Auteurs et autrices / Interview de Axel Mazuer, Cyril Romano et Pierre Taranzano
Entretien avec Axel Mazuer, Cyril Romano et Pierre Taranzano à l’occasion de la sortie de leur BD "Les Portes de Shamballah" aux éditions Clair de Lune.
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[Pierre Taranzano] Bonjour ! Nous sommes un peu les 3 Lone Gunmen de X-Files, des fouineurs toujours à l’affût d’histoires bizarres. Pour ma part, je suis aussi un fan absolu de BD : j’ai commencé à en dessiner avant de savoir écrire (y compris sur la déclaration d’impôts de mes parents…). En ce moment, je suis dans une période très créative puisque je sors mon premier album un mois après la naissance de mon premier enfant !
[Cyril Romano] Salut ! Oui c’est sûr, on est atypique ! J’ai appris à lire avec les contes de Ceylan. Puis mon adolescence a été bercée par les mangas, la SF et les arts martiaux. Ma mère me dit souvent : « Il ne lui manque que les yeux bridés ! »
Ma collaboration avec Axel et Pierre est issue d’une très belle rencontre. Très vite nous nous sommes aperçus que nos visions du monde et nos intérêts pour le paranormal étaient semblables. En y réfléchissant, au début de notre rencontre, alors que je n’avais que 19 ans (oui je suis le plus jeune), ils m’ont fait découvrir la demeure d’Alexandra David-Neel. Je me souviens que j’étais ensuite parti acheter un de ses livres, et sa lecture m’a complètement bouleversé ; c’était « le Bouddhisme du bouddha ». Depuis j’essaie de suivre cette voie. Donc merci les gars !
Vos passions respectives semblent assez différentes (paranormal pour Axel, culture de l’Asie pour Cyril et Histoire pour Pierre). Comment vous êtes-vous rencontrés ? Qu’est ce qui vous a amené à travailler ensemble sur « Les Portes de Shamballah » ?
[Pierre Taranzano] A vrai dire, j’étais passionné d’Histoire quand j’étais gamin ; aujourd’hui, c’est surtout l’Histoire occulte qui m’intéresse, tout ce qui n’est pas vraiment abordé dans les manuels scolaires : les faits inexplicables, les ressorts cachés, les manipulations en tout genre.
Il y a par exemple des vestiges archéologiques très anciens qui ne collent absolument pas avec la vision que la science officielle a de ces époques, parce qu’ils relèvent d’une technologie avancée : il est donc plus pratique de les ignorer. Le rôle des sociétés secrètes est souvent méconnu aussi, il est pourtant essentiel dans des évènements comme la Révolution Française ou l’avènement du nazisme ; d’autre part, les déclarations de guerre sont souvent accompagnées de manipulations de l’opinion publique : on se rend compte après coup que les évènements déclencheurs, présentés comme spontanés et inattendus, sont en fait prémédités de longue date… Ce qui nous amène à réfléchir sur l’actualité ! Dans ces coulisses de l’Histoire on trouve bien sûr les services secrets mais aussi des cercles ésotériques et des personnages hauts en couleurs comme Aleister Crowley ou Trébitsch Lincoln. C’est dans cette frange un peu trouble que l’Histoire rejoint le paranormal…
J’avais donc depuis longtemps l’envie de traiter en BD ces sujets qui me passionnent et me préoccupent : les sociétés secrètes et l’Histoire occulte ; mais je ne savais pas par quel bout les prendre ! J’ai donc proposé à Axel, dont je connaissais le même intérêt pour ces questions et la grande érudition, d’y réfléchir avec moi ; or, Axel avait justement commencé à travailler sur une nouvelle abordant ce thème : deux hommes se rencontrent dans un train ; l’un d’eux, traqué, aux abois, va révéler à l’autre, au fil du voyage, tout ce qu’il a appris sur les agissement d’un gouvernement occulte. Son interlocuteur, tout d’abord sceptique, sera de plus en plus troublé par cette nouvelle vision du monde.
