Auteurs et autrices / Interview de Bruno Duhamel
Bruno Duhamel est quelqu’un de méticuleux. Ca se sent dans son dessin, mais aussi dans son rapport avec les critiques, le monde de l’édition… Et il n’a pas sa langue dans sa poche…
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Difficile de répondre à cette question, ne sachant pas quel jour cette interview sera mise en ligne. Disons que j'allais bien.
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L'école d'Angoulême, j'y retournerais. Tout comme je suivrais à nouveau les cours de Sera à la Faculté Saint Charles de Paris. C'est plutôt les années d'avant que je modifierais un chouïa. J'irais me coller deux ou trois coups de pied au cul pour m'obliger à prendre le dessin un peu plus au sérieux dès mon plus jeune âge, à fréquenter un peu plus les musées, à bosser la perspective et à bosser le dessin d'après nature. Mais bon, il y a toujours des trucs à améliorer, mais il n'est jamais trop tard. Et puis si je m'amuse toujours autant à dessiner, c'est peut-être justement parce que je n'ai pas pris ça trop au sérieux.
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Pas grand-chose à dire. Beaucoup de gens pensent que je dessinais pour le jeu vidéo, mais en fait, rien à voir. J'y suis entré en temps que webdesigner et sorti en tant que webmaster : je programmais et j'animais des sites Internet en technologie flash pour les différents jeux qui sortaient.
Ah si, un souvenir rigolo, tout de même, j'y ai croisé, sans lui parler, Régis Loisel, étant donné que j'ai entièrement réalisé le site Internet du jeu « Gift », basé sur ses personnages. C'est d'ailleurs un des moments pendant lesquels une petite voix m'a chuchoté : Qu'est-ce que tu fous ici ? C'est la bande dessinée, ton truc, pas les jeux vidéo. Casse-toi ! »
Et en effet, j'étais entré dans l'univers de l'entreprise par peur de me lancer dans la bande dessinée, et un an après, grâce à Frédéric Brémaud et aux allocations chômage, j'en suis sorti pour devenir dessinateur de bande dessinée.
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Je n'ai jamais été un membre éminent de l'association Café Creed.
Elle a été créée par Jean-Emmanuel Vermot-Desroches, Tristan Lagrange, David Quertelet et Benoît Girier, qui faisaient tous les quatre partie de ma promo à Angoulême, et qui m'ont demandé très gentiment de participer aux collectifs « Café Creed » puis « Choco Creed » (la version enfantine), histoire de m'aider un peu à une époque où mon travail se finissait souvent dans la douleur. A l'époque, il m'arrivait régulièrement de détruire plusieurs pages, après des semaines de travail, parce que je n'en étais pas satisfait. Par la suite, j'ai arrêté d'enchaîner les nuits blanches, ce qui m'a permis de gérer un peu mieux mon système nerveux, et petit à petit, j'ai réussi à gagner un peu de confiance en moi.
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Au fond d'un verre :)
Fred était responsable du pôle multimédia du Centre National de la Bande Dessinée et de l'Image (CNBDI) d'Angoulême pendant mes études aux Beaux-Arts de cette même ville, et nous avons tout bêtement fait connaissance comme celà se fait souvent à cette période de la vie, à savoir en buvant des coups en terrasse. Comme il souhaitait devenir scénariste, j'ai offert la première tournée, et vu que je voulais devenir dessinateur, il a offert la seconde. Petit à petit, c'est devenu une méthode de travail très efficace.
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Non, mais comme je l'ai dit plus haut, après en avoir rêvé toute mon enfance, j'ai pas mal hésité à me lancer, vu la difficulté du métier et la précarité du statut d'auteur. J'ai été animateur jeunesse, modélisateur 3D, webmaster... Mais assez vite, c'est devenu un besoin vital, un manque. Le dessin est la seule chose qui m'apporte suffisamment de plaisir pour maintenir mon équilibre mental. Si je ne dessine pas, je sombre dans l'ennui.
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Les spécialistes te diront que je les dessine très mal. En fait, je m'en fiche, j'essaie de les faire bouger plus que d'en maîtriser parfaitement les proportions et la morphologie. C'est la même chose pour les êtres humains : je veux qu'ils participent à l'histoire, pas qu'ils soient beaux.
