« Aventures en Chartreuse » est une superbe série jeunesse initialement créée afin de faire connaitre le massif de Chartreuse aux enfants. Entretien avec les deux auteurs, Muriel Zürcher et Nicolas Julo.
Bonjour Muriel, bonjour Nicolas, pourriez-vous vous présenter s’il vous plaît ?
Muriel : Née au siècle dernier, mais pas encore fossilisée, j’écris pour les enfants et les ados, des BD et plein d’autres sortes de livres ! Ça fait 15 ans que ça dure, après une tout autre vie professionnelle, et ça me plait.
Nicolas : Je suis né à Paris au siècle dernier moi aussi, mais j’ai quitté la capitale il y a 20 ans pour venir établir mon camp de base près de Chambéry, au pied des montagnes. Je suis illustrateur depuis 30 ans. J’ai commencé dans la pub, puis j’ai travaillé de nombreuses années dans la presse et l’édition jeunesse. Et maintenant, je fais de la BD !
Les Aventures en Chartreuse est votre premier projet commun. Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Muriel et Nicolas : Notre première rencontre s’est faite par l’intermédiaire de l’éditeur jeunesse Rageot, en 2006. Muriel publiait son premier roman (Papa est un superhéros) et la directrice artistique avait choisi Nicolas pour l’illustrer. On a fait connaissance, et le courant est passé.
Parlez-nous un peu de vos Aventures en Chartreuse.
Muriel : Cette série de BD est une aventure en elle-même ! Tout a commencé en 2015 avec le lancement par la maison du Parc de Chartreuse d’un marché public pour constituer une équipe dessinateur-scénariste-éditeur afin de faire une BD destinée à faire connaitre le massif de Chartreuse aux enfants.
Nicolas a eu vent du projet, m’a passé un petit coup de fil, on a candidaté, et hop ! c’était parti.
Les objectifs du premier tome étaient triples : avoir une histoire qui permette de faire découvrir plusieurs lieux emblématiques de Chartreuse d’une part, et faire en sorte qu’elle soit vraiment lue par les enfants d’autre part. Pour ça, on a pris ensemble le parti d’une aventure drôle, divertissante et pleine de suspens. J’ai donc travaillé sur une chasse au trésor avec Alex et Meylie, des héros pleins de qualités et de défauts, qui affrontent de vrais méchants ! Et comme Nicolas connait le massif de Chartreuse sur le bout des doigts (de pieds), on peut désormais visiter les lieux avec la BD en guise de guide !
Le troisième objectif était documentaire. Il a été rempli par un cahier de jeux en fin d’album écrit par l’association « Histoires de… ».
Ce premier tome a rencontré un tel succès, que l’idée d’en lancer un deuxième n’a pas tardé à germer dans l’esprit de Michel Jans, l’éditeur. Nicolas était partant, moi également, donc, hop ! c’est reparti. Dans le deuxième tome, c’est l’hiver, et les méchants enlèvent des animaux sauvages pour les vendre au marché noir. Autant dire qu’Alex et Meylie doivent se dépasser pour les arrêter !
On sent dans vos albums un amour certain pour la montagne de manière générale, et pour le massif de la Chartreuse en particulier. On retrouve notamment des villages réels, des sommets connus, etc. Parlez-nous un peu de votre rapport avec la montagne.
Nicolas : Dès que je quitte ma planche à dessin, je file en montagne me défouler et me ressourcer, en Tarentaise, Maurienne, Belledonne et bien sûr en Chartreuse. J’aime bien ce massif, je le parcours régulièrement à pied l’été et à skis de rando l’hiver. Je le connais même de l’intérieur puisque j’y ai fait pas mal de spéléo également.
Muriel : J’habite en Savoie, à Aix-les-Bains, donc la montagne est là, toute proche. Toujours belle, parfois dangereuse.
Nicolas, en rapport aux lieux réels des histoires : travailles-tu à partir de livres/photos, ou te déplaces-tu en personne pour « croquer » les paysages ?
