Quand l'Homme veut devenir Dieu, il ne peut que se brûler les ailes.
Après avoir découvert Mathieu Bablet avec Adrastée et la mythologie, voici un space opéra qui fera date dans le domaine de la science-fiction.
Un récit qui sur le fond reste classique mais qui a su maintenir mon intérêt de la première à la dernière page. Une narration maîtrisée qui visite le racisme avec les animoïdes et la publicité très sexualisée. Une dystopie réaliste qui fait réfléchir sur l'intérêt de protéger notre belle planète.
Une relecture toujours aussi jouissive.
Parlons du dessin maintenant, là où il fera consensus, c'est dans les décors, on est véritablement plongé dans l'espace, dans ce grand vide. Bablet utilise un appareillage numérique pour les couleurs et ainsi reproduire un effet photographique du plus bel effet. Bluffant !
Son trait précis, minutieux et détaillé pour la représentation de la station orbitale apporte du réalisme au récit. Remarquable !
Par contre, là où son dessin fera débat c'est sur les personnages aux visages disgracieux et aux petits "pieds bandés" issus d'un Japon d'un autre temps. Alors oui, cela ne permet pas toujours de différencier les personnages, il faut rester concentré, mais ce petit effort en vaut la peine.
Je suis fan du style Bablet.
Toujours coup de cœur.
"Silence" est une véritable pépite de la bande dessinée. Cette oeuvre magistrale m'a captivé et émerveillé avec son mélange unique de chronique paysanne, d'onirisme et de fantastique.
L'histoire nous transporte dans le village fictif de Beausonge, immergé dans l'atmosphère envoûtante de l'Ardenne. Au coeur de cette aventure se trouve Silence, un jeune homme muet au cœur pur, qui devient l'homme à tout faire de l'odieux Abel Mauvy. Mais à travers sa rencontre avec une sorcière aveugle, Silence découvre ses origines et les raisons de se venger de son maître tyrannique.
Ce qui rend "Silence" si exceptionnel, c'est le talent artistique de Comès. Son trait graphique en noir et blanc est d'une beauté saisissante, utilisant habilement les contrastes et les jeux d'ombre pour créer une ambiance sombre et mystérieuse. Chaque page est une véritable œuvre d'art, avec des détails minutieux et des expressions émotionnelles qui transpercent l'âme des personnages.
Les personnages de "Silence" sont profondément complexes et nuancés. Silence lui-même est un protagoniste attachant et vulnérable, dont la force réside dans sa pureté et son innocence face à la cruauté du monde. Abel Mauvy, en tant qu'antagoniste, incarne la brutalité et la méchanceté, créant un contraste saisissant avec Silence. Les autres personnages, tels que la sorcière aveugle Sara et le mystérieux Blanche-neige, ajoutent des dimensions fascinantes à l'histoire, apportant des éléments de destinée, de vengeance et de quête d'identité.
Au-delà de l'histoire captivante, "Silence" explore des thèmes profonds tels que l'intégration sociale, la superstition et les relations familiales. Comès nous invite à réfléchir sur la nature humaine, la dualité entre le bien et le mal, et les chemins tortueux de la destinée. Tout en étant ancrée dans la réalité paysanne, l'histoire bascule dans le fantastique, offrant une dimension onirique qui transcende les limites de la bande dessinée.
En lisant avidement cette série je me suis retrouvé adolescent dévorant les récits de Henri de Monfreid dans ces aventures sur la mer Rouge.
Je suis fan de Jack London même si je ne connais pas ses écrits sur ses aventures maritimes des mers du Sud.
J'ai retrouvé dans le scénario de Nury cette ambiance unique d'aventuriers gentlemen-brigands qui ont sillonné les mers du Sud au tournant du siècle précédent pour y faire fortune ou y trouver la mort.
Au delà du profit et des trafics (perles, drogues, armes, essences rares...) c'est surtout l'adrénaline et ce sentiment de liberté que l'on retrouve chez Grief et ses alter ego qui ont donné sens à leurs actions.
Dans son excellent scénario qui mêle trahison, loyauté, honneur et amour Nury transcrit à merveille la personnalité de ces seigneurs des mers mi pirates mi aristocrates.
L'ouvrage m'a d'autant plus touché qu'il est porté par le formidable graphisme de Henninot. Il ne manque que l'odeur du sel et la brulure du soleil pour sentir le roulis des cotres. Le trait réaliste est fin, précis et dynamique.
Les émotions des marins sont palpables et la dramaturgie du récit est soutenu par ces images impressionnantes de la tempête qui oeuvre sur l'île mais aussi dans les coeurs et les esprits des personnages.