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Kochka est une traduction phonétique de « petit chat », en Russe. En réalité, il ne s'agit pas réellement d'un personnage. Il est à la fois le symbole du désir de « soumission » du photographe sur le monde qui l'entoure et sur sa femme, Michka, et l'observateur extérieur de l'histoire. Comme le sont la plupart des bestioles de Disney : elles sont toutes la « petite différence » qui singularise le héros, et le rendent à la fois différent et « supérieur » aux autres personnages. Le dragon miniature de Mulan, par exemple, qui est aussi un symbole sexuel : Mulan est une femme, mais dès lors que ce couillon d’asticot ailé se pose sur son épaule, elle devient un homme, et un redoutable guerrier. C'est très psychanalytique, ce genre de truc... Bref, pour Kochka, c'est un peu la même chose. D'ailleurs, il porte malheur à tous les personnages sur lesquels il s'installe. Parce que le désir de soumission, en général, ça porte malheur. Et accessoirement, ça rend con.
D'autre part, un chat a neuf vies, et Fred et moi, on pouvait donc le réincarner à différentes époques de l'histoire, sans se soucier de trouver un lien entre chaque cycle. Avec Brémaud, on voulait faire une série sans pour autant s'ennuyer à rester toujours à la même époque, avec les mêmes personnages. On avait donc choisi un prétexte pour pouvoir changer régulièrement d'univers.
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N'exagérons rien : « Kochka » est dessiné au format d'édition. Tout simplement parce que j'ai une certaine tendance à avoir peur du vide et à rajouter beaucoup de détails, ou tout simplement à avoir envie de raconter des histoires dans l'histoire, par les décors et par les personnages secondaires. Mais pour mes premiers albums, j'ai considéré qu'il valait mieux un petit format pour pouvoir facilement prendre du recul vis-à-vis de ma page, et en surveiller ainsi la lisibilité, qui est tout de même la première qualité d'une page de bande dessinée.
Pour les projets suivants, j'ai un peu agrandi le format, et je bosse aujourd'hui en format 30/40 environ. Si bien que je rajoute un peu plus de détails, tout en essayant de ne pas trop en faire, toujours pour cette question de lisibilité. Et j'encre certaines parties avec des outils suffisamment fins (plume et rotring) pour ne pas trop « graisser » ces détails. Kochka était encré exclusivement au pinceau. J'utilise maintenant tout une gamme d'outils différents en fonction de mes besoins, jusqu'au cutter, avec lequel je lacère mes pages, pour les séquences de pluie, entre autres.
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Non. Je la trouve intéressante, parce qu'elle montre une étape du travail, les hésitations, les erreurs, mais, pour le coup, elle est totalement illisible pour la personne qui s'intéresse à l'histoire. C'est un truc pour collectionneurs, pour amateur de dessin, mais pas pour les lecteurs.
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Co-écrit, avec Brémaud. Au départ, c'est un projet que Brémaud m'avait proposé. Je ne me souviens plus pourquoi je l'ai finalement refusé. Peut-être pour ne pas être définitivement catalogué dans le genre « Western », et imposer assez vite aux éditeurs le fait que je suis un dessinateur, pas un « dessinateur de cowboys ». Bref, toujours est-il que j'avais déjà pas mal bossé sur le projet quand Jean-Emmanuel a accepté de le reprendre, et Brémaud m'a donc proposé de l'écrire à deux. Il a été très honnête, sur ce coup-là. Bon, en même temps, il n'avait pas le choix, on avait signé Harlem ensemble, à la même époque.
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Pour plusieurs raisons. Raison principale : c'est un excellent dessinateur. D'autre part, c'est un ami, il n'avait pas d'autre boulot sous la main, et, comme je l'ai dit, c'est un des fondateurs du Café Creed, et c'est sans doute celui qui m'a le plus encouragé à l'époque où le dessin était un calvaire pour moi. Mais avant tout parce que c'est un excellent dessinateur. Les autres raisons n'ont fait que rendre le choix plus agréable encore.
