Le Tueur de la Green River (Green River Killer)
Will Eisner Award 2012 : Best Reality-Based Work. L'histoire du plus grand tueur en série de l'histoire des Etats-Unis.
1961 - 1989 : Jusqu'à la fin de la Guerre Froide Dark Horse Comics Les grandes affaires criminelles Serial killers Will Eisner Awards [USA] - Côte Ouest
Dans les années 1980, la priorité de la police de Seattle était l’appréhension du « tueur de la Green River », surnom du meurtrier de douzaines de femmes. Mais en 1990, alors que le nombre de crimes s’était élevé à au moins quarante-huit, l’affaire a été remise aux mains d’un seul détective, Tom Jensen. Après vingt ans, Gary Leon Ridgway finalement confondu grâce à une recherche ADN est interrogé par Jensen pendant 180 jours...
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Date de parution | 10 Mai 2012 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Un simple travail d'enquête sur vingt ans - Il s'agit d'une histoire complète indépendante de toute autre, en noir & blanc, initialement parue en 2011. Le scénariste est Jeff Jensen, le fils de Tom Jensen ; l'illustrateur est Jonathan Case. En 1965, à 16 ans, Gary Leon Ridgway poignarde un jeune enfant de 6 ans, juste pour savoir ce que ça fait de tuer quelqu'un. Pendant les années 1970, Tom Jensen fait son service militaire dans la marine, puis il s'engage dans la police dans la région de Seattle. En juin 2003, Gary Ridgway est transféré secrètement dans le commissariat où Jensen est devenu détective pour être interrogé. Il est inculpé de 4 meurtres attribué au tueur en série appelé Green River Killer. L'enjeu pour les policiers qui l'interrogent est de déterminer l'étendue de sa culpabilité, c'est à dire d'acquérir la certitude qu'il s'agit bien du tueur en série et qu'il est bien le responsable d'une quarantaine de meurtres. Outre les interrogatoires, il faut organiser des sorties sur le terrain pour retrouver les cadavres de ses victimes dont il se souvient avec plus ou moins de précision des endroits où il les a laissés, ou enterrés. Au cours de ces journées, Jensen se souvient des 20 années qu'il a passé à enquêter sur ces meurtres. Dans le bref mot de remerciements, Jeff Jensen indique qu'il a souhaité écrire ce comics pour mieux comprendre son père, Tom Jensen. Le tueur en série de la Green River a réellement existé (en 2012 il purge toujours sa peine de prison) et Tom Jensen a fait partie de l'équipe constituée pour le traquer. Jensen a la particularité d'être un simple détective de police, pas un expert en tueurs en série. D'une certaine manière, il s'agit d'un fonctionnaire effectuant le travail routinier de l'enquête, les recueils de faits, la rédaction des rapports minutieux, la saisie des éléments dans les bases de données, etc. Jeff Jensen le présente comme un individu affable, déterminé, obstiné, sans être obsessionnel. Il apporte quelques touches personnelles telles que la chanson favorite de son père ( In-a-gadda-da-vida d'Iron Butterfly), son habitude de fumer malgré les observations de ses collègues, son canard en plastique dans son tiroir, etc. Jeff Jensen a construit une biographie de son père très particulière, évitant le sensationnalisme, évitant l'approche psychologique, évitant la fascination pour le tueur en série, refusant la psychanalyse, proscrivant les coups de théâtre, la mise en scène par les médias, la dramatisation, etc. Bref Jeff Jensen fait attention à ne jamais transformer cette histoire en spectacle. Au contraire, il s'attarde sur la rigueur de la démarche policière, les aspects les plus prosaïques de l'enquête, les culs-de-sac, les années qui passent sans résultat, sans avancée, et la banalité de la personnalité de Gary Ridgway pendant les interrogatoires ou les recherches des cadavres. Il réussit à faire transparaître l'horreur des actes de Ridgway sans jamais recourir à une scène choc, à une mise en scène de meurtre, ou à des déclarations sadiques ou haineuses. Il n'y a pas d'analyse psychologique du tueur ou de Tom Jensen. Il y a quelques faits biographiques de Jensen (études, mariage, déménagement, carrière) et son travail patient et déterminé. Au-delà du récit passionnant sur ce travail de fourmi, Jeff Jensen montre, avec une économie de moyens remarquable, l'évolution des convictions et des motivations de son père au travail, ainsi que sa conviction inébranlable de travailler à quelque chose d'utile. J'ai été sidéré par l'aisance avec laquelle Jeff Jensen a su rendre compte de l'angoisse existentielle latente inhérente à consacrer 20 ans de sa vie à une entreprise