Mon ami Dahmer (My friend Dahmer)

Note: 4.04/5
(4.04/5 pour 23 avis)

Angoulême 2014 : Prix Révélation ex-aequo. L'auteur nous raconte son "amitié" étrange avec Jeffrey Dahmer qu'il a fréquenté au collège puis perdu de vue jusque 1991, année où fût arrêté le cannibale de Milwaukee, l'un des pires serial killer de l'histoire des USA.


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Derf Backderf a passé son enfance à Richfield, petite ville de l’Ohio située non loin de Cleveland. En 1972, il entre au collège, où il fait la connaissance de Jeffrey Dahmer, un enfant solitaire au comportement un peu étrange. Les deux ados se lient d’amitié et font leur scolarité ensemble jusqu’à la fin du lycée. Jeffrey Dahmer deviendra par la suite l’un des pires serial killers de l’histoire des États-Unis. Son premier crime a lieu à l’été 1978, tout juste deux mois après la fin de leur année de terminale. Il sera suivi d’une série de seize meurtres commis entre 1987 et 1991. Arrêté en 1991, puis condamné à 957 ans de prison, Dahmer finira assassiné dans sa cellule en 1994. Mon Ami Dahmer est donc l’histoire de la jeunesse de ce tueur, à travers les yeux de l’un de ses camarades de classe. Précis et très documenté, le récit de Derf Backderf (journaliste de formation) décrit la personnalité décalée de Dahmer qui amuse les autres ados de cette banlieue déshumanisée typique de l’Amérique des années 1970. Dahmer enfant vit dans un monde à part, ses parent le délaissent, il est submergé par des pulsions morbides, fasciné par les animaux morts et mortifié par son attirance pour les hommes. Personnage fascinant, voire attachant car presque victime de son environnement, Dahmer vit une implacable descente aux enfers vers une folie irréversible. Derf Backderf John « Derf » Backderf est né en 1959 à Richfield, une petite ville de l’Ohio où il passera toute son enfance. Après un bref passage dans une école d’art, il retourne chez lui et travaille comme éboueur, avant de recevoir une bourse pour L’université de l’Ohio, où il suivra un cursus en journalisme tout en réalisant des illustrations pour le journal local. Une fois diplômé, il devient journaliste pour un quotidien de Floride, puis abandonne cette carrière pour se lancer dans la réalisation d’un strip, The City, qui durera vingt-deux ans et sera publiés dans plus de 50 hebdomadaires américains. Son précédent roman graphique, Punk Rock & Trailer Parks, a été consacré comme l’un des meilleurs romans graphiques de 2010 par Booklist. Il a commencé à travailler sur la réalisation de Mon ami Dahmer en 1994 ; le livre sera finalement terminé en 2011 et publié en 2012 aux États-Unis. Derf Backderf a été nominés pour deux Eisner Awards et a reçu de très nombreuses récompenses pour son travail de dessinateur de presse, dont le prestigieux Robert F. Kennedy Journalism Award du dessin politique en 2006. Il vit à Cleveland (Ohio) avec sa femme Sheryl Harris (journaliste lauréate du Prix Pulitzer) et leurs deux enfants. « Journaliste de formation, Backderf a épluché les dossiers du FBI et est revenu sur place pour interroger d’anciens profs et camarades de classe. Empathique, mais jamais complaisant, dérangeant, mais nécessaire, son récit - porté par un dessin évoquant subtilement le graphisme underground des années 1970 - plonge dans les limbes de la folie humaine. » Le Monde « Entre recherche documentée et souvenirs personnels, la BD »Mon ami Dahmer« est intrigante, déroutante, et dérangeante aussi, car si l’auteur ne pardonne pas au tueur, ces 200 et quelques pages remarquables exhalent la tristesse, un remord latent, un intense sentiment de gâchis et cette irréductible incompréhension face à la noirceur d’un esprit familier, dans laquelle, pâlotte, miroite une lueur d’humanité accordée à rebours. » Radio Nova « L’un des livres les plus effrayants et les plus dérangeants de l’année. » Time « Un très bon livre qui revient sur les origines du tueur en série putride que fut Jeffrey Dahmer. Plongez-vous dedans - il vous laissera sur le carreau. » James Ellroy « A small, dark classic » Publishers Weekly « Mon ami Dahmer est un authentique chef d’œuvre » extrait de la préface de Stéphane Bourgoin (auteur du Livre noir des serial killers )

