Luna Park

Note: 4/5
(4/5 pour 2 avis)

Le récit d'un vétéran immigrant désabusé luttant contre les tourments de son passé...


DC Comics New York Vertigo

"Alik Strelnikov vit dans les ténèbres de Coney Island, un monde où la rouille des parcs d'attractions et les manèges figés se moquent bien de son rêve de devenir un héros." "Il y a dix ans, il a troqué une existence violente au sein de l'armée russe pour la prometteuse Amérique où il a servi d'homme de main pour la mafia de Brooklyn. Aujourd'hui, il chasse ses démons comme Il le peut : alcool, héroïne ou sa maîtresse, Marina, une prostituée doublée d'une voyante." "Entre le futur prédit dans le jeu de tarots de Marina et les horribles souvenirs du passé d'Alik. existe-t-il une échappatoire à leur misérable destinée ? Cela dépendra d'un plan désespéré qui les placera au milieu d'une guerre des gangs et couvrira un siècle entre Coney Island aujourd'hui, la seconde guerre de Tchétchénie et la fascinante New York de la belle époque." Panini Comics.

Scénario
Dessin
Couleurs
Traduction
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution Novembre 2011
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Luna Park © Panini 2011
Les notes
Note: 4/5
(4/5 pour 2 avis)
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24/06/2013 | Ned C.
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Par Présence
Note: 4/5
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Thriller russe et fantastique - Alik Strelnikov fut un soldat russe pendant la guerre en Tchétchénie. Il a quitté son pays pour émigrer aux États-Unis. Il a trouvé un boulot de gros bras pour un petit caïd installé dans un parc d'attraction abandonné. Il passe ses journées à recouvrir des créances en retard auprès de pauvres hères qui mettent trop de temps à rembourser, ou à payer leur protection ou à donner leur part de de revenus de la prostitution. le reste de la journée il erre d'attraction abandonnée en attraction en ruine. Et le soir si tout va bien, Marina le rejoint dans sa chambre sordide pour faire l'amour. Quand tout va mal, les cauchemars reprennent le dessus : une femme qu'il a abandonnée à un sort affreux, les horreurs de la guerre en Tchétchénie, les horreurs d'une guerre plus ancienne en Russie, etc. Il ne lui reste plus alors qu'à se faire une piquouze en espérant trouver un oubli réparateur. Cette existence sordide ne durera pas longtemps car un autre caïd a des vues sur le territoire de l'employeur d'Alik, Marina ne supporte plus la séparation d'avec sa fille et les cartes du tarot indiquent que la violence va aller en s'intensifiant. Dès les premières pages, le lecteur prend conscience qu'il a plongé dans un récit ambitieux, adulte, complexe et sans espoir. La mise en couleurs a été confiée à Dave Stewart, un artiste exceptionnel. Il a choisi une palette très restreinte de teintes à dominante grise et marron. Chaque page dégage une atmosphère glauque, étouffante, irrespirable et condamnée. Ces ambiances évoquent les pages les plus sombres de V pour Vendetta et le style des dessins s'approchent également parfois de celui de David Lloyd. Danijel Zezelj effectue un travail remarquable d'une grande sensibilité pétrie de désespoir et d'une remarquable puissance d'évocation de Coney Island. À chaque page, le lecteur plonge dans l'univers d'Alik Strelnikov et il a l'impression d'être avec lui dans la même pièce ou au même endroit juste à ses cotés que ce soit dans sa chambre minable, ou devant une attraction fermée, ou sur un champ de bataille, ou en face de prisonniers tchétchènes, ou dans un champ enneigé de Novgorod face à un loup, ou dans les tranchées de la guerre de 14-18, etc. Zezelj n'abuse pas de gros aplats de noir pour accentuer la noirceur du récit, il préfère rester proche de la réalité, simplifier les traits pour ne garder que les éléments visuels les plus saillants. Ce parti pris aboutit à une lecture très facile de ses dessins qui ne gardent que l'essentiel et dans lesquels les éléments réalistes se détachent avec une grande force pour mieux marquer l'esprit du lecteur. Sa stylisation s'arrête juste avant que les illustrations ne basculent dans l'abstraction. C'est un remarquable travail de composition rendu encore plus saisissant par la palette sophistiquée et restreinte des teintes utilisées par Dave Stewart. Les illustrations méritent 5 étoiles. La première moitié du récit est aussi déroutante qu'envoutante. Kevin Baker dévoile petit à petit l'histoire personnelle et la voie quotidienne de son personnage principal d'une manière morcelée en intercalant les moments présents et les moments passé, au fil des remémorations de Strelnikov. le lecteur assemble petit à petit les pièces du puzzle et c'est un vrai plaisir que de découvrir une pièce après l'autre avec chacune son ambiance et ses sensations tout en essayant de recomposer l'image complète. Baker a effectué un gros travail de recherche sur les conflits russes du vingtième siècle et sur la culture russe qui contribue à la véracité du personnage et à l'épaisseur de l'intrigue. le choix du parc d'attraction permet de composer des scènes dont l'étrangeté du décor intensifie le malaise des actions, un régal. Et puis petit à petit, Kevin Baker délaisse le domaine du polar urbain mettant en scène des petites frappes se mangeant entre elles en introduisant un élément fantastique dans le récit. Ce basculement du récit dans un autre registre m'a complètement déconnecté du récit et arrêté dans ma lecture. Je ne suis pas opposé au mélange des genres, mais dans ce cas particulier il m'a semblé malheureux. Baker commence par installer une ambiance des plus réussies basées sur le morcellement des souvenirs de Strelnikov et sur des scènes très visuelles laissant présager un règlement de comptes bien tordu, sans beaucoup d'espoir d'une fin heureuse. Puis survient l'élément fantastique qui sert de lien entre les pièces du puzzle qui ne s'assemblaient pas avec les autres, mais qui révèle aussi de fait l'issue de l'affrontement à la moitié du tome et qui oriente le récit dans une autre direction moins intéressante. Chaque scène reste intéressante pour elle-même, mais mises bout à bout elles ne forment pas un récit accrocheur.

