Auteurs et autrices / Interview de Nicolas Jarry
Nicolas Jarry est l’un des jeunes auteurs qui montent. Aventures historiques, fantasy, thriller, science-fiction, rien ne lui échappe !
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Nicolas Jarry, 30 ans, j’ai commencé par des études de biologie. J’ai écrit un bouquin, j’ai été édité, puis j’ai rencontré Jean-Luc Istin, éditeur chez Soleil, et je suis parti vers le scénario comme ça. Tout s’est fait un peu par hasard. J’ai quitté la fac pour écrire, parce que j’en avais réellement envie, mais après je n’ai pas spécialement cherché à intégrer l’univers de la BD. C’est vraiment au hasard des rencontres, avec Istin, mais aussi Christophe Arleston que j’avais rencontré par le biais du livre.
Tu es d’abord un écrivain, et tu t’es en premier distingué dans la fantasy, genre pourtant bien bouchonné ces dernières années. Tu n’as pas craint que ton premier roman soit noyé dans la masse de la production actuelle ?
Lorsque j’ai écrit mon premier roman, le genre était un petit peu moins bouchonné. C’était en 2001. Enfin, on dit que c’est bouchonné, mais quand on se donne les moyens, qu’on se fait un peu violence, il y a le moyen d’y arriver. Mon premier roman a été bien accueilli. Le second peut-être un peu moins bien. Il faut dire que je n’étais vraiment pas vieux. J’ai écrit les deux premiers livres sans savoir si je serais édité. Le premier m’avait servi à me faire la main, le second m’avait permis d’essayer autre chose. Je pense que j’ai fait une petite erreur là-dessus. Avec le recul, je n’en suis pas très content, et je vais réécrire ces deux premiers tomes pour réaliser un gros bouquin plus homogène.
Ta première bande dessinée, Les Brumes d'Asceltis, ressort de la fantasy.
Alors en fait, les premières BD que j’avais écrites étaient Maxime Murene, donc du polar SF, et Les Chroniques de Magon, et ensuite seulement j’ai attaqué Les Brumes d'Asceltis. Les Chroniques de Magon ont mis du temps à sortir, parce qu’il y a eu des soucis au niveau de l’éditeur ; on l’avait proposé chez Soleil, puis Delcourt. Et encore, on avait dû la refaire 2-3 fois avec Guillaume et Elsa (le auteurs). Maxime Murène, on l’a signé assez vite, mais le dessinateur devait se former parce qu’il est parti de zéro, il a mis 2-3 ans pour faire la BD. Du coup c’est Asceltis qui est sorti en premier. Jean-Luc Istin a été le plus réactif.
Tu passes ensuite à plusieurs séries qui s’inscrivent dans la veine fantastique, mais en multipliant les époques, les styles et les univers, comme pour Les Chroniques de Magon. Es-tu fasciné par les univers parallèles ?
Oui, effectivement. Là j’ai un space opera que devrait sortir d’ici quelques temps. J’ai travaillé sur un récit médiéval ésotérique avec une amie historienne, La rose et la croix, sur les rose-croix, la pierre philosophale… J’ai fait de l’historique, toujours avec France… C’est un peu l’envie de toucher à tout qui m’anime, je vais peut-être me recentrer après, mais pour l’heure j’ai envie d’explorer d’autres voies. Il y a tout de même un socle commun à mes histoires, le côté romanesque, héroïque, la création d’univers… C’est de la BD pour se détendre, du divertissement.
Tu as également écrit Tokyo Ghost, un diptyque très réussi dessiné par Djief, dont la ville de Tokyo est un personnage à part entière. As-tu l’intention d’écrire d’autres récits de ce genre ?
J’avoue que je ne sais pas. Dans Les Chroniques de Magon, la ville est quand même assez personnifiée, elle joue un rôle important. Mais vais-je écrire dans le style de Tokyo Ghost ? Je ne sais pas. Sans doute cela dépendra-t-il d’une rencontre avec un dessinateur, si j’ai envie de lui écrire quelque chose dans ce genre. Pour revenir à cette série, c’est un projet que j’avais depuis 2-3 ans dans mes cartons, mais c’est la rencontre avec Djief qui a été le vrai déclencheur.
Récemment tu as sorti une BD plus orientée historique, co-écrite avec France Richemond, Le trône d'argile. J’imagine que tu as fait pas mal de recherches pour conter cet épisode de la Guerre de Cent Ans ?
France est historienne, à la base. Elle avait réuni beaucoup de notes sur Jeanne d’Arc, elle voulait en faire une thèse Elle m’a découpé le cadre de l’histoire, puis elle m’a mâché les enjeux politiques. De mon côté, je me suis aussi documenté, car si je ne connaissais pas un minimum l’histoire, je n’aurais aucune liberté dans le récit. Je ne suis pas allé aussi profond qu’elle. J’ai pris ce dont j’avais besoin pour me faire plaisir.
L’Histoire fait aussi partie de tes inspirations en tant qu’écrivain, puisque tu as sorti un diptyque romanesque avec France Richemond déjà, aux Editions du Rocher.
En fait j’y suis venu à l’histoire grâce à France. Elle (L’histoire) ne m’avait jamais passionné, mais il faut savoir qu’elle (France) est conférencière au Louvre, et qu’elle a l’art de te captiver quand elle raconte un truc. Elle a la faculté de trouver l’angle par lequel l’Histoire devient humaine. Elle m’a donné envie.