Scénario
Dessin
Traduction
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 22 Février 2013
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Mon ami Dahmer © Cà et Là 2013
Les notes
Note: 4.04/5
(4.04/5 pour 23 avis)
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26/02/2013 | ArzaK
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Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
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Prêter attention - Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Il comprend 188 pages de bande dessinée en noir & blanc avec des nuances de gris. La première édition en VO date de 2012, et une première version différente avait été réalisée en 1997, par l'auteur Derf Backderf, scénariste et dessinateur. La présente édition commence par de nombreuses citations extraites de journaux louant les qualités de cette oeuvre. Il se termine avec une vingtaine de pages explicitant les sources utilisées pour chacune des scènes et indiquant ce que sont devenus Jeff Dahmer, et ses parents Joyce Dahmer et Lionel Dahmer. Jeffrey Dahmer marche le long de la route qui dessert plusieurs pavillons espacés, à l'extérieur de Bath Township, Summit County, Ohio. Il avance d'un bon pas, ses chaussures faisant un petit crissement chaque qu'il pose un pied sur le gravier. Dans l'axe de ses pas se trouve le cadavre d'un chat autour duquel virevoltent quelques mouches. Il le pousse un peu du bout du pied pour vérifier qu'il est bien mort. Puis il se baisse et le ramasse. Il est fasciné par la consistance du cadavre. Il finit par le prendre d'une main et le ramener derrière la maison de ses parents, dans les bois. Il croise trois autres adolescents qui ont décidé de couper par là pour arriver à l'heure pour l'épisode Monthy Python. Ils remarquent que Jeffrey tient le cadavre d'un chat à la main : celui-ci leur explique qu'il va le dissoudre dans de l'acide. Son père est un chimiste et il se procure facilement de l'acide. Il leur propose de les accompagner dans un petit cabanon qu'il qualifie de hutte s'ils ne le croient pas. Ils lui emboîtent le pas et à l'intérieur il leur montre ses bocaux à cornichons avec des cadavres d'animaux en cours de décomposition : raton laveur, lapin, corbeau. Ça l'intéresse de savoir ce qu'il y a l'intérieur d'un corps. L'un d'eux rétorque que ce n'est que de l'eau boueuse à l'intérieur des bocaux. Jeffrey en prend un et le jette sur le sol avec force où il se fracasse : il s'en dégage une odeur pestilentielle et ils sortent en courant pour vomir dehors. L'un d'eux le traite de taré. Beck a rencontré Jeff Dahmer pour la première fois en cinquième dans l'établissement scolaire Eastview Junior Higg. Jeffrey était un anonyme, un de ces enfants qui devient un handicapé social avec l'adolescence, acceptant docilement son destin, devenant invisible. Ce n'est qu'après plusieurs mois de cette année scolaire que Derf a fini par le remarquer. Les autres collégiens qui l'avaient remarqué le méprisaient, et le bousculaient dans les couloirs. En classe de biologie, Dahmer avait repéré le foetus de cochon conservé dans du formol. Ce collège était en sureffectif du fait du baby-boom et les adolescents timides et lents à se faire des amis, se faisaient littéralement marcher dessus. Alors que tout le monde se faisait des copains en grande quantité, Jeffrey était un solitaire, l'enfant le plus solitaire que Derf ait jamais rencontré. Ce jour-là après les cours, Jeffrey récupère subrepticement le foetus de porc dans le flacon. Dans le car scolaire qui ramène les collégiens chez eux, il regarde avec insistance le jogger qui court le long de la route. Certes il est possible d'être attiré par cette lecture, sur la base de l'auteur, bédéaste à la forte personnalité. Il est plus vraisemblable que le lecteur soit attiré par la perspective d'en découvrir plus sur l'un des tueurs en série américain les plus médiatiques et les plus horribles : dix-sept meurtres reconnus à son actif, aggravés par des viols, des démembrements, de la nécrophilie et du cannibalisme. Comment devient-on un monstre, une abomination ? Dans l'introduction, l'auteur met les choses au clair : l'objet de son ouvrage n'est pas de raconter les meurtres, mais de retracer la vie du futur tueur, pendant les années où il l'a côtoyé au collège, puis au lycée. Backderf raconte ses souvenirs et il a pris soin de les confronter à ceux de ses copains de l'époque. Il a complété ces éléments, en lisant les articles de journaux de l'époque, ainsi que les rapports officiels accessibles au public pour s'en tenir aux faits, et reconstituer cette époque avec précision. Il n'y a donc pas de voyeurisme morbide à craindre, ou de sensationnalisme : ce n'est pas l'objet du récit. En outre, l'auteur précise qu'il ressentait un minimum d'empathie pour Jeffrey Dahmer, essentiellement de la pitié pendant ces années-là, mais que cela ne constitue nullement une excuse pour les atrocités qu'il a commises par la suite. le lecteur se lance donc dans une chronique de la vie dans cette région du monde à cette époque-là. Pour autant, l'auteur raconte ses souvenirs à la lumière de ce que Dahmer va devenir, comme si une forme de destin inéluctable s'accomplissait au travers de chaque souvenir reconstitué. Cela donne une vision orientée de cette partie de sa vie. L'histoire s'ouvre avec un dessin en pleine page : un ruban de route tout droit se déroule du bas de la page vers le haut, ondulant avec le relief du terrain, avec de la végétation de part et d'autre, et trois ou quatre pavillons le long. le lecteur se retrouve un peu décontenancé