On tenait là un point de départ. Comme je venais de lire « Le Matin des Magiciens », de Pauwels et Bergier, nous sommes partis sur la Golden Dawn, les racines ésotériques du nazisme et les civilisations disparues dont ce livre traite abondamment. Cyril Romano, lui aussi féru de paranormal et d’ufologie, nous a très vite rejoints et a apporté la dimension orientale du récit : les arts martiaux, la philosophie Bouddhiste, le thème du Dragon… Dès les premières séances de travail, nous sommes devenus un triple cerveau très efficace, échangeant les idées comme au ping-pong ; on a défini une trame, créé les personnages ; le train est devenu un bateau… et nous a embarqués !
[Axel Mazuer] Je me souviens que j’ai rencontré Pierre pour la première fois à l’automne 1997, à l’occasion d’un forum « SF et séries télés » à Marseille. Nous nous sommes revus quelques fois entre temps, mais le projet d’une série BD n’a été abordé que deux ans plus tard, vers fin 1999.
A cette époque-là, je m’intéressais depuis déjà un bon moment à tous ces sujets et j’avais effectivement, depuis deux ou trois ans, en tête l’histoire qui a servi d’idée préliminaire aux "Portes de Shamballah". Je pensais alors en faire une nouvelle ou le scénario d’un court-métrage amateur.
[Cyril Romano] Ma première rencontre a eu lieu avec Axel et remonte à 1996. A l’époque, l’Internet n’était pas développé comme maintenant, mais j’avais la chance de l’avoir chez moi. Au cours de mes diverses recherches, j’avais dégoté quantité d’informations utiles, que l’on ne trouvait pas forcément par le biais des médias classiques. Etant donné qu’Axel est un dévoreur d’informations de tout genre, il a pris contact avec moi, et m’a présenté Pierre par la suite.
Au fil du temps, et à force d’enquêter sur le paranormal, notre objectif est devenu celui d’informer les gens sur ce sujet, sur les manipulations dont ils n’ont pas conscience et qui régissent le monde qui nous entoure. Nous avons essayé de comprendre ce qu’il se passe dans les sphères cachées, de tenter de partager des expériences peu communes. La BD est apparue comme le média qui nous a semblé le plus pertinent.
Les Portes de Shamballah est votre première BD. Pouvez-vous nous présenter ce projet ?
[Pierre Taranzano] Nous le présentons habituellement comme un hybride de X-Files (pour le côté paranoïaque assumé) et d'Indiana Jones (pour le côté Aventure avec un grand A !). Il s’agit d’un projet très ambitieux dont le but est, au-delà du simple divertissement, d’amener le lecteur à se poser des questions sur le monde dans lequel il vit, à découvrir des zones peu explorées de notre Histoire, qu’elle soit antique ou contemporaine, et de ce fait à percevoir les évènements de notre actualité sous un autre jour. Il ne s’agit pas d’apporter des réponses toutes faites, ou d’imposer notre propre vision des choses, mais simplement de mettre un coup de projecteur sur des sujets qui nous intéressent, dans une approche fantastique.
Mais attention, ce n’est pas un cours d’Histoire ! Il n’y a rien de plus pénible qu’une BD purement didactique… C’est avant tout une BD d’aventure, qu’on a voulue pleine de suspense, de mystère, d’action, avec des rebondissements comme dans un roman-feuilleton. Nous avons cherché à privilégier un côté spectaculaire, dynamique, divertissant, dépaysant… Comme le film du dimanche soir de mon enfance qui me faisait oublier le lundi matin et l’école !
Au niveau du dessin et du découpage, j’ai essayé d’appliquer les leçons des Comics et du Manga : fluidité, efficacité, cadrages spectaculaires, speed-lines… Même si je revendique mon héritage Franco-Belge !
[Axel Mazuer] Ca va être le Il était une fois… l’homme du Grand Complot !… (Rires…) Présenter ce projet comme un croisement entre X-Files et Indiana Jones est assez exact.
