Auteurs et autrices / Interview de Tarek et Aurélien Morinière
Tarek est l’un des scénaristes qui montent en puissance à l’heure actuelle. Ses écrits permettent aux Editions Emmanuel Proust, notamment, de sortir beaucoup d’albums chaque année. Aurélien Morinière est l’un des dessinateurs avec lesquels il travaille régulièrement.
Voir toutes les séries de : Aurélien Morinière - Tarek
[Aurélien] : C’est faisable, je pense. Aurélien Morinière, Auteur/Illustrateur de BD, en exil dans la campagne creusoise après une existence de banlieusard puis de Parisien indécrottable. Des études en arts appliqués puis une Maîtrise d’arts plastiques. Je me consacre depuis à un métier de Fainéant (j’aimerais bien), d’argent facile (aussi) et de vice (…).
[Tarek] : J’ai commencé la bande dessinée en 1999 en signant deux contrats chez Vents d’Ouest, un éditeur que je ne connaissais pas à cette époque. J’avais déjà sorti un livre d’art en 1992, ce qui m’avait permis de connaître le monde de l’édition et ses rouages…
Après de longues études à la Sorbonne et de nombreux voyages, je me retrouve embarqué dans l’aventure BD avec Ivan puis très rapidement avec Aurélien, un compagnon de la première heure, une sorte de résistant du 18 juin… Je suis scénariste à temps plein par choix, et ce depuis le début.
Tarek, tu as un passé d’étudiant en histoire, et tu as enseigné le Français en Syrie. Comment es-tu venu à la bande dessinée ?
Par hasard…
La porte était ouverte et je suis entré…
Sans exagérer, je suis arrivé à ce medium sans passer par les fanzines et sans connaître la bande dessinée des années 80/90. Le premier éditeur chez qui j’ai signé était inconnu pour moi, tout comme les autres à part Casterman et Dupuis. Je me suis dit après avoir signé deux contrats : « Tarek, tu dois apprendre à connaître ce milieu et ses auteurs ! »… Je me suis donc mis à lire beaucoup de BD et à discuter avec les auteurs que je rencontrais en festival pour mieux cerner ce monde étranger pour moi. Je me suis fait des amis et j’ai découvert une richesse parmi mes collègues : ce monde est génial !
Je possède une énorme bibliothèque et depuis cette fameuse année 1999, la partie BD a pris de la place… Comme j’aime bien faire les choses à fond, j’ai décidé de me consacrer à l’écriture à plein temps, au risque de mal vivre au début.
Tu as également été photographe. Est-ce que cette passion t’aide à réaliser des story-boards pour tes dessinateurs, ou leur laisses-tu une grande liberté ?
[Tarek] La photographie me permet de bien comprendre les cadrages et certainement me donne l’occasion d’avoir une écriture qui le cas échéant peut être plus visuelle que pour d’autres. Cela m’a aidé à mettre sur pied quelques histoires au début : le dessinateur du Professeur Stigmatus (Pointe Noire) m’a demandé de lui préciser les cadrages et le dessinateur des Cavaliers de l’Apocalypse (Theloma) m’a demandé un story-board. Dans ces deux cas précis, ma pratique de la photo a servi mon récit et ma manière de leur apporter des précisions.
En règle générale, les dessinateurs avec qui je travaille réalisent leur propre story-board : nous en parlons, j’apporte des précisions au moment de l’écriture si je pense qu’un plan est important, sinon ils sont libres ! Le récit est plus dynamique de cette manière.
Aurélien, tu as une formation de dessinateur et graphiste. Tu es passé par le fanzinat, le land art et tu as même essayé le cinéma d’animation. Que retires-tu de ces différentes expériences ?
Toutes les expériences artistiques permettent de relativiser ce qu’on fait en bande dessinée, de digérer peut-être plus facilement nos influences.
Le fanzinat a été une expérience assez brève. Je ne crois pas avoir appris beaucoup sur la manière dont on peut aborder la bande dessinée par ce biais d’abord parce que nous étions jeunes, pleins d’enthousiasme mais très velléitaires.
