Auteurs et autrices / Interview de Gilles Le Coz
Interview de Gilles Le Coz, scénariste et dessinateur de « Yo-yo Post Mortem », qui s’est fait connaître du public grâce à la plateforme de crowdfunding Sandawe, et qui ne compte pas s’arrêter là !
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En costume cravate avec un cigare à la bouche.
Consacres-tu maintenant 100% de ton temps à la BD ou exerces-tu encore ton boulot de roughman ?
Oui j’exerce toujours mon métier de roughman qui me fait vivre.
Pratiques-tu un loisir ou une activité qui n’a rien à voir avec le milieu dans lequel on te connaît ?
Oui l’Aikido, même si j’ai arrêté cette année pour faute de temps je ne pourrais pas m’en passer bien longtemps.
Roughman de métier donc, tu as aussi un penchant pour la calligraphie et l’estampage à l’encre de Chine, dont tu dis apprécier le côté « aléatoire ». Est-ce que parfois, c’est plus le crayon ou le pinceau qui te guide plutôt que l’inverse ? J’ai notamment lu que le principal personnage de Yo-Yo Post Mortem, Monsieur Bône, était un peu né par hasard ?
Est-ce un hasard ? Je ne sais pas. Pour ma part mes idées viennent souvent du dessin, et c’est souvent des dessins insignifiants faits sur un bout de feuille que vient l’idée.
J’ai cru comprendre que tu étais un adepte convaincu du noir et blanc. Pour quelles raisons ? Penses-tu tout de même travailler un jour avec un coloriste ?
Oui j’adore le noir et blanc, on va à l’essentiel, pas d’artifices. Ça ne veut pas dire que je n’admire pas la couleur, hein ! Il y a des choses remarquables. Et si un jour un projet se présente je serai ravi de travailler avec un coloriste. Mais je préfère laisser le soin à quelqu’un de réaliser la couleur, moi, ça m’ennuie.
Quels auteurs t’ont influencé au cours de ta vie ? Certains membres du site voient un côté « Burtonien » dans ta première BD.
La liste des auteurs qui m’ont influencé est longue, je vais citer les premiers que j’ai découverts. Druillet, Moëbius, Comès, Pratt, Hergé, Miyazaki, Mignola, et bien d’autres, mais j’ai réalisé que ce n’est pas seulement le dessin qui me fait apprécier ces auteurs mais surtout leur univers. Ce sont des auteurs qui vous plongent dans un univers bien à eux, des univers fantasmagoriques. C’est ça qui m’intéresse. Pour le coté Burtonien dès qu’on fait un squelette on ne peut pas échapper à l’Etrange Noël de Mister Jack, le film de Tim Burton.
Les ouvrages de Philippe Druillet t’ont aussi influencé. Dans ceux-ci on retrouve également souvent une thématique ésotérique et morbide (La Nuit, Lone Sloane, Yragael, Nosferatu…), un hasard ?
Sûrement que non puisque j’étais un fan inconditionnel de l’univers de Druillet. La différence c’est que je suis dans l’humour, je ne pense pas que mon traité fasse morbide. Si j’étais parti sur un traité plus réaliste là oui, je me serais fait peur.
Pourquoi être passé chez Sandawe ? As-tu contacté d'autres éditeurs qui avaient refusé ton projet ?
Oui j’ai contacté plusieurs éditeurs sans succès, un éditeur était intéressé mais cela n’a pas pu se faire, la personne n’étant pas seule décisionnaire. Et puis Patrick Pinchart de Sandawe m’a fait confiance, je lui ai envoyé le dossier et il a été tout de suite emballé par l’originalité du projet.
L’absence d’assurance de voir son projet aboutir avec le financement participatif doit être quelque chose de stressant. Ce stress a-t-il eu un impact positif ou négatif sur ton travail ?
Non je n’ai pas stressé sur le travail en lui-même d’autant plus que j’avais pas mal avancé sur l’album en amont. En crowdfunding le stress vient plutôt de savoir si les internautes vont être attirés par le projet ou pas, et s’ils vont être suffisamment séduits pour investir sur votre projet. Quand vous voyez que les mises montent vous avez le moral au beau fixe, quand il y a des périodes de creux ça va moins bien.
Au final, la nécessité de créer une animation pour faire vivre et connaître le projet, et les sollicitations des édinautes (comme moi ! :p) ne sont-elles pas trop chronophages ?
Oui c’est assez chronophage, ça demande un minimum de temps en plus pour animer le projet, ça fait partie du « jeu ». Sur Sandawe il y a beaucoup de passionnés de BD qui sont friands de dessins, d’échanges avec les auteurs. Si vous mettez un projet en ligne et pensez qu’il va se financer tout seul, passez votre chemin. Nous avons vu certains projets qui avaient pourtant du potentiel et qui n’ont pas abouti parce que les auteurs n’étaient pas présents, il faut le savoir avant de se lancer dans l’aventure.
