Les Beaux jours reviennent
Et si l'extrême-droite gagnait les élections ? Adaptation du roman de Zilber Karevsky.
Adaptations de romans en BD Les petits éditeurs indépendants Racisme, fascisme
Au lendemain des élections présidentielles, Joseph Lapouthre, professeur au lycée Georges Brassens, découvre les nouvelles directives du Ministère. Désormais, l’enseignement de la Bible est rétabli, afin de lutter contre «l’islamisation» du pays. Parallèlement, des milices gouvernementales sont constituées et la propagande anti-immigrés attise les tensions. Joseph assiste, résigné, au licenciement de ses collègues grévistes. Parmi leurs remplaçants : Marie, une jeune femme lumineuse. Du moins en apparence... (texte : Même pas mal)
Scénario | |
Dessin | |
Editeur
|
|
Genre
/
Public
/
Type
|
|
Date de parution | Avril 2012 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Si techniquement la note de cette BD devrait être plus de 3/5, j'ai tout de même mis un petit quatre, car cette BD possède indéniablement plusieurs qualités. J'aime beaucoup la BD quand elle permet de s'ouvrir et de réfléchir, pas seulement de s'évader un court instant. L'art au service du monde, c'est un concept que j'affectionne tout particulièrement. Et là, dans ce cas précis, je me suis régalé de ce principe. L'auteur a développé son histoire sur le simple principe d'une victoire aux élections de l'extrême-droite (avec ici un candidat fictif) et consacre le récit à montrer comment les principes premiers de ce parti vont s'appliquer dans la France actuelle, celle qui possède Internet et les médias, la technologie et la science. C'est assez net que l'auteur à voulu montrer tout ce qui le répugne et l'horrifie dans un discours d'extrême-droite chrétien, conservateur et moralisateur. Le propos est assez virulent et un peu grossier, mais il est aussi très juste car il ne fait pas dans la fiction. Il cible juste tout un discours que nous entendons régulièrement dans les médias, tenu par des personnes sensées et -malheureusement- écoutées/votées/élues. Le personnage principal semble être assez effacé au début, mais j'ai beaucoup aimé la représentation d'un homme qui est indigné de ce qui arrive et s'effraye de la tournure que prend son pays, toutes ses dérives de plus en plus marquées et les horreurs qu'on peut y trouver progressivement. Mais en même temps, tout sonne très juste, et lorsque le héros allumait sa télé pour écouter les informations, j'avais l'impression d'entendre un journal TV actuel. Comme quoi, le trait un peu grossier tape tout de même très juste. C'est vraiment saisissant dans la formulation et la manière de présenter les choses. Les dérives s'accentuent petit à petit, sans grosse imposition d'une dictature ou d'un état policier, mais dans des petits gestes qui s'accumulent. De ce côté, il y a un caractère presque vicieux avec l'enchainement des directives, toujours aux noms de grands principes simples. Certains sont juste symbolique (changement du nom du lycée George Brassens), mais très fortement connotés. Évidemment, le propos n'est pas celui d'un 1984, et l'auteur semble vouloir montrer que ce ne serait pas une fin du monde, que la société actuelle ne serait pas si facilement transformée en dictature, et j'ai bien aimé ce petit côté optimiste. D'ailleurs il faut noter que l'on peut voir, de manière très cynique, qu'il y aurait -presque- des bons côtés à un tel état, mais c'est très noirci tout de même. Le trait est pas mal du tout, entièrement en noir et blanc et assez charbonneux, mais je l'ai beaucoup aimé. Il est simple, et bien que certaines cases semblent un peu déroutante, la BD se lit sans le moindre mal d'un bout à l'autre. Dans la généralité, le petit nombre de page oblige l'auteur à faire certains raccourcis et quelques clichés, mais dans l'ensemble j'ai trouvé le récit très bien construit. Ce qui fait sa force, c'est surtout qu'il interpelle et qu'il invite à considérer une société qui se veut éclairée, qui se dit ouverte, et qui vote aussi massivement à l'extrême-droite. Le propos n'est pas politisé, ne visant pas un parti précisément. Il vise simplement cette branche politique en général, son discours et son attitude. En tout cas, la BD vaut la peine d'être lue et aura encore plus d'impact dans quatre ans, invitant peut-être certains personnes trop enclin à voter rapidement à reconsidérer leur geste. Contre un petit bout de papier dans une urne, un gros tas de papier dessiné peut jouer. A lire, car après tout, en ce moment, les beaux jours reviennent aussi.
On assiste, aux alentours des grandes élections, à une floraison d'oeuvres qui font la part belle à la caricature, ou se penchent sur l'histoire de tel ou tel parti, ou telle ou telle personnalité politique. Mais peu prennent le risque de la politique-fiction. Manolo Provo répare cet oubli en nous mettant dans la situation d'un pays transformé en peu de temps par une extrême droite qui accède au pouvoir, au travers du regard d'un prof de maths-physique. Retour des cours de morale... chrétienne, retour de la conscription à partir de 14 ans, condamnation des grèves, mariage obligatoire pour tous les couples, ghettoïsation, avortement criminel, caméras dans les rues, les classes... Bien des clichés y passent, mais pas tous. Cependant le message est clair, cette dérive finira mal, très mal... De manière très simple, Manolo Provo montre cette (pas si) lente descente aux enfers d'une société entière. C'est bien sûr très exagéré, mais ça fait peur. Provo parvient à captiver très vite son lectorat, grâce à une narration claire, à des situations bien amenées. Il y a des petites défauts de rythme par-ci par-là, mais rien de bien méchant. Graphiquement Provo se situe entre Mazan et Alfred, son trait gras, charbonneux souligant bien un style fort agréable à l'oeil, dans une ligne claire décomplexée qui est une belle découverte. Et je trouve le titre excellent. A lire.
Site réalisé avec CodeIgniter, jQuery, Bootstrap, fancyBox, Open Iconic, typeahead.js, Google Charts, Google Maps, echo
Copyright © 2001 - 2024 BDTheque | Contact | Les cookies sur le site | Les stats du site