Pour ce qui est du land art, cela correspond à ma période universitaire. Cela va de pair avec mon éducation artistique. J’ai été très attiré par le minimalisme, le land art. Des choses simples, efficaces. En fait, selon moi, dans le domaine artistique, lorsqu’on veut exprimer des choses complexes il s’agit d’utiliser une forme la plus simple possible. J’ai conscience de la difficulté d’accès de l’art contemporain. Il m’a été accessible par les formes simples, sans filtre avec l’intention de l’artiste. Je me suis épanoui avec le land art qui ma entraîné à faire des installations de plusieurs centaines de mètres de long sur les plages de la baie de Somme. Le contact avec la nature a été déterminant dans mon attirance pour le land art. Le jeu de l’art et de la nature m’a donné des sensations fortes.
Si je parle de ça c’est que ce souci de simplicité, je le perçois parfois dans mon travail actuel. Un récit complexe demande selon moi le plus de clarté possible. Je ne parle pas forcément du dessin. Si vous regardez mon travail, vous constaterez peut-être que mes planches sont organisées de manière plutôt classique. Je redoute de noyer le lecteur dans des compositions complexes, des agencements de cases spectaculaires. Pour moi, c’est le récit qui compte et je suis, comme Tarek avec sa plume, à son service, quitte à sacrifier certains effets de style.
Quant au cinéma d’animation, il m’a tout simplement permis de comprendre à quel point la bande dessinée est libre. On peut faire beaucoup de choses dans le cinéma, et je continue à faire des choses dans ce domaine, mais la BD permet de faire des choses énormes en termes d’histoire, avec peu de moyens et de A à Z en maîtrisant toutes les étapes de la création. C’est fantastique et ça n’existe que dans la BD selon moi.
Tarek et Aurélien, comment vous êtes-vous rencontrés ?
[Aurélien] : Presque par hasard. En entrant à l’université, j’avais sérieusement mis de côté l’idée de faire de la BD qui me poursuivait depuis l’enfance. J’ai eu vent du fait que Tarek cherchait des crayons pour illustrer sa plume par un ami commun. Et je l’ai rencontré plus par curiosité que par réel fantasme pour la BD. En fin de compte, notre vision de ce moyen d’expression a rapidement convergé. J’étais complètement disponible, c’est ce qui m’a permis de saisir l’opportunité et de m’investir dans son apprentissage, parce que c’était de ça qu’il s’agissait pour moi.
[Tarek] : Nous nous sommes rencontrés dans un rade pourri de la Porte de Brancion (Paris), ambiance Tontons flingueurs avec une forte odeur de « Gitane maïs » dans l’atmosphère et une patronne à l’ancienne, un serveur tatoué et un Berger allemand mourant encore sur ses gardes…
Comment ne pas sauter le pas et se mettre à travailler ensemble après une telle rencontre ? Ce jour est important pour moi, car notre collaboration a commencé à ce moment-là !
Tarek, tu as sorti 24 albums en quelques années, et ceci chez 6 éditeurs différents ! Comment expliques-tu cette diversité éditoriale ?
Elle s’explique assez facilement. J’ai appris à faire de la bande dessinée en faisant des albums. Vent d’Ouest a été mon premier éditeur et notre relation n’a pas donné de suites après la sortie du tome 2 du Prophète de Tadmor, l’éditeur Pointe Noire a disparu et nous avons changé d’éditeur après sa disparition. Soleil, après avoir lancé la collection jeunesse a décidé de l’arrêter sans donner de raisons valables : les titres se vendaient, la qualité, le public et la presse étaient au rendez-vous mais l’éditeur a préféré tout arrêter pour se consacrer à des titres plus importants comme Les Blondes et autres BD « essentielles ».
Theloma, Mosquito et bien sûr EP éditions sont mes maisons d’édition du moment ! Emmanuel Proust est un éditeur qui travaille avec nous et suit nos projets. Grâce à lui, nous avons pu relancer la collection jeunesse avec de nouveaux titres et rééditer les anciens comme Monsieur Lune (1er tome des Aventures d'Irial) … Cette collaboration est enrichissante et m’apporte la force d’écrire de nouvelles histoires.
Aurélien, Tarek a scénarisé 6 séries différentes pour toi, en l’espace de 6 ans. Comment peux-tu dessiner aussi rapidement ? Tu as monté un atelier clandestin ?
Hé, hé ! C’est marrant ce que tu me dis là, c’est à peu près le commentaire que me fait notre éditeur actuel. Studio Morinière. Je crois que nous ne sommes vraiment pas égaux quant à notre vitesse d’exécution. C’est très variable selon les personnes. Je pense que parfois certains éditeurs doivent être tentés de pousser tout le monde à pouvoir pondre deux ou trois bouquins dans l’année. Ce serait assez pervers et plutôt contre-productif.
