallèle animaux/humains est jubilatoire ! Mine de rien et avec humour, c'est toute la nature humaine et ses travers qui passent au crible de ce prisme animalier pour notre plus grand plaisir. Qu'il s'agisse, de la différence, de la religion, de la cupidité, et j'en passe, ça se télescope sévèrement mais toujours avec humour. Les dialogues ne sont pas en reste et participent pleinement à cette ambiance drôlatique qui trouve le parfait équilibre entre fable et caricature caustique.
Voilà donc un album que je vous recommande chaudement en ces temps bien tristounets, vous devriez passer un agréable moment de lecture qui vaudra bien plus qu'une messe !
*** Tome 2 ***
Hey ! L'Irlande repointe le bout de son nez !
C'est pas encore le printemps, c'est même plutôt sous la neige de Noël que nous retrouvons nos ouailles et son pub adossé à l'église : le Pink Clover.
Cette fois le curé ne leur fera pas défaut et va même organiser une surprise qui va finir par mettre le village en émoi. Le vieil instituteur de Kilkenny a du rendre son tablier, et le curé a trouvé... une charmante remplaçante !
Les présentations sont faites lors de la messe de minuit, et je vous renvoie aux 4 cases avant/après avec d'un côté les hommes, de l'autre les femmes pour saisir à merveille l'effet de cette nouvelle arrivée ! Jubilatoire :D
Bref, vous l'aurez compris, cette fois-ci point de disparition, mais plutôt une arrivée remarquée qui va faire ressortir de vieux souvenirs et de vieilles histoires pas vraiment jolies jolies... Ajoutez à cela une petite dose de fantastique et des moutons toujours en plein questionnement, prompt à philosopher (à leur niveau, hein ^^) et en pleine crise de mysticisme, et voilà brossé le tableau de ce second opus.
Alors oui, c'est un réel plaisir que de retrouver ce microcosme bigarré ancré dans ses traditions et ses contradictions. C'est encore plus drôle de retrouver ces boutons et brebis aux tronches toujours aussi délurées. Mais malgré une histoire qui tient tout à fait la route, j'ai trouvé l'album un cran en dessous du premier. Il est loin d'être mauvais, bien au contraire, mais est-ce du à l'effet de surprise en moins, je l'ai trouvé moins drôle dans l'ensemble (malgré quelques scènes hilarantes). C'est donc un album de très bonne tenue, mais le premier aillant placé la barre si haute, que forcément, la suite est plus difficile à négocier. Cela reste une petite bouffée de fraicheur irlandaise parfaite pour s'aérer la tête.
Une petite pépite méconnue cet album.
Plusieurs lectures depuis sa sortie et je me bidonne toujours autant.
On a affaire à de la Fantasy épique et humoristique, complètement con et crétin, j’adore.
On y suit 2 frères, Cotus et Léon, l’un guerrier et l’autre magicien, chargés bien malgré eux de sauver le monde ...
Quand on voit le niveau de nos 2 gugusses, on se dit que c’est pas perdu mais que c’est pas gagné gagné, je n’en dis pas plus.
Les dangers et rencontres montent crescendo jusqu’au final jouissif.
L’humour bête et méchant fonctionne à plein tube, quelques running gags du plus bel effet, ça ne plaira pas à tout le monde mais perso j’ai adhéré à 100%.
La partie graphique sert bien le récit et possède sa patte (inspirée de Mignola mais en plus grossier), j’ai bien aimé, quelques bonnes bouilles.
Je ne connais que cette œuvre des auteurs mais bravo à eux, ils ont su jouer avec les codes, une réussite à mes yeux.
Un one shot rondement mené, j’invite les amateurs du genre à le découvrir. Je serais curieux de connaître votre ressenti.
3,5+ et coup de cœur
Une très belle histoire, mêlant la grande Histoire, le conte (avec ses personnages bien typés : le voleur, le puissant...), le pamphlet (les autodafés, le renvoi dos à dos de chaque camp refusant de voir leurs propres défauts), une ode à la littérature (à la fois si puissant et si fragile),
Le livre en lui-même donne envie à être mis en valeur, avec ses côtés colorés et sa couverture enluminurée.
Je redoutais au début un parti-pris trop "Islam éclairé" mais la suite montre l'excellent travail d'équilibre de Lupano.