dont il n'est pas possible de connaître l'issue, dont il n'est pas possible de savoir s'il est possible d'atteindre le but que l'on s'est fixé. Tom Jensen consacre sa vie professionnelle à déterminer l'identité du tueur de Green River, sans assurance de réussir. Au fil des pages, le lecteur ne peut que s'interroger sur l'absurdité d'un tel engagement, sur l'espoir fallacieux d'aboutir, sur l'inanité de la vie, son manque de sens. À partir d'une série de meurtres abjectes et de la détermination d'un fonctionnaire ordinaire, Jeff Jensen saisit une question philosophique des plus difficiles, des plus délicates, des plus essentielles : quel est le sens des actions d'un individu, quel est l'intérêt d'une vie professionnelle, à quoi ça sert ? Il le fait sans jamais être démonstratif, ou pédant, mais sans qu'il soit possible au lecteur de passer à coté de ce thème. Il réussit le tour de force de faire douter le lecteur quant au bienfondé de l'obstination tranquille de Jon Jensen, alors même le résultat en est connu. Cette histoire terrible est mise en images par Jonathan Case, en noir & blanc, sans niveaux de gris. Il utilise un style réaliste, avec une simplification des textures et des ombres portées, pour des dessins très faciles à lire, également dépourvus de tout sensationnalisme. Case a une mission difficile : décrire les individus de la manière la plus prosaïque qui soit, tout en faisant en sorte que les images apportent quelque chose aux dialogues. À nouveau l'économie de moyens est remarquable et le résultat redoutablement efficace. Jensen et Case sont complémentaires dans leur approche de la narration. Jensen compose des scènes qui incorporent des mouvements, des déplacements, des interventions de nouveaux individus, des gestuelles. Tous ces éléments fournissent de la matière à Case pour éviter scène après scène de dialogues avec uniquement des dessins de têtes en train de parler, avec un phylactère. Au lieu de ça, le lecteur est en présence d'individus vivants ayant une gestuelle naturelle, des expressions de visage normales et parfois ambigus. Les illustrations en retenue de Case mettent en avant la banalité des individus, la quotidienneté des actions. Tout son savoir faire est mis au service d'une mise en page rigoureuse avec des personnages normaux et ordinaires, dans des mises en scène vivantes, sans être spectaculaire. Le lecteur reconnaît ce quotidien, il se sent proche des actions de ces individus et l'immersion est intense. Du coup chaque élément sortant de l'ordinaire prend un relief incroyable et occasionne un ressenti émotionnel fort dû à son incongruité dans un environnement si normal. Jeff Jensen et Jonathan Case réussissent la gageure d'impliquer le lecteur dans une enquête laborieuse étendue sur 20 ans, en créant un suspense psychologique basé sur d'autres ressorts que la simple dynamique chassé / chasseur. Ils mettent en scène les approches irréconciliables du tueur et du fonctionnaire de police, mais aussi l'impossibilité d'appréhender un comportement aussi aberrant et monstrueux par rapport aux normes sociales, et l'engagement sans faille de Tom Jensen dans cette enquête. Ils transmettent le point de vue de Tom Jensen, sans bulles ou cellules de pensée, un tour de force.
Vaguement romancée à la marge, l’album s’intéresse à une terrible affaire criminelle ayant frappé la région de Seattle, le tueur en question étant soupçonné d’avoir tué plus de 70 femmes. Un spécialiste des tueurs en série détaille l’affaire et la personnalité du tueur dans une préface, l’album en lui-même se concentrant sur l’enquête, et surtout les interrogatoires menés avec le tueur une fois celui-ci arrêté. Avec des flash-back (débuts des années 1980 pour les premiers crimes et investigations, puis 20 ans plus tard pour la résolution de l’affaire). Mais c’est aussi une histoire de famille et un hommage rendu à l’opiniâtreté, à l’obstination dont a fait preuve le principal enquêteur, qui a consacré toute sa carrière et une bonne partie de sa vie à cette affaire. Cet homme n’est autre que le père du scénariste, aujourd’hui journaliste, et qui a du coup vécu en partie – de l’extérieur – cette traque (et les conséquences pour la vie de son père), et qui lui rend donc ici hommage. L’histoire se laisse lire, la construction est globalement bien fichue. Et – comme d’autres du même genre – ce tueur fait froid dans le dos. La façon détachée qu’il a de parler de ses meurtres, de sa nécrophilie… Douloureuse histoire, mais bien narrée, les amateurs de ce type de dossier y trouveront leur compte.