Une excellente lecture pour les amoureux d'aventures où la fiction et la réalité sont imbriquées.
Alors ça c'est vraiment très bien !
Nous voilà avec une nouvelle petite série fantastique américaine à destination des préados. Maxine vient d'arriver dans un nouveau collège, et cela ne va pas être facile pour elle. Petite, elle est la cible de harceleurs scolaires. Accolée malgré elle à une autre collégienne que l'on traite de sorcière, elle va devoir faire avec la sagacité de cette dernière. Elle rencontre un autre collégien qui semble ne pas exister ; et pire encore, elle "voit" des créatures qui semblent tenir certaines personnes sous leur emprise... Mais aussi trouver leur versant bienveillant. Des ingrédients que l'on trouve dans pas mal d'histoires ces dernières années, mais plus rarement ensemble, et encore plus rarement avec succès. Car c'est plutôt bien ficelé : les dialogues me semblent faire mouche. Les parents de Maxine, sans être des monstres d'indifférence, sont un peu accaparés par leur installation dans leur nouvel environnement, et il y a fort à parier que le camarade harceleur ait quelques soucis personnels...
Bref, cette histoire d'India Swift, qui a aussi une carrière d'animatrice 2D après avoir été formée aux Gobelins, est d'autant plus sympathique qu'elle bénéficie d'un dessin aussi nerveux qu'expressif, aussi à l'aise dans les scènes d'action que dans les séquences intimistes.
A suivre, car même s'il n'en est fait aucune mention dans ce premier tome, c'est bien une série en plusieurs volets qui débute.
Bon on va pas tourner autour du pot, le label 619 a encore frappé !!
J’adore cette collection, elle nous propose toujours des albums soignés et c’est mené par une chouette génération d’auteurs fidèles. Il y en a du talent et ils ne cessent de s’améliorer au fil du temps.
Leur catalogue est rempli de pépites, Frontier ne déroge pas à la règle.
A mes yeux, une aussi belle surprise que Hoka Hey ! de Neyef, j’adore ces albums que l’on n’attend pas et qui te font Waouh. Comme son comparse avant lui, Guillaume Singelin franchit un cap en tant qu’auteur complet. J’aime ses précédentes œuvres mais là c’est la belle claque, ce sentiment est renforcé par la taille et la beauté de l’écrin.
J’ai adoré son style graphique et le parti pris du côté kawaii des personnages ne m’a absolument pas dérangé, chaque case est un délice de détails, et que dire des couleurs et des décors magnifiques, un plaisir pour les yeux.
Le tout est dans une narration impeccable pour une histoire fluide et prenante, c’est rempli de persos charismatiques et attachants (notre trio et leur petit compagnon en tête). Les thématiques développées sont passionnantes, divertissantes et intelligentes pour un récit dur mais plein d’optimisme, il y a un côté feel good bien agréable.
Un voyage spatial au top, je ne peux que conseiller sa découverte, un album fort attachant.
Il était temps pour moi de retourner en librairie, après plusieurs semaines sans prendre connaissance des sorties récentes, et boum! Voilà t'y pas qu'est sorti un Chabouté y'a 2 jours. Béni soit le Dieu du destin, j'achète sans hésiter.
Je vais me répéter, mais le dessin de Chabouté sait m'absorber dès la première planche. Son style est pour moi l'art de la contemplation. Le muet occupe un tiers du récit, au début. Et puis, peu à peu, les personnages du musée font naître les phylactères. Certains sont immobiles, d'autres ont la bougeotte. Certains sont taiseux et pensifs quand d'autres bavardent, se querellent ou se questionnent. Ces personnages, ce sont tantôt les visiteurs du musée d'Orsay, tantôt les œuvres d'art qui, après une journée à les écouter sans bouger, prennent vie durant la nuit. Tout au long du récit, Chabouté nous fait alterner les moments diurnes et nocturnes. Le quotidien défile en même temps que le temps semble s'arrêter, dans un moment où le lecteur rencontre toutes ses œuvres traversant les âges.
La parole donnée aux peintures et aux sculptures amènent des situations tout à fait absurdes qui prêtent à rire (à commencer par Héraclès). Il y a beaucoup d'humour oui, mais aussi une simplicité poétique que je ne saurai pas décrire. Je vais simplement rappeler que Chabouté réussit encore à porter un regard artistique formidable sur des faits et évènements qui semblent basiques, dont on ne prête pas vraiment attention. Et, fait rare ressenti: Chabouté ne met pas autant en exergue la bêtise humaine ni sa cruauté. On retrouve sa vision critique et sombre bien sûr, mais je la trouve bien faible face aux passages qui redonnent foi en l'humanité. Peut-être que le fait de poser l'Art plutôt que l'Homme au centre de son récit lui fait changer d'état d'esprit.