La référence à X-Files est incontournable, vu le thème abordé, quoiqu’après trois premières saisons excellentes, cette série se soit révélée particulièrement décevante à mon goût. Je pense que, dans le même esprit, notre BD se rapproche beaucoup plus de la série Dark Skies.
Pour l’aspect Aventure, je citerai aussi volontiers les impérissables Mystérieuses cités d’or aux côtés d’Indiana Jones…
Mais, comme vient de l’expliquer Pierre ci-dessus, ce projet va bien au-delà d’une simple fiction divertissante, en possédant une véritable portée documentaire et didactique. En cette période où l’on parle beaucoup politique, donner aux lecteurs une chance supplémentaire de découvrir le dessous des cartes grâce à cette BD est une démarche citoyenne tout à fait salutaire…
C’est aussi par ce caractère engagé que notre BD se distingue des autres productions du genre !
[Cyril Romano] À mon sens, cette BD aborde des sujets dont on n’a pas l’habitude de parler. Dès le plus jeune âge, on nous enseigne et on nous impose, une vision très rationaliste de la réalité, du monde, et de son histoire, surtout du point vue de l’Occident. Ce projet est finalement le fruit de nos réflexions personnelles et communes, de nos connaissances et de nos spécialisations respectives.
A quel point vos connaissances respectives (paranormal, culture de l’Asie et Histoire) vous ont-elles aidé lors de la réalisation du scénario ?
[Pierre Taranzano] Avant de commencer à travailler sur le scénario proprement dit avec mes deux collègues, j’ai longtemps étudié les sociétés secrètes, passé de nombreuses soirées à archiver des noms, des dates, des cercles, des grades… qui ne m’ont, pour la plupart, servi à rien ! En revanche, au fil de mes lectures, je me suis imprégné d’une ambiance, d’un état d’esprit, d’un langage, de certains courants de pensées qui ont animé la fin du XIXème et le début du XXème siècle ; Tout cela a été un acquis prépondérant pour camper des atmosphères crédibles et écrire des dialogues qui sonnent juste.
[Axel Mazuer] Oui, en général, il faut faire un travail documentaire énorme pour finalement n’avoir à s’en servir qu’à hauteur de 5 à 10 %. Il a d’ailleurs fallu beaucoup simplifier et élaguer notre histoire d’origine pour faire des albums d’une cinquantaine de pages, car il n’a pas été possible d’y caser la totalité de ce qu’il devait y avoir au départ en regard des éléments réels que nous voulions montrer.
Mais au moins, nos spécialités respectives nous permettent souvent de cibler rapidement l’info intéressante ou nécessaire lorsqu’une question précise se pose à propos de tels ou tels sujets.
Par parenthèse, nous avons déjà bien avancé sur la réalisation d’une sorte de « making-of » de la BD, destiné à faire la part des choses entre la réalité et la fiction, en détaillant case par case les sources, les faits réels et les personnages historiques à la base de notre travail.
Espérons qu’il sera lui aussi publié un jour…
Le nombre de tomes est-il définitivement fixé à 4, ou vous réservez-vous la possibilité de changer cette limite ?
[Pierre Taranzano] Tout dépend du succès que la série va rencontrer ! A vrai dire, nous avons convenu de 3 albums avec Clair de Lune, mais il nous en faudra plutôt 4 pour boucler le premier cycle, dédié aux souvenirs de Malcolm Mac Kenzie et à la période 1900-1930 ; en cas de succès, on repart sur 4 nouveaux tomes, avec l’aventure d’Erwan Frioul qui traitera plus particulièrement du nazisme et de la seconde guerre mondiale. Par la suite, nous avons prévu encore 2 nouveaux cycles pour les années 50-60 et pour notre époque… Les sujets qui nous intéressent sont tellement vastes et nombreux qu’on pourrait faire une quantité phénoménale d’albums ! Cela dit, il ne s’agira pas pour le lecteur d’attendre 20 tomes pour avoir le fin mot de l’histoire : chaque cycle de 3 ou 4 albums pourra être lu indépendamment des autres, posera ses propres questions et aura son propre dénouement. Mais bien sûr, les connexions seront nombreuses, et fourniront un intéressant jeu de puzzle au lecteur attentif, sans pour autant gêner la lecture de chaque cycle. Nous envisageons d’ailleurs de faire appel à d’autres dessinateurs pour lancer les différents modules de la série… mais nous n’en sommes pas encore là !
