Les forums / Ces auteurs de BD qui arrêtent...

Par Agecanonix Le 27/05/2014 - 19:54 (Modifier)
Agecanonix

>>Alix avait écrit: >>>>Mac Arthur avait écrit: >>>>... pour un auteur qui abandonne, il y en a 15 qui frappent à la porte. Alors oui, c'est toujours triste de voir des auteurs que l'on apprécie se retirer et, oui, je pense qu'il est de plus en plus dur pour un auteur de vivre uniquement de la bande dessinée. Mais je ne m'inquiète pas spécialement pour l'avenir de la bd. >>>> >>>>Le jour où les écoles d'art section bd seront désertées, il sera temps de s'inquiéter. D'ici là, il nous faudra continuer à scruter les jeunes auteurs et à encourager ceux qui nous plaisent tout en continuant à suivre les anciens. >> >>Tout a fait... mais disons que ce genre d'abandon, de message un peu cynique, risque d'avoir un effet negatif sur un jeune etudiant qui considere une carriere dans la BD... non ?


Par Mac Arthur Le 27/05/2014 - 15:32 (Modifier)
Mac Arthur

>>samsa avait écrit: >>Je ne suis pas sûre qu'il s'agisse simplement d'un problème de délocalisation et d'artistes acceptant des tarifs ridiculement bas. La mondialisation pourrait être phénomène incroyable, une ouverture sur le monde. Mais personnellement, j'ai le sentiment que la tendance est aux grosses sociétés qui ne favorisent pas les salariés mais leurs dividendes, lesquels sont répartis entre un très petit nombre de personnes. Je pense qu'il s'agit d'un problème mondial, à l'heure actuelle, les salaires diminuent alors qu'un tout petit pourcentage de la population devient de plus en plus riche. J'ai repris une des premières bd que mes parents m'avaient acheté lorsque j'étais petite, il s'agissait d'un Yoko Tsuno, il y a encore l'étiquette du prix: 32 Francs. >>À l'heure actuelle, le Yoko est à 10,60 Euros, soit près de 70 francs. Or je ne crois pas que l'auteur soit mieux rémunéré. Alors certes, je prends en compte l'augmentation du prix de la vie et des matières premières, le fait que le papier produit par des forêts gérées de manière durable est sans doute plus cher etc.... Toutefois, je suis sincèrement persuadée que l'avenir n'est pas aux grosses sociétés ni au lobbying mais bien aux petits artisans qui prennent soin de leur travail. N'oublions pas que par exemple, au Japon, les auteurs de manga sont très respectés et les éditeurs leur doive le plus grand respect de ce que je comprends. Qu'est-ce qui fait donc que chez nous l'éditeur prime ? Mais bon vous pouvez toujours dire que je suis une rêveuse qui ne comprend rien à la vie....ce qui n'est sans doute pas faux mais de ce que j'observe le problème n'est pas limité à la bd, reste à savoir quel type de mondialisation nous voulons....mais là je m'éloigne du sujet Sourire Un petit artisan, dans le monde de l'édition, je ne crois pas que ce soit vivable. Pour pouvoir vivre de son métier, un auteur de bd doit pouvoir en vendre un paquet. Le travail est long (tu dois compter un an pour le dessin). Alors, pour un revenu net de 1.800 €/mois, il te faut toucher 3.200 € bruts. Pour un an, cela te donne 38.400 €. le petit artisan, qui va produire une petite production (mettons 400 albums), devra les vendre en dégageant un bénéfice de 96 €/album. Compte les frais supplémentaires (coûts de production, marges bénéficiaires) et ton album devrait se vendre au minimum 250 € pièce.... Tu peux oublier... Impossible pour un petit de survivre et encore moins de vivre de la bd. Tu as une foule de petits éditeurs et la plupart tirent méchamment la langue parce que, pour être rentable, un album doit pouvoir s'écouler à 7.000 exemplaires... Ce sont des passionnés et ils font ça par passion mais ne peuvent pas en vivre. C'est pour ça que les grosses boites monopolisent le marché, c'est pour ça qu'il y a eu tout d'un coup une foule de dessinateurs espagnol au moment où le pays était en crise profonde (c'est moche à dire mais eux devaient absolument travailler et étaient prêts à rogner sur les prix). Les actionnaires n'ont pas (encore, ça viendra peut-être) grand chose à voir avec la crise de l'édition.