J’ai entendu qu’avant Yo-Yo Post Mortem, tu étais dessinateur sur un projet de BD qui n’a pas abouti, était-ce un prémisse de Yo-Yo Post Mortem ou quelque chose de totalement différent ?
Non ce n’était pas un prémisse de Yo-Yo. C’était mon tout premier essai BD. Un scénariste m’avait proposé une collaboration, nous avions présenté le projet aux éditeurs, ça n’a pas abouti. Mais cette personne m’a intégré dans un atelier BD d’auteurs via un forum. C’est grâce à lui que j’ai mis un pied dans le milieu de la BD.
Pour le scénario de Yo-Yo Post Mortem, tu as été influencé par la pièce de théâtre La Mastication des morts, que son auteur, Patrick Kermann, qualifiait « d’une grande joyeuseté, [et d’] une formidable gaieté ». On retrouve en effet un point commun avec ton œuvre, à savoir une certaine dédramatisation de la mort.
Je n’ai pas vu la pièce de théâtre, mais j’ai lu le livre qui m’a beaucoup plu, et forcément influencé dans mon travail.
Pourrais-tu nous éclaircir sur le choix du mot « yoyo » post mortem ? (bon, moi je connais déjà la réponse, mais c’est pour la communauté du site… !)
Il faut dire que c’est devenu un sous-titre, puisque le titre principal de l’album c’est « mourir nuit gravement à la santé ». Yo-Yo parce que dans l’histoire il y a des rebondissements entre la surface et le monde souterrain, et post mortem qui allait de soi.
Le titre Yo-Yo Post Mortem était sur la couverture provisoire sur le site Sandawe, j’avais mis une bulle avec « mourir nuit gravement à la santé », ça a beaucoup plu à l’éditeur qui a préféré mettre en avant cette phrase. Nous avons laissé Yo-Yo parce que les édinautes y étaient attachés.
Dans une case de cet album apparaissent 3 édinautes : étant auteur de BD, ne vit-on pas cette contrepartie comme une certaine contrainte, c’est-à-dire d’être forcé d’insérer des personnages qu’on n’aurait pas forcément mis de prime abord ? Par ailleurs, le fait de devoir respecter la physionomie des édinautes tout en restant fidèle au trait du reste la BD parait être un exercice difficile.
Oui ce n’est pas évident. Dans mon album il ne s’agit que d’une case clin d’œil, donc ça n’a pas trop de conséquences. Ça fonctionne mieux sur des projets plus réalistes où les édinautes s’intègrent plus facilement en tant que figurants.
J’ai vu qu’il y avait même eu des éditions de timbres Yo-Yo Post Mortem, comment cette idée a-t-elle vu le jour ?
C’est Bulle d’encre, qui a proposé à l’éditeur si des auteurs étaient intéressés pour faire une série de timbres. Quelques-uns ont répondu présent, et les timbres ont été édités.
Je crois savoir que tu travailles sur un projet intitulé « Nous irons tous au bois ». Peux-tu nous en dire quelques mots, notamment sur le synopsis ? S’agit-il de la BD qui doit sortir cette année pour les éditions Des ronds dans l’O, écrite par Alain Austini (Rwanda 1994) et Alexis Sentenac, (Les Hydres d'Arès, La Geste des Chevaliers Dragons)
Oui il s’agit d’une BD qui doit sortir cette année chez Des ronds dans l’O, je n’ai pas encore le planning de sortie, j’arrive en fin d’album, il me reste 10 planches à encrer.
L’histoire se passe dans le bois de Vincennes, c’est plutôt une chronique sociale, une histoire de vengeance dans le milieu des SDF. Je suis sur un traité graphique complètement différent de « Mourir nuit gravement à la santé ». C’est ce qui m’intéressait aussi.
Tu as travaillé en solo sur Yo-Yo Post Mortem, comment vis-tu dorénavant le fait de travailler en équipe ?
Je suis ravi, c’est une nouvelle expérience qui se passe très bien et qui est très enrichissante. Alexis, que je connais depuis longtemps via l’atelier, est un talentueux dessinateur, il m’apporte son regard sur certaines planches, quant à Alain le courant est bien passé tout de suite. Je suis donc sur cette BD un peu Alextérieur et Alaintérieur si j’ose dire.
Si tu avais le choix, avec qui aimerais-tu travailler à l’avenir ?
Faisant mes premiers pas dans le milieu de la BD je ne connais pas suffisamment de personnes. Dans tous les cas j’aime rencontrer les personnes avec qui je me lance, après ça se passe au feeling.
Merci beaucoup Gilles, au plaisir de te relire !!!
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