Enfin, au niveau du dessin, c'est ce qui me fait ajouter le coup de coeur. Alors OK, de base j'adore. Mais là, c'est pas pareil. J'adore plus. Et je vais vous dire pourquoi en fait. A force de lire Chabouté, je trouvais le faciès des personnages assez répétitifs quelle que soit la BD. Grosso modo. Mais cette fois, et peut-être grâce à tous ses visiteurs éphémères qui vont qui viennent, l'auteur s'est amusé à jouer avec les formes pour nous offrir des visages et expressions bien plus variées qu'à l'accoutumée.
Après Yellow Cab, Chabouté prouve encore son audace (si tenté qu'il cherche à prouver quoi que ce soit). Voilà un objet curieux, au récit simple et poétique et dont le dessin rend l'ensemble profondément enivrant.
Dans tout ça, le lecteur peut jouer à s'identifier parmi tous ces visiteurs dessinés, il peut également se divertir ou s'interloquer devant les scènes nocturnes, ou encore réfléchir sur l'intérêt qu'il porte sur l'Art. Et par-dessus tout, j'espère qu'il n'en finira pas d'apprécier le monde incroyablement riche du quotidien, aussi basique semble-t-il être.
Il ne m'a pas fallu plus de quelques secondes pour craquer en librairie sur cette nouvelle série de Rick Remender. Ce monsieur est un scénariste assez prolifique qui a signé entre Fear Agent et The Last Days of American Crime quelques-un de mes plus beaux souvenirs de lecture de comics indépendants.
De surcroit il sait s'entourer de dessinateurs talentueux développant chacun leur style particulier et je vous laisse regarder sa production pour en avoir le coeur net.
Pour le présent titre, on ne déroge pas à cette tradition avec le trait d'un dessinateur portugais proche des dessins de Moebius, Geof Darrow ou de Katsuhiro Otomo, excusez du peu !
Si cette histoire avare en dialogues semble se lire bien vite, le tout réside dans les détails créant une sensation de mal être et de suspens de chaque instant. On suit ici les déambulations d'un homme d'origine Asiatique dans Vancouver sans savoir ce qui va se tramer ni quels sont les desseins du héros pour atterrir dans une sombre histoire de meurtres sanglants et de complot.
Amateurs de la série Breaking Bad, vous allez être aux anges ! Imaginez un polar urbain où tout peut basculer du calme vers la tempête en un claquement de doigts. Que ce soit l'environnement ou le découpage, tout est parfaitement mis en condition pour passer un moment de lecture des plus délectables. La série se clôture en deux tomes et ne perd pas de temps en allant droit à l'essentiel tout en conservant beaucoup de subtilité comme de mystères mais offre une conclusion des plus jouissives et satisfaisantes que je ne peux dévoiler ici.
J’avais déjà beaucoup aimé Les Sauveurs chez le même éditeur, mais « Nées Rebelles » m’a encore plus ému.
Le principe est similaire : les auteurs brossent le portrait de jeunes femmes voulant changer le monde, quitte à faire face à des ogres effrayants : les talibans, la National Rifle Association… et puis l’opinion générale et les trolls sur Internet, aussi… leur détermination inspire, et leur impact aussi, puisqu’elles ont toutes réussi à faire bouger les choses. Greta Thunberg n’est plus à présenter, et sa diatribe « how dare you » à l’ONU a fait le tour du monde… son histoire AVANT d’être connue m’a cependant beaucoup touché. Et que dire de Emma González… son discours à elle, prononcé suite à la fusillade de Parkland, m’a fait fondre en larmes. Une photo des jeunes filles conclut judicieusement chaque chapitre, ce qui les humanise encore plus.
Je note aussi le rôles des parents. Ils sont dépeints comme ouverts, et encouragent leurs enfants à poursuivre leurs rêves et leurs idéaux… être un model pour ses enfants est plus important que jamais.
Il parait futile de parler de réalisation technique… je note toutefois que la narration est parfaite, et que les différents styles graphiques apportent une variété appréciable entre les chapitres.
Un album d’intérêt général, à mettre entre toutes les mains… et plus particulièrement celles des jeunes filles, qui ont plus que jamais besoin de modèles autres que Kim Kardashian et toutes ces influenceuses TikTok à la vacuité sans fond.