Pour ce qui me concerne, je ne sais pas ! Je dessine peut-être rapidement, je ne sais pas trop, je suis paumé dans la campagne et je n’ai pas de référence en la matière. Il ne s’agit pas de faire la course. Mais pour être franc, il faut bien manger, et faire des pages de BD me fait vivre. J’ai une famille et je dois assurer un minimum pour pouvoir offrir un peu de confort à tout ce petit monde. Ma femme m’a suffisamment entretenu durant mes débuts pour que j’essaye de lui épargner ça maintenant. Ça c’est pour la partie bêtement matérialiste.
Pour le reste, je m’ennuie rapidement, j’ai besoin de pression pour avancer, autrement je peux partir dans des directions assez peu productives. Je crois que c’est le cas dans beaucoup de métiers artistiques.
J’essaye de faire un livre jeunesse et un livre adulte dans l’année, dont je fais la couleur. L’album jeunesse est mis en couleur par un coloriste, en l’occurrence Svart. En 2006 si autant de livres sont sortis, c’est que certains étaient commencés et en attente, mais c’est vrai que le rythme était soutenu.
Aurélien, tu n’avais aucune expérience de coloriste, mais finalement c’est toi qui as fait les couleurs de certains de tes albums, avant de laisser la main à ton compère Svart. Tu n’étais pas satisfait de ton travail ?
Non, il ne s’agit pas de ça. J’avais envie de m’investir dans les couleurs de Tengiz. Une grosse frustration par rapport à ce livre faisait que j’avais besoin de le voir exister rapidement. Or, nous avions déjà commencé à travailler sur la jeunesse chez EP et je ne pouvais pas tout faire (eh non). Alors j’ai fait appel à un coloriste pour les livres jeunesse, me laissant tout le temps d’aboutir Tengiz comme je l’entendais.
C’est difficile de déléguer parfois, mais je crois aussi que j’avais besoin de ça. Ca permet de rester humble par rapport à son boulot, de le laisser être pris en main par quelqu’un d’autre. Pouvoir s’exprimer sur ce qu’on attend sans brider le développement de l’univers d’un coloriste est assez délicat, mais c’est enrichissant. On est des chiants avec nos petits gribouillis, on veut ci, on veut ça, « ne touche pas à mon dessin !! ». Travailler avec un coloriste peut-être très enrichissant parce que ça oblige à se tenir pour ne pas passer pour un lourdingue obtus. Ça peut aussi mal se passer. C’est une question de caractère, je suppose. En plus, en BD, comme on travaille souvent seuls, les rapports humains ce n’est pas toujours notre truc.
Comment passes-tu d’un style « jeunesse » à ton trait plus adulte ? Réalises-tu tes albums en même temps, ou les uns après les autres ?
[Aurélien] J’ai essayé de faire les deux en même temps, mais ça s’est avéré impossible. Mais pas à cause du style. C’est plus une question de gestion du planning. Je suis l’antithèse de l’organisation et j’ai un cerveau de poisson rouge (avec le mémoire qui va avec). Je suis un besogneux. Pour bien travailler j’ai besoin de travailler longtemps. C’est pour ça que je vais vite aussi peut-être… Et c’est pour ça que répondre à cette interview me met à la bourre sur le tome 2 de Tengiz. Il faudra que vous contactiez mon éditeur pour lui expliquer.
Sinon, changer de style ne présente pas vraiment de souci. L’important étant l’histoire, il faut trouver le meilleur moyen à disposition pour la servir.
Je ne suis pas partisan (évidemment) du formatage des styles en BD. Je trouve ça important qu’un auteur parvienne à digérer ses influences pour s’exprimer de manière personnelle et ce même dans la BD populaire qui est mon domaine. Ce n’est pas du snobisme, c’est une question d’épanouissement artistique. Je ne sais d’ailleurs pas encore si je suis parvenu à m’exprimer librement… C’est quelque chose que les auteurs voient assez mal je pense.
Cependant, je n’adhère pas non plus à l’idée qu’un auteur doit avoir un trait et s’y tenir. C’est encore une question de liberté et aussi, encore une fois, de service rendu à une histoire. J’ai la chance de travailler avec un scénariste qui ne m’oriente pas vers un style de récit précis. Ça me fait progresser et j’en ai besoin.
Tarek, si l’on se penche sur ta production, on remarque deux grosses tendances : les séries historiques et les contes classiques, détournés à ta façon. Le reflet d’un manque ou une envie de t’amuser ?