11/06/2024 (modifier)
Par Ned C.
Note: 4/5

Savant mélange de tragédie historique, drame d'immigrant, thriller mafieux et histoire d'amour impossible, l'écrivain Kevin Baker nous a concocté un cocktail aux relents de tord-boyaux servi par le très talentueux illustrateur croate, Danijel Zezelj. Son graphisme indéniablement particulier, est puissant,violent et colle parfaitement à la narration complexe, bourrée de flash-backs. Il sculpte les ombres et d'un trait juste retranscrit parfaitement les émotions des personnages ou le climat oppressant d'un décor. Les visages semblent tourmentés, marqués par la rudesse de leur vie. Le scénario, quant à lui est assez compliqué et se durcit au fur-et-à-mesure du déroulement de l'intrigue. Les retours en arrière deviennent de plus en plus présents pour finalement nous faire totalement perdre pied (une volonté évidente de l'auteur). Il y a plusieurs niveaux de lecture qui s'entrelacent : passé, présent et futur mais aussi les interprétations: réalité et folie, conscient et inconscient. Personnellement j'aime bien les casse-tête ! Et au passage un petit cours d'histoire sur la Russie... Le choix du coloriste Dave Stewart de n'utiliser que quatre couleurs n'est pas dérangeant, au contraire. Les atmosphères ainsi dégagées paraissent revenir inlassablement hanter nos protagonistes, où qu'ils se trouvent.J'ai juste le regret que la qualité du papier ne rende pas véritablement hommage à celles-ci (le point noir de l'album). Bon album, intelligent, dramatiquement humain, magistralement illustré qui met nos neurones et notre imagination à l'épreuve.

24/06/2013 (modifier)