Woua ! Il y a tout ce que j'aime dedans cette BD ! Je sors de ma lecture absolument charmé. Détails :
D'abord, un dessin ultra chouette, fin, original, en particulier les (rares) scènes de nuit, splendides. Une ligne claire souple qui flatte le regard. On ne fait pas trop gaffe en survolant, mais franchement, c'est un trait de génie, dans tous les sens du terme. Les couleurs aussi fonctionnent très très bien, imprimant une ambiance forte et dynamique à l'ensemble.
L'univers, en grande partie dépendant du dessin, est super original. Les auteurs font du neuf avec du vieux. Et que je te reprends cette bonne vieille légende arthurienne ! Et que je t'ajoute une bonne dose d'humour, de cool-trash (chais pas trop ce que ça veut dire, mais je trouve que ça correspond :) ainsi qu'un brin de baroque avec aussi un peu de satanisme (Merlin n'en est que plus pervers). Les dialogues sont quant à eux très frais, et mis au goût du jour.
Les personnages sont très typés, que ce soit Arthur lui-même, en pleine décadence et baignant littéralement dans son caca, le comte de Cumbre (qui a une identité double, mais chuuuuut !) et son petit zizi au bol, le grand taiseux de Claude, ou tout simplement l'héroïne, une jeune femme pleine de vie et éprise de liberté. Bref ! On a affaire à une galerie de portraits tous plus incroyables les uns que les autres.
Le scénario enfin. Ce n'est pas un scénario en fait, mais une course effrénée. Ca bombarde à deux mille à l'heure, avec des rebondissements en veux-tu-en voilà. Qui plus est, ça coupe sans arrêt l'herbe sous le pied. Franchement une très belle mécanique. La fin est pour le moins assez inattendue, et si, comme le dit MacArthur, on a affaire à une allégorie du pouvoir, les auteurs poussent le bouchon encore plus loin en achevant cette épopée sur une dualité bien/mal, création/destruction... qu'ils semblent présenter comme une composante indissociable de la vie elle-même. Avec là au milieu, l'Homme (en l'occurrence la Femme) qui demeure entièrement libre de prêter le flanc à l'une ou l'autre, ou de tout simplement suivre son propre chemin. Moi, ça me convient parfaitement en tout cas. Mine de rien, c'est hyper finaud !
Ajoutons que ça plaira sans aucun doute à papa comme à sa fifille. On dit intergénérationnel, non ?
J'ai adoré, un thriller haletant dans la même veine que Colorado train.
Contrition est un village du comté de Palm Beach, les habitants sont tous des délinquants sexuels, ils s'y sont regroupés du fait du chapitre 775 section 210 des statuts de la Floride qui interdit à toute personne condamnée pour certains délits sexuels de vivre à moins de 1000 pieds d'une école, crèche, parc ou cour de récréation. Bref la création d'un ghetto.
Marcia Harris est journaliste au Palm Beach Sun et elle va mener une enquête sur la mort d'un pédophile dans la ville de Contrition. Et son entêtement va la mener au bord du gouffre, malmenant sa vie personnelle.
Je ne vais rien dévoiler de plus, mais sachez que le récit sera d'une noirceur extrême et qu'il explorera des thèmes tel que la pédophilie, le harcèlement scolaire, le suicide, la vengeance et la rédemption. Un récit sombre, dur et poignant. Sachez aussi que tous les personnages sont psychologiquement très travaillés, que les dialogues sonnent juste et que les surprises seront au rendez-vous. Une narration non linéaire qui prend le temps de mettre en place toutes les pièces du puzzle.
Un récit qui explore sous différents angles et tout en nuances la face cachée d'une société loin d'être idyllique.
Une réussite !
Visuellement, un noir et blanc très noir et légèrement charbonneux qui met de suite dans une ambiance glauque qui sera présente de la première à la dernière page. Une mise en page somptueuse.
Magnifique !
Une symbiose parfaite entre le graphisme et l'intrigue. Je recommande chaudement à tous les amateurs de polars, mais ce récit est bien plus qu'un simple thriller.
Carlos Portela et Keko, deux immences artistes.
Après relecture, je passe à 5 étoiles. Très gros coup de cœur
"S'ils ne peuvent pas vivre parmi les autres, pourquoi on les relâche ?"
"Je simplifie peut-être, ce qu'il faut retenir, c'est que faire des mauvaises choses ne fait pas nécessairement de vous une mauvaise personne."
