Auteurs et autrices / Interview de Pascal Bertho et Chandre
Chandre a fait ses gammes sur des adaptations d'Agatha Christie, où ses ambiances ont fait merveille ; Pascal Bertho a une carrière plus ancienne et plus diversifiée, mais deux auteurs d'une telle qualité ne pouvaient que se rencontrer pour nous livrer un petit bijou, Saint Kilda. Génèse.
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Pascal : Je suis grand, beau et intelligent. Je sais aussi faire la cuisine comme un chef. Ah oui, et mon métier, c’est de raconter des histoires.
Chandre : Je suis gros, j’aime bien faire la cuisine aussi (Pascal, vous venez manger quand vous voulez …) et moi je dessine les histoires des autres quand c’est pas les miennes. Avec mes crayola je fais aussi le coloriage des dessins.
Comment êtes-vous arrivés dans la BD ?
Pascal : J’ai fait beaucoup de fanzines dans ma (lointaine) jeunesse. Dans ces années-là, j’ai rencontré beaucoup d’auteurs maintenant reconnus. Après pas mal de détours, j’y suis revenu parce que je m’ennuyais dans l’animation. Je ne regrette pas.
Chandre : Je suis tombé dedans quand j’étais petit, mais une fois grand j’en ai eu tout de même besoin, alors école de dessin, fanzines aussi (on va croire que je fais que copier), albums collectifs et petits boulot dans de petites boites d’éditions jeunesses et entretemps des projets non-signés à droite à gauche (dont certains avec Pascal, le scénariste pas le philosophe).
Pascal, tu as débuté en 2000 avec la série Kerioth, publiée chez Vents d’ouest. C’est un triptyque plaisant baignant dans une atmosphère d’aventure fantastique. Reviendrais-tu à ce genre ?
Pascal : Pourquoi pas, j’aime beaucoup ce genre d’atmosphère composée de bric et de broc et qui mélange les genres et les époques. Kérioth était notre première série à Marc Antoine et à moi et nous avons appris notre « métier » sur cette série. J’en garde un souvenir particulier et ému…
La collaboration avec Boidin s’est bien passée, puisque vous avez travaillé ensemble sur Chéri-Bibi et Endurance. Te considères-tu comme un scénariste « fidèle » ou préfères-tu multiplier les collaborations ?
Pascal : Oui je pense être fidèle, trop peut-être. Comme le montre ma « maigre » bibliographie, je ne multiplie pas les collaborations puisque que je ne travaille presque exclusivement qu’avec des gens que je connais et que j’apprécie. Il va aussi falloir que je fasse confiance à mes scénarii et que je tâche de les écrire pour moi avant de les écrire pour un dessinateur, si je veux avancer un peu.
Hormis pour des récits comme Pattes de velours et La Voix, tu sembles privilégier les fresques historiques (de courte durée cependant) dans tes histoires. C’est conscient, ou d’est dû aux hasards des projets ?
Pascal : Pas vraiment conscient et pas vraiment voulu. Je « m’adapte » pas mal aux auteurs avec lesquels je travaille. Stéphane (Duval) est féru de fresques d’aventures presque-historiques, hop ça a donné Chevalier Malheur et Aëla.
Pour Chéri-Bibi, c’était un personnage qui m’avait marqué quand j’avais vu la série télé dans les années 70. Après Kerioth, on cherchait un sujet avec Marc Antoine, je lui ai parlé de Chéri Bibi, je lui ai fait lire les bouquins et il tout de suite accroché. Si ça ne lui avait pas plu, on aurait aussi bien pu faire une série de science fiction…
Pour la collection « Sept », j’avais fait une première histoire plus contemporaine, mais qui était vraiment trop difficile à mettre en place compte tenu des contraintes de la collection. Du coup, j’ai eu envie de me faire plaisir et d’exploiter l’univers des Pirates.
La Voix et Pattes de velours détonnent donc dans ta bibliographie… Comment te sont venues les idées pour ces deux récits ?
Pascal : Travailler avec Nicoby a toujours été un bonheur. C’est le dessinateur le plus rapide de l’Ouest et c’est quelqu’un avec qui je peux me laisser aller à passer des sentiments dans mes textes sans jamais être déçu par l’interprétation qu’il en fait. Pour Pattes de velours, je lui envoyais une scène, trois jours après il me renvoyait les planches et je lui envoyais une nouvelle scène. On a tout fait en « ping-pong », sans vraiment de plan établi. J’avais la trame générale et je réagissais à ce que Nico m’envoyait.
Pour La Voix, je ne sais pas d’où m’est venu l’idée, en tout cas entre le moment où j’en ai parlé à Nico et le moment où on a signé chez Vent d’Ouest il a bien dû se passer deux ans.
Sept pirates t’a obligé à te plier à un certain nombre de contraintes, j’imagine. Qu’est-ce qui a été le plus dur dans ce projet ?
Pascal : Pour une fois j’ai travaillé avec un dessinateur que je ne connaissais pas. David (Chauvel) m’avait envoyé pas mal de dessins de Tim (Mc Burnie) qui étaient très séduisants (Tim l’est aussi…).
