Auteurs et autrices / Interview de Loïc Godart
Jeune dessinateur formé à l'école Emile Cohl de Lyon, Loïc Godart, co auteur de Bang!, Le Joueur et L'anatomiste (entre autres), répond à nos questions. Bonne lecture !
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J’ai fait mes études à l’école Emile Cohl à Lyon, et puis après diverses petites choses en bd chez petit à petit et quelques décors pour le théâtre j’ai eu la chance de pouvoir signer assez vite mon premier album, L'Anatomiste chez Soleil.
A quand remonte ton premier contact avec la BD ? Qu’est-ce qui t’a conduit à vouloir devenir toi-même dessinateur de BD ?
Ça remonte à l’enfance, et les premières lectures de Blueberry (La mine de l’Allemand perdu et Le spectre aux balles d’or surtout) ou de la trilogie Nikopol de Bilal notamment m’ont vraiment décidé à embrasser ce métier, j’ai toujours dessiné et eu envie de raconter des histoires, la bd est un medium parfait pour cela.
As-tu eu du mal à te faire une place en tant que dessinateur dans le vaste monde du 9ème art ?
Sorti de l’école ça été assez vite, après il y a eu pas mal de désillusions, aujourd’hui je ne dirais pas que j’ai ma place mais j’y travaille petit a petit.
Ta première BD à toi tout seul en tant que dessinateur, L'Anatomiste, sort en 2005, c’est un gros one-shot de 80 pages, rien que ça ! Ca ne fait pas un peu beaucoup pour une première ? As-tu eu du mal à en voir le bout ?
Il y a deux scénaristes sur ce projet : Stéphane Miquel et Nicolas Tackian qui m’ont bien aidé tout au long de la réalisation du livre, en me rassurant sans me mettre de pression. Finalement ça s’est plutôt bien passé, c’est surtout le début qui a été difficile et puis une fois qu’on tient son rythme de croisière, on déroule tranquillement.
En 2007 tu as participé au collectif Paroles de Verdun. Quels souvenirs gardes-tu de cette expérience qui doit être assez unique et enrichissante du point de vue de la mémoire collective et de l’histoire de France ?
Je me souviens surtout avoir été flatté que l’on me propose de réaliser quelques planches sur ce projet, le recueil contient des pages d’illustrateurs dont j’apprécie beaucoup le travail et depuis longtemps. Après, concernant les pages en elles-mêmes, je me suis essentiellement appliqué à bien illustrer le texte, lui rendre service au maximum, des textes comme ça (ici des lettres de poilus) vous forcent à une certaine humilité.
A la même période, on voit ton nom dans le Projet Bermuda, et en 2004 tu as participé à Arthur Rimbaud : les poèmes en BD : les projets collectifs c’est une manière de travailler qui te plait particulièrement ou est-ce juste une manière de se faire connaître lorsqu’on débute ?
Un peu des deux en fait, en parallèle de bosser sur un projet plus long, ça permet de faire une pause, de chercher d’autres choses, ça a un côté plus récréatif.
Ton actualité la plus récente, c’est Le Joueur, libre adaptation du roman de Fédor Dostoïevski. Dans cet album, tu collabores à nouveau avec Stéphane Miquel, avec qui tu avais travaillé sur L'Anatomiste, comment ce projet a-t-il vu le jour ?
Clotilde Vu, la directrice de la collection, cherchait des auteurs dont elle appréciait le travail pour nourrir son catalogue alors naissant. Elle m’a contacté pour me demander si ça m’intéresserait de travailler sur une adaptation. Apres différents essais j’ai choisi Le Joueur et Stéphane m’a rejoint sur le projet pour s’occuper du scénario.
Combien de temps vous a-t-il fallu pour boucler cet album ?
Presque trois ans…
Ca donne quoi du côté des ventes ? Est-ce à la hauteur de vos attentes ? Mieux ? Moins bien ?
Aucune idée
As-tu le sentiment, grâce à ce travail d’adaptation (Le Joueur tout récemment, mais aussi Arthur Rimbaud : les poèmes en BD il y a quelques années maintenant), de rendre abordable au plus grand nombre des œuvres qui ont pu effrayer plus d’un allergique à la littérature classique ? (c’est un peu mon cas en fait ;))
C’est un peu l’idée, de faire découvrir des œuvres par un autre biais et puis c’est aussi très stimulant de travailler sur des textes d’une telle qualité, ça vous force à chercher constamment a hausser le niveau de votre travail.
Es-tu joueur toi même ?
Non, du tout et puis je suis tricheur et assez mauvais perdant en fait, ce n’est pas vraiment mon truc.
Cela t’a-t-il donné l’envie de continuer sur la voie de l’adaptation de grandes œuvres littéraires ?
On travaille actuellement avec Stéphane sur une nouvelle adaptation, on en n’est encore qu’au début, on verra comment ça évolue…
A propos d’adaptation, qu’est devenu le projet Dom Juan de Molière avec Jean-Christophe Deveney ?
Il est advenu ce qu’il advient de beaucoup de projets, il est au fond d’un tiroir quelque part dans un bureau, mais ce n’est plus vraiment à l’ordre du jour…
2010 c’est aussi la parution du premier tome de Bang !, en association avec le même Jean-Christophe Deveney : combats, violences et explosions, mais encore dans un cadre russe : un petit faible pour ce pays ou pure coïncidence ?
Pure coïncidence pour le coup
D’ailleurs, pourquoi le titre de cet album est-il passé de « Bang Bang ! » à « Bang ! » ? Est-ce à cause de la trop grande similitude avec une série d’un tout autre genre ? Et du coup que devient le jeu de mot « un one shot à plusieurs coups » ?