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Une idée à tous les deux. C'est un univers de petits malfrats minables à la Brémaud sur des envies graphiques qui sont les miennes : je voulais dessiner les Etats-Unis dont j'ai rêvé toute mon enfance, et que je ne verrai jamais, d'abord parce j'ai grandi et que je n'admire plus vraiment ce pays, même si je ne le déteste pas non plus pour autant (je continue à le trouver intéressant, car bourré de contradictions), ensuite parce que les bagnoles ne sont plus les mêmes, et que New York sans Dodge Challenger 70, sans Plymouth Fury 72 ni Chevrolet Impala 73, ce n'est plus New York. C'est juste une très grosse ville qui me fait peur.
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Pourquoi ? Elle ne vous plaît pas, la fin ?
…
Bon, ok, petit point sur la réalité du marché du livre !
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Fred et moi on a du écrire cette fin en catastrophe. En fait, on a été prévenu à 15 pages de la fin du tome 2 qu'il n'y aurait pas de tome 3. Ce sont des choses qui arrivent de plus en plus souvent. Certains éditeurs (pas tous, et pas forcément les plus gros) sont de moins en moins capables de prendre des risques, parce qu'ils ont des comptes à rendre à des investisseurs qui, la plupart du temps, ne connaissent rien à la bande dessinée, ni à l'édition, et s'en foutent d'ailleurs comme de leur première chemise. La seule chose qui intéresse ces investisseurs, c'est le montant de leurs dividendes. Résultat, au lieu de faire des choix éditoriaux et de les assumer, en suivant, et en poussant, un nombre limité de projets, ces éditeurs préfèrent jouer à la pêche à la ligne, sortir 15 « tome 1 », et ne soutenir que les coups de bol, à savoir les deux albums sur 15 qui réussiront, grâce à une qualité irréprochable ou par un heureux concours de circonstance, à se vendre. Si l'on ajoute à cela que la durée de vie d'un directeur de collection au sein d'une maison d'édition s'est franchement écourtée, et que lorsque ce directeur de collection est dégagé, la plupart des séries qu'il a signées, et qui ne sont pas rentables au moment de son départ, vont dégager avec lui, on en vient à la situation présente, à savoir que si les ventes d'une série ne démarrent pas au tome 1, la série, le plus souvent, est fichue. D'autant que les libraires, souvent pris à la gorge par le nombre de nouveautés, ne commandent quasiment pas de tome 2 lorsqu'un tome 1 ne s'est pas bien vendu. Et comme, côté lecteurs, beaucoup de gens attendent de voir arriver le tome 3 avant d'acheter le tome 1, de peur que la série soit interrompue, cela finit d'achever le boulot.
N'oublions pas le rôle de certains critiques (parfois autoproclamés), qui n'hésitent pas à déconseiller l'achat d'un tome 1 tout en attendant de voir la suite pour se forger un avis. Non seulement dans la réalité actuelle, c'est un paradoxe complet, mais ils oublient aussi que les tomes 1 sont rarement totalement au point, même ceux des séries qui sont devenues par la suite des séries cultes. La création d'un univers se fait brique par brique, pas du jour au lendemain. J'ai beau savoir que c'est le jeu, j'ai plutôt tendance, de mon côté, à carburer à l'énergie positive : en règle générale, je dis du bien de ce que j'aime. Quand je n'aime pas, je n'en parle pas publiquement. Ce n'est pas une question de censure, mais plutôt d'autocritique : je suis amateur de bande dessinée, de cinéma, de littérature, de peinture, j'aime en discuter, confronter mon point de vue, décortiquer une œuvre, mais je ne suis pas un croisé, et je ne pense pas que mon point de vue soit important au point de sabrer le boulot de quelqu'un.
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Ceci étant, cette fin est une remarquable queue de poisson comme on n'en fait plus. J'en suis très fier ! :)
Bref, le plus énervant dans tout ça, c'est que plein de lecteurs viennent encore me demander, en festival, à quelle date est prévu le tome 2... Et quand je leur dis qu'il est sorti depuis 5 ans, mais que la série est arrêtée, c'est moi qu'ils engueulent. Or, même si je comprends tout à fait la frustration pour le lecteur, il faut tout de même avoir à l'esprit que dans un cas comme celui-ci, il y a tout de même deux auteurs qui perdent du jour au lendemain l'intégralité de leurs revenus. Or, rappelons que les auteurs n'ont pas droit aux allocations chômage. Cette année-là, je suis resté plus de 6 mois sans aucun revenu.
