Auteurs et autrices / Interview de Midam

Qui ne connaît Kid Paddle ? Qui n’a jamais lu une planche de Game Over ? Rencontre avec Midam, leur créateur, toujours disponible malgré son succès. Et jamais en panne de projets !

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Midam Bonjour Midam, et merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Le contact avec ton lectorat demeure important à tes yeux ?
C’est important et il se fait surtout au travers de la presse et de mon site www.midam.be. Les séances de dédicace attirent beaucoup de collectionneurs qui ne sont pas nécessairement des lecteurs.

Entrons dans le vif du sujet. Si tu étais un des animaux de Gaston Lagaffe, tu serais :
- son chat, speedé et gaffeur ;
- la mouette rieuse, bien moins drôle pour ceux qui te côtoient que pour ceux qui te lisent ;
- Bubulle, son poisson rouge, de plus en plus isolé dans sa cage de verre ;
- Cheese, sa souris grise, on ne te remarque pas mais tu es d’une efficacité et d’une voracité redoutables.

Je serais la mouette avec un peu de Bubulle et de souris.

On sent une belle complicité avec Clarke qui dessine « histoires à lunettes » sur tes scénarii. Inverser les rôles, est-ce envisageable ?
Non, je suis incapable de dessiner le scénario de quelqu’un d’autre, j’aurais tout le temps envie de remanier le gag pour qu’il soit toujours meilleur. Je ne dois donc pas être un partenaire idéal dans ce sens de collaboration...

Accéder à la BD Histoires à lunettes (Durant les travaux, l'exposition continue...) Penses-tu continuer à collaborer avec Clarke, pour les histoires à lunettes ou sur d’autres projets ?
Avec Histoires à Lunettes, nous avons vécu un paradoxe typiquement européen : d’excellentes critiques mais les ventes n’ont pas suivi. Cette série est destinée à un public plus restreint de par le type d’humour que l’on y développe. C’était une belle aventure et j’ai apprécié les bonnes critiques mais je suis un auteur qui a besoin de plaire à un plus grand nombre. Kid Paddle et Game Over me donnent cette satisfaction.

En quelle mesure contrôles-tu les déclinaisons (romans, jeux vidéo, dessins animés) de Kid Paddle ?
J’essaie d’avoir un contrôle maximal. Mais il est impossible d’avoir des déclinaisons de ce type sans déléguer, ce qui est très difficile. Ces déclinaisons doivent se rapprocher au maximum de l’esprit de la série (qui a fait son succès) en acceptant quelques différences ou quelques distorsions dues au simple fait que ce sont d’autres personnes qui travaillent sur Kid. Bien sûr la tentation de tout relire, corriger, voire réécrire est grande, mais je dois seulement m’arrêter sur les choses très importantes et non sur les « détails ».

Accéder à la BD Kid Paddle Es-tu toi-même un ancien accro des jeux vidéo et autres lunapark ? Si oui, sur quoi jouais-tu ?
Non, je ne joue pas aux jeux vidéo. Ce thème m’a été imposé par la rubrique qui a vu naître Kid. Je m’efforce de ne pas m’y mettre car il faut pouvoir être extérieur à un sujet, si on veut tourner autour de son sujet et surtout parler à un public qui ne connaît pas du tout les jeux vidéo. Après tout, Jules Verne a écrit de formidables romans d’aventures à travers le monde sans avoir quitté Amiens !

A l’instar de Kid Paddle, essayais-tu d’entrer au cinéma pour assister à des séances qui t’étaient interdites ?
J’avais essayé une fois de falsifier ma carte d’identité (à l’époque, en carton) pour passer un guichet de cinéma, mais étant né en 1963 je devais changer le 3 en un 0, ce qui ne marchait pas bien… J’ai raturé et j’ai dû demander une nouvelle carte d’identité.

Pourquoi le personnage avec la queue de cheval blonde, qui était présent dans les premiers Kid Paddle, a-t-il disparu ?
Ce personnage est ma caricature en réalité, et je ne lui ai pas trouvé un rôle important dans la série, pas trouvé une personnalité originale pour se démarquer, contrairement à Horace ou Big Bang...

