Alack Sinner
Angoulême 1978 : Prix œuvre réaliste étrangère Angoulême 1983 : Alfred meilleure BD de l'année pour le tome 2 Alack Sinner, le détective qui marche au Prozac. Les dépressifs s'abstiendront.
Angoulême : récapitulatif des séries primées Auteurs argentins Best of 1970-1979 Charlie Mensuel Détectives privés El Vibora Frigidaire Linus New York
Né dans un quartier pauvre de New York, Allack Sinner a quitté les flics et est devenu détective privé Solitaire, lucide et sarcastique, il évolue dans un univers en déliquescence, où règne la pauvreté, le racisme et la misère sociale. Cette série, écrite et dessinée par deux Argentins expatriés en europe, prend souvent des allures politiques et sociales. Les deux auteurs cherchent toujours à trouver le peu d'humanité qui reste au milieu de la crasse.
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Date de parution | Mai 1977 |
Statut histoire | Une histoire par tome 7 tomes parus |
Les avis
Ce personnage atypique qui promène son blues dans les bas-fonds newyorkais, au sein d'un univers glauque peuplé de marginaux, de flic véreux, d'avocats marrons, de maquereaux sadiques, de junkies et de raclures en tous genres, m'a rappelé les personnages souvent déglingués des romans noirs de David Goodis, aussi lorsque je m'attaque à ses aventures en 1976 dans Charlie Mensuel, je pense trouver une certaine satisfaction, ayant toujours été fan des romans noirs U.S., mais j'ai ensuite déchanté. Au début, ça allait, le personnage de Sinner, ami des laissés pour compte, se situait dans la lignée des grands héros américains des romans noirs de ma jeunesse, tout en étant différent des privés hollywoodiens, il va à l'encontre des héros monolithiques, c'est un véritable anti-héros que je trouvais intéressant par son passé douloureux, plus que pour ses enquêtes; c'est un héros torturé d'une grande richesse, un apôtre de la dérive, à la recherche de lui-même, un homme brisé mais doté d'une forte volonté qui l'aide à surmonter la crasse qui l'entoure. La psychologie des personnages est donc plus importante dans cette bande que l'histoire elle-même. Mais ce ton mélancolique, voire morbide a fini par m'ennuyer, par son aspect déprimant, renforcé par la technique graphique de Munoz un peu heurtée qui n'en fait pas une Bd facile d'accès; pourtant au début, le dessin utilisait un savant noir et blanc et des clairs-obscurs remarquables pour créer une atmosphère de cauchemar réaliste, influencé par Hugo Pratt (dont Munoz avait suivi les cours), mais au fil du temps, le dessin devenait de plus en plus épuré, parfois difforme et donnant une impression de bâclé qui a fini par me détourner de cette série. Et ce n'est pas les prix d'Angoulême qui m'impressionnent, ces récompenses étant comparables aux prix du Festival de Cannes, des prix décernés par une élite intellectuelle qui ne reflète pas forcément les goûts du grand public, et qui ne garantissent pas forcément une oeuvre de qualité.
Il y a seulement deux BD qui ont été récompensées à deux reprises lors du Festival d'Angoulème: Maus de Spiegelman et Alack Sinner de Munoz et Sampayo; c'est dire la qualité de cette série qui traverse les années Reagan à New York pour nous conduire jusqu'au premier mandant de Georges W Bush. Comme pour Maus, les planches sont réalisées en noir et blanc et le dessin n'est pas très facile d'accès pour le grand public. Mais la force de cette série c'est avant tout son scénario avec des répliques qui font mal, comme les coups de ces boxeurs espagnol ou polonais qui traversent la série. Alack Sinner, c'est vous, c'est le voisin d'à côté, bref Monsieur tout le monde, le anti-héros par excellence qui apparait dans le monde de la BD dans les années soixante dix. Il boit, il fume, mène une vie dissolue faite d'aventures amoureuses sans lendemain. Les deux auteurs Argentins nous décrivent ainsi sa vie intérieure tourmentée, notamment dans les trois premiers albums. Tour à tour policier dans une profession corrompue, puis détective et chauffeur de taxi, il mène l'enquête. Mais l'intérêt de la série est ailleurs, dans la psychologie d'Alack Sinner racontée par le biais de off ou apparaissent toutes les angoisses, les peurs et les joies du personnage. Les personnages secondaires, notamment féminin ont un grand rôle dans la vie d'Alack Sinner et les femmes de sa vie ont une grande personnalité, comme Sophie la Polonaise ou cette Afro-Américaine avec laquelle il aura un enfant. La série nous conduit dans les bas fonds de New York, celle de la musique, des voyous de bas étage, des maris violents.... Alack Sinner y croise aussi ses auteurs qui se mettent en scène dans un des épisodes, chose tout à fait inédite dans le monde de la BD. Autre originalité de la série, des dialogues de personages principaux qui sortent d'une voiture ou d'un appartement tandis que le dessin représenté sur la planche campe une situation tout autre ou l'on voit les personnages de la ville de New-York, des vraies gueules qui déambulent ou se disputent, témoignant du caractère hétéroclite et cosmopolite de cette capitale du monde. Les auteurs ne manquent pas de critiquer la politique américaine des différents gouvernements américains, que ce soit le soutien aux groupes para-militaires au Nicaragua, ou le jeu trouble du lobby pétrolier au moment des attentats du 11 septembre. Les derniers albums mettent en scène un Alack Sinner vieillissant, à la recherche d'un amour de jeunesse, et tentant de tisser des liens avec sa fille dont il ne soupçonnait pas l'existence. Alack Sinner est donc une série riche, tout à la fois critique sociale et politique de l'Amérique des 30 dernières années, mais aussi portrait d'un personnage lambda, torturé, tourmenté mais qui accède finalement au bonheur. Une des plus grandes BD de ces trente dernières années.
