Etat de veille (Morti di sonno)
Diagonale 2011 : prix du meilleur album étranger. Voici la chronique d’une triste cité de banlieue, en Italie. Presque tous ses habitants sont ouvriers à l’usine pétrochimique voisine. Leur sombre destinée est racontée du point de vue d’une bande d’enfants désoeuvrés, tous forcés de grandir à l’ombre des tours d’immeubles, tous ayant fait de longue date l’apprentissage du renoncement…
Auteurs italiens Football Gros albums Italie Prix Diagonale/Victor-Rossel
Le titre en italien, Morti di sonno, se traduit par « État de veille ». Mais sonno, en italien, signifie « sommeil » : le sommeil de gens dont la vie s’écoule entre inconscience et conscience, indifférence et lucidité. Ces gens, ce sont les habitants d’une triste cité de banlieue, presque tous ouvriers à l’usine pétrochimique voisine. Leur sombre histoire est racontée du point de vue d’un enfant, Koper, et de ses amis désœuvrés – tous rejetons des employés de l’usine qui dévore leurs vies sans joie, tous forcés de grandir à l’ombre des tours d’immeubles, tous ayant fait de longue date l’apprentissage du renoncement. Mené sur quelques 350 planches avec une puissance graphique peu commune, Morti di sonno est un accablant réquisitoire contre toutes les formes d’aliénation et de déshumanisation de notre « modernité ». Ce roman graphique exceptionnel a obtenu le prix du meilleur album au Festival de Naples.
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Date de parution | 12 Janvier 2011 |
Statut histoire | Histoires courtes 1 tome paru |
Les avis
Voilà un album assez épais (environ 350 pages quand même !), plutôt étrange, inclassable, et difficile à appréhender. D’abord le côté graphique. Avec un trait brouillon, simple, auquel je me suis fait à la longue, pour lui reconnaître de réelles qualités poétiques. Proche de Gipi je trouve, mais en Noir et Blanc. L’histoire aussi est à la fois originale et difficile d’accès, mais offre un intérêt qui ne s’émousse pas. On y suit les relations de gamins d’une banlieue ouvrière italienne, qui passent leur temps à jouer au football, à singer les tics, surnoms et attitudes des « vrais » footballeurs du Calcio. On y découvre le désœuvrement de ces jeunes, leurs rêves, et la rudesse, la violence de leurs relations. Et puis, omniprésente, il y a l’usine très proche, qui « fait vivre » les gens du coin, en étant le premier employeur. Mais qui les fait mourir aussi. Par des accidents de travail. Mais aussi et surtout par la pollution (de l’air, des sols, des rivières). La catastrophe est plus d’une fois pressentie, épée de Damoclès sur les habitants et le récit, au point que ma seule déception est de ne pas avoir senti de fin très claire à ce propos. A noter que si l’album est très épais, il se lit relativement vite, car beaucoup de planches sont muettes. Et que les dialogues sont peu nombreux, souvent brefs. Quelques passages décorent la triste réalité (Théodoric sur son cheval !), quelques dialogues ou commentaires eux-aussi poétiques fluidifient la lecture (même si certains lecteurs seront peut-être rebutés par ces artifices). Album à découvrir (mais à feuilleter avant d’envisager un achat). Note réelle 3,5/5.
Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à la catastrophe de Seveso à la lecture de cette BD qui tient davantage du roman graphique basé sur les souvenirs de l’auteur. Le récit est parcouru par une tension diffuse et angoissante à peine distanciée par la poésie de l’enfance. Car c’est bien au travers du prisme de l’insouciance incarnée par ces enfants qui ne sont là que pour laisser libre cours à leur énergie vitale et joyeuse, cruelle parfois, qu’est racontée cette histoire. L’empire glauque de la pétrochimie contre l’empire de la rêverie et des jeux. L’indifférence des adultes cloîtrés dans leur fatalisme, silencieux sur les morts prématurées, rendus aigris par leurs peurs et leurs renoncements, est évoquée de manière empathique. Il fallait bien nourrir et élever ses enfants, alors comment faire autrement qu’honorer, de façon un peu honteuse, le démiurge « légendaire » M. Mattei ?, à la fois bienfaiteur et empoisonneur, à la fois constructeur de l’usine et de la ville-dortoir qui ressemble davantage à une prison à ciel ouvert où les rêves se cognent sur un plafond de verre invisible et maudit... Le trait, charbonneux et hachuré, contribue à instaurer un climat menaçant, mais n’en reste pas moins plaisant à l’œil et bénéficie d’une mise en page libre et créative. Une façon pour l’auteur de faire coexister graphiquement la tension et l’insouciance poétique. Je dirais que cela se regarde plus que cela ne se lit, c’est une sorte d’expérience hallucinée dans un monde souillé, fermé sur lui-même, d’ailleurs on a vraiment l’impression que les gens y sont parqués, à la faveur des rondes de police. Une police qui veille à ce que toute cette jeunesse ne découvre pas le pot aux roses, parce qu’une catastrophe est si vite arrivée, ce qui en dit long sur les conditions de sécurité… Pour ma part, j’ai trouvé que le récit avait tendance à se diluer dans ses digressions poétiques et souffrait de répétitions qui n’apportaient pas forcément grand-chose. Si je reconnais les qualités graphiques et poétiques de l’ouvrage, il me semble que l’auteur aurait pu compacter davantage, même si cela reste fluide malgré les 340 pages.
J'ai bien aimé ce roman graphique, Davide Reviati a un vrai sens du découpage de l'action et de la mise en scène. Donc je trouve cela bien réussi sur le plan graphique. Concernant l'histoire, on se trouve dans une petite cité italienne où les enfants jouent beaucoup au football pour tuer le temps, et cela à proximité d'une usine chimique. Cette dernière pollue, pique les yeux et on ne sait pas vraiment ce qui y est fait, ni son impact sur la santé mais elle emploie des gens et un des personnages va s'y retrouver à l'âge adulte. On vit là sans se poser trop de questions, avec une sorte de fatalité. Ce qui est un peu dommage, c'est que malgré le nombre de pages assez conséquent, à l'instar de Lucille auquel j'ai pensé pendant ma lecture, on tourne les pages assez vite et on perd à un moment le fil lors du passage de ces enfants au stade d'adulte. C'est à dire qu'il y a un peu trop d'ellipses dans le récit et on aimerait en connaître davantage sur leur parcours respectifs. Bref il manque de liant si je puis dire pour rendre ce récit vraiment fort.
C'est la première fois que cet auteur italien est traduit en France. Cette bd a obtenu un prix au dernier festival de Naples. On a droit à une vision de l'Italie qui est loin d'être idyllique. L'aspect social est décortiqué un peu à la manière d'un auteur comme Baru entre forme d'aliénation et déshumanisation. Le cadre est celui d'une cité de banlieue située à proximité d'une usine pétrochmique dans le Nord de l'Italie, ce qui empoisonne la vie de ses habitants. L'auteur se contente de décrire sans expliquer ce qui me semble être une démarche un peu incomplète. Pourtant, il aurait pu le faire sur ces 350 planches. Je n'ai pas non plus aimé le dessin avec ces traits noirs et épais. Cependant, le graphisme cadre avec perfection avec cet univers triste. Il manque réellement de l'émotion ce qui fait qu'on lira cet ouvrage avec un peu d'indifférence malgré la gravité du sujet pour ceux qui ont des préoccupations d'ordre écologique.
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