Par samsa Le 27/05/2014 - 15:14 (Modifier)

Je ne suis pas sûre qu'il s'agisse simplement d'un problème de délocalisation et d'artistes acceptant des tarifs ridiculement bas. La mondialisation pourrait être phénomène incroyable, une ouverture sur le monde. Mais personnellement, j'ai le sentiment que la tendance est aux grosses sociétés qui ne favorisent pas les salariés mais leurs dividendes, lesquels sont répartis entre un très petit nombre de personnes. Je pense qu'il s'agit d'un problème mondial, à l'heure actuelle, les salaires diminuent alors qu'un tout petit pourcentage de la population devient de plus en plus riche. J'ai repris une des premières bd que mes parents m'avaient acheté lorsque j'étais petite, il s'agissait d'un Yoko Tsuno, il y a encore l'étiquette du prix: 32 Francs. À l'heure actuelle, le Yoko est à 10,60 Euros, soit près de 70 francs. Or je ne crois pas que l'auteur soit mieux rémunéré. Alors certes, je prends en compte l'augmentation du prix de la vie et des matières premières, le fait que le papier produit par des forêts gérées de manière durable est sans doute plus cher etc.... Toutefois, je suis sincèrement persuadée que l'avenir n'est pas aux grosses sociétés ni au lobbying mais bien aux petits artisans qui prennent soin de leur travail. N'oublions pas que par exemple, au Japon, les auteurs de manga sont très respectés et les éditeurs leur doive le plus grand respect de ce que je comprends. Qu'est-ce qui fait donc que chez nous l'éditeur prime ? Mais bon vous pouvez toujours dire que je suis une rêveuse qui ne comprend rien à la vie....ce qui n'est sans doute pas faux mais de ce que j'observe le problème n'est pas limité à la bd, reste à savoir quel type de mondialisation nous voulons....mais là je m'éloigne du sujet Sourire


Par Spooky Le 27/05/2014 - 14:24 (Modifier)
Spooky

Tiens, pour ajouter au débat, une réaction d'Augustin Popescu : "Depuis hier, le fil d'actualité de mon facebook est surencombré avec les partages de la lettre de démission, si vous voulez, ( un article partagé dans un but très noble, d'ailleurs, celui de la solidarité ) de Bruno Maiorana. C'est triste, c'est dommage, ça fait toujours mal au cœur quand un auteur arrête, et le fait que nôtre métier est un métier chronophage, n'est plus un secret pour personne. Mais qu'on vient pas me casser les c... en invoquant toujours et toujours l'argument du plombier polonais... tchèque, dans son cas : « La mondialisation et le dumping social, qui fait qu'il est plus intéressant pour un éditeur de rémunérer un auteur tchèque ou chinois, ne nous épargnent évidemment pas ». On est d'accord que le terme tchèque est un terme qui généralise de manière très hypocrite et assez xénophobe, les dessinateurs de l'est...Nous ne sommes pas là pour voler le boulot des Français, ce n'est pas à cause de nous si certains auteurs se trouvent sans travail, et ce n'est pas surtout vrai QU'ON ACCEPTE D’ÊTRE SOUS-PAYES !! Ce n'est pas mon cas, et personnellement, je ne connais pas des "dessineux" Serbes, Ukrainiens, Roumains, etc qui font des prix de dumping sur leurs planches. Le sujet du plombier polonais est un sujet périmé et il n'a plus sa place dans le 21ème siècle. Qu'on aime ou pas, on vive dans l'ère de la MONDIALISATION et ceux qui ne veulent pas comprendre, et qui pensent qu'ils détiennent le monopôle sur le métier de dessinateur de bande dessinée ont toujours le choix de changer tout ça aux prochaines élections présidentielles."


Par Alix Le 27/05/2014 - 14:23 (Modifier)
Alix

>>Mac Arthur avait écrit: >>... pour un auteur qui abandonne, il y en a 15 qui frappent à la porte. Alors oui, c'est toujours triste de voir des auteurs que l'on apprécie se retirer et, oui, je pense qu'il est de plus en plus dur pour un auteur de vivre uniquement de la bande dessinée. Mais je ne m'inquiète pas spécialement pour l'avenir de la bd. >> >>Le jour où les écoles d'art section bd seront désertées, il sera temps de s'inquiéter. D'ici là, il nous faudra continuer à scruter les jeunes auteurs et à encourager ceux qui nous plaisent tout en continuant à suivre les anciens. Tout a fait... mais disons que ce genre d'abandon, de message un peu cynique, risque d'avoir un effet negatif sur un jeune etudiant qui considere une carriere dans la BD... non ?