Donc le prochain qui m'engueule, je l’assomme.
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Du « Choco Creed », j'ai écrit les 3 premières histoires pour les collectifs sur les thèmes respectifs de la nature, de la tendresse et du mystère.
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Parce qu'il s'agissait de collectifs, et que nous n'avions que 5 pages chacun. J'ai ensuite gardé ce format car il s'agit de ma première expérience en tant qu' « auteur complet », et que je ne me sens pas encore prêt à affronter des récits longs.
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La réponse est simple : parce que Vincent Henry semblait suffisamment motivé pour soutenir la série, alors que Vent d'Ouest venait de flinguer « Harlem ». A choisir entre un gros éditeur vaguement intéressé et franchement mercenaire dans sa façon d'agir et un petit éditeur qui fait du bon boulot, je choisis le second, même si la contrepartie financière est bien moindre. Par contre, je négocie les clauses du contrat.
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Oui, mais comme les avances sur droits sont réduites et que mes autres projets me réclament énormément de temps, je ne sais pas quand. Il voit le jour petit à petit, au gré de mes heures libres.
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Ne pas oublier les bandes blanches de Nävis. Pour le reste, Jean-David nous a foutu une paix royale. Il a même adapté son scénario parce que je voulais dessiner des extraterrestres. Un mec bien, ce Jean-David !:)
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Aux petits oignons. D'ailleurs, c'est encore un projet dû en partie à Jean-David Morvan, créateur de la collection Ex-Libris, qui nous a mis en relation, Philippe, Thierry et moi. Ce sont deux scénaristes extrêmement professionnels, et j'ai reçu des pages auxquelles je n'avais aucune modification à faire. Ce qui tombe plutôt bien parce que le boulot de documentation, en plus du dessin, était largement suffisant pour m'occuper pleinement !
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Non. Un auteur caméléon change totalement de style d'un projet à l'autre, souvent par manque de confiance en lui, ou pour répondre à des projets de commande. Je pense en revanche que l'on peut reconnaître ma « patte » sur chacun de mes albums. Par contre, je change de vocabulaire graphique, de mise en scène, et d'outils, en fonction de ce que je dois raconter. Un encrage au pinceau ne dit pas la même chose qu'un encrage à la plume ou qu'un rendu au crayon. Le résultat est plus ou moins liquide, sec, ou dur, et provoque donc des sensations différentes.
Ensuite, je me sers de l'histoire de l'art et des différentes époques de l' « image » : je me suis inspiré des caricaturistes du 19ème siècle pour Le Père Goriot, parce que cela aidait à plonger le lecteur dans une ambiance 19ème siècle, en jouant sur sa culture visuelle, même inconsciente. Si un jour je dois dessiner des samouraïs, je m'inspirerai évidemment de la tradition visuelle japonaise. Ou des peintures rupestres, ou encore des tapisseries du Moyen âge, pour un autre projet :) Le tout étant toujours de ne pas trop en faire :)
Et pour ce qui est de l'humour, ce n'est pas être un caméléon que de changer de ton. J'aime faire rire, et rire moi-même, ça ne m'empêche pas de vouloir aussi parler de choses qui me rendent triste ou me mettent en colère. Or, Balzac, dans la Comédie Humaine, met justement en scène beaucoup de choses qui me révoltent. L'humour lui-même est d'ailleurs parfois le dernier rempart face à la colère. Dans Kochka, l'humour était assez noir. Je fais rarement de l'humour gratuit. Romain Gary dit une chose très juste dans La Promesse de l'aube : « L'humour est une déclaration de dignité, une affirmation de la supériorité de l'homme sur ce qui lui arrive. »
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Non, il s'agit d'une réédition simple, mais en un seul volume, ce qui est plutôt une bonne chose, mais ne lèse pas les lecteurs qui ont acheté la première édition.