Les 2. J’utilise pas mal les photos que j’ai faites lors de mes randos et ce que je trouve sur Internet. Mais il m’est arrivé de me déplacer sur le terrain pour plus de précision.
Muriel, les thématiques du troisième album sont plus « lourdes de sens », si je puis dire (occupation, résistance, rafle de juifs, etc.) Il y avait-il une volonté consciente d’introduire un background plus ancré dans l’Histoire ? Les prochains tomes vont-ils explorer d’autres périodes historiques ?
Muriel : C’est Michel Jans qui est à l’origine de ce troisième album. Il souhaitait aborder cette période historique de la Seconde Guerre mondiale, quand les Allemands viennent remplacer les Italiens comme force d’occupation, en restant localisé en Chartreuse, plus particulièrement autour de Pont-de-Beauvoisin.
Pour moi, aborder cette période en restant à hauteur d’enfant était un challenge intéressant. Il s’agissait d’écrire une histoire divertissante, avec des notes d’humour et des moments d’émotion, mais sans laisser la thématique de la guerre prendre trop de place, ou au contraire devenir anecdotique. En choisissant de raconter comment deux enfants vont cacher un petit veau orphelin pour le sauver des mains du boucher, j’ai fait un petit pas de côté qui m’a permis d’aborder la présence des enfants cachés, l’occupation allemande, la place de la milice, les difficultés de la guerre, le marché noir, etc. Nicolas a dessiné l’ensemble avec sa maestria habituelle.
Les tomes 1 et 2 sont publiés en partenariat avec le Parc Naturel de la Chartreuse. Comment s’est créé ce partenariat ? En quoi consiste-t-il exactement ?
Muriel et Nicolas : Sans la maison du Parc Naturel de Chartreuse, cette série n’aurait pas vu le jour. C’est à leur initiative qu’on a commencé le travail. Et c’est grâce au partenariat financier conclu avec l’éditeur qu’on a pu le poursuivre.
Nos interlocutrices, les deux femmes qui s’occupent du projet BD au sein du parc, ont été une source d’enrichissement pour les deux premiers tomes. Elles connaissent le territoire sur le bout de doigt, non seulement l’aspect géographique, mais aussi patrimonial, culturel, historique… Cela a permis dès le départ de disposer d’une base d’éléments documentaires inspirante et très diversifiée.
Elles font également vivre ces albums au quotidien sur le territoire de Chartreuse grâce aux nombreuses activités de médiation conduites par Nicolas dans les écoles, dans le cadre d’atelier BD.
Comment s’est passé votre rencontre avec Michel Jans, des éditions Mosquito ?
Muriel : On s’est rencontré après que la maison du Parc a choisi de nous faire travailler ensemble… autant dire qu’on appréhendait un peu ! Et puis on a bu une bière, on a fait connaissance, et on s’est dit que ça allait le faire.
Nicolas : En fait, c’est le parc qui nous a mis en contact. Michel ne me connaissait pas et il était un peu méfiant au début, mais une fois qu’on s’est rencontré, il a bien aimé mon dessin et l’entente a été parfaite pour la suite.
Quels sont vos projets actuels ou futurs ?
Muriel : Grosse réflexion en cours sur une nouvelle aventure d’Alex et Meylie, avec la montagne en toile de fond, bien sûr ! Mais on n’en est encore qu’aux prémices. On vous tient au courant !
Nicolas : Entre 2 albums sur la Chartreuse, j’ai sorti en juin dernier une BD aux éditions Boule de neige,
Hector Krapahutt et le Mont Inaccessibilis, en tant que scénariste et dessinateur. En ce moment, toujours sur un scénario que j’ai écrit, je travaille sur un gros projet de BD historique sur l’alpinisme. Et on réfléchit bien sûr avec Muriel pour continuer notre collaboration sur d’autres aventures en Chartreuse. Donc plein de projets en perspective !
Muriel, Nicolas, merci !
Merci Alix !