Les Quatre Fleuves

Angoulême 2001 : Alph-Art du scénario. L'association de Baudouin et de la romancière Fred Vargas, pour un polar sociologique.
Angoulême : récapitulatif des séries primées Les petits éditeurs indépendants Paris
Toujours campé sur ses rollers, le jeune Grégoire Braban et son ami Vincent s'adonnent avec plus ou moins de bonheur au vol à la tire. Ce jour-là, à Saint-Michel, il arrachent la sacoche d'un vieux. Trente mille balles. Le gros lot. Mais la sacoche est lourde de bien autre chose."Autre chose d'assez dégueulasse. Le sac du vieux, Grégoire, c'est la boîte dee Pandore. Il y a tous les péchés du monde là-dedans". Au soir, Vincent est assassiné, la cuisse lacérée de quatre coups de lame. Le commissaire Adamsberg s'inquiète de cet étrange dessin. Le tueur à la serpe, celui que la rumeur a surnommé Le Bélier vient-il de signer son quatrième meurtre ?
Scénario | |
Dessin | |
Editeur
/
Collection
|
|
Genre
/
Public
/
Type
|
|
Date de parution | Novembre 2000 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis

L'association entre Baudoin et Fred Vargas est une véritable réussite. J'ai toujours énormément apprécié les romans policiers de Vargas et je suis ravi qu'elle soit parvenue à changer de support avec autant de succès. J'aime beaucoup le dessin de Baudoin dans cette bd mais c'est clair que c'est surtout le talent de Vargas que j'ai savouré. Ce qui m'intéresse dans l'ensemble de l'oeuvre de cette romancière ce n'est pas l'enquête policière souvent basique (parfois les résolutions me déçoivent) mais ses personnages originaux et loufoques sans être caricaturaux. Ils sont originaux, attachants et pleins de poésie. Cette poésie se retrouve également dans certaines idées géniales de Vargas, ici c'est bien sûr la sculpture Les quatre fleuves en canettes.