[Axel Mazuer] Il serait vraiment bien de pouvoir poursuivre la série jusqu’à son terme, en réalisant les 4 cycles, et d’offrir ainsi aux lecteurs toute la richesse et la complexité captivante d’une histoire que nous avons conçue dès le départ comme une grande fresque historique, couvrant une période allant de la fin des années 1800 à 2020.
Mais en attendant, nous pouvons au moins bel et bien assurer au lecteur que nous savons exactement où nous allons au niveau de l’histoire.
Vos personnages semblent avoir des profils psychologiques assez poussés. Sont-ils inspirés de personnages réels ou connus ?
[Pierre Taranzano] Voilà une question qui nous fait plaisir, parce qu’elle prouve qu’on a réussi à donner une dimension crédible à nos personnages ! Malcolm Mac Kenzie et Erwan Frioul ont été créés de toutes pièces, mais nous voulions en effet leur donner une véritable épaisseur, une histoire qui leur est propre, même si elle n’est pas racontée dans la BD proprement dite. Nous avons d’abord défini leurs professions, qui allaient nous permettre d’aborder logiquement certains thèmes : un agent secret pour les coulisses du pouvoir, et un archéologue pour la quête des civilisations disparues. Puis, nous avons commencé à imaginer leurs goûts, leurs penchants, leurs origines, leur passé, leurs caractéristiques physiques. Au départ, nous avions pensé à un personnage à la Michael Caine pour Malcolm ; puis au détour d’une case du story-board, un sourire à la Nicholson est apparu, à la fois enjôleur et carnassier, et c’est ainsi qu’il a commencé à vivre réellement. C’est assez curieux, troublant même, quand les personnages deviennent des êtres indépendants…
Pour affiner leur psychologie, nous nous sommes inspirés des types psychologiques de l’énnéagramme : le battant pour Malcolm et le loyaliste pour Erwan, ce qui nous a donné une matière assez consistante pour chacun ; nous nous sommes aussi renseignés sur les vrais agents secrets, leurs motivations, leurs profils. Evidemment, il y a aussi dans chacun d’eux une part de nous-même, ou de gens qu’on a rencontrés.
[Axel Mazuer] Le nom de Mac Kenzie a un rapport avec un membre de la Golden Dawn, Kenneth Mac Kenzie, mais la ressemblance s’arrête là.
Quant à la psychologie de nos personnages principaux, vous serez agréablement surpris si vous aimez leur épaisseur, car elle va encore s’étoffer au fil des albums !
Les aventures ésotériques sont à la mode ces dernières années. Quelles sont vos histoires du genre préférées ? Celles qui vous ont inspirés ?
[Pierre Taranzano] Au moment où nous avons commencé à travailler sur ce projet, vers l’année 2000, la mode n’était pas encore lancée (il faut dire que cette série a connu une longue gestation !) ; il y avait bien Le Troisième Testament et Arcanes, mais aucun de nous n’avait encore lu ces séries. Le Triangle Secret n’était pas encore sorti, pas plus que la collection « Loge Noire », et on n’avait pas encore entendu parler de Dan Brown. Ce projet est né de nos centre d’intérêts communs qui, apparemment, sont partagés par beaucoup de nos contemporains, qu’ils soient auteurs ou lecteurs : cela prouve au moins que nous sommes en phase avec notre époque !