C’est devenu « Bang ! » a cause du bouquin de Bernet et Trillo , c’est juste une question de référencement en fait , et quant au jeu de mot, c’est juste que les protagonistes passent leur temps à se tirer dessus c’est marrant « one shot à plusieurs coup », non ? (NDLR : « oui ! »)
En combien de tomes est prévue la série ?
Là on bosse sur un nouveau volume, un one shot également, il n’y a pas un nombre de tomes fixé, vu que ce ne sont que des one shot, si on a une autre histoire qui vaut le coup et que le public suit, on la fera peut-être, pour l’instant on se concentre sur ce nouveau volume on verra plus tard pour le reste.
Tu travailles essentiellement sur de gros albums (presque 80 pages pour L'Anatomiste, presque 70 pour Bang ! et plus de 90 pour Le Joueur), si (quand) on te propose un projet d’album standard en 48 pages, tu ne te sens pas un peu à l’étroit ?
En fait ça ne s’est tout simplement jamais produit qu’on me propose un 48 pages, j’imagine que ça va tous simplement un peu plus vite a faire. Après, le format ce n’est pas très important : c’est une contrainte comme une autre, c’est aux auteurs de s’adapter de ramasser davantage leurs histoires, ça doit sans doute obliger à être plus synthétique, ce n’est pas forcement un mal… enfin, j’imagine.
Le rendu graphique de « Le Joueur » est très différent de celui de « Bang ! », notamment au niveau de la colorisation (le premier à l’aquarelle avec toutes les nuances et dégradés qu’ont peut imaginer, le second beaucoup plus « brut » et contrasté). Est-ce un choix lié à l’histoire que tu veux mettre en image ? Est-ce que c’est un sujet que tu abordes et un choix que tu fais avec le scénariste ?
Non mes scénaristes, que ce soit Stéphane ou JC, m’ont toujours laissé carte blanche quant à la technique à utiliser pour les projets que nous montons, après c’est vraiment du ressenti, le look que l’on veut donner au bouquin, ce qui semble être le plus juste par rapport à l’histoire que l’on veut raconter.
Es-tu plus attiré par la palette graphique et les couleurs informatiques ou par le vrai pinceau et la couleur directe ?
Je crois que j’aime mieux les pinceaux quand même, c’est plus agréable et comme c’est plus casse gueule, ça oblige à réfléchir un peu plus, à trancher davantage, ce n’est pas si mal. Maintenant, l’informatique a des avantages qui sont tout de même non négligeables… Le choix de l’un ou de l’autre c’est vraiment en fonction du projet.
En tant que dessinateur, quelle est la marge de manœuvre que tu aimes (aimerais ?) avoir pour illustrer le scénario d'un autre ? Je vois que tu es co-scénariste sur Bang ! par exemple, c’est une nécessité pour toi de participer au scénario ?
L’écriture de Bang ! ça a vraiment été un ping-pong avec JC et c’est comme ça qu’on travaille ensemble. Une fois qu’on a bien joué, il m’envoie son découpage et je passe à la réalisation des planches en modifiant parfois certaines choses, mais finalement assez peu. Sur le joueur on a pas mal discuté en amont du projet mais une fois commencé je n’interviens pas du tout. Après c’est sur les planches qu’on discute : ma part de scenario je la fait via mes dessins. Du coup ça varie assez d’un projet à l’autre en fait.
"En attendant Mado", c’est qui ? As-tu un lien personnel avec ce groupe ou est-ce juste professionnel entre vous ? Peux-tu nous en dire plus sur ce que tu as fait pour eux ?
C’est des amis qui ont monté leur groupe sur Bordeaux, quand ils ont enregistré leur premier album, ils m’ont demandé de réaliser la maquette de la jaquette et du livret de paroles. C’était vraiment très agréable à faire, j’aime bien ce genre d’exercice, ça change de la BD.
Es-tu BDPhile toi-même ? As-tu des séries cultes ? Quels sont tes coups de cœur du moment ?
J’ai été très bédéphile, ça c’est un peu calmé avec le temps, il y a par contre des auteurs que je suis de près comme Taiyo Matsumoto par exemple ou que je redécouvre comme Richard Corben.
La BD numérique commence à se faire une place, d’un côté cela permet d’enrichir le côté visuel avec des effets qu’on ne pourrait pas mettre en place sur le support papier, mais à côté de ça, on perd (entre autres) le plaisir du toucher et l’esthétisme d’une étagère remplie de BD, ça t’inspire quoi en tant que dessinateur et en tant que lecteur ?
Ben en fait ça ne m’inspire pas grand-chose, je ne m’inquiète pas tellement pour le support papier … Maintenant je ne suis pas très au fait de ce qui se trame, alors bon…
Y a-t-il un dessinateur que tu admires, qui influence ou inspire ton travail ?
Oh il y’en a plus d’un et pas seulement des dessinateurs de bd, des peintres aussi des graphistes, des photographes, il y’a beaucoup de monde en fait…
Une BD que tu aurais rêvé d’illustrer toi-même ?
Je ne vois pas trop…
Un scénariste avec qui tu rêverais de travailler ?
Les gens avec qui je travaille sont déjà très bien, je rêve plutôt de pouvoir signer tous les projets que l’ont monte ensemble.
Es-tu tenté par une BD en solo ? Ou par l’exploration d’univers moins réalistes ?
J’écris en ce moment un scenario mais ça avance très lentement, c’est vraiment quelque chose que j’aimerais pouvoir faire à moyen terme, pouvoir développer mon propre univers. Maintenant travailler avec d’autres permet d’étudier leur façon de faire, de comprendre les rouages d’une intrigue, c’est aussi très enrichissant. L’idéal serait de pouvoir passer de l’un à l’autre.
Loïc, merci !
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