Le rythme est cassé par moments, une dizaine de pages auraient pu être tronquées mais rien de condamnable, c'est en cohérence avec le rythme de marche de nos pauvres héros et de cette pauvre mule craquante (pour elle, 2-3 pages de plus auraient été délicieuses).
Une BD à mettre entre toutes les mains, elle vous fera voyager et vous rendra moins bête une fois terminée.
Superbe BD qui mérite d'être lue, qu'on soit concerné ou non par le sujet de la bipolarité et de la cyclothymie.
D'abord parce qu'elle change la vision réductrice qu'on a sur les troubles bipolaires. En véritable support de vulgarisation scientifique, elle détaille les différentes formes de troubles bipolaires, les effets biologiques associés, les conséquences sur le moral et le comportement. On y découvre que le spectre de la bipolarité est beaucoup plus large qu'on le croit, et SURTOUT qu'on ne peut pas réduire quelqu'un au fait d'être "bipolaire" ou ici "cyclothymique", comme un critère excluant.
Ensuite, parce que le dessin est superbe, avec beaucoup de mouvement; que le jeu de couleur (noir-orange) est manié avec intelligence pour servir le propos; que très souvent dans la BD, le récit s'arrête le temps d'une case, dans laquelle on trouve un graphique, des curseurs, une balance, des poissons... des images symboliques qui appuient l'explication. Celles-ci sont très bien trouvées, très fines et touchantes.
Enfin, parce qu'on ne peut que s'attacher à Lou, qui raconte ici son propre parcours: la découverte de sa maladie, sa galère de psychologues, l'impact sur sa vie sentimentale, sur son travail...
C'est un brillant équilibre entre un ouvrage de vulgarisation scientifique et une autobiographie touchante. J'ai adoré.
En France, les livres sont au même prix partout. C'est la loi !
Avec BDfugue, vous payez donc le même prix qu'avec les géants de la vente en ligne mais pour un meilleur service :
des promotions et des goodies en permanence
des réceptions en super état grâce à des cartons super robustes
une équipe joignable en cas de besoin
2. C'est plus avantageux pour nous
Si BDthèque est gratuit, il a un coût.
Pour financer le service et le faire évoluer, nous dépendons notamment des achats que vous effectuez depuis le site. En effet, à chaque fois que vous commencez vos achats depuis BDthèque, nous touchons une commission. Or, BDfugue est plus généreux que les géants de la vente en ligne !
3. C'est plus avantageux pour votre communauté
En choisissant BDfugue plutôt que de grandes plateformes de vente en ligne, vous faites la promotion du commerce local, spécialisé, éthique et indépendant.
Meilleur pour les emplois, meilleur pour les impôts, la librairie indépendante promeut l'émergence des nouvelles séries et donc nos futurs coups de cœur.
Chaque commande effectuée génère aussi un don à l'association Enfance & Partage qui défend et protège les enfants maltraités. Plus d'informations sur bdfugue.com
Pourquoi Cultura ?
Indépendante depuis sa création en 1998, Cultura se donne pour mission de faire vivre et aimer la culture.
La création de Cultura repose sur une vision de la culture, accessible et contributive. Nous avons ainsi considéré depuis toujours notre responsabilité sociétale, et par conviction, développé les pratiques durables et sociales. C’est maintenant au sein de notre stratégie de création de valeur et en accord avec les Objectifs de Développement Durable que nous déployons nos actions. Nous traitons avec lucidité l’impact de nos activités, avec une vision de long terme. Mais agir en responsabilité implique d’aller bien plus loin, en contribuant positivement à trois grands enjeux de développement durable.
Nos enjeux environnementaux
Nous sommes résolument engagés dans la réduction de notre empreinte carbone, pour prendre notre part dans la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la planète.
Nos enjeux culturels et sociétaux
La mission de Cultura est de faire vivre et aimer la culture. Pour cela, nous souhaitons stimuler la diversité des pratiques culturelles, sources d’éveil et d’émancipation.
Nos enjeux sociaux
Nous accordons une attention particulière au bien-être de nos collaborateurs à la diversité, l’inclusion et l’égalité des chances, mais aussi à leur épanouissement, en encourageant l’expression des talents artistiques.