Nos sources d’inspiration ont donc été plutôt littéraires et audiovisuelles : Le Matin des Magiciens, dont nous avons déjà parlé, Le Dictionnaire des Sociétés Secrètes, d’un collectif d’auteurs, Les Gouvernants Invisibles de Serge Hutin, Dossiers sur un Gouvernement Mondial de Meurois-Givaudan, Le Frémissement du voile où W.B. Yeats raconte son passage à la Golden Dawn, des auteurs comme Papus ou encore David Icke. Pour la fiction, il y a eu aussi le roman d’Umberto Ecco : Le Pendule de Foucault, et bien sûr les séries X-Files et Millenium, incontournables ; le film Skulls, bien qu’assez moyen, nous a donné l’idée de rendre plus dynamique la scène des épreuves. Quand nous avons fait lire notre projet, certains ont évoqué Eyes Wide Shut de Kubrick, mais je ne saurais pas dire aujourd’hui si ce film nous a inspirés ou pas ; en tous cas, je pense que le thème des sociétés secrètes y est évoqué de façon très réaliste.
Maintenant, nous nous sentons très proches des séries dont nous avons parlé : Le Troisième Testament, Le Triangle Secret, Arcanes mais aussi Le Chant des Stryges, W.E.S.T, L'Histoire Secrète, Cross Fire ; j’apprécie beaucoup les scénarios de Pierre Makyo, et certains de Jodorowsky qui parviennent à donner une vraie dimension spirituelle à leurs histoires ; sans oublier le génial Alan Moore et en particulier son From Hell où il aborde la Franc-maçonnerie et évoque, comme L’Aube Dorée, la Golden Dawn, Yeats et Crowley.
Cela dit, je regrette un peu que la Bd ésotérique actuelle surfe très souvent sur les mêmes thèmes, qui finissent par lasser le public, et j’en profite pour signaler que notre série est garantie 0% Templiers, 0% Vatican, et 0% manuscrit- apocryphe- contenant- des- révélations- sur- le- Christ- qui- feraient- l’effet- d’une- bombe- si- elles- étaient- dévoilées. Tout cela est certes très intéressant mais il y a tellement d’autres sujets !
[Axel Mazuer] Il y a eu beaucoup de livres documentaires ou de références à la base de notre travail. Pourquoi chercher à s’imaginer des histoires fantastiques ou de science-fiction, alors que la réalité nous en fournit des vraies encore plus passionnantes ?
Nous apprécions aussi Jimmy Guieu, auteur précurseur dans ce domaine, notamment son roman-vérité E.B.E. Alerte rouge et sa remarquable série de reportages Les portes du Futur. Nous saluons respectueusement sa mémoire à cette occasion, puisque Les Portes de Shamballah reprennent à la fois, sur le fond, les thèmes qui lui sont chers (société secrète, archéologie mystérieuse, ovni, complots), et sur la forme, ce style de roman d’aventures populaire à message, basé sur des faits authentiques.
Pour son style docu-drama fouillé et sa méthode de travail, je pense que l’on peut aussi parler de Frederick Forsyth (Chacal, Odessa, Le négociateur, Le vengeur) comme d’un modèle.
Pour les romans concernant la face cachée de l’histoire, il est bien regrettable que la vague Da Vinci Code ait galvaudé le thème des sociétés secrètes, mais dans les productions récentes sur ce thème, j’ai apprécié Le rituel de l’ombre de Giacometti et Ravenne.
Plus largement, je pourrais citer pas mal d’autres bons romans intéressants comme L’échiquier du mal de Dan Simmons, Les puissances de l’invisible de Tim Powers ou Le secret interdit de Bernard Simonay…
[Cyril Romano] Je suis d’accord avec Pierre et Axel ! Il y a tellement d’histoires mystérieuses, dans notre société et à notre époque, qui mériteraient une plus grande attention. Déjà très jeune, j’étais passionné par les origines de l’humanité et par les philosophies mystiques. Les grands maîtres tibétains et les sagesses orientales sont la source principale de mon inspiration. Deux ouvrages m’ont particulièrement inspiré : Shambhala, la Voie sacrée du guerrier de Chögyam Trungpa, et les livres de Rampa.