Pour être plus précis, je dirai que j’ai sorti autant d’albums adultes que jeunesse. En revanche, les histoires qui ont le plus marqué à ce jour sont, en effet, un conte, Les 3 petits cochons, et une série d’espionnage se déroulant pendant la seconde guerre mondiale, Sir Arthur Benton.
Comment t’est venue l’idée de détourner ces classiques de la littérature pour enfants, directement ou en les croisant comme dans Les Aventures d’Irial ?
[Tarek] J’adore lire des contes depuis mon enfance… En écrivant Monsieur Lune, j’ai voulu introduire des personnages de contes pour rendre le récit plus onirique et annoncer la suite car j’avais déjà l’idée de faire une histoire où le rôle des protagonistes (le loup et le chaperon rouge) était inversé. C’était un début… Avec les trois petits cochons, nous sommes passés à la vitesse supérieure en modifiant la structure et le déroulement du conte originel. Cette envie est ancienne de montrer à travers les contes les problèmes de notre société. N’est-ce pas le rôle de ce type de récit ?
Aurélien, Irial est le prénom de ta fille, et c’est Tarek qui t’a proposé de donner ce prénom à l’héroïne de cette série… En retires-tu de la fierté ?
Evidemment. Si je fais de la BD, c’est grâce à ma famille, à ma femme et à mes filles. Je suis un vieux flemmard. Si je n’avais personne à qui prouver ce que je sais faire, je serais affalé sur un canapé à me gaver d’inepties télévisuelles comme une vieille larve. On fait de la BD pour les lecteurs, parce qu’on a envie de raconter des histoires. Mais ça ne peut pas être la seule motivation car elle est abstraite jusqu’à la sortie du livre et notre intervention lors des salons et festivals. Moi si je fais de la BD, c’est aussi pour ceux que j’aime. J’ai hâte que mes filles soient assez grandes pour les lire.
Démon Yäk a été publié chez Pointe Noire, puis terminée chez Soleil… Visiblement la disparition de cet éditeur t’a marqué…
[Aurélien] Oui, c’est forcément difficile. Dans cette première discussion qui a été le début de notre collaboration avec Tarek, nous avions cette idée de l’intérêt de voir un éditeur se développer et exister. C’est un bon coup de hache quand on se rend compte que le bateau fait naufrage alors qu’on vient d’arriver dans le milieu. Ça permet d’apprendre des choses sur le comportement humain, a posteriori, bien entendu. Sur le moment, on est forcément bien flippé en se demandant où ça va mener.
Dans ces cas-là, on est content d’être deux... On s’est soutenu mutuellement avec Tarek. Si j’avais été tout seul, j’aurais échoué avec le bateau certainement. C’est juste dommage.
Tarek, parlons du volet « historique ». Quelle est ta période préférée de l’Histoire ?
Ma période historique préférée est de loin le Moyen âge… J’ai fait des études d’histoire médiévale à la Sorbonne et pourtant, à ce jour, je n’ai pas encore écrit de scénario sur cette époque. J’y pense sérieusement depuis quelque temps… En 2008, une série dessinée par Eddy Vaccaro sur le sultan mamelouk Baybars sortira dans la collection Trilogie chez EP éditions : Le sultan Baybars. Ce récit qui se déroule en orient au Moyen âge est avant tout une geste populaire mettant en avant le personnage de ce sultan… J’ai d’autres projets, mais je n’en dirai pas plus, je travaille dessus.
Tu as lancé récemment plusieurs séries ambitieuses chez EP : Sir Arthur Benton, Tengiz, Le Tsar Fou… Et le public semble suivre.
[Tarek] En effet, le public est au rendez-vous et j’en suis très content. Sir Arthur Benton touche de plus en plus de lecteurs tout comme Raspoutine dont le second tome vient de sortir. La collection jeunesse rencontre également un réel engouement tant chez les enfants que chez les institutionnels. Cet éditeur me donne la possibilité de proposer des histoires ambitieuses, il est à l’écoute et s’investit pleinement dans nos projets… Que demander de plus !
Tarek et Aurélien, Tengiz devait au départ être publié chez Soleil… Que s’est-il passé ?
