Editeurs et éditrices / Interview de Didier Borg
Didier Borg a créé il y a cinq ans le label KSTR, avec bonheur et succès. Bilan et perspectives…
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Editeur par hasard, passionné de tout donc de trop de choses.
On fête les cinq ans de la collection KSTR... En cinq ans, si tu te retournes sur le chemin parcouru, quel est ton sentiment ?
Je ne me retourne jamais ! Mais mon sentiment est que le label a fortement évolué, il tend à prendre une place réelle dans le cœur des libraires et d’un certain lectorat que je ne maîtrise pas… Je croise des gens en festival qui me disent des choses vraiment agréables à entendre et souvent surprenantes pour moi ! Je suis toujours étonné de voir à quel point les gens s’imaginent des tonnes de théories sur le pourquoi/comment du label… Un jour un lecteur m’a dit, j’adore vos pages de gardes… Elles sont pourtant simples, quadri, mais une couleur… Je ne crois pas être le seul !
Comment as-tu choisi le nom ?
C’est au cours d’une conversation avec Louis Delas (Directeur général de Casterman et Audie), je lui disais que je trouvais amusant d’entendre tout le monde parler de CASTER pour évoquer CASTERMAN et j’avais vécu la même chose lorsque je travaillais chez CANALSATELLITE, tout le monde disait CANALSAT… Louis a rebondi en me disant que mon label c’était un peu le CASTERMAN « jeune », donc CASTER c’était bien… Retournant dans mon bureau je me suis demandé si on pouvait l’écrire plus graphiquement, l’envoyer par SMS… C’est alors devenu KSTR ! Mais tout le monde dit CA ESSE TAI ERRE ! Comme quoi… Il faut se méfier de trop de réflexion !
Qu'est-ce qui motive la création d'une nouvelle collection ?
C’est d’abord l’envie d’une maison d’édition qui a eu envie de se renouveler, de chercher à s’ouvrir sur des tendances qui semblaient passer à côté sans croiser son chemin. Ensuite c’est la rencontre entre des personnes, j’ai rencontré Louis Delas à l’occasion de Rock en Seine, il était fan d’Archive et s’était mis les pieds dans la boue ! Un ami nous a présentés.
De là j’ai évoqué mes souvenirs de jeunesse, METAL HURLANT, A SUIVRE, PILOTE… FUTUROPOLIS et ma rencontre avec Etienne ROBIAL chez CANAL+. C’est de là qu’est venu le discours sur le rock… Je trouvais que la jeunesse s’intéressait au rock et je me demandais où était l’esprit rock des années 80 version 2000 en bande dessinée…
Est-ce que c'est la création de cette collection qui amène à la recherche d'auteurs et de projets qui pourraient rentrer dedans, ou bien le fait d'avoir des projets avec un même fil conducteur qui pousse la création d'une collection ?
Dans mon esprit ça n’est pas une collection, ce qui induit l’idée que tout se ressemble ou bien qu’une thématique rassemble. C’est un label, j’ai pensé KSTR comme un espace ouvert, dans lequel la liberté prévaut, liberté de style, de thème, de pagination. Avec le temps je resserre un peu les boulons mais la liberté reste mon crédo.
En cinq ans, environ cinquante albums sont sortis, soit environ un par mois... Tu t'attendais à un débit pareil ?
Je ne m’attendais à rien… En fait le nombre d’albums n’est pas un critère, par contre, ce sont des albums longs et la performance est plutôt du côté des auteurs, plus de 100 pages par album… Ca fait des pages !!!
Quelle liberté éditoriale possèdes-tu ?
J’ai toute latitude pour faire ce qui me semble cohérent avec ce que je suis finalement… KSTR c’est vraiment la liberté totale, mais encore une fois, je façonne petit à petit et aujourd’hui je veux ouvrir deux grands axes, le premier autour d’auteurs complets, la jeune génération qui prolonge la découverte de Bastien Vivès, sans pour autant chercher de clones comme il y a eu les clones de Sfar, Blutch, Blain… et le deuxième axe, plus axé sur des récits d’aventure action, policier… Mais si on se reparle dans 5 ans j’aurai peut-être encore changé !
Quels sont les liens avec les éditions Casterman ?
KSTR est un label de la maison d’édition Casterman, il n’y a pas de lien à chercher plus loin…
Tu as publié deux albums scénarisés par ton frère, Eric, et deux autres vont bientôt sortir... Comment cela se passe-t-il quand la relation familiale est remplacée par celle d'un employeur avec son employé ?
En tant qu’éditeur, je ne vois pas les auteurs comme des employés et moi encore moins comme leur employeur. Eric est d’abord scénariste, et le fait que ce soit mon frère ne joue pas, quand un scénario est bon, je ne vais le laisser partir chez un autre au prétexte que j’ai un lien de parenté avec le scénariste !... Et avoir deux BORG de plus chez Casterman, ça me semble naturel… après Axel… (référence à Axel Borg dans Lefranc).
Je n'ai rien contre Bastien Vivès, mais j'ai un peu de mal à comprendre la parution de Le Goût du chlore et Polina dans la collection KSTR... Je saisis mal "l'esprit rock" qui sert de fil conducteur à la collection dans ces 2 ouvrages... Une piste pour m'éclairer ?
Qu’on me fiche la paix avec l’esprit rock !
Pour moi Le Goût du chlore ou Polina sont beaucoup plus rock que n’importe quel album sur les zombies. La force de la musique c’est que sous une même bannière on peut avoir différentes tendances, pour moi c’est pareil. Bastien représente une tendance « pop », mais avec son prochain projet : LASTMAN, je vous garantis que le rock sera là et bien là !
Quels sont les albums dont tu souhaites nous parler en particulier (passés, nouveautés, projets) ?
Justement, le projet LASTMAN de Bastien Vivès avec Michaël Sanlaville et Balak va être une tuerie absolue. Ils se sont constitués en studio à la japonaise, ils arrivent à boucler plus de 200 pages tous les 3 mois, on est parti pour une série la plus longue possible avec un univers d’une richesse rarement atteinte dans la bande dessinée franco/belge. Ça va se décliner en jeu vidéo et on prépare tout un tas de surprises… On vient d’ailleurs de boucler le tournage du making of qui sera diffusé sur le net, et pour ça on a fait venir une actrice du Japon, une actrice… un peu particulière… et c’est une star absolue à Tokyo !
Parle-nous un peu de Delitoon, ce site qui a ouvert il y a un peu plus d'un an... Quel est le principe ?
Delitoon c’est un peu le prolongement de ma réflexion éditoriale dans la cour numérique. Alors que tout le monde réfléchit à des formats, de l’interactivité… j’ai décidé de m’intéresser à la dimension médiatique de la BD dans un monde d’écrans.
Comment installer la lecture de BD entre deux vidéos sur youtube et un jeu vidéo en ligne… Il faut pour cela proposer un espace de lecture dédié, qui propose à la fois du choix, de la simplicité d’accès et une véritable logique de programmation, comme à la télé ! Je veux revenir à des formats par épisodes, comme à l’époque des magazines, mais dans un format nouveau et sans se soucier de la référence au papier.
C’est aussi un espace dédié aux talents en devenir puisque l’on peut y poster ses créations en vue de se faire repérer et donc potentiellement éditer…
Quelles sont les perspectives ?
Je travaille au développement de services payants qui permettront donc la répartition de droits, ainsi qu’un service de financement de la création par des dons en partenariat avec ulule.fr, et surtout une version anglaise pour aller titiller nos amis d’Outre-Atlantique avec des artistes de chez nous !
Didier, merci.
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