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Par téléphone, et lors de réunions au SNAC (Syndicat National des Auteurs Compositeurs). Visiblement, Kris, lorsqu'il était libraire, conseillait Kochka à toutes les personnes qui passaient devant lui. Il m'a un jour appelé pour savoir si un projet mi-historique mi-science-fiction m'intéressait. J'ai lu son projet, et je me suis fait embarquer par l'histoire immédiatement. Son scénario est à la fois très drôle et pose des questions extrêmement graves, ce qui est plutôt rare. Derrière le prétexte du voyage dans le temps, la véritable question de cette série, c'est évidemment : jusqu'où peut-on aller pour sauvegarder une civilisation ? Et combien d'autres civilisations a-t-on le droit de sacrifier ? C'est une question très actuelle ! Et réussir à poser cette question tout en emportant le lecteur dans une aventure bourrée d'humour, c'est un tour de force remarquable.
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Absolument pas. J'ai découvert leurs boulots respectifs trop tard pour qu'ils aient un réel impact sur le mien. Mes influences viennent de mon enfance ou de mon adolescence. Par contre, il est possible que Gazzotti, Meyer et moi ayons des influences communes, ce qui expliquerait une certaine parenté. Encore qu'elle ne me saute pas aux yeux.
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Bien sûr. C'est un boulot qui nécessite à la fois une grosse recherche de documentation mais aussi d'éprouver du plaisir dans l'exercice. Je ne passerais pas des heures, voire des jours, sur certaines cases si je n'y prenais pas de plaisir !
Faire une série sur le voyage dans le temps, c'est d'abord et avant tout, pour les auteurs, l'occasion de voyager eux-mêmes dans le temps. Par la documentation, d'une part, qui nous plonge dans une époque et dans une culture, et par le dessin, ensuite, parce que lorsqu'on dessine une ville entière, on se balade dans chacune de ses rues, on les visualise. C'est une véritable immersion. Et si l'immersion est réussie pour les auteurs, il y a de grandes chances qu'elle le soit aussi pour le lecteur. Du coup, il ne s'agit pas d'une simple bande dessinée, mais d'une machine à voyager dans le temps !
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Pour des questions de droit vis-à-vis d'un jeu vidéo, et de risque de confusion vis-à-vis d'autres bandes dessinées qui n'existaient pas à l'époque à laquelle Kris a écrit son histoire.
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Le plus possible.
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Je propose des idées à Kris chaque fois que l'on parle du projet dans son ensemble, je lui fais part de mes envies graphiques concernant les périodes de l'histoire qui m'intéressent, et il m'arrive d'ajouter ou de modifier un dialogue par-ci par-là lorsque cela sert la mise en scène ou que j'ai une idée qui me semble drôle ou intéressante. Ou de modifier son découpage. Mais toujours avec son accord.
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Les deux. Il ne faut jamais mettre tous ses œufs dans le même panier. Et il y a des projets intéressants partout. Je saisis ceux qui me plaisent.
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Là, je pose un Joker, parce que toutes catégories confondues (musique, cinéma, littérature, bande dessinée etc.), ça ne peut finir que par une liste de 400 noms, et c'est un peu fatiguant. En plus je vais en oublier plein.
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Il ne s'agit pas de se sentir à l'aise : un auteur qui se sent trop à l'aise a toutes les chances de se casser la figure. Il s'agit d'y prendre du plaisir, ou pas. Je prends beaucoup de plaisir à écrire, donc oui, pourquoi pas ? Après, c'est aussi une question de temps.

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Celui dont je parle dans la question suivante :) Et le tome 3 de « Je suis pas petite !!! ».
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Je préfère ne rien dévoiler sur l'histoire, car cela ne servirait à rien : c'est un projet intimiste dans lequel tout se joue sur les ambiances, les silences et les personnages. C'est un album 100% contemplatif. Je préfère vous montrer quelques pages, ici : http://www.hibbouk.com/Abel/Abel.html
« Le Voyage d'Abel » sera mon premier projet d'auto édition, et fera sans doute l'objet d'un tirage unique, limité, numéroté et signé.
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D'un jeu de mot idiot.
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Merci.