Les quatre fleuves part d'un scénario écrit par Fred Vargas pour son adaptation en BD, donné ensuite à Baudoin qui l'a travaillé en collaboration avec elle pour en faire ce récit original. C'est une des rares BD de l'édition Viviane Hamy. Malgré son succès, principalement par la critique, l'expérience n'est pas rééditée, même si en 2010 est sortie une adaptation d'une nouvelle de Vargas par Baudoin, qui est un polar noir au dessin libre. Commençons par la couverture, un homme en fuite avec une poule, des nuages qui sortent du cadre, le long d'une route, noir et blanc, quasiment pas de gris. Une partie du livre est déjà là, la fuite, le décalage, le naturel et la fluidité des lignes, elle nous donne envie d’entrer dans l’histoire et nous signale déjà que le style sera particulier. Le dessin en lui-même s'est adapté au genre, en quelques coups de feutres, il donne une ambiance. Il n'est pas forcément très précis, ne cherche pas à tout expliquer, mais il sait transmettre l'émotion des personnages, des situations, il plante le décor. Ensuite, c'est surement ce que l'on remarque en premier, un lien particulier existe entre texte et dessin, les deux sont en parallèle, ils se complètent et se répondent en permanence, mais ne cherchent pas à aller ensemble. Parfois, l'un va manger l'autre dans la page, lui prendre toute la place, ce qui dessine la situation, par exemple lorsque Grégoire pose une question à une marchande de journaux, et qu'elle lui parle, lui parle, son visage disparaît à la fois dans le texte et dans le reste du dessin, qui la déforme et la confond avec d'autres histoires, dans ce cas précis, le placement du texte fait entièrement partie du dessin, ensemble ils racontent l’histoire, parfois en restant décalés. Les personnages sont plutôt originaux et bien travaillés dans leurs spécificités, ils semblent tout de même parfois caricaturaux et peu recherchés. Estelle est pour celà la plus flagrante, disons qu'une fille sans parents, dont le meurtrier s'occupe, qui le protège tout en tombant amoureuse de celui qu'il veut tuer, avec peu de détails et d'explications, cela semble un peu facile et déjà vu. Malgré cela, on les sent ces personnages, par exemple on comprend vite la connaissance l'un de l'autre et les différences du commissaire Adamsberg et du lieutenant Danglard ou le point auquel les quatre frères forment un "bloc" avec des orientations opposées. En parlant de ces quatre frères, ils sont peut-être le sujet principal du livre, comme l'indiquerait le titre, l'omniprésence de la création du père (par la recherche des cannettes, et sa vision dans les scènes de la maison) et les réflexions de fin d'enquête. À leur manière d'être plus ou moins en-dehors de la société, sans que celle-ci les empêche de vivre, ils montrent quelque chose, un autre point de vue sur elle et on comprend vite la façon de vivre différente de chacun. Lorsqu'on observe ces personnages, c'est principalement dans leurs dialogues qu'on commence à les comprendre, à les intégrer, et les paroles sont particulières à chaques personnages, ils ont chacun un rôle, qui transforme parfois le livre en pièce de théâtre, ou les répliques s'échangent avec quelques perles, citations et reprises par-ci par-là. Un peu tous les styles de dialogue sont utilisés, de la narration froide ou orientée, des répliques courtes, du silence, des monologues... Ensemble ces personnages et ces dialogues occultent la noirceur du polar, ils lui donnent un aspect lumineux, ouvrant le regard du lecteur tout en le divertissant. Après cela, il ne faut pas oublier de juger la qualité de l'histoire et là, par rapport à celle de la mise en forme, cela n'est peut-être plus aussi réussi. Le scénario reste tout de même prévisible, même s'ils sont assez originaux, en particulier les personnages principaux, sans même parler de Grégoire et d’Estelle. Adamsberg, à la fois dans son flair et dans sa manière de procéder, est bon, tellement bon qu'il résout l'enquête sans aucune difficulté et qu'aucun des "gentils" n'a de problème. S'il est facile de prendre son temps à chaque page, et même si elle ne s'étale que sur quelques jours, l'enquête va trop vite, le plaisir du polar dans lequel on se demande pendant des heures et des heures ce qu'il pourra se passer n'est pas présent, certaines parties de l'histoire sont juste aperçues (les meurtres précédents, les relations entre Estelle et le meurtrier...) et à aucun moment on ne craint pour la survie des personnages. Les quatre fleuves possède un style original, excellent par la forme et l’ambiance, sûrement grâce au talent des deux auteurs chacun dans sa spécialité, qu’ils conservent grâce au mode d’écriture du livre ; ils conservent tout au long du livre un lien particulier entre texte et dessin, à la fois en mélangeant les deux et en les faisant se confronter.


Je m'attire souvent des regards sévères car je n'aime pas le dessin de Baudoin et du coup je n'ai que très peu apprécié mes lectures de cet auteur jusqu'à présent. On m'a cependant nettement conseillé cet album pour essayer de me faire une autre opinion. Après une longue hésitation, je me suis finalement lancé. Résultat : je n'aime toujours pas le dessin de Baudoin. Je n'apprécie pas du tout son encrage qui me donne l'impression d'avoir été réalisé avec un gros pinceau où la peinture noire aurait un peu séché. Je n'aime pas du tout le rendu de ces planches, leur aspect "sale", leur manque de détail, etc. Il y a un style indéniable, et malgré cette impression de trait grossier on reconnait bien les personnages, mais je n'aime pas. Et pourtant j'ai trouvé cette BD très bonne. Le scénario est excellent et on sent que Fred Vargas et Edmond Baudoin se sont vraiment bien entendus pour mettre au point leur album. L'intrigue est celle d'un polar noir assez simple finalement, quand on la résume. Seule l'idée du serial killer qui est en même temps le gourou de sa propre secte personnelle est surprenante. Mais ce sont surtout les personnages qui sont bons. Ils sont originaux, attachants, intelligemment rendus et très crédibles malgré la loufoquerie de certains. Par le biais de ces personnages, et grâce à une narration très réussie, les auteurs parviennent à captiver le lecteur et à rendre très prenant le récit. Il y a en même temps quelques idées touchantes, notamment tout ce qui tourne autour de cette famille de 4 frères qui ne savent pas qui est le vrai fils de leur père, et autour de cette sculpture en canettes de bière, "les Quatre Fleuves". Un peu de poésie et d'humour se dégagent dans une ambiance qui aurait autrement pu être assez glauque. Une très bonne lecture qui m'a réconcilié avec Baudoin dont je n'apprécie toujours pas le dessin mais dont je sais maintenant qu'avec un bon scénario, il peut offrir une oeuvre de grande qualité.