Les histoires extraordinaires qui se déroulaient autrefois en Inde, et qui nous ont été rapportées, ont encore aujourd’hui un écho très présent. Je suis particulièrement touché par les témoignages de personnes qui ont réellement vécu les choses de l’intérieur.
Lisez-vous vous-mêmes des BDs ? Quels sont vos BDs et auteurs préférés ?
[Pierre Taranzano] Je lis énormément de BD, je le confesse ! J’ai été bercé dans mon enfance par Alix, Tintin et Milou et le journal de Spirou ; ensuite j’ai découvert les Bernard Prince, Comanche, Valérian, Thorgal, Luc Orient, Blueberry… J’ai adoré les dessins de Giraud et ceux de Moebius ; quand j’ai découvert que c ‘était le même alors là, c’est devenu mon maître ! (comme pour beaucoup de dessineux de ma génération…)
Et puis il y a eu Druillet, Bilal, Corben, Liberatore, Gotlib, Edika, Pratt, Bisley, Otomo, et des séries incontournables comme Les Passagers du vent, La Quête de l'Oiseau du Temps, Balade au bout du monde… J’en passe, et des tonnes ! Actuellement, en-dehors de ceux que j’ai déjà cité tout à l’heure, Je suis fan de Frank Miller et d’Andréas qui, chacun à sa manière, renouvellent complètement les codes de la BD.
Pour le dessin, la référence absolue du moment pour moi c’est Mike Mignola (selon moi, Mignola est un dessinateur qui fait de bons scénarios, alors que Miller est un scénariste qui dessine bien) ; après, il y en a tellement qu’on ne peut donner que des exemples ! au dessin : Lauffray, Bonhomme, Marini, Guarnido, Alice, Lepage… Au scénar : Dorison, Pécau, Velhmann… J’ai flashé aussi sur The Goon, Human Target ou Hardland… Etc !
[Axel Mazuer] J’avoue à l’inverse qu’avant de faire de la BD, je n’en lisais vraiment pas beaucoup… Surtout les classiques grand public, ici et là, étant plus jeune : Gaston Lagaffe, Tintin et Milou, Léonard, Blake et Mortimer, Rahan et surtout Le Scrameustache de Gos et Walt (que j’ai eu le plaisir de rencontrer à Angoulême en janvier dernier), ou les illustrés comme Pif Gadget.
Je m’intéresse bien davantage au « neuvième art » depuis que je suis moi-même co-scénariste !
Comme Pierre, je n’ai pas manqué de lire et d’apprécier Le Triangle Secret de Convard et consort, ou Le Chant des Stryges de Guérineau et Corbeyran.
Dernièrement, j’ai beaucoup ri avec les BD satyriques de Jul et de Pétillon, et j’ai bien aimé V pour Vendetta de Moore et Lloyd.
Côté série, je suis depuis le début La Malédiction de Zener, prélude au Concile de pierre (le roman, pas le film !), de Grangé et Adamov, Crypto de Menvielle et Martin, et "Stellaire" de Pécout, Ponticelli, etc… (qui a hélas l’air d’être au point mort…)
[Cyril Romano] J’en lis moins qu’avant, surtout les mangas dont je raffolais. Maintenant je sélectionne ! Dernièrement j’ai découvert l’édition « les enfants rouges » (NdW : Voir notre interview de cet éditeur ici). De très belles découvertes !
Comment s’est passé votre rencontre avec l’éditeur « Clair de lune » ?
[Pierre Taranzano] Très simplement : on lui avait envoyé un exemplaire de notre dossier et comme ça lui a plu, il nous a appelés et on s’est rencontrés ; comme on habitait tous dans la région de Marseille à ce moment-là, ça a facilité les choses. Dargaud et Soleil s’étaient montré très intéressés au départ, avant de se désister, de même que Casterman, qui nous avait appelés après avoir vu les planches sur le net ; Delcourt a tellement hésité qu’on n’a jamais eu de réponse… Akileos était sur le coup aussi, on les a rencontrés : des gens très sympas ! Mais Pierre Leoni, de Clair de Lune avait appelé avant. Aucun regret : même si on n’est pas toujours d’accord, on s’entend très bien, c’est un passionné, comme nous. Et puis Clair de Lune a le vent en poupe en ce moment !