par la manière de représenter les éléments de cet environnement. D'un côté, l'angle de vue est particulièrement bien choisi et les détails abondent. Il en est ainsi tout du long de cette bande dessinée. le bédéaste impressionne par la clarté de sa mise en page, simple et efficace, montrant avec évidence chaque situation, chaque posture, chaque geste. Il apporte un soin appliqué et soutenu pour monter chaque lieu dans le détail : les couloirs de l'établissement scolaire avec les casiers des élèves, la cantine avec les tables communes et les emplacements pour une personne, l'intérieur des pavillons dont celui de la famille Dahmer, la chambre de Jeffrey, les bois alentours, les voitures, le bord du lac, le bureau du vice-président des États-Unis, une salle de cinéma, les alentours du lycée, le bus scolaire, etc. À chaque fois, le lecteur peut prendre le temps de regarder les détails, d'absorber la texture de tel ou tel élément. Dans le même temps, certaines représentations présentent des caractères naïfs : une géométrie trop parfaite ou trop appliquée, une perspective scolaire, un élément avec beaucoup de détails mais chacun d'entre eux détouré avec une forme simplifiée. Cela confère un aspect un peu étrange à ces dessins, pouvant donner une sensation artificielle, d'environnements manquant de naturels. Par exemple, lorsque Dahmer massacre un poisson qu'il vient de pêcher avec un couteau, c'est un poisson dessiné de manière un peu enfantine. Cette sensation d'étrangeté, d'une fibre pas toujours naturelle se retrouve à l'identique dans les personnages. Ils sont tous incarnés, avec une morphologie différente, un visage différent, une tenue vestimentaire spécifique conforme à leur personnalité et à leur statut social. Les expressions de visage sont très réussies, concordant bien avec le langage corporel, expressif sans être exagéré. Pour autant, les visages sont un peu carrés, les lèvres un peu trop grosses, ou au contraire totalement inexistantes, les chevelures assez figées. Il peut falloir un temps d'adaptation au lecteur pour se faire à cette personnalité graphique, peu commune. Il remarque également que le dessinateur se repose à quelques reprises sur une posture ou un cadrage dramatisé, ce qui apparaît totalement forcé en comparaison du naturalisme de la majeure partie de l'oeuvre, comme une béquille visuelle pour un narrateur pas tout à fait assez confiant en ses capacités. Sous réserve qu'il ne soit pas allergique à ces caractéristiques sortant de l'ordinaire, le lecteur se laisse vite emporter par la narration visuelle simple et évidente, fluide et sans chichi. Berf Backderf a donc choisi de commencer par une anecdote singulière : la récupération d'un cadavre de chat pour le faire mariner dans un bocal rempli d'acide, peut-être pas l'entrée en la matière la plus subtile qui soit. En effet le lecteur n'est pas bien sûr de l'utilité de pointer du doigt ces moments clés, ou plutôt révélateurs et annonciateurs, car il sait par avance qu'il s'agit de quelques années de la vie d'un tueur en série, avant qu'il ne commence à commettre des atrocités. Une fois qu'il a accepté cette façon de faire, il suit la vie très banale d'un adolescent mal dans sa peau, inadapté social, vivant dans un foyer où la relation de couple de ses parents part en déliquescence. L'auteur a choisi d'éluder la relation avec le petit frère de Jeffrey, car elle n'a pas été mise en avant par Jeffrey dans ses interrogatoires, et peut-être pour ne pas en rajouter une couche pour l'adulte qu'il est devenu, vraisemblablement encore en vie. D'un côté, le récit montre les indices patents de la déshérence de Jeffrey : cela apparaît comme une évidence qu'il va mal tourner, que ses démons intérieurs vont le pousser à commettre le pire, mais c'est une évidence qui émane de la connaissance a posteriori. D'un autre côté, c'est une reconstitution d'une vie misérable : une incapacité à éprouver un sentiment d'amitié, une incapacité à établir ce type de relation sociale, et un foyer insupportable avec des parents totalement accaparés par leur propre mal-être, incapables d'accorder assez d'attention à leur fils ainé. Au-delà de cela, avec cette connaissance de l'avenir, Backderf met en lumière toutes les occasions manquées de déceler la souffrance et la désocialisation de Jeffrey Dahmer. Il se dit que lui-même adolescent, il n'a jamais été en mesure de faire preuve du recul nécessaire pour se rendre compte à quel point les symptômes étaient présents et évidents a posteriori. Mais il pose également une terrible question : où étaient les adultes ? Il n'y a aucune réponse satisfaisante à ce constat accablant d'absence d'aide ou d'un minimum d'attention de la part des parents, du corps enseignant, des autres adultes travaillant dans l'établissement scolaire. Cette bande dessinée réussit son pari d'évoquer l'adolescence d'un tueur en série, sans être jamais racoleuse ou pontifiante. La narration visuelle est évidente, même si certaines caractéristiques peuvent décontenancer de prime abord. Les pages se lisent aisément et se tournent rapidement. le lecteur sent bien que par moments l'auteur insiste un peu plus lourdement que nécessaire, soit visuellement, soit par un effet de dramatisation. Dans le même temps, il mesure à quel point cet adolescent est livré à lui-même, sans jamais qu'un seul adulte ne relève quoi que ce soit, ne détecte un des signaux alarmants bien présents. de ce point de vue, l'auteur fait oeuvre de prévention en attirant l'attention de ses lecteurs, ce qui a manqué à Jeffrey Dahmer, et par voie de conséquence à ses victimes.

