Auteurs et autrices / Interview de Aurélien Ducoudray
Aurélien Ducoudray est tout jeune en bande dessinée, mais il a su, avec des récits coupés au cordeau et des séries très prenante, se faire une place de choix.
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Bonjour, je suis scénariste, ancien journaliste photoreporter JRi et réalisateur de documentaire
Tu as une longue carrière de reporter. Pourquoi, un jour, t’être mis à la BD ?
En fait je ne crois pas m’être mis à la bd, j’en lis assidûment depuis tout petit, et le journalisme, la photo, la vidéo, c’est raconter des histoires avec des images ! La seule différence c’est que là, en BD, ce n’est plus moi qui fais les images ! Je peux me concentrer sur l’histoire !
Et j’ai aussi rencontré le scénariste Luc Brunschwig lors d’un stage de scénario au festival BD BOUM de Blois qui m’a mis le pied à l’étrier et la tête dans les scénarios !
Ton premier album parle de la vie de Battling Siki, un champion de boxe au parcours très particulier. Pourquoi ce sujet ?
J’ai réalisé 2 documentaires sur la boxe et me suis toujours demandé pourquoi et comment on montait sur un ring, pour se prendre des coups… Battling Siki est une rencontre hasardeuse, dans les notes de bas de page d’une encyclopédie de la boxe !
Comment as-tu rencontré Eddy Vaccaro, ton dessinateur ? D’une manière générale, comment choisis-tu tes dessinateurs ?
Ça dépend ; soit c’est des mariages arrangés (consentants bien sur !) proposés par l’éditeur, soit c’est le fruit de rencontres, sur les festivals ou internet. Je fouine sur internet régulièrement !
Si tu devais refaire cet album, changerais-tu des choses ? Par exemple le rythme ?
J’en ferais un second ! Il y a tant de choses à raconter sur Battling Siki !
Trois ans plus tard te revoilà avec la bio d’un émule de Siki, Victor « Young Perez », à nouveau avec Eddy Vaccaro. La boxe, ta passion ?
Non, pas une passion, un intérêt pour les vies des boxeurs qui en-dehors de la pièce de théâtre qu’est le ring, ont des parcours incroyables.
L’album sort presque en même temps qu’un biopic avec Brahim Asloum dans le rôle-titre. Est-ce un hasard ? As-tu rencontré l’équipe du film ?
Un hasard un peu contrôlé, l’album devait sortir juste après le film, notre éditeur nous a conseillé de finir un peu en avance !
Eddy a rencontré Brahim Asloum lors d’une avant-première ; il a été très touché qu’on lui offre un album. Je crois même qu’il s’est reconnu dans le dessin !
Ton deuxième album, La Faute aux Chinois, est dans une ambiance scénaristique différente, puisqu’il s’agit d’un récit noir, sans concessions, à la limite de la caricature même. T’es-tu inspiré de personnes de ta connaissance pour l’écrire ?
J’ai bossé 3 mois en intérim dans une usine de jambon, chez Madrange pour ne pas les nommer, entre les fours et la salle de réfrigération. 3 mois enrhumé, et à la pause on voisinait avec les tueurs de l’équipe d’en face, avec leur cottes de maille et leurs énormes couteaux ! De sacrés looks très effrayants ! Puis après un café, la franche camaraderie ouvrière ! C’est de cet écart et de ce milieu qu’est né « la faute aux chinois ».
Est-ce toi qui as eu l’idée de cette ambiance ocre ou as-tu laissé de la liberté à François Ravard sur ce plan ?
On était partis sur de la couleur, mais notre éditeur nous a dit que le cœur de l’album n’était pas là. On a donc décidé avec François de conserver une teinte un peu rouillée et un découpage en gaufrier pour accentuer un traitement documentaire
Tu as d’ailleurs resollicité François pour mettre en image Clichés de Bosnie, là encore une surprise, puisque tu te mets en scène dans ce récit d’un reportage réalisé en Bosnie il y a quelques années. Pourquoi avoir tant attendu pour raconter cela en BD ?
Avant la bd, j’ai réalisé un reportage pour un journal, une expo photo, un documentaire de 52 minutes, mais je n’avais pas l’impression d’avoir vraiment raconté mon « sujet » ; c’est Luc Brunschwig, après que je lui aie raconté de nombreuses anecdotes, qui m’a conseillé le récit bd… qui coulait de source ! On peut être dans l’action avec du recul ! Parfait pour cette histoire !
On remarque dans l’album une volonté de « casser » une ambiance morose et dramatique par l’ajout régulier d’anecdotes amusantes ou ridicules. Cette orientation était-elle voulue au départ, ou s’est-elle imposée au fil de l’écriture ?