Le plus dur a été l’éloignement. Je n’ai eu que très peu de contact avec Tim (Faut dire que mon anglais n’est pas très « fluent ») et je ne l’ai rencontré que quelques mois après la sortie du bouquin pour sa tournée de dédicaces française. J’envoyais mes découpages à David, qui envoyait ça à Jérôme (Lereculey) qui faisait les story-boards, qui envoyait ça au traducteur qui envoyait ça à Tim, qui posait ses questions à David. Tout ça pas forcément dans cet ordre. Les découpages et les planches ont fait un tour du monde permanent pendant quelques mois…
Combien d’albums va compter Aëla ?
Pascal : Que trois albums. Stéphane est parti sur d’autres projets, qui je l’espère lui apporteront plus de succès que ceux que nous avons réalisés ensemble…
Tu as fait l’Ecole des Gobelins, mais tu as débuté dans ce métier en travaillant sur des séries animées. Cala a-t-il été formateur pour toi ?
Pascal : J’ai travaillé quelques années dans l’animation avant de me (re)mettre à la bande dessinée. Aux Gobelins j’ai appris à faire du scénario de série d’animation et beaucoup de ce que j’ai appris me sert sans doute maintenant sans trop que je m’en rende de compte. Mais le principal truc que j’ai gardé, c’est le travail des dialogues. J’aime bien ça.
Comment en es-tu venu à travailler pour les Editions EP ?
Pascal : Par l’intermédiaire d’Alexandre. On avait fait un projet pour Vents D’ouest il y a quelques années, qui n’avait pas été retenu (pourtant c’était bien) et on est resté en contact. Quand il a voulu présenter un projet perso chez EP, il m’a demandé si je voulais bosser avec lui. Forcément j’ai dit oui tout de suite.
Et l’idée de placer une histoire dans le cadre de cet archipel perdu, coupé du monde ?
Pascal : Ça aussi c’est une idée d’Alexandre. Quand il m’a parlé de Saint Kilda et de son histoire étonnante, j’ai tout de suite pensé que c’était le cadre idéal pour raconter une histoire.
Pascal, quels sont tes projets ?
Pascal : Devenir un auteur « complet » et faire un album tout seul. Si cela intéresse un éditeur, ce sera sans doute un one-shot. Je vais essayer de présenter le projet dans les semaines à venir. Sinon, un projet de série avec Marc Antoine, mais pas pour tout de suite, il travaille actuellement sur autre chose. Sinon, des histoires et des histoires…
Au, fait, « Chandre », ça vient d’où ?
Du chapeau magique ! Non, en fait c’est une contraction de mon nom et prénom, vous savez déjà que ce prénom est Alexandre, je vous laisse imaginer le reste. En plus d’être plus court à écrire (je suis un peu feignant sur les bords et au milieu franchement) au bout de quelque années j’ai appris que c’était aussi un prénom indien.
Alors si un jour je décide de me tourner vers Boudha, la moitié du chemin est fait.
Chandre, tu t’es d’abord fait connaître en illustrant des récits courts pour des collectifs chez Petit à petit. Peux-tu nous en parler un peu ?
J’avais travaillé sur un collectif sur Piaf chez Vents d’Ouest en sortant de l’école et Petit à petit sortait au même moment un projet identique. J’ai trouvé cela rigolo et j’ai été les voir sur un salon. Mes collaborations avec eux se sont passées en fonction de leurs projets de collectifs. Le dernier en date a été bloqué pour une question de droits. C’était un groupe de rock et graphiquement je suis assez content de ce que j’avais fait.
Ce type de travail est sympa car cela permet d’essayer des trucs différents, de prendre des risques et du coup d’évoluer.
Puis tu as adapté graphiquement trois Agatha Christie chez Emmanuel Proust. Qu’as-tu appris dans cet exercice particulier ?
Mon métier, tenir sur la longueur, adapter un roman, beaucoup de choses sur mon dessin, et aussi qu’une grande partie des gens ne viennent pas lire ces albums pour l’auteur de l’adaptation, mais parce qu’il y Christie et Poirot sur la couverture. Cela permet de relativiser par rapport à son travail.
Pour Saint Kilda, comment as-tu travaillé ? As-tu fait des recherches sur la flore et le climat ?
C’est un endroit très très difficile d’accès. Donc une seule solution : la doc, livres, internet.
Le climat est un élément important de cet archipel et un des personnages principaux de l’histoire, du coup la faune et la flore s’adaptent (Darwin ?).
Une fois bien imprégné j’ai pu attaquer le dessin.
Comment travailles-tu avec Pascal ?
Beaucoup d’échanges. Comme il l’a expliqué plus haut, il travaille avec des gens qu’il peut connaître.
On se laisse beaucoup de liberté tout en prenant en compte les attentes de chacun. Ce n’est pas possible avec quelqu’un qu’on ne rencontre jamais.
Il m’envoie son découpage, qui à ma demande n’est pas définitif, et je découpe à mon envie en fonction du nombre de pages qu’il prévoit. On discute du story, puis il reçoit les planches terminées. Quand c’est fini pour moi, il s’occupe de réécrire les dialogues.
Quels sont tes projets ?
Finir Saint Kilda au mieux. Ensuite d’autres envies sont là.
Un projet avec Samély, nouvelle venue dans le scénar qui bosse en ce moment avec Aurélien Morinère. Et puis encore d’autres gens avec qui j’aimerais travailler.
Ah oui j’allais oublier, harceler Pascal pour qu’il continue à m’écrire des histoires dans les années à venir.
Pascal et Chandre, merci.
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