13/04/2024 (modifier)
L'avatar du posteur Pokespagne

Ne connaissant pas encore l'oeuvre à l'excellente réputation de Derf Backderf - l'aborder sous l'angle de son plus célèbre ouvrage, "Mon Ami Dahmer" (qui m'a été offert par un ami qui a très bon goût...), avait tout d'une évidence, pour moi, qui suis fan d'une certaine école "classique" du comics façon Crumb. Le graphisme de Backderf désoriente tout d'abord, avec cette "rectangularité" des visages et des corps, dont on craint qu'elle ne prive le livre de ces émotions qu'on associe plutôt à une certaine liberté des formes... Et puis on s'habitue, et on est surpris au contraire devant la subtilité des sentiments qui naissent, au détour de scènes remarquables par leur construction (... très cinématographiques, il est vrai, mais c'est désormais presque incontournable dans la BD, tant le cinéma est devenu la manière "normale" de raconter des histoires. On pourrait d'ailleurs réfléchir à la façon dont les "livres en images" originels sont devenus des "films dessinés" !). La simplicité apparente des cases et de leur enchaînement crée ainsi, plus on avance dans le livre, une impression de trouble, puis de vertige existentiel, qui contribuent beaucoup à la force de l'histoire racontée. Et cette histoire, ce n'est évidemment pas rien, puisqu'il s'agit de narrer ici l'enfance d'un serial killer célèbre et monstrueux, vue par ceux qui l'ont côtoyé durant ses années de collèges. Logiquement, le récit est extrêmement précis et bien documenté, puisque Backderf n'a pas seulement fait confiance à sa propre mémoire, mais il a conduit une enquête approfondie avant de nous livrer ce qui a tout de "l'oeuvre d'une vie". "Mon ami Dahmer" se présente comme l'analyse des éléments qui ont pu amener à un tel Dérapage d'un adolescent - dont les circonstances étaient certes difficiles (parents en crise, puis plongés dans un divorce haineux, désirs homosexuels inexprimables dans la société de l'époque...), mais pas forcément si différentes de millions d'autres. Néanmoins, l'aspect le plus intéressant du livre réside dans la cécité manifeste de tous par rapport aux comportements de plus en plus alarmants d'une personne qu'ils côtoyaient quotidiennement. Ce "Comment est-il possible qu'ILS n'aient rien vus ?" devient, inévitablement sans doute, un fascinant "Comment est-il possible que JE n'ai rien vu ?", voire un "... que je n'ai rien FAIT ?", forcément angoissant. Bien sûr, Dahmer n'a jamais été vraiment un "AMI" de Backderf, juste un sujet de plaisanterie, abandonné sans un seul regard dès qu'il est devenu trop encombrant, trop dérangeant, trop incompréhensible. Et il est clair en lisant le livre que ce qui en constitue le "point aveugle" et en même temps la "pierre de touche", c'est la question de la responsabilité, voire la culpabilité à la fois générale (de l'école, des enseignants, des voisins, etc. ) et individuelle. La coupable indifférence de Backderf lui-même, vis à vis d'un être en perdition, qu'il "ose" qualifier en titre de son livre de son "ami Dahmer"... C'est bien pour se libérer de tout cela que Backderf a dû écrire ce livre, qui lui a pris une bonne partie de sa vie adulte. Pas sûr pourtant qu'il ait réussi à chasser ses démons. Ni qu'il ait réussi à s'avouer à lui-même la nature de son trouble.