Votre vote
L'Aigle sans orteils
Lax est un maître conteur en humanité ! Je ne sais pas si sa formidable histoire d'Amédée Fario est pure fiction ou possède un fond de réalité mais peu importe. Mon premier avis sur le site était dédié à Marathon, c'est dire si l'effort solitaire avec un dépassement de soi gratuit m'attire. Même si mes légendes sont plutôt Zatopek, Mimoun ou Abebe Bikila, j'ai aussi rêvé sur les noms de Gaul, Coppi, Bahamontes Thévenet ou Hinault. Petit-Breton est un nom que l'on se transmettait de génération en génération comme le trésor d'un patrimoine sportif historique qu'il ne faut pas oublier. Merci à Lax de nous rendre ce patrimoine en images si belles. Au-delà de la belle histoire d'Amédée, c'est la formidable histoire des premiers Tours que l'auteur fait revivre. Effort, solidarité, créativité de la technique et de l'hygiène sportive, vision des organisateurs sur l'impact populaire d'un grand événement sportif, il y a tous ces thèmes très bien mis en valeur dans l'ouvrage. Evidemment, 1910,1911,1912,1913, le récit s'égraine comme une pendule tragique qui avance vers l'indicible. L'ombre portée de la guerre est toujours présent dans l'esprit du lecteur. Toutes ces vies, ces histoires non écrites à cause de ces vieillards ventripotents et galonnés qui vont envoyer des millions d'Amédée à la mort et produire des monstres encore plus terrifiants. 100 ans après, j'en ai encore de l'amertume dans la bouche et un ouvrage comme celui de Lax nous rappelle ce monstrueux gâchis. Je suis fan du dessin de Lax depuis ma lecture du Choucas. Lax ne nous vend pas de la Pin-up ou du BG body buildé (encore que Amédée est BG et Adeline à croquer) mais ses visages dans l'effort sont magnifiques. Son trait presque caricatural se prête bien aux rictus grotesques qu'ont tous les sportifs (moi le premier) au bout de leurs forces. Lax partage avec Cosey ses grandioses descriptions de montagne. Ici nous sommes gâtés. C'est dur, caillouteux, anguleux et froid mais c'est beau. Les teintes jaunes et bleutées sont piles dans les ambiances voulues. Lax revient aussi sur le thème du handicap surmonté, probablement un hommage à son frère, cela enrichit aussi un récit qui n'a aucune faiblesse à mes yeux. Pour finir, voilà une histoire qui crée de l'émotion, de l'empathie pour tous les personnages. Une lecture qui ne m'a pas laissé insensible.
Wika
J'ai vraiment pris une véritable claque graphique comme je me souviens pas en avoir pris dans de la BD franco-belge. Ce n'est pas la première BD que je lis dessinée par Ledroit. J'avais lu "les Chroniques de la Lune Noire", sans finir, et j'étais pas fan, le dessin de Ledroit à l'époque était plutôt criard et brouillon. J'avais lu Sha (en entier) et commencé Requiem, Chevalier Vampire sans finir. Le dessin de Ledroit s'était grandement amélioré, c'était même bon, je trouve, mais pas vraiment dans mon style, car trop agressif. Mais dans Wika, il a passé un énorme cap, je trouve que chaque planche est magnifique, ça donne l'impression de lire un artbook avec un scénario. Même si le principal intérêt de cette BD est graphique, le scénario est pas mal. Normalement, j'apprécie quand les dessins servent bien le scénario, même c'est pour moi l'intérêt d'une BD comparée à un roman. Là c'est plutôt le contraire, le scénario sert bien les dessins. Il fait le boulot, même si c'est pas ce que retiendrai principalement de cette BD.
Bugaled Breizh - 37 secondes
Pas besoin d’être un breton pour découvrir cet album magnifique. Pascal Bresson et Erwan Le Saëc ont su nous replonger dans l’affaire du Bugaled Breizh, chalutier qui a coulé mystérieusement en janvier 2004 dans les eaux britanniques au sud du Cap Lizard emportant 5 malheureux marins. A travers un journaliste sur le déclin mais fort en gueule, nous suivons l’enquête. Les incohérences sont nombreuses. C’est palpitant. Vous ne pouvez lire ce récit que d’une seule traite ! La question sous-jacente que pose cet album… pouvons-nous avoir foi aveuglement en l’état et à son armée ? On peut en douter. 18 ans après ce drame, les familles de ces marins sont toujours en attente, afin de comprendre ce qui s’est passé réellement. Deux scénarios s’affrontent. Celui d’un malheureux accident ou plus certainement d’un accrochage avec un sous-marin au cours d’un exercice militaire. Ne serions-nous pas devant un mensonge d’Etat ? Difficile de comprendre pourquoi si nous étions sur un banal accident, certains éléments sont toujours classés secret défense ! Les zones d’ombres sont nombreuses. Au-delà du scénario parfaitement maitrisé, je suis subjugué par le graphisme d’Erwan Le Saëc. Le trait est précis et fin. Les paysages et les scènes maritimes sont sublissimes. L’effet wahou est là ! Un plaisir pour les yeux cet album. Et que dire de la couverture avec son océan de sang et une ombre inquiétante ! c’est admirable. BD a vous procurer en urgence car malheureusement toujours d’actualité. Un gros coup de coeur.