[Axel Mazuer] Je n’ai rencontré notre éditeur que deux ou trois fois, mais je peux dire que c’est quelqu’un de convivial, et, comme en témoigne sa déco, nous partageons apparemment les mêmes goûts pour l’univers Mangas / Fantasy.
[Cyril Romano] Ok rien à rajouter.
Pierre, je lis sur ton site que tu es « actuellement storyboarder pour un studio de dessin animé ». De quel studio s’agit-il ? Sur quels projets travailles-tu ?
[Pierre Taranzano] Bon, il faudrait qu’on remette le site à jour, ça fait un petit moment que je n’ai pas fait de dessin animé ; j’ai travaillé pour BKN Studio à Arles, où j’ai participé à Lost Continent, Chocotte Minute pour Animage, et sur Kangoo Junior pour Label Anim. Je travaille aussi dans le spectacle, soit comme décorateur, soit pour créer des images destinées à être projetées sur les bâtiments.
Quels sont vos projets en cours ou futurs ?
[Pierre Taranzano] Pour ce qui est des projets communs, il s’agit avant tout de continuer Les Portes de Shamballah ; si le succès est au rendez-vous, on aura de quoi s’occuper ! De mon côté, j’aimerais explorer d’autres pistes graphiques et narratives dans un projet solo, quelque chose de plus personnel ; j’ai quelques idées en tête mais c’est assez flou pour l’instant. Il y a notamment des histoires que m’a racontées mon épouse, qui est Equatorienne : des trucs de dingues qui sont arrivés à son grand-père, ses oncles ses tantes, ou elle-même ; des trucs où le paranormal a une grande part… On verra plus tard ! En attendant, je continue le spectacle : un son et lumière dans les Vosges cet été, peut-être la Fête des Lumières à Lyon en décembre ; c’est un autre univers, et c’est passionnant aussi !
[Axel Mazuer] Continuer de travailler sur Les portes de Shamballah constitue mon projet N°1 dans l’immédiat. Mais je serai tout à fait partant pour servir de conseiller technique pour d’autres projets sur le thème de l’ufologie ou du paranormal, fictifs ou documentaires, littéraires ou audiovisuels.
A part ça, j’ai depuis longtemps en projet d’éditer un petit ouvrage, d’après ma maîtrise, Epistémologie et paranormal, avec préface d’Yves Lignon. Comme l’indique notre site, c’était une affaire en cours avec les « Editions Universitaires du Sud », mais il faudrait effectivement le remettre à jour, car le projet est en suspens, l’éditeur n’ayant plus donné signe de vie depuis un moment…
[Cyril Romano] Bien sûr Les Portes de Shamballah ! Ensuite, pour des projets plus personnels, je développe actuellement le scénario d’une BD construite sur de la retouche photo très stylisée, et qui traite de l’histoire d’un couple à Paris dont la vie bascule dans un univers peuplé d’esprits, avec la mort en filigrane. Cette BD sera très imprégnée de mysticisme bouddhique. Je travaille parallèlement sur la réalisation d’un clip vidéo, et également sur un projet de court-métrage.
Pour mes projets futurs, j’aurai le souhait de mettre en bulle l’histoire du Dalaï Lama.
Dernière question : la sortie des Portes de Shamballah le 7/7/7, c’est fait exprès ?
[Pierre Taranzano] Eh non, c’est l’effet de nombreux retards, mais le hasard fait bien les choses, c’est une date mystique ! (rires) Sinon, elle devait sortir le 21 Juin, c’était pas mal non plus (solstice d’été).
Merci et bonne chance !
[Pierre Taranzano] Merci à vous de nous avoir donné la parole, et bonnes lectures à tous !
A voir :
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