Concernant le roman qu’on a co-écrit, c’est quand même SON roman. Elle n’avait jamais écrit, et là au contraire c’est moi qui lui ai donné le cadre, une colonne vertébrale. Elle m’a tout donné brut de décoffrage, presque écrit au kilomètre. Et moi j’ai réécrit le livre. A la base c’est SON histoire. J’avais lu ce roman qu’elle avait écrit, que j’avais trouvé excellent, et je voulais partager ça avec elle.
En cette année 2007 sort le tome 1 du Crépuscule des Dieux, La malédiction des Nibelungen. Or une trilogie portant sur le même sujet commence à sortir chez un autre éditeur, Emmanuel Proust. L’objectif de son auteur, Sébastien Ferran, est de mettre à la portée de tous, et surtout des plus jeunes, un mythe méconnu du public. Quel est le vôtre, à Djief et à toi ?
En fait la BD est à moitié sortie (rires). Il y a eu un souci chez l’imprimeur, les trois quarts des pages sont sortis à l’envers, ou quelque chose comme ça. Il y a quelques exemplaires qui circulent, mais la sortie a été repoussée d’un mois, elle sera dans les bac d’ici deux semaines. Pour en venir à la version de Sébastien Ferran, on n’est pas du tout dans le même trip. Lui, il a fait une adaptation de l’opéra de Wagner. Pour le crépuscule des Dieux, j’ai essayé de tenir compte d’une certaine réalité historique. C’est dans une période troublée, dans des zones d’ombres, que s’inscrivent les grandes lignes de la légende des Nibelungen. Il y a également la mythologie germanique dont les sources authentiques sont rares (il y a entre autre les Edda, comme ceux de Snorri Sturluson). Et bien sûr, il y a la fiction Wagnérienne.
Djief et moi avons mêlé tout ça pour écrire le Crépuscule des Dieux.
Le public visé est celle des jeunes adultes, jusqu’à 45 ans. Après, c’est le graphisme qui fait que ça va tendre vers un public plutôt qu’un autre. C’est difficile de le savoir avant la sortie. Le scénario est assez dur. Ça s’adresse tout de même à des gens qui apprécient le côté fantasy, mais aussi le versant authentique de cette légende. Tiens d’ailleurs c’est intéressant de voir à quel point ça a influencé Tolkien pour son Seigneur des Anneaux. L’épée brisée, l’anneau, la malédiction, il y a beaucoup d’éléments communs.
C’est Djief qui travaille donc sur cette série. Il fait lui-même ses couleurs cette fois-ci. Il y a des différences au niveau du graphisme, mais aussi de la narration, de la mise en scène. On a été plus vers l’épique. Pour un polar on a besoin de plans resserrés, plus intimes, là on a joué sur l’ampleur, le côté épopée de la chose.
Pour qui aimerais-tu écrire ?
J’aimerais bien écrire pour moi-même, j’aimerais bien me remettre au roman (rires). Si j’avais le choix… il y a trop de superbes auteurs. C’est très difficile. Actuellement je trouve qu’il y a beaucoup d’auteurs talentueux dans la veine roman graphique. J’aimerais bien aller vers eux, mais je ne m’en sens pas encore capable. Un jour peut-être…
En bande dessinée, as-tu des modèles ?
Je travaille en librairie spécialisée à plein temps, donc j’avoue que je lis tout ce qui passe (où une grande partie). J’admire le travail de gens comme Vehlmann, Rabaté, avec Les petits ruisseaux… Cette sensibilité, cette facilité à capter l’authentique, c’est très très fort. Brunschwig, avec ses dernières parutions, Le sourire du clown, La Mémoire dans les poches, m’a aussi touché. En ce moment je suis plutôt dans un trip, niveau lecture, roman graphique, des récits intimistes. J’ai beaucoup aimé L'immeuble d'en face, de Vanyda. Une belle capacité à capter l’authenticité des personnages dans un quotidien banal, un peu gris.
Et en littérature (fantasy, fantastique, historique) ?
En ce moment je ne lis plus du tout de romans. Je suis plus dans les documentaires, les essais, les bouquins sur l’Histoire… Ou alors des trucs psychologiques. J’ai besoin de me cultiver avant de me remettre à écrire. En rencontrant d’autres scénaristes ou écrivains, je me suis rendu compte qu’ils avaient une grande culture générale.
Parmi mes modèles, je citerai Frank Herbert, avec Dune, mais aussi Dumas, avec Les Trois mousquetaires, qui m’a bercé pendant de nombreuses années. Je citerai aussi Zelazny, avec Les Neuf princes d’Ambre… Dune, c’est le monument, la Tour de Babel… Pas l’objectif, parce que c’est au-delà (rires). C’est le top pour moi, mais en tant que lecteur. Il faut vraiment faire la part des choses entre la posture de scénariste/écrivain et celle de lecteur.
Peux-tu nous parler de tes projets ?
J’ai un space opera qui va sortir en septembre, dès que la couleur sera bouclée. D’autres séries vont voir le jour. J’ai plusieurs projets de romans, dont la réécriture de mes premiers bouquins. Mes prochains projets sont dans une veine de fantasy historique.
Un petit message à l’intention des habitués de BDTheque ?
Faites l’amour pas la guerre. Mais surtout, continuez à lire des BD !
Nicolas, merci.
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