Ours
Gros coup de cœur pour ce récit que je trouve à la fois touchant, intelligent et instructif. Déjà l’idée de départ : nous raconter l’histoire d’un chien d’aveugle… lui-même frappé de cécité. Voilà qui est original et, surtout, qui va provoquer pas mal de choses chez le lecteur. Tout d’abord, il est difficile de ne pas s’attacher à cette boule de poils loyale, intelligente et dévouée à son maître. Ensuite, lorsque Ours (c’est son nom) se retrouve aveugle, les spécificités de sa race (canine) ouvrent des champs d’exploration sensorielle (ouïe, odorat) qui permettent au lecteur de mieux appréhender l’univers d’une personne aveugle. C’est intelligent, instructif et si ce livre se destine prioritairement aux enfants, il est tout sauf infantilisant ! Ensuite, le fil du récit, qui va mener Ours dans un périple dangereux avec pour espoir de retrouver la vue. Son amitié avec un véritable ours, la manière dont le dessinateur illustre ce que « voit » Ours, les différentes rencontres, tout incite constamment à poursuivre la lecture tout en surprenant avec intelligence. A nouveau, ce déroulé offre aux auteurs bien des moments durant lesquels ils peuvent nous apprendre certaines choses sur les chiens d’aveugles, les aveugles, les chiens, les ours, les chauves-souris, les ratons-laveurs… tout ça sans jamais que ce ne devienne lourd car l’aventure reste au centre du récit. Enfin, le happy-end final, bien en accord avec un récit jeunesse. Bourré de bons sentiments mais sans mièvrerie inutile… A titre personnel, je peux vous assurer que j’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce récit mais aussi que j’ai moi-même appris pas mal de choses et pris conscience d’autres alors même que ce livre est parfaitement adapté à son lectorat (8-10 ans, me semble-t-il) ! Franchement, dans le genre « jeunesse », c’est une belle réussite.
Petar & Liza
Miroslav Sekulic-Struja a réalisé quelques années auparavant ce diptyque détonnant et sombre qu'est Pelote dans la fumée, injustement ignoré du grand public, et puis plus rien. Nous étions alors en 2013. Neuf ans, rendez-vous compte ! Entre temps, l'homme semble s'être consacré à sa carrière de peintre, délaissant temporairement le 9eme art. Il revient avec ce pavé réjouissant (et un peu moins sombre). D'abord, son dessin est encore meilleur. Le contraire eut été étonnant. Dans ce nouveau livre, l'essentiel est conservé, c'est à dire ce qui confère toute l'originalité à son œuvre. En effet, les personnages lunaires envahissent le récit, et le lecteur demeure dans un état de veille surréaliste, oscillant entre songe poisseux et doux cauchemar, si l'on peut dire, traversant des moment de pure rêverie. Parce que ce n'est pas exactement cauchemardesque, ou alors, un cauchemardesque poétique. Miroslav crée un vocabulaire imagé vraiment original qu'il est difficile de définir, comme si la violence de cette société post-moderniste qu'il dépeint lui était inhérente, mais que ses personnages débordant d'une grande tendresse l'évacuaient, refusant sa dictature. D'où, peut-être, cette impression étrange de naviguer parmi une foule de portraits déglingués et d'êtres qui se cherchent tout comme ils cherchent un endroit où vivre pleinement leur bohème, les entraînant inévitablement aux marges. Ainsi, ce sont deux mondes qui se côtoient : celui de cette réalité sordide imposée par les valeurs matérialistes bourgeoise, et à laquelle il est décidemment bien difficile d'échapper, et celui des aspirations à la liberté de tous les rêveurs du monde, dont la plupart constituent les hordes de sacrifiés peuplant les faubourgs oubliés de l'économie de marché, ceux que la bien-pensance nomme pudiquement "les marginaux". On constate également au fil des pages que les ciels sont davantage travaillés, que les couleurs sont moins ternes, que les expressions des personnages sont mieux fixées. La mise en case varie un brin avec de grandes pages muettes et pleines ou des gaufriers irréguliers aux mouvements décomposés, ce qui renforce encore cette impression de fourmillement. Chaque case se savoure et nécessite d'être apprivoiser. C'est un plaisir pour les yeux, ce que j'attends avant tout d'une bonne bande dessinée. Voilà bien une œuvre réellement atypique dans le paysage ! Objet pictural autant que bande dessinée, Petar & Liza est une immersion totale chez les paumés de l'ex-Yougoslavie, les punks, les révoltés, les invisibles, les cabossés de tous poils. Les dessins, pour ne pas dire les peintures, vous gobent tout entier. A mi-chemin entre les tableaux de Bruegel qui fourmillent de détails et ceux du Douanier Rousseau et leur style naïf, Petar & Liza est une ode à la vie, avec ses inévitables malheurs. A quelques jours des élections, moi je mets mon billet à Miroslav Sekulic-Struja pour le prochain Fauve d'or...