[Aurélien] Je crois qu’il n’est pas vraiment utile de rentrer dans les détails. Comme pour Pointe noire, c’est une expérience qui permet d’apprendre sur les gens. Je crois qu’il n’y avait plus de volonté de la part de cet éditeur de défendre notre travail. Pour des raisons qui nous échappent, certaines politiques, humaines, on n’en sait fichtre rien… Peu importe finalement. Il y a d’autres personnes pour qui ça se passe bien chez Soleil. Je ne regrette pas d’avoir collaboré avec eux et je ne regrette pas que Tengiz soit fait ailleurs. Je suis juste surpris de comportements nous concernant, contre-productifs et stériles, de la part de cet éditeur. Passons, mais ne repassons pas.
[Tarek] Nous avons quitté cet éditeur parce qu’il ne souhaitait plus défendre notre travail – l’a-t-il défendu au début ? Je n’aime pas la polémique et encore moins les accusations gratuites, mais je dirai que l’éditeur de cette maison d’édition et nous autres n’avions pas les mêmes envies éditoriales. Voilà…
Parlez-nous un peu de Baudelaire ou le roman rêvé d'E.A. Poe, publié chez Mosquito. Ça ressemble à un pari, non ?
[Aurélien] Qu’est-ce qu’on gagne ? Nous avons en commun avec Tarek une grande admiration pour cet éditeur et pour tous les auteurs de leur catalogue. Regardez- moi ça, ça file les jetons ce catalogue !! Je suis absolument en admiration devant le travail de Sergio Toppi par exemple. Alors oui, ça pourrait ressembler à un pari. Mais le contact a été très constructif. Le livre a mûri longtemps. Il est passé par des mutations fondamentales. Au début axé sur Baudelaire et son univers poétique, Poe a pris la place l’air de rien. Le personnage principal de ce livre, c’est Poe, pas Baudelaire, Baudelaire n’est qu’un outil. Ça a pris du temps, et L’éditeur a été d’un conseil précieux. Nous sommes très fiers d’être dans ce catalogue, même si, pour ma part, je me demande encore ce que je fiche là et que j’aimerais tout refaire pour être à la hauteur… Mais ça pourrait être long.
[Tarek] Aurélien résume parfaitement ce que je pense concernant ce projet et cet éditeur… Je voulais tout simplement ajouter que nous avons obtenu le prix BD au salon du livre de Limoges cette année (mars 2007).
Tarek, tu as eu la bonne idée d’inclure des dossiers à la fin de chaque tome de la série Sir Arthur Benton, réalisé avec Stéphane Perger. Par souci de didactisme ?
Au départ nous voulions proposer ce dossier avec la première édition, mais le retour favorable des lecteurs, des libraires, des amateurs BD et des CDI nous ont poussés à garder le dossier pour toutes les éditions suivantes. Le second tome a également un dossier explicatif tandis que le dossier du tome 3 fait partie intégrante du récit et ne se lit qu’à la fin. Le souci de didactisme ainsi qu’une envie de préciser des choses et de donner des pistes pour mieux cerner cette période ont certainement été le moteur pour réaliser les dossiers.
Rétrospectivement, je pense que cela sert aux lectrices et lecteurs qui ont oublié ou ne connaissent pas bien ce moment tragique de notre histoire. Emmanuel Proust nous a donné carte blanche à Stéphane et moi quand nous lui avons proposé de le faire car au départ je n’y avais pas pensé ; mais en écrivant le scénario du tome 1 je me suis dit qu’il fallait faciliter la lecture avec un support didactique.
J’ajouterai que j’ai pris du plaisir à le faire et la mise en page de Stéphane est splendide.
Quel(s) point(s) commun(s) pourrait-on trouver entre toutes tes séries ? Certains ont relevé une présence plus ou moins consciente de l’Orient, mais y’en a-t-il d’autres ?
[Tarek] L’Orient certainement, l’envie de mettre en avant des valeurs qui me tiennent à cœur comme la justice et la tolérance, peut-être aussi la République et la laïcité… Certaines de mes séries n’ont aucun rapport avec ces choses énoncées plus haut, mais elles participent de mon imaginaire et je les ai écrites avec autant de plaisir que les autres… Derrière chaque album, il y a une rencontre qui m’apporte de la force et l’envie d’écrire. Le point commun qui me semble évident est la qualité graphique et l’excellence de la mise en couleur de mes albums – un ou deux titres sont plus « faibles » mais ils correspondent à des premiers albums où tout était à faire. Il m’arrive souvent de l’entendre de la part de lectrices ou de lecteurs lors de salons, c’est pour cette raison que je peux l’avancer même si je le pense. Pour ne citer qu’un exemple, Batist est un jeune dessinateur qui a fait « ses armes » sur Les Chaussettes trouées, son dessin a évolué, sa couleur est splendide depuis le tome 1… Notre prochaine série jeunesse sera encore meilleure : il a progressé et cela se verra à ce moment-là !