Par Mac Arthur Le 27/05/2014 - 14:04 (Modifier)
Mac Arthur

... pour un auteur qui abandonne, il y en a 15 qui frappent à la porte. Alors oui, c'est toujours triste de voir des auteurs que l'on apprécie se retirer et, oui, je pense qu'il est de plus en plus dur pour un auteur de vivre uniquement de la bande dessinée. Mais je ne m'inquiète pas spécialement pour l'avenir de la bd. Le jour où les écoles d'art section bd seront désertées, il sera temps de s'inquiéter. D'ici là, il nous faudra continuer à scruter les jeunes auteurs et à encourager ceux qui nous plaisent tout en continuant à suivre les anciens.


Par samsa Le 27/05/2014 - 13:59 (Modifier)

Que d'abandons, cela signifie-t-il que nous sommes abandonnés par les grands noms et que nous devrons faire face à encore plus de grosses séries blockbuster sans grand intérêt. J'aime la bd et si les séries comme Lanfeust (pour ne citer que la plus célèbre) me font généralement bien marrer, je n'attends pas de la bd qu'elle me fasse juste sourire et me détende, j'aime les oeuvres qui font réfléchir ou nous offrent un aperçu d'autres cultures, d'autres modes de vie, j'aime également les thèmes historiques, philosophiques, les critiques du monde actuel....Mais qu'allons nous devenir vu le nombre d'auteurs qui nous abandonnent. J'ai l'impression que c'est l'hécatombe.... de Crécy abandonne la bd (http://rue89.nouvelobs.com/2011/10/08/nicolas-de-crecy-je-ne-fais-plus-de-bd-je-ne-peux-plus-physiquement-225350) Sympa pour la fin de Salvatore qui indiquait bien en fin de tome "à suivre"... je ne lui en veux pas mais je suis totalement frustrée tout de même.... Maïonara abandonne également (série garulfo, D) Voilà donc Bonifay qui laisse tomber également....et je pense qu'ils ne sont pas les seuls Serait-il temps d'une action commune des lecteurs pour insister sur leur engouement et leur droit à la diversité ????? Je ne trouve pas les mots pour exprimer ma tristesse....


Par Spooky Le 27/05/2014 - 12:28 (Modifier)
Spooky

>>Ro avait écrit: >>J'ai classé Gitans des mers en série abandonnée car depuis 2010 et vu le peu de succès, je n'imagine pas qu'elle continue. >>Par contre, quid de John Arthur Livingstone - Le Roi des singes qui est plus récent et attendait un second tome pour se terminer ? Abandonnée aussi ? Je suis allé faire un tour sur la page facebook de Meddour, et visiblement il bosse dessus, et il n'annonce rien de particulier... Peut-être que ce sera le dernier album de Bonifay, du coup.


Par Ro Le 27/05/2014 - 11:57 (Modifier)
Ro

>>Spooky avait écrit: >>Après Bruno Maïorana, c'est Philippe Bonifay qui arrête la BD : >> J'ai classé Gitans des mers en série abandonnée car depuis 2010 et vu le peu de succès, je n'imagine pas qu'elle continue. Par contre, quid de John Arthur Livingstone - Le Roi des singes qui est plus récent et attendait un second tome pour se terminer ? Abandonnée aussi ?


Par Le Grand A Le 27/05/2014 - 11:32 (Modifier)
Le Grand A

>>Spooky avait écrit: >>...et tous ces eunuques cachés derrière leurs écrans qui vomissent leurs impressions inutiles sur des albums si difficiles à faire... Que ceux qui ne se sentent pas concernés ne me tiennent pas rigueur de ces propos généralistes. Et hop, du coup plus personne ne se sent concerné ! Ils parlent de nous là ? Je veux dire, les internautes qui postent et commentent les BDs en qualité de simples lecteurs ? Je trouve ça dur de sa part, à partir du moment où il les vends ses BDs, c'est bien normal qu'il y ait une critique derrière. D'un autre côté je me sens pas vraiment concerné, n'ayant jamais lu une de ses séries.