Le Spectateur
Un des gros atouts de ce roman graphique tout à fait singulier, c’est d’abord de réussir à nous captiver dès la scène d’ouverture, où l’on assiste à l’accouchement de Samuel. Ou plutôt, c’est Samuel qui assiste à son propre accouchement — le parti-pris du livre étant une narration en vue subjective, par les yeux du personnage —, car déjà il semble assez éveillé pour le faire, mais déjà, à peine sorti du ventre de sa mère, il inquiète. Il ne poussera aucun cri comme le fait tout nouveau-né, et fixera sa génitrice en silence, allant même jusqu’à provoquer le malaise de cette dernière. Cet enfant étrange, spectateur muet du monde qui l’entoure et ne le comprend pas, va ainsi grandir dans une solitude froide et acceptée, sans états d’âme (Souffre-t-il ? Est-il heureux ? en colère ? Impossible de le savoir…), contrairement à l’ensemble des vivants qui préfère masquer la peur qu’elle suscite par un verbiage souvent illusoire. Samuel apparaît ainsi comme un miroir renvoyant une image de l’humanité peu reluisante. Car Samuel voit tout, et son silence semble parfois plus éloquent que n’importe quel commentaire, plus impitoyable encore. Par les réactions d’incompréhension qu’il provoque, il met à jour la mesquinerie et la cupidité des adultes, notamment celles de ce père égoïste et absent. Mais les enfants n’échappent pas pour autant à son regard, se révélant souvent odieux, voire plus cruels encore. Trois personnages semblent trouver grâce à ses yeux, les seuls à ne pas être perturbés par son silence : sa mère (qui connaîtra une fin tragique), son ami Yacine et Judith, sa camarade de classe dont il est secrètement (évidemment) amoureux, n’exprimant son amour que par les portraits qu’il fait d’elle. Et pour revenir au parti pris narratif en vue subjective, c’est la grande originalité de l’album qui fonctionne très bien par la fascination exercée sur le lecteur. Théo Grosjean va ainsi s’amuser de notre curiosité (malsaine ?) de voir à quoi ressemble Samuel, qui, c’est certain, ne peut qu’avoir l’apparence d’un monstre ! Bon prince, l’auteur consentira à nous dévoiler dans de rares passages le visage de son « spectateur » lorsqu’il se regardera dans la glace de la salle de bains. Une sorte de jeu de miroir entre sujet et objet, puisqu’avec ce récit, il est beaucoup question de réflexions, et ce dans tous les sens du terme… Ce conte noir nous offre donc une vision assez désabusée de l’humanité, mais comme tout conte noir, il possède une part de merveilleux. Et la très belle présentation y contribue largement. D’abord par le choix d’une palette de verts à la fois sombres et lumineux, magnifiés par le cadrage noir. Avec sa belle ligne claire simplissime, à la fois très graphique et un brin naïve, assez proche du courant alternatif U.S., Théo Grosjean nous ramène au monde de l’enfance, tout en osant quelques digressions proches de l’abstraction, qui, par contraste, nous portent vers des territoires mystérieux, quasi-métaphysiques, évoquant des organismes traversés par des formes bizarres, entre cristaux et bactéries, comme peut-être une invitation à l’introspection. Quant au corbeau de la couverture, s’il constitue la part la plus inquiétante de Samuel, il ne les tue pourtant jamais, ne faisant que les conserver dans des boîtes, comme fasciné par leur décomposition. Un simple besoin, légitime chez l’enfant mais choquant pour l’adulte, celui d’approcher le mystère de la vie et de la mort. D’un point de vue graphique encore, on retiendra quelques scènes magnifiques, celle notamment où Yacine emmène Samuel dans un endroit secret, sur les toits du Sacré-Cœur, ou encore celle du séjour à la montagne où le même Samuel admirera les étoiles en compagnie de Judith. Si le livre se termine de façon si incongrue qu’on ne saurait décrire ce que l’on ressent, nous laissant avec nos questionnements sur la personnalité de Samuel et ses aspirations, il faut bien convenir que des explications n’auraient été ici que pure redondance. La scène finale, très suggestive, évoque des bouts de verres brisés, ou d’un miroir peut-être, celui franchi par Samuel, lien judicieux entre rêve et réalité. Ainsi, la boucle est bouclée, et l’on referme l’ouvrage en se disant que, oui, on est infiniment reconnaissant à son auteur de nous avoir fait partager les nobles et sublimes visions de son Spectateur, au milieu des brumes obscures de la condition humaine.