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Nos enjeux environnementaux
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Shangri-La
Quand l'Homme veut devenir Dieu, il ne peut que se brûler les ailes. Après avoir découvert Mathieu Bablet avec Adrastée et la mythologie, voici un space opéra qui fera date dans le domaine de la science-fiction. Un récit qui sur le fond reste classique mais qui a su maintenir mon intérêt de la première à la dernière page. Une narration maîtrisée qui visite le racisme avec les animoïdes et la publicité très sexualisée. Une dystopie réaliste qui fait réfléchir sur l'intérêt de protéger notre belle planète. Une relecture toujours aussi jouissive. Parlons du dessin maintenant, là où il fera consensus, c'est dans les décors, on est véritablement plongé dans l'espace, dans ce grand vide. Bablet utilise un appareillage numérique pour les couleurs et ainsi reproduire un effet photographique du plus bel effet. Bluffant ! Son trait précis, minutieux et détaillé pour la représentation de la station orbitale apporte du réalisme au récit. Remarquable ! Par contre, là où son dessin fera débat c'est sur les personnages aux visages disgracieux et aux petits "pieds bandés" issus d'un Japon d'un autre temps. Alors oui, cela ne permet pas toujours de différencier les personnages, il faut rester concentré, mais ce petit effort en vaut la peine. Je suis fan du style Bablet. Toujours coup de cœur.
Silence
"Silence" est une véritable pépite de la bande dessinée. Cette oeuvre magistrale m'a captivé et émerveillé avec son mélange unique de chronique paysanne, d'onirisme et de fantastique. L'histoire nous transporte dans le village fictif de Beausonge, immergé dans l'atmosphère envoûtante de l'Ardenne. Au coeur de cette aventure se trouve Silence, un jeune homme muet au cœur pur, qui devient l'homme à tout faire de l'odieux Abel Mauvy. Mais à travers sa rencontre avec une sorcière aveugle, Silence découvre ses origines et les raisons de se venger de son maître tyrannique. Ce qui rend "Silence" si exceptionnel, c'est le talent artistique de Comès. Son trait graphique en noir et blanc est d'une beauté saisissante, utilisant habilement les contrastes et les jeux d'ombre pour créer une ambiance sombre et mystérieuse. Chaque page est une véritable œuvre d'art, avec des détails minutieux et des expressions émotionnelles qui transpercent l'âme des personnages. Les personnages de "Silence" sont profondément complexes et nuancés. Silence lui-même est un protagoniste attachant et vulnérable, dont la force réside dans sa pureté et son innocence face à la cruauté du monde. Abel Mauvy, en tant qu'antagoniste, incarne la brutalité et la méchanceté, créant un contraste saisissant avec Silence. Les autres personnages, tels que la sorcière aveugle Sara et le mystérieux Blanche-neige, ajoutent des dimensions fascinantes à l'histoire, apportant des éléments de destinée, de vengeance et de quête d'identité. Au-delà de l'histoire captivante, "Silence" explore des thèmes profonds tels que l'intégration sociale, la superstition et les relations familiales. Comès nous invite à réfléchir sur la nature humaine, la dualité entre le bien et le mal, et les chemins tortueux de la destinée. Tout en étant ancrée dans la réalité paysanne, l'histoire bascule dans le fantastique, offrant une dimension onirique qui transcende les limites de la bande dessinée.
Fils du Soleil
En lisant avidement cette série je me suis retrouvé adolescent dévorant les récits de Henri de Monfreid dans ces aventures sur la mer Rouge. Je suis fan de Jack London même si je ne connais pas ses écrits sur ses aventures maritimes des mers du Sud. J'ai retrouvé dans le scénario de Nury cette ambiance unique d'aventuriers gentlemen-brigands qui ont sillonné les mers du Sud au tournant du siècle précédent pour y faire fortune ou y trouver la mort. Au delà du profit et des trafics (perles, drogues, armes, essences rares...) c'est surtout l'adrénaline et ce sentiment de liberté que l'on retrouve chez Grief et ses alter ego qui ont donné sens à leurs actions. Dans son excellent scénario qui mêle trahison, loyauté, honneur et amour Nury transcrit à merveille la personnalité de ces seigneurs des mers mi pirates mi aristocrates. L'ouvrage m'a d'autant plus touché qu'il est porté par le formidable graphisme de Henninot. Il ne manque que l'odeur du sel et la brulure du soleil pour sentir le roulis des cotres. Le trait réaliste est fin, précis et dynamique. Les émotions des marins sont palpables et la dramaturgie du récit est soutenu par ces images impressionnantes de la tempête qui oeuvre sur l'île mais aussi dans les coeurs et les esprits des personnages. Une excellente lecture pour les amoureux d'aventures où la fiction et la réalité sont imbriquées.
