Auteurs et autrices / Interview de Cécil
Cécil est un dessinateur qui a marqué les esprits avec la série « Le réseau Bombyce ». Il est aujourd’hui sur le devant de l’actualité avec la série « Holmes » qui revisite la légende du fameux détective de la fin du XIXème. Deux bonnes bandes dessinées pour deux bonnes raisons d’en savoir un peu plus…
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Un mètre soixante-dix-neuf, brun avec des lunettes...
Holmes est ton projet d’actualité, nous y reviendrons, mais beaucoup de questions reviennent sur Le Réseau Bombyce dont le dernier tome a été tant attendu. La première d’entre elle est simple, mais implique certainement une réponse plus complexe : Pourquoi autant de temps pour conclure cette histoire ?
Je serai malgré tout succinct : Des difficultés de compréhension et d'entente dès le premier tome avec le scénariste. Un éditeur trop souvent en difficulté. La couleur directe, une des techniques les moins rapides pour ma première série. On mélange tout ça et cela engendre un dessinateur en permanence dans le doute et dans la difficulté pour avancer correctement.
Comment s’est passé la collaboration avec Corbeyran et quelle a été l’implication de chacun dans cette histoire.
J'ai amené le sujet de la série et les deux protagonistes principaux. Puis Eric a proposé une trame de scénario pour le tome 1 que nous avons retravaillé ensemble. Ensuite je dessinais les planches.
Quelle a été la limite, tant au niveau dessin que du scénario en ce qui concerne le côté violent du récit (notamment l’aspect « snuff movie ») ?
La limite se situant dans l'exposition visuelle de la violence, le dosage sur ce plan est toujours lié à la subjectivité de chacun. Autant celle des auteurs que celle des lecteurs.
Dans cette série, la violence est le thème principal. L'ensemble des personnages cherche un moyen de vivre avec ou de s'en débarrasser. Que nous ayons choisi de la montrer ou pas elle est de toute façon omniprésente.
Pour cette série, as-tu utilisé de la documentation pour les décors ?
La doc m'entourait en permanence. Je m'imprégnais d'elle et ensuite je travaillais de mémoire.
D’où est venue l’idée du système de poulies qu’utilisent les deux personnages pour se déplacer sur les toits ?
Nous savions que les personnages devaient se déplacer sur les toits. Eric a eu la riche idée de concevoir une poulie équipée d'un système inspiré par les ressorts de montre. Des ressorts à plat qui se remontent mutuellement en alternance quand un se détend. Un système sûrement impossible à réaliser dans la vraie vie ;-)
Concernant Holmes, quand nous nous sommes vus, tu m’as dit que Holmes était originellement prévue en 9 tomes, mais que des discussions étaient en cours avec l’éditeur pour peut-être se limiter à 6. En sais-tu un peu plus aujourd’hui ? Si cela se fait en 6 tomes, comment va se passer la découpe ?
Ce n'est pas tout à fait ça. La pagination des albums peut être plus importante (pour exemple le tome 3). Ce qui par extension réduirait la quantité d'albums.
Il y a un gros travail sur les couleurs dans Holmes avec une utilisation de la bichromie, quelles sont les raisons de ce choix ?
Avec Luc nous souhaitons rendre la lecture de Holmes réaliste et immersive. Il nous a semblé qu'en utilisant des camaïeux rappelant dans leurs teintes les images d'archives, cela donnerait plus de réalité à l'univers et permettrait de mettre en place, de façon directe et claire, les deux temporalités que nous développons. Quant aux incursions de la quadrichromie dans la série, elle prendra tout son sens à la fin. Pour ceux qui aiment spéculer et tenter de devancer le récit je les laisse à leur déduction hein hein...
Les planches contiennent beaucoup de détails au niveau des architectures, tenues vestimentaires, voire même des navires lors du débarquement à Bordeaux dans le tome 3… J’imagine qu’il y a un travail de recherche énorme ? Sur quoi te bases-tu ? (photos, textes, déplacements sur place etc.)
En ce qui concerne toute l'iconographie cela demande pas mal de recherches. Je m'appuie sur des archives trouvées en bibliothèque (photos, illustrations d'époques etc.) et sur la littérature qui par moment dans ses descriptions me permet de comprendre un objet ou des lieux. Sans parler du cinéma et d'internet.
Pour Londres je m'y suis rendu, de façon à bien comprendre l'ergonomie de la ville.
Dans le carnet de croquis du tome 3, tu nous expliques un peu ton travail… Tu nous montres notamment une planche terminée (celle du débarquement à Bordeaux justement) que tu as complètement refaite parce que tu n’en étais pas complètement satisfait… Ce genre de mésaventures arrive-t-il souvent ?
Sur l'ensemble d'une page, rarement. Les écueils narratifs se voient à l'étape du story-board.
Par contre, il m'arrive souvent de refaire plusieurs fois une case ou deux sur une même planche, en général quand la réalisation s'est effectuée dans un moment de fatigue ou autre...
D’une manière plus générale, tes dessins sont fouillés et très travaillés, combien de temps mets-tu pour réaliser un planche ? Au risque de te faire hérisser les cheveux, mais n’as tu jamais été tenté de moins fignoler tes planches pour gagner en rentabilité ?
La rentabilité est un mot bizarre dans un métier artistique. Ce terme et souvent lié à l'industrie.
Alors effectivement la BD se trouve face à ce dilemme : une réalisation artisanale face à un système industriel pour sa fabrication et sa distribution.
Comme beaucoup dans ce métier (pour ne pas dire tous), je le fais par passion. Donc je ne compte pas mes heures de travail, ni le temps que me prennent mes planches pour soigner le détail. La planche se termine quand je suis satisfait ou épuisé de travailler dessus. Pour l'instant j'arrive à vivre en partie de ce métier. Pourvu que ça dure...
Pour les mêmes raisons, ne fais-tu que de la bande dessinée, ou as tu d’autres activités de dessinateur par ailleurs ?
Je suis enseignant dans une école privée de Bordeaux. L'ESMI (école supérieure des métiers de l'image). J'y enseigne la narration BD.
Cela me permet de sortir de mon atelier et de rencontrer les nouvelles générations de dessinateurs. Un bon moyen pour ne pas me scléroser en dessin comme en pensée.
As-tu d’autres projets dans les tuyaux, ou consacres-tu tout ton temps sur Holmes ?
Je déborde d'idées et d'envies mais je n'ai que deux mains. Pour l'instant Holmes est une bande dessinée exigeante en temps. Que ce soit dans sa réalisation ou dans les recherches qu'elle demande. Donc d'autres projets, oui, mais pas de suite...
Cécil, merci.
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