Le Pré derrière l'église
Oh en voilà une BD tout en fraicheur et en subtilité qui fait du bien ! Nous voilà propulsé en Irlande dans le petit village de Killkenny dans les années 30, où l'histoire locale veut que le seul pub du bled en question ait été construit à flanc d'église : le Pink Clovers. Forcément, un débit de boisson accolé à cet édifice religieux fait plus que débat depuis belle lurette au sein de la populace locale. Toute les semaines le curé prépare son sermon à l'arrière de l'église, face au champ attenant où l'attendent religieusement un troupeau de moutons. Même si elles ne comprennent rien à cet humain bien bavard, elles attendent avec impatience les friandises qu'il distribue avec parcimonie à la fin de son sermon... Mais voilà qu'un beau matin, fidèle au rendez-vous, nos moutons se retrouvent bien embêtés : pas de curé (ni de friandises...) ! Tout ce petit monde se retrouve tout chamboulé, et c'est à travers la kyrielle d'animaux de la campagne environnante que "l'enquête" commence... Crisse que je connaissais plus pour ses scénario SF ou fantasy nous propose ici un album humoristique champêtre d'une grande finesse et superbement illustré par Christian Patty. La campagne irlandaise, sa faune et ses habitants sont magnifiquement campés, c'est criant de vie, plein d'énergie, et le parallèle animaux/humains est jubilatoire ! Mine de rien et avec humour, c'est toute la nature humaine et ses travers qui passent au crible de ce prisme animalier pour notre plus grand plaisir. Qu'il s'agisse, de la différence, de la religion, de la cupidité, et j'en passe, ça se télescope sévèrement mais toujours avec humour. Les dialogues ne sont pas en reste et participent pleinement à cette ambiance drôlatique qui trouve le parfait équilibre entre fable et caricature caustique. Voilà donc un album que je vous recommande chaudement en ces temps bien tristounets, vous devriez passer un agréable moment de lecture qui vaudra bien plus qu'une messe ! *** Tome 2 *** Hey ! L'Irlande repointe le bout de son nez ! C'est pas encore le printemps, c'est même plutôt sous la neige de Noël que nous retrouvons nos ouailles et son pub adossé à l'église : le Pink Clover. Cette fois le curé ne leur fera pas défaut et va même organiser une surprise qui va finir par mettre le village en émoi. Le vieil instituteur de Kilkenny a du rendre son tablier, et le curé a trouvé... une charmante remplaçante ! Les présentations sont faites lors de la messe de minuit, et je vous renvoie aux 4 cases avant/après avec d'un côté les hommes, de l'autre les femmes pour saisir à merveille l'effet de cette nouvelle arrivée ! Jubilatoire :D Bref, vous l'aurez compris, cette fois-ci point de disparition, mais plutôt une arrivée remarquée qui va faire ressortir de vieux souvenirs et de vieilles histoires pas vraiment jolies jolies... Ajoutez à cela une petite dose de fantastique et des moutons toujours en plein questionnement, prompt à philosopher (à leur niveau, hein ^^) et en pleine crise de mysticisme, et voilà brossé le tableau de ce second opus. Alors oui, c'est un réel plaisir que de retrouver ce microcosme bigarré ancré dans ses traditions et ses contradictions. C'est encore plus drôle de retrouver ces boutons et brebis aux tronches toujours aussi délurées. Mais malgré une histoire qui tient tout à fait la route, j'ai trouvé l'album un cran en dessous du premier. Il est loin d'être mauvais, bien au contraire, mais est-ce du à l'effet de surprise en moins, je l'ai trouvé moins drôle dans l'ensemble (malgré quelques scènes hilarantes). C'est donc un album de très bonne tenue, mais le premier aillant placé la barre si haute, que forcément, la suite est plus difficile à négocier. Cela reste une petite bouffée de fraicheur irlandaise parfaite pour s'aérer la tête.