Quels sont les auteurs qui vous inspirent ? Que vous admirez ?
[Aurélien] J’ai déjà parlé de Sergio Toppi qui est un Maître. J’ai toujours admiré Moebius/Giraud. Son côté touche-à-tout est fascinant. Ce type sait tout faire et le fait sans complexe. J’aime Beaucoup Mucha, ce type aurait fait de la BD de nos jours, c’est certain.
[Tarek] A vrai dire, j’aime beaucoup de genres différents et si je devais retenir un scénariste ce serait Goscinny et un dessinateur Battaglia. Mon album préféré reste "les Ethiopiques" de Pratt et la série qui m’a marqué étant jeune reste Les Tuniques Bleues.
Kukri, votre dernier projet officiel, semble prendre la suite de Tengiz. Un petit scoop ?
[Aurélien] Ah non, Kukri c’est le nom que portait le projet à un moment donné. Il s’est appelé « Le Kukri des véridiques », « Le Koukri des véridiques » (demande de l’éditeur de l’époque pour des raisons de lisibilité (sic)), « Kukri »… Et puis Tengiz en passant chez EP.
Pour ce qui est de la Trilogie qui suivra Tengiz, car il y en aura une puisque l’histoire a été écrite pour 6 tomes, nous n’avons pas encore de nom.
[Tarek] Pour aller dans le sens de mon camarade, j’ajouterai que le second cycle a été pensé dès le départ et qu’il nous permettra de développer cet univers que nous avons créé. L’épopée est un mode narratif qui nous permet de faire des aventures qui s’imbriquent dans le récit initial sans le rendre morne ou vide de sens. Il y aura beaucoup de femmes dans ce second cycle, une trilogie plus féminine, pendant du premier cycle où les mâles sont omniprésents.
Quels sont vos projets ?
[Aurélien] Ensemble : Tengiz tome 2 sortira à la rentrée, nous souhaitons qu’il paraisse sur un rythme annuel. Le petit Mamadou poucet arrivera l’hiver prochain dans la collection EP jeunesse.
Ensuite, nous ne savons pas encore dans quel ordre nous allons donner vie à nos projets. Il y aura un Agatha Christie, un projet de science-fiction onirique en one-shot que nous coscénarisons tous les deux qui interviendra peut-être entre le 1er et le 2ème cycle de Tengiz. Il y a aussi un tome 3 pour "Irial" que nous ne savons pas où caser et d’autres choses un peu floues encore pour en parler.
[Tarek] Aurélien a bien énoncé nos projets en commun… Du travail en perspective !
Sinon, pour ma part le tome 3 de Raspoutine est terminé et sortira fin 2007 ou début 2008 au même moment que le tome 1 de Baybars. T. E. Lawrence (Lawrence d’Arabie) est prévu pour la fin août chez EP, le tome 3 des Chaussettes trouées en novembre, le tome 3 du Tsar Fou en octobre et un collectif jeunesse en fin d’année avec Aurélien, Chouin et Gomez Montero. Je travaille sur le second cycle de Sir Arthur Benton qui se déroulera de 1946 à 1954… Mais pour le moment, je ne peux en dire plus !
Vous connaissez tous les deux le site BDTheque. Quel message voulez-vous faire passer aux habitués ?
[Aurélien] Continuez à lire et à chroniquer. Aimez nos bouquins ou détestez-les !
Soyez corrects car même si les auteurs ne sont pas toujours au top, ils bossent toujours de bon cœur (enfin j’espère). La critique, c’est le jeu, on n’y coupe pas. Merci de nous lire.
[Tarek] Lire, encore lire et toujours lire… Pour pouvoir rêver, partager et en parler aux autres !
Tarek et Aurélien, merci.
Plus de photos d'installation de land art intitulées "Punctum, sillage" : 1 - 2 - 3 - 4 - 5 - 6 - 7
Site réalisé avec CodeIgniter, jQuery, Bootstrap, fancyBox, Open Iconic, typeahead.js, Google Charts, Google Maps, echo
Copyright © 2001 - 2024 BDTheque | Contact | Les cookies sur le site | Les stats du site