Une Illustration Kid Paddle Chose assez rare dans la bd, Kid évolue dans une famille monoparentale (avec sa sœur et son père). Est-ce un choix délibéré? Où est sa maman?
Sa mère n’a jamais trouvé sa constitution graphique. J’ai longtemps cherché un dessin, un physique qui m’aurait plu mais en vain. J’ai attendu et hésité tellement longtemps qu’elle n’est pas apparue dans le premier tome et si je voulais la faire apparaître dans le second tome, je devais expliquer (en plus de trouver un dessin) pourquoi elle était absente du premier tome! Donc j’ai laissé tomber...

Kid Paddle est en prépublication pour le moment dans le Spirou magazine. Chez qui sera-t-il publié ?
Il sera publié dans Télémoustique, Tremplin et dans Kid Paddle Magazine, d’autres replacements sont aussi envisagés. Il sera édité par notre maison d’édition MAD Fabrik.

Accéder à la BD Game Over Tu n’as pas le sentiment d’avoir un peu dédaigné Kid Paddle au profit de Game Over, ces dernières années ? C’était pour répondre à une demande du public ou par manque d’inspiration (ou d’envie) ?
J’ai fait une pause après le T11 de Kid. J’ai co-créé (avec mon épouse) Grrreeny, la mascotte écologique du magazine Wapiti. J’ai aussi scénarisé un album d’aventures sur l’histoire de l’art, avec Adam au dessin (réaliste). J’ai également mis en place la structure permettant de collecter des scénarios pour la série « Game Over » afin de pouvoir produire un album tous les 9 mois, en gardant la qualité désirée. Mais surtout, prendre un peu de recul sur ma série phare est souverain d’un point de vue purement artistique, je collecte des nouvelles idées, des nouvelles envies, etc.

Les propositions de gag de la série Game Over sont depuis un bon bout de temps ouvertes au public. Comment se déroule la sélection ? Qui compose le comité de lecture ?
Ha, si vous voulez le savoir, vous devez vous faire engager par MAD Fabrik ! Nous sommes tous plus ou moins juges et impliqués dans le comité... Certains gags n’ont pas besoin d’un long débat à plusieurs pour être jugés, d’autres oui.

Une Illustration Game Over La formule rencontre t’elle toujours un réel succès ? Y a-t-il des scénaristes amateurs qui retiennent plus particulièrement ton attention ?
Nous recevons entre 10 et 30 scénarios par jour. Il y a des habitués, des ultra-productifs, des enfants, etc. Ce site nous a permis de découvrir deux perles qui s’ignoraient scénaristes, Patelin et Thitaume. J’ai tellement aimé leurs scénarios que je leur ai commandé à chacun 2 albums entiers ! Bien sûr en gardant la possibilité de pouvoir choisir leurs meilleurs gags. C’est ainsi que le tome 6 de Game Over sortira déjà en mars 2011 (“The sound of silence”) avec Patelin comme scénariste unique.

Tu n’aurais pas envie de développer toi-même un jeu vidéo vraiment délirant et digne de la série Game Over ?
Ah oui, ça, j’aimerais bien. Il faudrait la confiance d’un éditeur de jeux vidéo et puis il faudrait un peu de sous, aussi. En tout cas si on veut le faire bien. J’ai entendu dernièrement que les budgets totaux mobilisés pour créer, produire et lancer un jeu vidéo sont plus importants que les budgets du cinéma !

Accéder à la BD Harding was here Avec Harding was here, tu t’éloignes de l’univers de Kid Paddle et de ses blorks. A quand le second tome ?
J’aimerais bien faire ce tome 2, vraiment. J’ai été coupé dans mon élan par l’éditeur Mourad Boudjellal (Soleil) qui a remis en question notre collaboration après le tome 1. Je suis pris maintenant par des projets multiples sur Kid Paddle pour quelques années. Un jour, je pense que je continuerai ou alors quelqu’un d’autre... peut-être au cinéma d’ailleurs.