Cotus et Léon
Une petite pépite méconnue cet album. Plusieurs lectures depuis sa sortie et je me bidonne toujours autant. On a affaire à de la Fantasy épique et humoristique, complètement con et crétin, j’adore. On y suit 2 frères, Cotus et Léon, l’un guerrier et l’autre magicien, chargés bien malgré eux de sauver le monde ... Quand on voit le niveau de nos 2 gugusses, on se dit que c’est pas perdu mais que c’est pas gagné gagné, je n’en dis pas plus. Les dangers et rencontres montent crescendo jusqu’au final jouissif. L’humour bête et méchant fonctionne à plein tube, quelques running gags du plus bel effet, ça ne plaira pas à tout le monde mais perso j’ai adhéré à 100%. La partie graphique sert bien le récit et possède sa patte (inspirée de Mignola mais en plus grossier), j’ai bien aimé, quelques bonnes bouilles. Je ne connais que cette œuvre des auteurs mais bravo à eux, ils ont su jouer avec les codes, une réussite à mes yeux. Un one shot rondement mené, j’invite les amateurs du genre à le découvrir. Je serais curieux de connaître votre ressenti. 3,5+ et coup de cœur
La Bibliomule de Cordoue
Une très belle histoire, mêlant la grande Histoire, le conte (avec ses personnages bien typés : le voleur, le puissant...), le pamphlet (les autodafés, le renvoi dos à dos de chaque camp refusant de voir leurs propres défauts), une ode à la littérature (à la fois si puissant et si fragile), Le livre en lui-même donne envie à être mis en valeur, avec ses côtés colorés et sa couverture enluminurée. Je redoutais au début un parti-pris trop "Islam éclairé" mais la suite montre l'excellent travail d'équilibre de Lupano. Le rythme est cassé par moments, une dizaine de pages auraient pu être tronquées mais rien de condamnable, c'est en cohérence avec le rythme de marche de nos pauvres héros et de cette pauvre mule craquante (pour elle, 2-3 pages de plus auraient été délicieuses). Une BD à mettre entre toutes les mains, elle vous fera voyager et vous rendra moins bête une fois terminée.
Goupil ou face
Superbe BD qui mérite d'être lue, qu'on soit concerné ou non par le sujet de la bipolarité et de la cyclothymie. D'abord parce qu'elle change la vision réductrice qu'on a sur les troubles bipolaires. En véritable support de vulgarisation scientifique, elle détaille les différentes formes de troubles bipolaires, les effets biologiques associés, les conséquences sur le moral et le comportement. On y découvre que le spectre de la bipolarité est beaucoup plus large qu'on le croit, et SURTOUT qu'on ne peut pas réduire quelqu'un au fait d'être "bipolaire" ou ici "cyclothymique", comme un critère excluant. Ensuite, parce que le dessin est superbe, avec beaucoup de mouvement; que le jeu de couleur (noir-orange) est manié avec intelligence pour servir le propos; que très souvent dans la BD, le récit s'arrête le temps d'une case, dans laquelle on trouve un graphique, des curseurs, une balance, des poissons... des images symboliques qui appuient l'explication. Celles-ci sont très bien trouvées, très fines et touchantes. Enfin, parce qu'on ne peut que s'attacher à Lou, qui raconte ici son propre parcours: la découverte de sa maladie, sa galère de psychologues, l'impact sur sa vie sentimentale, sur son travail... C'est un brillant équilibre entre un ouvrage de vulgarisation scientifique et une autobiographie touchante. J'ai adoré.