Clair obscur (Moving Pictures)
Quand la guerre révèle les rapports troubles qui unissent les êtres…
1939 - 1945 : La Seconde Guerre Mondiale Auteurs canadiens
Paris, sous l'Occupation. Ila Gardner répertorie et protège les œuvres d’art pour éviter une mainmise trop envahissante de la commission militaire allemande. Mais il est difficile d’échapper à la vigilance de l’officier Rolf Hauptmann. Les deux individus s’opposent dans leurs choix politiques, leurs convictions humaines, leur rapport à l’art. Lors d’un interrogatoire, un bras de fer s’engage entre eux, qui va cristalliser leurs dissensions mais aussi mettre à jour les liens complexes et profonds qui les motivent… Pouvoir, passion, domination, émotion, survie : une plongée au cœur de l’âme humaine toute en finesse et subtilité, orchestrée avec brio dans un noir et blanc entre ombre et lumière. Mari et femme à la ville, Kathryn et Stuart Immonen livrent ici une œuvre aux antipodes de leurs travaux habituels, qui révèle une toute nouvelle facette de leurs talents. (Texte de l'éditeur)
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Date de parution | Avril 2014 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Envoûtant et interprétable - Il s'agit d'une histoire complète et indépendante, d'abord publiée sous la forme de webcomic, puis sur format papier pour la première fois en 2010 en VO. L'histoire s'ouvre sur une femme assise sur une chaise qui attend sagement que quelqu'un vienne l'interroger. Il y a pour tout ameublement une table nue et 2 chaises. Un homme entre, il porte un plateau avec une carafe et 2 verres. Il sort et un autre homme entre apportant une liasse de feuillets qu'il pose sur la table. Les feuillets s'envolent vers le haut. La scène change pour un retour en arrière. Dans une gare parisienne, 2 femmes se font leurs adieux. Il est évident qu'elles sont liées par les liens du sang et que celle qui part usurpe l'identité de sa sœur pour bénéficier de ses papiers en règle. L'histoire se déroule pendant la seconde guerre mondiale à Paris, sous l'occupation. Une personne pénètre dans la pièce de la première scène pour interroger la jeune femme. Il apparaît qu'elle est une conservatrice de musée qui fait tout son possible pour que les œuvres d'art du musée où elle travaille ne disparaissent pas et soient pas emmenées par l'occupant allemand. de son coté, l'officiel allemand tente de comprendre comment sont gérées ces œuvres d'art, afin de pouvoir rapatrier les plus pertinentes en Allemagne. Il s'en suit une partie de cache-cache, d'affrontement de volonté et même confrontations de convictions. L'éditeur Top Shelf est spécialisé dans les comics qui sortent de l'ordinaire et dont les auteurs ont une certaine ambition littéraire (ou autre). J'ai donc été assez surpris de voir apparaître un récit des époux Immonen dans leur catalogue. Madame (Kathryn) s'est plutôt fait connaître en écrivant des séries de superhéros (par exemple une aventure des Runaways, ou une aventure de Wolverine & Jubilé, ou de Pixie) et son époux (Stuart) en les dessinant (par exemple les New Avengers de Bendis dans Siège ou les Nextwave de Warren Ellis). Ici, aucun superhéros et un récit très ambitieux en termes de narration qui s'adresse à des adultes prêts à faire un effort de lecture. Pour commencer, les illustrations de Stuart Immonen n'ont rien à voir avec le style qu'il emploie pour les histoires de superhéros. Ici il utilise une approche très dépouillée et stylisée et il utilise le noir & blanc. Les visages se rapprochent du simplisme des smileys (à l'opposé du photoréalisme). Il y a un simple trait pour chaque sourcil et un simple point pour figurer l'œil. Malgré cette approche minimaliste, les expressions des visages traduisent des sentiments complexes. Chaque personnage dispose d'une morphologie qui le rend unique et tous les visages sont distincts les uns des autres. Stuart Immonen fait preuve d'une grande maîtrise formelle dans chacune de ses illustrations et dans la composition de ses planches. Il n'a recours qu'à des formes géométriques les plus simples possibles, avec des à-plats de noir massifs qui mangent parfois les visages. Son style oscille entre des personnages rendus à la manière d'Hergé, des décors (en particulier les rues de Paris) qui évoquent parfois le travail de Tardi, et des cases qui s'approchent de l'abstraction par l'utilisation de formes géométriques pour l'ombre qui mange les détails tout en faisant