Sous l'entonnoir
Sibylline raconte son séjour en hôpital psychiatrique.
Douleurs intimes La BD au féminin Mirages
Après "Premières fois" et "Le Trop Grand vide d'Alphonse Tabouret", Sibylline se lance dans l'autobiographie. Remontant le fil de ses souvenirs, elle relate son séjour à Sainte-Anne. Elle y est même retournée, non sans appréhension, pour récupérer son dossier lors de l'écriture de Sous l'entonnoir. Puis elle a passé la main à Natacha Sicaud... pour une très belle collaboration et un album tout en finesse. (texte : Delcourt)
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Date de parution | 19 Octobre 2011 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Alors que je me réjouissais de lire une nouvelle BD de Sybilline, dont j'apprécie plusieurs œuvres, je me suis retrouvé devant une BD qui m'a laissé complètement de marbre. Et même, devrais-je dire pour être honnête, qui m'a semblé ennuyeuse. La faute, selon moi, à un découpage en chapitres très courts et qui se contentent de montrer la vie qu'elle mène dans cet hôpital psychiatrique. Mais globalement tout manque : l'implication dans le personnage, dont j'étais distant tout au long de ma lecture; l'ambiance de cet hôpital, que je n'ai pas du tout ressenti (a part l'ennui, mais je crois que je transposais mon émotion sur la BD); le cœur de l'histoire, à peine évoqué, sur les raisons de cet enfermement et les conséquences sur le personnage principal. En fin de compte, je ne sais pas vraiment pourquoi elle y est allée (en dehors de sa tentative de suicide et des raisons génétiques, mais lesquelles ?), je me demandais pourquoi on la gardait, ce qu'il se passait dans sa famille, pourquoi elle voulait tant sortir, et je n'ai eu aucune réponse. Les rares passages où elle s'exprime n'ont fait qu'ajouter à ma confusion, et seuls quelques documents présentés à la fin donne un semblant de pistes (comme le fait qu'elle soit déprimée ou le rapport avec ses parents). Donnant une Bd qui ne développe pas du tout cet aspect du personnage. Je peux comprendre qu'il y eut un choix de montrer l'intérieur de l'hôpital psychiatrique uniquement, mais là du coup j'étais largué et je ne m'intéressais pas à elle. Niveau dessin ce n'est pas mal, quoique souvent vide. Je ne sais pas si c'est volontaire pour accentuer le vide de l'hôpital ou si c'est une façon de l'auteur, mais je trouvais quand même ça un peu vide au fur et à mesure qu'il ne se passait rien. Bref, en gros une histoire que je n'ai pas aimée, et dont je ne recommanderai pas la lecture. Ça n'est pas mauvais, mais en tout cas ça ne m'a pas du tout plu !
Il arrive que la solution passagère soit l'hôpital psychiatrique... J'ai bien envie de rééditer ce sale coup de mettre 4 étoiles sans conseiller l'achat, parce que le sujet peut paraître lourd et angoissant et on n'a pas nécessairement envie de recroiser cette histoire dans sa bibliothèque. Elle est tellement réaliste. La composition en chapitres courts permet de rythmer l'ennui. Les dialogues, la voie intérieure du personnage, les silences sont assemblés de telle sorte que l'ennui est palpable mais pas douloureux, pas inquiet. On a l'impression que cette obligation d'observer les autres qu'elle se choisit est une part de son traitement. Le propos et le dessin sont tellement bien accordés que c'est surprenant de constater que deux personnes différentes ont accouché de cet album. l'aplat vert-bleu hôpital qui baigne l'épisode, donne un aspect frontal, qui convient aussi bien à la situation : on est arrêté par cette masse indéfinie (pas beaucoup de meubles) comme l'héroïne par les murs de l'établissement. La stylisation des corps est poussée vers une expression très juste des personnalités, et de leurs humeurs. Les dimensions, les proportions de ses corps ont une grande présence : très peu de décors, aucune ombre, seulement des aplats et des traits, peu. Peu de cases par page aussi. Je ne vois pas de meilleure manière de faire partager cette place "sous l'entonnoir". Une simplicité, une franchise intelligente qui transperce nos carapaces. La place de chacun (médecin, infirmières, parents, patients, impatients...) est défendue avec grâce. Un sens de l'observation silencieuse rarement égalé, et un sourire en coin dans les nombreux moments où la personnalité refait surface. Le vert d'eau omniprésent rebute à l'abord, mais n'hésitez plus, plongez dans cet parenthèse d'étrangeté.
Récit autobiographique d'une jeune femme internée pour tentative de suicide, "Sous l'entonnoir" est une BD intéressante et très touchante. Le dessin est simple mais soigné, le trait suffisamment forcé pour que l'on reconnaisse les personnages et il permet de vraiment bien rentrer dans l'histoire. Le récit est très prenant, vraiment bien écrit. La narratrice nous mène par petites touches, à la fois dans la description de l'asile où elle est internée et dans les raisons qui l'ont conduite ici. J'ai bien aimé la façon dont l'essentiel est très factuel, comme un témoignage ou un reportage, tout en restant très simple, et en même temps, le regard du personnage, qui est en train de vivre une expérience vraiment pas évidente, est toujours présent, et c'est émouvant. À son arrivée, elle est attachée au lit, sanglée, et décrit très bien à quel point cela lui est insupportable. La suite est à l'image de cette scène : en la lisant, on la ressent saine d'esprit, et la voir interdite de sortie est difficile à supporter. En même temps on ressent bien l'impuissance du personnel médical à traiter mieux que cela les cas qui leur sont confiés. Un témoignage intéressant et émouvant, même si peu approfondi, du traitement des "fous" dans nos hôpitaux.
