Turcos
Evocation des "Turcos", ces soldats des "colonies" enrôlés dans l'armée française et engagés dans les différents conflits.
Les petits éditeurs indépendants Première Guerre mondiale
Rescapé de la terrible boucherie de 14-18, Mourad Ben Slimane est de retour dans son village de Saint-Arnaud, non loin de Constantine. Il boite légèrement et porte encore au bras un pansement qu’il doit changer régulièrement. Dans sa poche, il garde précieusement un mouchoir renfermant du jasmin séché que lui avait donné son ami Alouache lorsqu’ils débarquèrent en France. Celui-ci lui avait dit ces quelques mots : « Prends ce jasmin, mon frère ! Il te portera chance et tu penseras au pays quand tu te sentiras seul… »
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Date de parution | 31 Octobre 2011 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Comme l’avait fait le film « Indigènes » pour l’engagement des combattants nord-africains durant la seconde guerre mondiale, cet album lève le voile sur le rôle, le sacrifice, le courage de leurs prédécesseurs durant la première guerre mondiale (surnommés « Turcos » depuis certains engagements du XIXème siècle). Nous suivons donc certains de ces soldats lors de combats s’étalant sur la durée de la guerre, avec le cortège d’horreur et de décès. En fin d’album, un dossier présente une série de documents (photos, cartes postales, etc) et un petit rappel historique. Le sujet est intéressant, et, en plus de mettre en valeur ces hommes, met aussi en lumière le sort qui leur a été réservé (bons soldats français pour fournir de la chair à canon, mais pas assez pour devenir citoyen à part entière après la guerre). Mais hélas, malgré cela, et j’en suis désolé, je dois dire que je n’ai pas du tout accroché à cet album, qui souffre de nombreux défauts. D’abord le dessin, qui possède quelques qualités, y compris esthétiques, mais qui est aussi trop brouillon, parfois approximatif, et pas toujours très clair (pour reconnaître certains protagonistes par exemple). La colorisation n’est pas non plus des plus réussies. Mais c’est surtout la narration qui n’est pas à la hauteur du sujet. On y sent là aussi une forme d’ « amateurisme », avec une narration ampoulée, souvent proche de certains récits « scolaires » d’il y a près d’un siècle. Ce n’est vraiment pas emballant (et la plupart des dialogues sont franchement plats) ! Et le dossier de fin d’album est lui aussi dans le même style, sans regard trop critique. Un sujet intéressant – et presque nécessaire si l’on veut lutter contre certains propos racistes diffusés par la vox populi. Mais un traitement qui ne le sert pas vraiment, hélas.
La participation des coloniaux français à la guerre 14-18 est le sujet abordé par cette BD, malheureusement je n’ai pas été séduit par cet ouvrage. Le scénario est pauvre, pratiquement inexistant, l’histoire se résume en une suite de combats ou de missions dont on ne sait pas grand-chose mise à part qu’elles sont exécutées par une majorité de soldats issus des colonies. Les dialogues sont plats, l’ambiance du récit résonne avec soumission et obéissance, pas vraiment ce que j’attends d’un récit sur la grande guerre. Le dessin est quelconque, les décors peu ou pas travaillés, et la mise en couleur est à certains endroits à pleurer. Une BD dont le sujet méritait beaucoup mieux. 2.5
J’ai bien aimé le texte écrit sur la préface par un littéraire algérien assez célèbre et que je ne connaissais point à savoir Yasmina Khadra. L’idée véhiculée est somme toute assez simple : l’humanité ne retient guère les leçons du passé et les actes de guerre se poursuivent à travers le monde véhiculant leur cortège d’horreur. A quoi servent dans ce contexte les diverses commémorations ? Le débat est lancé et chacun a droit d’avoir son opinion. Cette bd va traiter sur un aspect plutôt méconnu mais qui a été remis au goût du jour via un film en 2006 intitulé « Indigènes ». La France a puisé dans ses colonies pour envoyer au front en première ligne des combattants de couleur. Tout irait bien si ce n’est que le postulat était de se battre et de mourir pour la patrie. Oui mais ces habitants n’avaient pas le titre de ressortissant pleinement français. C’est un peu comme si on n’avait que des devoirs et non pas de droits. Et pourtant, des milliers de ces combattants de couleur se sont fait massacrés dans un conflit qui les dépassait. Bref, on voit également poindre un débat sur l’identité nationale. C’est donc une bd qui met à l’honneur ces gens déracinés de leur pays respectif pendant la Première Guerre Mondiale à travers le 11ème régiment des tirailleurs de Constantine et le soldat Mourad. On connait tous l’horreur de cette guerre de tranchée où la valeur humaine était déconsidérée par des militaires haut gradés comme le maréchal Joffre. Au nom de la victoire et de terrain gagné sur l’ennemi, on n’hésitait pas à massacrer des milliers, non des millions de soldats. Aux 1.5 millions de mort côté français, s’ajoutent bien évidemment 6 millions d’handicapés et d’atrocement mutilés et 4 millions d’orphelins. On ne pourra pas croire au « plus jamais ça » car 20 ans après rebelote ! Cette bd ne sera pas très agréable au regard de la dureté du sujet. Elle a le mérite de nous éclairer un peu sur les conditions de ces soldats provenant des colonies notamment au travers de la partie documentaire à la fin. Après cela, on ne pourra que se dire qu’ils sont morts pour notre liberté et qu’ils méritent bien plus que notre respect. Cependant, la gratitude n’est pas l’apanage de notre société.