Force est de constater que si Baudoin se contente de pondre un magnifique dessin, on part sur de meilleures bases que lorsqu'il est également au scénario. Ca devient très réussi quand Fred Vargas lui propose un polar bien rodé que ne reniera pas un autre adepte du genre qu'est David Chauvel. On découvre ici une sale histoire, au départ un simple vol à la tire qui va attirer bien des ennuis à ses auteurs, un serial killer est sur leur trace. Celui-ci est très méthodique, le rituel du meurtre et sa mise en scène est nécessaire comme beaucoup de tueurs en série. On suit alors un jeu du chat et de la souris, et du chien de garde entre les flics, le jeune voleur un peu paumé Grégoire et sa victime qui ne compte pas en rester là devant tel affront. On sent venir le dénouement environ 30 ou 40 pages avant, déroulement logique et bien ficelé.


Heureuse initiative de ma part d’avoir lu cet album de Baudouin après ma déception de « Crazyman », le seul album en solo de cet auteur que j’ai pu feuilleter jusqu’à ce jour. « Les quatre fleuves » n’a rien à voir avec la thématique de Crazyman, cette BD se résume à un récit d’un jeune paumé doublé d’une enquête policière. Cette fois-ci, je n’ai pas été déçu par le traitement graphique d’un album de Baudouin. Son trait gras et sombre m’a semblé bien adapté à l’ambiance de cette BD. Son style est très personnel et par conséquent donne un cachet notable à cet album. J’ai apprécié également la situation du récit dans Paris et ses environs où j’ai pu reconnaître de nombreux lieux. Le scénario est une histoire assez sympa à lire à mi-chemin entre l’enquête policière et le road-movie agrémentée d’une pincée d’ésotérisme. Néanmoins, ne vous attendez pas à lire un polar « noir » de chez « noir », l’histoire n’est pas si horrible que ça et la résolution des énigmes m'est apparue cohérente dans l’ensemble. La narration est très accrocheuse malgré l’emploi de longs commentaires et de planches qui s’apparentent plus à un roman illustré qu’à une BD. L’un des points forts des « quatre fleuve » est dans l’attachement que j’ai pu ressentir pour les personnages de Grégoire et de l’enquêteur. « Les quatre fleuves » est, à mon avis, une BD très agréable à lire. L’enquête policière est intéressante à suivre et les personnages, surtout celui de Grégoire, sont attachants. « Les quatre fleuves » est un album que je relirai avec grand plaisir lors d’une soirée, bien campé dans un bon fauteuil.

Etrange formule que celle de ce roman graphique : il s'agit bien d'une bande dessinée mais certains passages ne sont qu'écrits, certains longs dialogues ne laissent plus de place qu'à du texte, "dessiné" à même la planche. C'est une formule souple et diablement efficace. Le style de Baudoin est, comme d'habitude, souple et frénétique, aussi sale que poétique. On aime ou pas. Fred Vargas a concocté un polar de qualité, certains passages sont très touchants. Malgré la crasse et les espoirs déçus dans lesquels les personnages baignent, il leur reste encore un peu d'innocence ou de naïveté pour conjurer le sort.
Site réalisé avec CodeIgniter, jQuery, Bootstrap, fancyBox, Open Iconic, typeahead.js, Google Charts, Google Maps, echo
Copyright © 2001 - 2025 BDTheque | Contact | Les cookies sur le site | Les stats du site