Par Spooky Le 27/05/2014 - 10:24 (Modifier)
Spooky

Après Bruno Maïorana, c'est Philippe Bonifay qui arrête la BD : "34 ans, cette fin d'année, que j'ai commencé la BD, dans ma chambrée de seconde classe. J'étais à l'armée, pour mon service militaire. J'écrivais mon premier album : Le chariot de Thespis, dessiné par Rossi. J'apportais un univers, avec la prétention de parler de l'Humain. Aujourd'hui, c'est fini. J'ai essayé, avec le peu que j'avais, de faire au mieux. Peu d'albums, c'est vrai. Mais pas de compromis. Des erreurs, des ratés, comme tous ceux qui essayent. Mais avec, toujours, la volonté d'écrire de vraies histoires. Et qu'on ne me dise pas que tout le monde fait pareil, ce n'est pas vrai ! Les ersatz, les arrière-suites comme des arrière-cuisines dont les recettes ont ce goût rance qui rebutent, les idées qu'on confond avec un scénario, et, au bout du compte, toujours, un livre de plus dans un bac déjà plein. J'ai le sentiment d'un immense gâchis et, peut-être, d'une vie professionnelle bien inutile. C'est de ma faute. Je n'ai jamais été capable d'écrire pour le grand public, ni d'écrire pour écrire. Je n'ai jamais ciré les pompes, serré les mains, souri poliment, dit le bien que je ne pensais pas des faiseurs, des boursicoteurs de l'édition. Mais je n'ai jamais craché dans la soupe non plus. Aujourd'hui, j'arrête. Ce monde de l'édition BD ne me convient plus. Je n'y ai jamais vraiment eu ma place, c'est vrai, mais là, c'est trop. La lâcheté méprisable de certains auteurs qui acceptent des conditions de travail inacceptables, l'indécence des éditeurs qui abusent sans vergogne des auteurs pris à la gorge, les libraires qui n'ouvrent plus les cartons et tous ces eunuques cachés derrière leurs écrans qui vomissent leurs impressions inutiles sur des albums si difficiles à faire... Je n'ai pas été élevé comme cela. Je n'ai pas élevé mes enfants comme cela. Je pars la tête haute et laisse ce monde où trop de dos voûtés et de pantalons baissés définissent un univers qui n'est plus celui que je connaissais. Que ceux qui ne se sentent pas concernés ne me tiennent pas rigueur de ces propos généralistes. Et hop, du coup plus personne ne se sent concerné ! Je laisse sur certaines étagères des histoires de cow-boys, de pirates, de motos... Un père Noël perdu, comme un paradis misérable. J'y laisse aussi une femme qui a retrouvé son âme et me tend aujourd'hui son bandeau, qui lui barrait le visage. Elle n'en a plus besoin. Mais moi ? Rester sans rien dire et continuer ? L'expression « perdre son âme d'Auteur » peut paraître excessive. Elle ne l'est pas. Certains riront aux larmes de mes mots, d'autres non. Je laisse aussi ces dernières gouttes d'eau qui ont fait déborder des cuves de patience. Blanche-Neige, Barbe-Bleue et Pinocchio, si longtemps travaillés, portés par toute une équipe, d'auteurs et d'éditeurs, pour n'être-naître au bout du compte que du papier à pilon, sans suite, sans avenir, sans rien. Malheureusement, je laisse aussi dans le souffle des pages qu'on feuillette les collaborations. Cela devient douloureux. Les échanges, les envies de raconter, mes idées que j'ai vues naitre de la main de tous ces artistes. J'ai eu la chance d'avoir ces belles collaborations. Il n'y aura plus pour moi de livres, de festivals, de bières avec ceux qui furent mes frères de vie. 30 ans d'intimité, de rires, de doutes, de confidences. J'ai aimé être parmi vous. Vraiment. Mais je prends cette grave décision, que certains j'espère comprendront et qu'avec un peu de chance on ne moquera pas. J'arrête. Mourir ou mourir, il faut choisir. C'est fait. Peut-être qu'ailleurs, dans d'autres expériences, d'autres projets, signerai-je encore de mon nom, ou d'un autre, pour dire que l'auteur qui sommeille en moi existe encore. Je l'espère vraiment, en tout cas. Sinon, tant pis, je trouverai autre chose. Bonifay n'est plus. Je ne regrette rien. Philippe"