apparaître de singulières compositions. L'ensemble de ces approches graphiques s'amalgame harmonieusement pour un résultat d'allure trompeusement simple et très facile à lire. Il s'en dégage une ambiance noyée dans les zones d'ombre, qui convient parfaitement à ce récit sophistiqué. Kathryn Immonen construit son récit sur 2 temps différent : celui de l'interrogatoire et celui des retours en arrière qui éclairent peu à peu les circonstances. Tout n'est pas explicite et il appartient au lecteur de relier les points du récit entre eux, ainsi que de déduire les motivations des personnages à partir des dialogues. L'enjeu relatif aux œuvres d'art des musées parisiens correspond à une réalité historique de la période retenue (la seconde guerre mondiale). Mais l'enjeu de la partie qui se joue entre Ila Gardner (la conservatrice) et Rolf Hauptman (l'officier allemand) ne se limite pas à la conservation de ses éléments patrimoniaux. L'un comme l'autre, ils sont confrontés à l'absurdité de leur situation et à la perte de repère quotidien du fait de la guerre. En particulier, Ila Gardner constate chaque jour la disparition arbitraire des individus qu'elle a l'habitude de côtoyer, tel que son boulanger. Cette réalité mouvante contraint les individus à remettre en question le sens de leurs actions, le sens de leur vie. Immonen emmène le lecteur vers un questionnement philosophique (s'apparentant au point de vue de Martin Heidegger) tout en restant dans le registre d'une histoire simple. Et puis, au fur et à mesure que l'affrontement des convictions des deux personnages avance, il apparaît que la question du classement des œuvres d'art peut se transposer à celui des humains imposé par le nazisme. Je ne m'y attendais pas : à partir d'un récit tout simple et d'illustrations toutes simples, les époux Immonen emmènent leur lecteur au travers d'interrogations existentielles complexes. Il n'y a pas à proprement parler de résolution dans ce récit, il s'agit plus d'un voyage qui transforme les personnages principaux. La guerre n'est qu'un danger diffus de tous les jours ; il n'y pas de méchants soldats nazis caricaturaux. Il y a des circonstances extraordinaires qui font perdre leurs repères et leur cadre de référence à des individus normaux.
Tout comme elveen, j’apprécie ce travail sur le noir et blanc. Les aplats fournissent de beaux contrastes. Mais … côté histoire, c’est très (trop) hermétique. Mes petits neurones semblent avoir capté le sens donné au récit mais je trouve qu’il manque cruellement d’accroche. Il y a bien quelques flash-back pour donner un semblant de consistance mais la relative froideur des protagonistes (qui se justifie par le contexte historique) n’aide vraiment pas à s’immerger dans cette histoire mêlant sauvegarde artistique, sens du devoir, amitié et amour . . . Le final, très plat, est bien représentatif de l’ensemble de l’œuvre. Du blabla et un grand vide, c’est tout ce que je retiens de ma lecture.
Je me retrouve un peu dans l’avis de elveen. J’aime beaucoup le sujet de cette histoire, cette relation ambiguë au background historique lourd de sens, cette réflexion sur l’Art et l’importance relative de telle ou telle œuvre. J’adore le dessin en noir et blanc et l’ambiance qui en découle. Mais de manière générale, je reste sur une impression de trop peu. J’ai trouvé certains passages un peu mous, un peu trop chargés en dialogues pas toujours passionnants. Et puis la fin a fait retomber le soufflé en ce qui me concerne, il n’y pas vraiment de dénouement, pas de conclusion. Un album original, qui a su captiver mon attention, mais pas vraiment marquant.
J’ai acheté cette BD pour les dessins. J’aime beaucoup ce noir et blanc, très bien maîtrisé. Les personnages sont expressifs et Stuart Immonen intègre dans le récit des dessins d’œuvres d’art qui sont, je trouve, utilisés à bon escient et aident à créer une atmosphère. J’aime cette atmosphère qui se dégage de l’album, entre vie quotidienne, amitiés, espoirs, sentiments amoureux et crainte du Reich. Un mélange qui, pour moi, a bien fonctionné. J’ai été prise dans le récit. Cependant, il manque quelque chose au niveau du scénario. Je m’attendais à une histoire avec une fin intéressante. Malheureusement, je trouve que ça tombe à plat. Il y a bien une conclusion, mais ce n’est pas une véritable fin. Mon avis est donc assez mitigé, malgré les qualités graphiques de l’album.
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