Honte à moi car le nom de Gary Leon Ridgway ne me disait absolument rien avant de lire ce one shot. Pourtant il est considéré comme le plus grand tueur des Etats-Unis d'Amérique et ce n'est quand même par rien comme distinction. J'avais entendu parler de Ted Bundy , de Berkowitz ( plus connu sous le surnom de Fils de Sam ) ou encore d'Ed Gein mais par contre le tueur de la Green River m'était totalement inconnu. C'est sans doute pour cela que cette BD m'a tellement plu car j'ai découvert l'intégralité de cette histoire . Mais parlons-en de l'histoire de cet album, elle est très originale car on suit l'enquête effectuée par le détective chargé de l'enquête pendant plus de vint ans. Vu que cette histoire est vraie (c'est le fils de l'enquêteur qui scénarise ce one-shot) on n'a pas du tout l'impression d'être mené en bateau. On suit cette enquête comme un documentaire , avec des passages qui nous décrivent des scènes de la vie privée de Tom Jensen, même si c'est quand même l'enquête de sa carrière qui prédomine dans ce pavé de plus de 230 pages. De plus le scénariste n'oublie pas de s'attarder sur l'interrogatoire de ce tueur hors norme pour notre plus grand plaisir. J'ai trouvé cette partie de l'histoire très intéressante, car on a l'impression de participer à cet interrogatoire . Par contre on s'aperçoit qu'une enquête policière ne ressemble en rien à ce que l'on peut voir dans les films américains où les flics passent leur temps à courir ,à tirer sur les "méchants" et à s'engueuler avec leurs collègues. Ici il n'y a quasiment pas d'action , on suit juste une enquête criminelle sur les scènes de crime ou dans les bureaux d'un poste de police. Cette histoire est d'un réalisme effrayant et c'est pour cela qu'elle m'a plu à ce point. Le dessin est simple mais très réussi. Le noir et blanc s'accorde à merveille avec ce récit policier tiré d'une histoire vraie. Si comme moi vous ne connaissiez pas ce sérial killer , n'hésitez pas à lire ce one shot car vous découvrirez des personnages hors du commun , que ce soit le tueur ou bien celui qui finira par l'arrêter. Même ceux qui connaissaient son nom ne regretteront sans doute pas de s'être lancé à la poursuite du tueur de la Green River.
Intéressante cette reconstitution de l'enquête de police sur le plus grand tueur en série de l'histoire des Etats-Unis. Ce n'est pas vraiment l'histoire du monstre qui est décortiquée, mais plutôt la façon dont a été conduite l'enquête, en particulier par un détective qui s'est retrouve à un moment presque seul sur le dossier. Il s'agit en fait du père du scénariste, lequel a voulu rendre hommage à cet homme qui a passé près de 20 ans (autant dire l'essentiel de sa carrière d'inspecteur, enfin, de détective) sur cette affaire. On passe donc des débuts de Jensen, dans les années 1990, jusqu'à sa retraite, après avoir interrogé pendant 188 jours (six mois, au jour près) celui que l'on a appelé le Tueur de la Green River. Un homme qui avoua le meurtre de plus de 70 femmes, toutes des prostituées professionnelles ou occasionnelles, qui accepta, après sa capture, de collaborer avec les services de police pour retrouver les corps de ses victimes. mais les années passant, sa mémoire s'est émoussée, et seuls les deux tiers des restes ont pu être trouvés... L'ampleur du phénomène fut tel qu'un autre tueur en série, Ted Bundy, offrit même ses services aux autorités pour le coincer. Gary Leon Ridgway était pourtant un homme paisible, rangé, marié, père de famille (d'un petit garçon qui lui permettait parfois, sans le savoir, d'amadouer ses futures victimes...). Le détective Jensen essaya de le comprendre, essayant de ne pas se laisser attendrir par cet homme un peu pataud, coopératif. L'hommage à son père par Jeff Jensen est assez réussi, on sent l'homme parfois déchiré par ses convictions profondes, son dégoût pour le monstre qu'il côtoie (pour des raisons de sécurité, Ridgway sera installé dans le poste de police pendant son interrogatoire). Le récit fait sans cesse des aller-retours sur plusieurs périodes d'enquête, ne jouant absolument pas la carte du voyeurisme morbide, malgré quelques cadavres par-ci par-là. Il y a très peu d'action, l'essentiel du récit étant constitué des conversations entre les flics et le tueur. On ne peut s'empêcher de penser à l'excellent film de David Fincher Zodiac, tant la démarche, centrée sur un enquêteur, est similaire.
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