Sous l'entonnoir est le récit autobiographique d'un internement d'un mois en hopital psychiatrique que la scénariste a vécu il y a une quinzaine d'années quand elle n'avait pas encore 18 ans. Les faits sont présentés par les yeux de l'internée elle-même et non pas vus de l'extérieur. Du coup, il y a bien peu d'explications sur les raisons qui l'ont menée là, sur ce que les psychiatres pensent d'elle et sur son traitement. Même si nous sont présentées les événements qui l'ont amenée à être internée, on ne sait pas tout au long du récit si elle est vraiment malade et si oui, de quoi. Par contre, on est bien mis en présence de sa réaction à cet environnement fermé qui l'entoure, les autres pensionnaires dont certains semblent particulièrement atteints tandis que d'autres paraissent aussi normaux que vous et moi, le comportement des médecins et infirmiers, mais surtout je le répète comment la scénariste elle-même l'a vécu à l'époque, ce qu'elle a pensé, les quelques discussions et relations qu'elle a pu avoir, l'inconnu sur la date possible de sa sortie et même sur la question de savoir si elle allait vraiment pouvoir sortir ou pas. C'est un ouvrage qui se lit relativement vite malgré son nombre conséquent de pages car la narration est légère et les dialogues relativement peu bavards. Bref, ce n'est pas un ouvrage fastidieux comme j'aurais pu le craindre sur un sujet aussi compliqué. C'est intéressant et plutôt bien raconté. Et j'ai apprécié d'avoir un aperçu en fin d'album des véritables rapports de psychiatre confirmant les faits ainsi décrits et expliquant un petit peu mieux de quoi souffrait la scénariste. Inversement, j'ai eu un léger sentiment de superficiel. L'album ne rentre pas tellement dans le détail, ce dont souffre l'auteure n'est pas une maladie aussi complexe que la schizophrénie ou un trouble bipolaire, et son séjour en hôpital se révèle finalement assez court, presque comme une passade certes marquante mais rapidement close de manière définitive. Il est clair que c'est ce qu'on peut espérer de mieux pour quelqu'un étant amené à faire un tel séjour, qu'il ne se répète surtout pas et ne s'éternise pas, mais du coup j'ai eu un léger sentiment d'anecdotique. La lecture passe donc de manière plaisante et instructive mais elle marque relativement peu l'esprit, juste ce qu'il faut pour ne pas plomber l'esprit, ce qui est bien, mais pas suffisamment pour transmettre son lot d'émotions et imprimer sa marque à mon goût.
Nombre d'auteurs, depuis une vingtaine d'années, ont intégré l'autobiographie à leur oeuvre, certains en ont même fait en quelque sorte, leur signature. Sibylline, dont la voix est singulière dans le paysage du 9ème Art, y est passée à son tour, pour nous raconter l'épisode le plus douloureux de sa vie. Après le suicide de sa mère, lorsqu'elle avait 7 ans, la petite fille puis adolescente traîne son mal de vivre. Jusqu'à tenter elle-même de mettre fin à ses jours par absorption massive de médicaments, à 17 ans. Mais elle est sauvée par un ami, qui alerte les secours, et la jeune fille se retrouve en hôpital psychiatrique. C'est cette expérience qui nous est contée. Les gens vraiment dérangés, ceux qui font semblant, les médecins paternalistes, beaucoup d'éléments sont présents, mais Sibylline n'en rajoute pas, se concentrant sur son rapport aux autres, sur la façon dont elle vit ce séjour. Celui-ci durera un mois, jusqu'à ce qu'elle convainque un médecin de sa bonne santé mentale. C'est très émouvant, le récit est linéaire et se suit sans problème. Il a dû en falloir du courage à Sibylline pour revenir sur cette période pour le moins compliquée de sa vie, allant jusqu'à récupérer son dossier médical à l'hôpital Sainte-Anne. Comme elle le dit en postface, racontant ce retour, elle n'a pas écrit tout cela pour réparer quoi que ce soit, mais simplement pour en faire une histoire, qui ne feront plus jamais mal. Je tire mon chapeau à la jeune femme, et j'espère qu'elle profite pleinement de la vie à présent. C'est Natacha Sicaud qui met en images cette histoire, et j'avais déjà loué ses qualités sur Sauve qui peut. Ici encore elle illustre une autobiographie, celle-ci plus "complète", et s'en sort avec les honneurs, illustrant sobrement cet épisode. Un petit 3,5/5, car je pense que le public auquel cet album parlera n'est hélas pas très nombreux.
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