La Fille et le Kibrille
Alors ça c'est vraiment très bien ! Nous voilà avec une nouvelle petite série fantastique américaine à destination des préados. Maxine vient d'arriver dans un nouveau collège, et cela ne va pas être facile pour elle. Petite, elle est la cible de harceleurs scolaires. Accolée malgré elle à une autre collégienne que l'on traite de sorcière, elle va devoir faire avec la sagacité de cette dernière. Elle rencontre un autre collégien qui semble ne pas exister ; et pire encore, elle "voit" des créatures qui semblent tenir certaines personnes sous leur emprise... Mais aussi trouver leur versant bienveillant. Des ingrédients que l'on trouve dans pas mal d'histoires ces dernières années, mais plus rarement ensemble, et encore plus rarement avec succès. Car c'est plutôt bien ficelé : les dialogues me semblent faire mouche. Les parents de Maxine, sans être des monstres d'indifférence, sont un peu accaparés par leur installation dans leur nouvel environnement, et il y a fort à parier que le camarade harceleur ait quelques soucis personnels... Bref, cette histoire d'India Swift, qui a aussi une carrière d'animatrice 2D après avoir été formée aux Gobelins, est d'autant plus sympathique qu'elle bénéficie d'un dessin aussi nerveux qu'expressif, aussi à l'aise dans les scènes d'action que dans les séquences intimistes. A suivre, car même s'il n'en est fait aucune mention dans ce premier tome, c'est bien une série en plusieurs volets qui débute.
Frontier
Bon on va pas tourner autour du pot, le label 619 a encore frappé !! J’adore cette collection, elle nous propose toujours des albums soignés et c’est mené par une chouette génération d’auteurs fidèles. Il y en a du talent et ils ne cessent de s’améliorer au fil du temps. Leur catalogue est rempli de pépites, Frontier ne déroge pas à la règle. A mes yeux, une aussi belle surprise que Hoka Hey ! de Neyef, j’adore ces albums que l’on n’attend pas et qui te font Waouh. Comme son comparse avant lui, Guillaume Singelin franchit un cap en tant qu’auteur complet. J’aime ses précédentes œuvres mais là c’est la belle claque, ce sentiment est renforcé par la taille et la beauté de l’écrin. J’ai adoré son style graphique et le parti pris du côté kawaii des personnages ne m’a absolument pas dérangé, chaque case est un délice de détails, et que dire des couleurs et des décors magnifiques, un plaisir pour les yeux. Le tout est dans une narration impeccable pour une histoire fluide et prenante, c’est rempli de persos charismatiques et attachants (notre trio et leur petit compagnon en tête). Les thématiques développées sont passionnantes, divertissantes et intelligentes pour un récit dur mais plein d’optimisme, il y a un côté feel good bien agréable. Un voyage spatial au top, je ne peux que conseiller sa découverte, un album fort attachant.
Musée
Il était temps pour moi de retourner en librairie, après plusieurs semaines sans prendre connaissance des sorties récentes, et boum! Voilà t'y pas qu'est sorti un Chabouté y'a 2 jours. Béni soit le Dieu du destin, j'achète sans hésiter. Je vais me répéter, mais le dessin de Chabouté sait m'absorber dès la première planche. Son style est pour moi l'art de la contemplation. Le muet occupe un tiers du récit, au début. Et puis, peu à peu, les personnages du musée font naître les phylactères. Certains sont immobiles, d'autres ont la bougeotte. Certains sont taiseux et pensifs quand d'autres bavardent, se querellent ou se questionnent. Ces personnages, ce sont tantôt les visiteurs du musée d'Orsay, tantôt les œuvres d'art qui, après une journée à les écouter sans bouger, prennent vie durant la nuit. Tout au long du récit, Chabouté nous fait alterner les moments diurnes et nocturnes. Le quotidien défile en même temps que le temps semble s'arrêter, dans un moment où le lecteur rencontre toutes ses œuvres traversant les âges. La parole donnée aux peintures et aux sculptures amènent des situations tout à fait absurdes qui prêtent à rire (à commencer par Héraclès). Il y a beaucoup d'humour oui, mais aussi une simplicité poétique que je ne saurai pas décrire. Je vais simplement rappeler que Chabouté réussit encore à porter un regard artistique formidable sur des faits et évènements qui semblent basiques, dont on ne prête pas vraiment attention. Et, fait rare ressenti: Chabouté ne met pas autant en exergue la bêtise humaine ni sa cruauté. On retrouve sa vision critique