Voulue et entièrement assumée ! Elle reflète la réalité de l’ambiance de ce voyage, donc aucun intérêt de dramatiser les évènements qui sont déjà bien assez durs comme ça !
Au contraire d’autres épisodes, tu choisis de ne pas en dire trop sur la tragédie du tunnel de Tuzla. Il y a donc des limites à ce qu’on peut montrer ?
Absolument pas, c’est juste que ce tunnel nous n’avons pas pu y avoir accès directement, à mon grand désespoir !!
Es-tu retourné en Bosnie depuis 10 ans ?
Oui, 1 an avant de commencer le récit nous avons refait le voyage avec François (et Arlette) pour qu’il s’imprègne des lieux et des personnages. Ça lui paraissait essentiel pour être crédible côté dessin.
La série The Grocery est intrigante ; c’est ton premier (et seul jusqu’à présent) projet avec un dessinateur présentant des personnages au physique non réaliste. Là encore, était-ce prévu au départ ?
Le look vient du style fou de Guillaume Singelin, par contre la série est un hasard de rencontre total ! J’ai découvert Guillaume sur son blog et ensuite tout s’est enchaîné très rapidement. J’ai écrit le prologue, Guillaume était en stage chez Ankama, Run a repéré son boulot et c’était parti ! Sauf que moi il me restait 110 pages a écrire, sans la moindre idée de ce que j’allais y mettre dedans ! Le style visuel est essentiel pour ce récit, il n’y a qu’avec un tel décalage que l’on peut s’aventurer dans tous ces styles de récit, un style réaliste sonnerait faux !
As-tu, dans ta folle jeunesse de reporter tout-terrain, enquêté sur les gangs des rues de Baltimore ?
Jamais mis les pieds aux USA ! Par contre j’ai les 5 saisons de « The Wire » en dvd !
Békame est pour toi l’occasion de parler d’un autre problème de société plus ou moins invisible, celui des immigrés clandestins. Aujourd’hui le centre de Sangatte est fermé. Quel est ton sentiment sur la question ?
Divisé… un centre d’accueil sur le court terme permet d’accueillir dignement les personnes qui souhaitent passer en angleterre. A long terme ce type d’endroit est un nid fécond pour les filières du crime organisé.
On attend le tome 2 depuis presque deux ans. Où en est-il ?
Il arrive en 2014 !
Gueule d'amour t’a permis de parler d’un sujet difficile, celle des « gueules cassées » de la Grande Guerre. Le ton employé, humoristique, presque burlesque, permet de mieux saisir le dramatique de la situation… A quelles sources as-tu puisé pour traiter ce sujet ?
Sources historiques et récits sur la première guerre mondiale, films, photos…
Le graphisme de Delphine Priet Mahéo est très particulier… Comment as-tu trouvé l’adéquation entre ton propos et celui-ci ?
Delphine était en atelier avec François Ravard, elle m’a envoyé son book et l’histoire s’est imposée comme une évidence en voyant ses dessins très corporels et très torturés…
Peux-tu nous parler un peu de El Paso, sorti en 2012 chez Sarbacane ?
El Paso c’est un jeu de ping-pong avec Bastien Quignon que j’ai découvert avec son premier album « Trois jours en été » ; coup de foudre sur le dessin pour moi, pas envie de travailler avec un scénariste pour Bastien ! Héhé ! Je lui ai donc donné les pleins pouvoirs : j’écris une scène, il peut retoucher et changer ce qu’il veut, il me la renvoie et je peux faire de même encore une fois… Et voilà, El Paso est né comme ça ! Impossible de dire quelles idées sont les siennes ou les miennes ! Une grande liberté et un vrai plaisir de collaboration !
Quels sont tes projets ?
Chez Futuropolis :
« Mobutu dans l’espace », avec Eddy Vaccaro
« Mort aux vaches » avec François Ravard
Chez Ankama :
« The Grocery » tomes 3 (en février 2014) et 4 + une surprise !
Aux Editions Bamboo/Grand Angle :
« Amère Russie », avec Anlor, en mai 2014
« La Balade de Dusty » avec Gilles Aris
« La Malbête », avec Hamo
Et une très grosse surprise aussi !
Chez Delcourt :
« L’anniversaire de Kim Jong Il » avec Mélanie Allag
Chez Sarbacane
« Sixteen Kennedy Express », avec Bastien Quignon, en février 2014
…et plein d’autres envies !! Dont un projet qu’on propose en ce moment aux éditeurs avec Steve Baker : « BOTS »
Aurélien, merci.
C’est moi !!
A voir aussi : le blog de l'auteur
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