Si, bien sûr, mais pas n'importe comment, et pas tout de suite. Mon prochain western sera très certainement plus noir que Kochka, et sans doute assez violent.
Ceci dit, sans aller tout à fait dans le genre western, je crois que Daggy et Stuart, les deux agents temporels des Brigades du Temps, ont peu de chances d'échapper à une petite mission réglementaire au fin fond du Far West.
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- La loi sur les œuvres indisponibles du 20ème siècle, qui, si elle ne concerne pas directement la bande dessinée, pose tout de même le lien entre « édition papier » et « édition numérique » comme un état de fait, et menace de réduire les marges de négociation des auteurs en même temps que leurs droits, voire remet franchement en question la paternité de l'auteur.
- La révision du Code de la Propriété Intellectuelle, suivie avec brio par Hubert, Fabien Vehlmann, et notre Maître Yoda, à savoir Emmanuel de Rengervé, l'excellent juriste du SNAC, au sein du Comité Permanent des Écrivains, ainsi que l'intégration de nouvelles clauses adaptées aux nouveaux supports numériques.
- Le statut de l'auteur, ses droits, son statut fiscal, la possibilité de congés ou d'indemnités maternité, la propriété des originaux, le statut du coloriste, et tout un tas de médiations ou de conflits auteur/éditeur à gérer au fur et à mesure qu'ils se présentent.
- L'information et la formation des auteurs, notamment grâce à un formidable travail réalisé par un groupe d’auteurs composé d’Alain Ayroles, Sébastien Cosset, Virginie Greiner et Cyril Pedrosa, toujours avec l’aide et l’assistance d’Emmanuel de Rengervé, qui a donné naissance au Contrat Commenté, qui regroupe et explique les différentes clauses qui régissent un contrat de bande dessinée. Ce livre est un outil remarquable. Il a été offert aux professionnels dans sa version papier sur différents festivals, ainsi qu'aux adhérents, et il est disponible gratuitement dans sa version numérique, en suivant ce lien : http://www.syndicatbd.org/pdf/contratcomment.pdf.
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Pour ma part, je pressens de plus en plus les deuxième et troisième solutions : beaucoup d'éditeurs, à l'heure actuelle, réagissent comme de vrais enfants gâtés : ils ont eu le monopole durant des années, ils ont pu faire ce qu'ils voulaient, et en ont largement profité. A présent que leur monopole s'éteint, avec l'arrivée de nouveaux acteurs, de nouveaux supports, de nouveaux modèles économiques et de nouvelles formes de distribution, dans une Europe qui lutte contre ces monopoles, en remettant en question des lois comme celle du prix unique ; au lieu de soigner leurs auteurs afin de les conserver, ils les saignent de leurs derniers acquis en espérant ainsi les attacher solidement. Les auteurs sont obligés de leur céder de plus en plus de droits, l'audiovisuel, le numérique, l'intégralité des traductions en langues étrangères, sans aucune contrepartie. Au contraire, les revenus baissent. Et par-dessus le marché, les éditeurs tentent de plus en plus d'orienter les auteurs vers les projets qui les intéressent eux, qu'ils pensent rentables (alors même que personne ne connaît la recette d'un best-seller), à tel point que certains projets deviennent purement et simplement des boulots de commande.
Ils ne se rendent pas compte que nous avons d'autres armes. Si je dois bosser sur un boulot de commande, je ne le fais pas chez un éditeur, je le fais tout seul, ou avec une entreprise spécialisée, et mon prix de page double, voire triple. Il m'est arrivé de gagner en trois semaines ce que je gagne en 1 an de bande dessinée chez certains éditeurs. Demain, je peux très bien décider de gagner ma vie de cette façon, faire de la bande dessinée pour mon plaisir, et la diffuser par moi-même. Comme je l'ai dit, il y a un point de rupture à toute chose. L'édition est une matière comme une autre. Posez un témoin sur une faille qui apparaît sur la façade d'un immeuble : le témoin va se fendre progressivement, la pierre va mettre des années avant d'atteindre son point de rupture. Mais lorsqu'elle l’atteint, l'immeuble s'effondre en 5 secondes.
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Merci à toi.
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