et sombre bien sûr, mais je la trouve bien faible face aux passages qui redonnent foi en l'humanité. Peut-être que le fait de poser l'Art plutôt que l'Homme au centre de son récit lui fait changer d'état d'esprit. Enfin, au niveau du dessin, c'est ce qui me fait ajouter le coup de coeur. Alors OK, de base j'adore. Mais là, c'est pas pareil. J'adore plus. Et je vais vous dire pourquoi en fait. A force de lire Chabouté, je trouvais le faciès des personnages assez répétitifs quelle que soit la BD. Grosso modo. Mais cette fois, et peut-être grâce à tous ses visiteurs éphémères qui vont qui viennent, l'auteur s'est amusé à jouer avec les formes pour nous offrir des visages et expressions bien plus variées qu'à l'accoutumée. Après Yellow Cab, Chabouté prouve encore son audace (si tenté qu'il cherche à prouver quoi que ce soit). Voilà un objet curieux, au récit simple et poétique et dont le dessin rend l'ensemble profondément enivrant. Dans tout ça, le lecteur peut jouer à s'identifier parmi tous ces visiteurs dessinés, il peut également se divertir ou s'interloquer devant les scènes nocturnes, ou encore réfléchir sur l'intérêt qu'il porte sur l'Art. Et par-dessus tout, j'espère qu'il n'en finira pas d'apprécier le monde incroyablement riche du quotidien, aussi basique semble-t-il être.
Une soif légitime de vengeance
Il ne m'a pas fallu plus de quelques secondes pour craquer en librairie sur cette nouvelle série de Rick Remender. Ce monsieur est un scénariste assez prolifique qui a signé entre Fear Agent et The Last Days of American Crime quelques-un de mes plus beaux souvenirs de lecture de comics indépendants. De surcroit il sait s'entourer de dessinateurs talentueux développant chacun leur style particulier et je vous laisse regarder sa production pour en avoir le coeur net. Pour le présent titre, on ne déroge pas à cette tradition avec le trait d'un dessinateur portugais proche des dessins de Moebius, Geof Darrow ou de Katsuhiro Otomo, excusez du peu ! Si cette histoire avare en dialogues semble se lire bien vite, le tout réside dans les détails créant une sensation de mal être et de suspens de chaque instant. On suit ici les déambulations d'un homme d'origine Asiatique dans Vancouver sans savoir ce qui va se tramer ni quels sont les desseins du héros pour atterrir dans une sombre histoire de meurtres sanglants et de complot. Amateurs de la série Breaking Bad, vous allez être aux anges ! Imaginez un polar urbain où tout peut basculer du calme vers la tempête en un claquement de doigts. Que ce soit l'environnement ou le découpage, tout est parfaitement mis en condition pour passer un moment de lecture des plus délectables. La série se clôture en deux tomes et ne perd pas de temps en allant droit à l'essentiel tout en conservant beaucoup de subtilité comme de mystères mais offre une conclusion des plus jouissives et satisfaisantes que je ne peux dévoiler ici.
Nées Rebelles
J’avais déjà beaucoup aimé Les Sauveurs chez le même éditeur, mais « Nées Rebelles » m’a encore plus ému. Le principe est similaire : les auteurs brossent le portrait de jeunes femmes voulant changer le monde, quitte à faire face à des ogres effrayants : les talibans, la National Rifle Association… et puis l’opinion générale et les trolls sur Internet, aussi… leur détermination inspire, et leur impact aussi, puisqu’elles ont toutes réussi à faire bouger les choses. Greta Thunberg n’est plus à présenter, et sa diatribe « how dare you » à l’ONU a fait le tour du monde… son histoire AVANT d’être connue m’a cependant beaucoup touché. Et que dire de Emma González… son discours à elle, prononcé suite à la fusillade de Parkland, m’a fait fondre en larmes. Une photo des jeunes filles conclut judicieusement chaque chapitre, ce qui les humanise encore plus. Je note aussi le rôles des parents. Ils sont dépeints comme ouverts, et encouragent leurs enfants à poursuivre leurs rêves et leurs idéaux… être un model pour ses enfants est plus important que jamais. Il parait futile de parler de réalisation technique… je note toutefois que la narration est parfaite, et que les différents styles graphiques apportent une variété appréciable entre les chapitres. Un album d’intérêt général, à mettre entre toutes les mains… et plus particulièrement celles des jeunes filles, qui ont plus que jamais besoin de modèles autres que Kim Kardashian et toutes ces influenceuses TikTok à la vacuité sans fond.