Alack Sinner traîne pour la première fois sa dégaine -en France- dans "Charlie Mensuel" n° 82 de Janvier 1975. Alack ?... C'est un ancien flic devenu détective privé. Il traîne son mal de vivre dans les bas-fonds de New-York et tente d'y survivre. Il faut dire qu'avec la faune de paumés qu'il rencontre ce n'est pas facile du tout. Heureusement, il y a son "point de chute" : le Bar à Joe. L'ambiance y est conviviale et il y oublie -pour un temps- ses tracas... Qui est-il ?... On n'en sait trop rien. Mais au fur et à mesure du déroulement de la série, les auteurs nous dévoilent un peu de son passé, dont sa jeunesse gâchée dans l'Argentine de Juan Peron. Alack est aussi un grand nostalgique. Se comprend-il lui-même ?... Il semble plutôt vivre comme un extradé qu'en véritable New-Yorkais. Cette série policière et politique bénéficie d'un graphisme influencé par celui d'Hugo Pratt (Corto Maltese). Un style d'approche "mélancolique" de bien bonne facture. En 1978, les auteurs délaissent un peu Alack. Ils entreprennent "Sophie Goin' South" (1 album paru chez Futuropolis en 1981). Ils racontent l'histoire d'une "black" apparue dans les premiers tome. Cette femme deviendra l'amante d'Alack et lui donnera une fille. En 1980, notre "héros" fait son retour dans le magazine "à suivre" et y continue ses enquêtes. Alack ?... C'est une très bonne série, généreuse dans les scénarios et le graphisme. C'est aussi une sorte d'histoire d'un rêve à l'espoir de liberté de tout opprimé. A lire en prenant son temps, dans un coin du "Bar à Joe"... Les auteurs : Le scénariste, Carlos SAMPAYO, argentin, est né à Buenos Aires le 17 Septembre 1943. Confronté à la junte militaire qui régit l'Argentine, il est contraint à l'exil et s'installe en Espagne. Il écrira de nombreux scénarios pour d'autres séries, se rangeant directement du côté des pauvres et des opprimés. Le dessinateur, José Antonio MUNOZ, argentin, est né à Buenos Aires le 10 Juillet 1942. Exilé tout comme SAMPAYO il en fait la rencontre en 1974. Son graphisme semble austère mais il y superpose une dimension symbolique, une sorte d'expression baroque dans le trait qui le libère ainsi de toute influence.
Pour moi, Alack Sinner fait partie intégrante des chefs d’œuvre de la Bande dessinée. Tant au niveau graphique que du scénario, elle réussit à séduire. Au niveau dessin, on est dans un monde en noir et blanc digne des plus belles planches de Hugo Pratt et de Comès et qui dégage une atmosphère toute particulière qui s'accorde avec merveille au texte. Tantôt les dessins sont brutaux et à d'autres moments plus harmonieux suivant les intrigues. Cela permet vraiment un dialogue entre le scénario et le dessin qui permet aux émotions d'être d'autant mieux ressenties. Qui plus est, à travers ces histoires ordinaires d'un détective privé qui ne sait pas vraiment où il en est, Munoz arrive à bien recréer l'ambiance qui devait régner dans les années 70 dans les bas quartiers de New York. Outre cet aspect, il dépeint avec finesse la psychologie des hommes vivant à la fois avec leurs regrets, et leurs espoirs. Une ambiance toutefois triste, lorsqu’on se retourne et qu'on s'aperçoit qu'on n'a pas fait tout ce qu'on voulait faire. Et puis il y a l'amour et la différence entre les cultures. Comment faire pour harmoniser tout cela, ne vaut-il pas mieux fuir... A lire absolument...
Merci à Arzak de m'avoir permis de découvrir cette série. Un personnage complexe et attachant, déprimé et révolté, romantique insatisfait. Un homme en marge de la société américaine. Avec un recul parfois cynique, jamais fataliste, il témoigne de l'abrutissement des masses, des laissés pour compte du modèle capitaliste US, des communautarismes, du ségrégationnisme et de la répression policière. Un dessin évolutif de Munoz traduisant de façon exceptionnelle les ambiances et les sentiments (disciple de Breccia et Pratt). Attention cependant, le graphisme épuré des derniers volumes ne facilite pas la lecture et pourrait apparaître comme bâclé aux yeux de certains.
Une série noire et sombre, traversée par des moments de rare félicité. Alack Sinner est un héros sombre et renfermé, solitaire et taciturne mais à certains instants la carapace se brise : devant sa fille, devant la femme qu'il aime sans avoir jamais eu le courage de l'épouser... Il y a quelque chose dans cette série que je n'ai jamais trouvé dans d'autres bds, une profondeur psychologique et une fine analyse des sentiments refoulés. Mais elle n'est pas sans défaut. Munoz ne privilégie pas toujours la lisibilité, c'est dommage, mais il s'exerce en revanche à des exercices de style et de mise en scène parfois très inventifs. A lire, et à dévorer si vous aimez le genre.
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