Comment s’est opérée la sélection des tableaux représentés dans la série ?
En compulsant des livres d’art et en circulant dans les musées, principalement à Bruxelles, Paris, Montréal et Londres. A chaque fois, je cherche un léger anachronisme dans la peinture, un détail dont j’expliquerai la présence. Le tome 2 de Harding parlera du tableau de Van Eyck “les époux Arnolfini”. Dans le fond du tableau, en dessous du miroir, Van Eyck a écrit : “Johannes de Eyck fuit hic”. Géniale coïncidence ! Ça veut dire “Jan Van Eyck was here” en latin !

Comment se passe la collaboration avec Adam (Harding was here, Game Over) ?
Très bien, merci pour lui :o) Adam a réussi à se glisser dans mon style BD et il le fait de plus en plus naturellement. Il a son style personnel, semi-réaliste, que j’adore et avec lequel un jour, nous retravaillerons. Mais aujourd’hui, nous sommes tous dans une atmosphère, très grisante, de studio. Nous voulons produire plus en gardant la qualité qui a fait le succès de Kid Paddle et Game Over, ce qui ne laisse pas beaucoup de place à d’autres projets.

Cliquer pour voir une planche de Harding was here Pourquoi as-tu fondé ta propre société d’édition ? Etait-ce une volonté de prendre ses distances avec Dupuis ?
C’est plutôt une volonté de prendre mon destin en main. Je ne partageais plus la même ambition avec Dupuis. Ceci dit, je suis resté en bon contact avec les équipes Dupuis car nous avons des intérêts en commun, d’ailleurs Kid Paddle est toujours prépublié dans Spirou et nous travaillerons avec Dupuis pour des opérations ponctuelles.

Envisages-tu une collaboration avec d’autres maisons d’édition ?
Oui, probablement pour des titres différents, comme par exemple Harding was here, Les carnets de Grrreeny 2 ou un “artbook” style “Mission Maurice” paru chez Max Milo.

Tu es devenu une entreprise à toi tout seul. Tu n’as pas peur qu’à force de te disperser, tu oublies de faire ce que tu fais le mieux : de la bande dessinée ?
C’est une question qui ne se pose pas :o) Quand on fait toujours la même chose, les gens vous demandent si vous n’avez pas envie de faire autre chose; et quand vous faites d’autres choses, les gens vous demandent de revenir à votre première chose !

En ces temps de crise, cela doit être incroyablement gratifiant de se dire que l’on crée de l’emploi. Mais, au fait, combien de personnes travaillent pour ta société ?
C’est très gentil de souligner ce point car beaucoup de personnes minimisent la part de risque d’une telle entreprise en imaginant qu’il sera très facile pour moi de gagner plus d’argent... Le noyau central et décisionnaire est un trio, en plus nous avons 3 employés sans compter bien entendu des partenaires indépendants qui travaillent pour nous.

La couverture de Grrreeny D’où vient le projet « Grrreeny » ? Le public a-t-il été au rendez-vous ?
C’est mon épouse et associée, Araceli Cancino, qui a voulu écrire sur l’écologie, sujet qui l’a marquée depuis longtemps. De mon côté, j’avais besoin de faire une pause entre 2 Kid Paddle. Elle m’a donc proposé de revenir à mon premier métier d’illustrateur et de participer en tant que co-auteur à la création de Grrreeny. Le livre a été notre première sortie MAD Fabrik et a connu un bel accueil tant de la critique que du public.

Quelle est l’importance du para-bd dans ton univers (Kid Paddle, Grrreeny, .) ?
Le para-BD a une importance capitale pour moi car je veux que les personnages de mes univers débordent du papier. L’album est une limite, sortir de l’album est un défi pour ma créativité et j’ai beaucoup de plaisir à imaginer et dessiner mes personnages pour un autre support.

Dans le domaine de la bande dessinée, as-tu d’autres projets que les séries en cours ?
Pour le moment, je me recentre sur ce que je sais faire le mieux, Kid Paddle et ses univers.

Midam, merci pour ta disponibilité. Puisse ton univers encore longtemps nous muscler nos zygomatiques !
Merci et à la prochaine !



A voir aussi :
Le site internet de Midam
Interview réalisée le 17/11/2010, par Mac Arthur, avec la participation d’Alix, de Paco, de Belhou, de Superjé, de Pierig, de Spooky.