Furieuse
Woua ! Il y a tout ce que j'aime dedans cette BD ! Je sors de ma lecture absolument charmé. Détails : D'abord, un dessin ultra chouette, fin, original, en particulier les (rares) scènes de nuit, splendides. Une ligne claire souple qui flatte le regard. On ne fait pas trop gaffe en survolant, mais franchement, c'est un trait de génie, dans tous les sens du terme. Les couleurs aussi fonctionnent très très bien, imprimant une ambiance forte et dynamique à l'ensemble. L'univers, en grande partie dépendant du dessin, est super original. Les auteurs font du neuf avec du vieux. Et que je te reprends cette bonne vieille légende arthurienne ! Et que je t'ajoute une bonne dose d'humour, de cool-trash (chais pas trop ce que ça veut dire, mais je trouve que ça correspond :) ainsi qu'un brin de baroque avec aussi un peu de satanisme (Merlin n'en est que plus pervers). Les dialogues sont quant à eux très frais, et mis au goût du jour. Les personnages sont très typés, que ce soit Arthur lui-même, en pleine décadence et baignant littéralement dans son caca, le comte de Cumbre (qui a une identité double, mais chuuuuut !) et son petit zizi au bol, le grand taiseux de Claude, ou tout simplement l'héroïne, une jeune femme pleine de vie et éprise de liberté. Bref ! On a affaire à une galerie de portraits tous plus incroyables les uns que les autres. Le scénario enfin. Ce n'est pas un scénario en fait, mais une course effrénée. Ca bombarde à deux mille à l'heure, avec des rebondissements en veux-tu-en voilà. Qui plus est, ça coupe sans arrêt l'herbe sous le pied. Franchement une très belle mécanique. La fin est pour le moins assez inattendue, et si, comme le dit MacArthur, on a affaire à une allégorie du pouvoir, les auteurs poussent le bouchon encore plus loin en achevant cette épopée sur une dualité bien/mal, création/destruction... qu'ils semblent présenter comme une composante indissociable de la vie elle-même. Avec là au milieu, l'Homme (en l'occurrence la Femme) qui demeure entièrement libre de prêter le flanc à l'une ou l'autre, ou de tout simplement suivre son propre chemin. Moi, ça me convient parfaitement en tout cas. Mine de rien, c'est hyper finaud ! Ajoutons que ça plaira sans aucun doute à papa comme à sa fifille. On dit intergénérationnel, non ?
Contrition
J'ai adoré, un thriller haletant dans la même veine que Colorado train. Contrition est un village du comté de Palm Beach, les habitants sont tous des délinquants sexuels, ils s'y sont regroupés du fait du chapitre 775 section 210 des statuts de la Floride qui interdit à toute personne condamnée pour certains délits sexuels de vivre à moins de 1000 pieds d'une école, crèche, parc ou cour de récréation. Bref la création d'un ghetto. Marcia Harris est journaliste au Palm Beach Sun et elle va mener une enquête sur la mort d'un pédophile dans la ville de Contrition. Et son entêtement va la mener au bord du gouffre, malmenant sa vie personnelle. Je ne vais rien dévoiler de plus, mais sachez que le récit sera d'une noirceur extrême et qu'il explorera des thèmes tel que la pédophilie, le harcèlement scolaire, le suicide, la vengeance et la rédemption. Un récit sombre, dur et poignant. Sachez aussi que tous les personnages sont psychologiquement très travaillés, que les dialogues sonnent juste et que les surprises seront au rendez-vous. Une narration non linéaire qui prend le temps de mettre en place toutes les pièces du puzzle. Un récit qui explore sous différents angles et tout en nuances la face cachée d'une société loin d'être idyllique. Une réussite ! Visuellement, un noir et blanc très noir et légèrement charbonneux qui met de suite dans une ambiance glauque qui sera présente de la première à la dernière page. Une mise en page somptueuse. Magnifique ! Une symbiose parfaite entre le graphisme et l'intrigue. Je recommande chaudement à tous les amateurs de polars, mais ce récit est bien plus qu'un simple thriller. Carlos Portela et Keko, deux immences artistes. Après relecture, je passe à 5 étoiles. Très gros coup de cœur "S'ils ne peuvent pas vivre parmi les autres, pourquoi on les relâche ?" "Je simplifie peut-être, ce qu'il faut retenir, c'est que faire des mauvaises choses ne fait pas nécessairement de vous une mauvaise personne."