05/10/2019 (modifier)

Une découverte géniale ce Derf Backderf ! J'ai adoré son style de dessin d'ado de lycée qui se révèle en fait super précis. Les histoires des 3 volumes sont excellentes, l'Amérique profonde, des types ordinaires dans des vies ordinaires, mais racontées et dessinées de façon extraordinaire ! Une des meilleures séries BD indépendante que j'ai lue depuis longtemps. J'attends avec impatience le prochain opus.

05/08/2016 (modifier)
Par jimbo86
Note: 4/5 Coups de coeur expiré

Alors, nous y voilà, que dire, ai-je assez d'adjectifs dans mon vocabulaire pour décrire et donner mon avis sur cet ouvrage de mon ami Backderf ? Dieu soit loué, le journaliste s'est mué en dessinateur et scénariste de grand grand talent. Est-ce vraiment une BD ? Moi j'ai plutôt eu l'impression de lire un dessin animé. Dès les premières images, dès les premières vignettes, on est conquis. Le scénario est accrocheur surtout que l'auteur a fréquenté ce futur monstre, qu'il rend humain et limite attachant. Cet opus m'a bien entendu donné envie de lire ses 2 autres ouvrages qui sont tout aussi cultes. Bref vous aurez compris, j'adore. Je vous conseille de claquer votre argent dans ce bouquin, plutôt que de faire plaisir à votre gosse, votre douce ou de le dépenser dans des clopes, mais ça c'est juste mon avis de "backderphile".

05/11/2015 (modifier)
Par Blue Boy
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur Blue Boy