Les récits de guerre sont parait-il extrêmement surveillés en terme de véracité. Cothias disait pour son L'Ambulance 13, que l’histoire avait été disséquée pour vérifier que tout ce qui entourait le récit était véridique, et il ne s’agissait pas d’une simple formalité, les n° de compagnie, leur présence dans les villages décrits, le fait qu’il y ait bien des attaques ennemies ce jour là, avec le bon n° d’armée en face, avec la bonne méthode d’attaque (en cas d’attaque au gaz ou avec l’aviation par exemple, cela va même jusqu’à vérifier que la compagnie était bien équipée de ce type de peigne à tant de dents…). Bref, lorsqu’un opus parait sur la première guerre mondiale qui raconte que l’antépénultième compagnie a attaqué le 12 thermidor le village de Douillois et qu’en face ça a riposté à la mitrailleuse, on peut le croire… Cet opus tente de nous raconter un double destin, celui de ces Français des colonies venus en métropole défendre la mère patrie contre un ennemi qu’il ne connaissait pas. L’auteur raconte ici ces missions désespérées que tout le monde savait lourdes en pertes humaines confiées à ces combattants au sang de même couleur, mais de moindre importance. L’exercice est louable, et l’auteur arrive à présenter ce mélange de sentiments, entre l’acceptation de la fatalité, la fraternité des combattants, le courage de tous ces hommes que l’on croise qu’ils soient d’origine métropolitaine ou coloniale, le respect que seuls quelques xénophobes viennent perturber. En cela, bravo, mais hélas il n’y a pas d’histoire. L’album est une succession de récits de guerre, sans lien, sans liant. Le lecteur passe d’un bombardement à l’autre, d’une tuerie à l’autre avec le seul fil conducteur de deux personnages. Les multiples allers-retours temporels ne suffisent pas à construire un récit. Graphiquement, le trait montre avec un certain talent la violence des combats avec ce qu’il faut de réalisme et ce qu’il convient d’abstrait. La colorisation participe à cet ensemble transcrivant avec justesse le contenu des combats. Le style me fait un peu penser à Notre Mère la Guerre dans la vision « cabossée » des personnages et des décors. La lecture finit mitigée. Malgré l’absence de scénario, le ton me semble pertinent pour une œuvre de présentation. Absolument pas militante ou dénonciatrice, le lecteur visualise ce qu’il connaissait déjà, mais ce rappel fait du bien. Bref la lecture en bibliothèque fera certainement du bien, mais de là à l’avoir chez soi, le trop grand pas ne sera pas franchi malgré le dessin de qualité.
Une histoire attachante et tout en pudeur sur les tirailleurs algériens de la guerre de 14, dont on suit un destin particulier, mais aussi un travail de fond, que l'on sent à travers la transcription du récit et les dossiers de fin, très intelligents comme ceux de Sir Arthur Benton du même auteur d'ailleurs, une marque de fabrique agréable à suivre. Car ici il est question de mémoire et de réconciliation, à notre époque chaotique ce n'est pas du luxe. Enfin le graphisme est tout en nuances de couleurs sobres et au trait fin, achevant de tenir la cohérence du récit, une bonne découverte.
La France traverse actuellement une crise identitaire sans précédent, et la place de ceux qui sont nés dans un autre pays devient de plus en plus contestée par les autorités. A l'heure où l'on clame la prédominance de la patrie, il est bon de rappeler que nombreux furent ceux, nés sous d'autres horizons que les frontières actuelles, qui ont donné leur vie pour cette... patrie. Qu'on les appelle tirailleurs (sénégalais, algériens...) ou tout simplement Turcos (surnom donné par les soldats russes, confondus par les tenues des soldats concernés), il est vital de se souvenir d'eux. C'est ainsi que Kamel Mouellef, entrepreneur (je ne sais pas de quoi et au final cela n'a aucun intérêt) a voulu raconter l'histoire de son arrière-grand-père, dont le régiment a participé à toutes les batailles du front français de 14-18. Il s'agit bien sûr d'une fiction, placée dans le cadre historique de la Der des Ders (pour le tome 1 du moins). Cette oeuvre de mémoire est salvatrice, complétée par des bonus en fin d'album racontant les conditions de vie de ces soldats, la façon dont ils furent reconnus, etc. de nombreuses photos de ces combattants émérites et de leurs sépultures sont aussi présentes. Un récit très intéressant, puisque nous voyons la façon dont sont utilisés ces soldats, parfois pour des tâches un peu ingrates. le récit se lit sans grande gêne, avec le dessin semi-réaliste de batist, qui fait du beau boulot même si on est loin d'un Tardi en termes de style, par exemple. Il y a tout de même un souci en termes de narration. Les transitions entre les différentes parties du récit me semblent un peu artificielles, et on se perd parfois entre les deux personnages principaux, Mourad et Alouache. Mais malgré ces petits défauts, il faut saluer le travail de l'éditeur, qui a réalisé une superbe maquette, à la hauteur de l'album.
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