Un jeune homme, vu de dos, marche au bord d’une route de campagne, environnée ça et là de rares maisons. La route semble monter vers un paradis serein aux cieux rayonnants. Zoom aérien sur le personnage, un peu raide, bras serrés le long du corps à la manière d’un automate désœuvré, puis sur ses baskets. Crissements des semelles sur le sol, crunch… crunch… crunch… tel le tic-tac d’une horloge maléfique, compte-à-rebours inéluctable vers une destination aléatoire mais que l’on devine tragique. Pause. Le jeune homme tombe en arrêt devant le cadavre d’un chat sous une nuée de mouches noires. Il le prend dans ses bras, imperturbable. Regard fixe. Fascination de la putréfaction, des chairs mortes… Puis il reprend sa marche funèbre en emportant son trophée, avec visiblement un plan bien précis en tête. Tout compte fait, on dirait que ce n’est pas la route du paradis, mais bien plutôt celle de l’enfer. L’enfer de celui pour qui la vie pris très vite la forme d’une cellule aux cloisons infranchissables… Ainsi débute ce récit peu commun. D’emblée, ce prologue mystérieux soutenu par un graphisme unique très attrayant nous plonge immédiatement dans l’histoire. Chez Derf Backderf, tout est dans la verticalité. Lui-même fait ses dédicaces debout (comme j’ai pu le voir à Angoulême cette année), en posant le support sur un carton vide. Une verticalité amplifiée par la rectangularité des formes, des objets et des personnages, comme une tentative de relier le ciel et la terre, et dans le cas de Dahmer, un paradis inaccessible et un enfer omniprésent. Backderf est un rejeton de la BD US alternative, une sorte de Charles Burns au trait géométrique révélant des personnages désincarnés, comme engoncés dans leur carcasse, ectoplasmes d’une Amérique sans gloire. Ce style aux contours précis se dispense parfaitement de la couleur au regard de la profondeur de l’histoire, et son aspect juvénile permet de distancier la noirceur sous-jacente. De bout en bout le lecteur reste happé par l’histoire dérangeante (et authentique) de cet étrange garçon dont chaque fait et geste entre en résonance avec son terrible destin de tueur en série qu’aucun de ses proches, professeurs et camarades, n’avaient su deviner en le côtoyant. A l’époque, Jeff Dahmer avait juste l’air d’un enfant un peu spécial et secret, et pourtant quiconque s’y serait intéressé de plus près aurait pu constater que tous les éléments étaient réunis pour un massacre annoncé : son attirance pour les animaux morts, ses errances de zombie solitaire, son alcoolisme chronique, sa mère dépressive, les relations très conflictuelles entre ses parents avant leur divorce, ses cris d’épileptiques soudains, ses pantomimes déments qui firent de lui une mascotte dans son lycée ! Mais bien sûr, personne n’imagine jamais qu’une connaissance ou un proche puisse renfermer un tueur potentiel. D’ailleurs, la scène des retrouvailles de l’auteur avec deux de ses anciens camarades plusieurs années après est très révélatrice. Lorsque celui-ci évoque Dahmer en suggérant sa probable conversion en tueur en série, leur seule réaction est d’éclater de rire comme un seul homme (confession très courageuse il faut bien le dire). Derf Backderf porte un regard juste, ne cherche à accuser personne ni à tomber dans l’auto-culpabilisation. Sans dédouaner son « ami » Dahmer de ses actes ignobles, il s’efforce simplement de comprendre comment ce camarade de classe atypique a pu devenir « le monstre du Milwaukee ». Se basant sur ses propres souvenirs, mais également sur des témoignages, des articles de presse et documents du FBI, il brosse un portrait éloquent du futur tueur depuis ses années au collège jusqu’à son premier crime. Aucun voyeurisme ici, la démarche de Backderf se veut à la fois factuelle et introspective. Mais elle est aussi remarquable dans le sens où ce dernier aide le lecteur, davantage en suggérant qu’en pointant du doigt les causes, à vérifier qu’on ne devient pas un tel monstre tout à fait par hasard. Tout cela fait de « Mon ami Dahmer » un one-shot passionnant et incontournable selon moi. Pour cette raison, je ne manquerai pas de remercier mon webmaster préféré de me l’avoir conseillé lors de notre virée à Angoulême !

22/03/2015 (modifier)
Par Alix
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
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Génial ! J’ai tout simplement adoré cette histoire racontant les années de lycée d’un des pires tueurs en série américains (lisez donc la page Wikipédia du charmant jeune homme). L’auteur était ami avec Dahmer au lycée, et j’avais peur que cet album sente le « claim to fame » comme on dit en anglais (vous savez, quand on se la pète parce qu’on a côtoyé quelqu’un de vaguement connu). Mais non, pas du tout, le ton est juste, et l’auteur présente les faits de manières très habile. Il s’intéresse surtout aux années précédant les meurtres, et on observe la lente détérioration sociale de Dahmer, et surtout le fait que personne ne s’en soucie, ado ou adulte. Il nous raconte le côté humain de ce qui restera l’un des pires monstres de l’Histoire (ses pulsions incontrôlables qu’il tentait de supprimer en se saoulant, sa vie de famille épouvantable, ses problèmes d’intégration). L’ouvrage se base bien entendu sur les souvenirs de l’auteur, mais ce dernier s’est quand même beaucoup documenté, a lu les rapports du FBI et des interviews du meurtrier, interviewé des tas de gens, bref, c’est du solide (voir notes en fin d’ouvrage). La lecture est vraiment aisée, la narration est maitrisée, et l’album s’engloutit rapidement malgré ses 222 pages. Le dessin est parfaitement adapté et typique des comics indépendants. Un album indispensable, et la plus grosse vente de cet éditeur en 2013 avec 7290 exemplaires vendus (source). C’est bien peu pour une telle pépite, et assez représentatif de la situation précaire dans laquelle se trouvent de nombreux petits éditeurs de BD.

21/05/2014 (modifier)