Les Equinoxes
Tenter de capter, malgré son évanescence, ce sentiment de solitude qui nous saisit face à la complexité du monde. Cet état d'âme qui, s'il nous isole de nos semblables, est peut-être ce qui fait de nous des humains.
Aire Libre
Outrepassant par la grâce du dessin le principe selon lequel il faut se taire sur ce dont on ne peut pas parler, Cyril Pedrosa suit les méandres de cette émotion, nous livrant un magistral récit en quatre tableaux. Quatre tableaux, pour quatre saisons et autant de personnages en quête de leur destinée, à travers l'espace et à travers le temps. Autour de lieux, à l'occasion de luttes, ces êtres sans attaches vont croiser d'autres solitudes et tisser les uns avec les autres le fil ténu d'une conscience happée par l'inconnu et tourmentée par l'énigme du sens de la vie. Chaque saison a son identité graphique, chaque voix également. Une oeuvre d'une intensité et d'une sensibilité narrative rares, du créateur du très remarqué Portugal.
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Date de parution | 25 Septembre 2015 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
C’est un ouvrage pétri de qualités, plutôt exigeant, et qui fera fuir tous les lecteurs recherchant de l’action, ou qui sont réfractaires à la mélancolie, aux longs espaces imprégnés d’ennui, aux questionnements existentiels qui dominent ici. C’est vraiment du roman graphique pur. Un aspect accentué par les nombreux passages très littéraires, avec uniquement du texte, qui entrecoupent les différents chapitres. J’ai eu du mal à entrer dans « l’intrigue ». Y en a-t-il véritablement une d’ailleurs ? C’est une somme d’histoires, de plusieurs personnages indépendants les uns des autres, et j’ai longtemps attendu que toutes les pièces du puzzle se rassemblent. Pour compliquer le tout, quatre grandes parties sont introduites par une histoire où nous suivons une sorte d’enfant sauvage – ou un gamin préhistorique – dans des aventures n’ayant a priori aucun lien avec l’histoire ou les histoires principales. Pedrosa use de divers style ou colorisation, ce qui concourt à dérouter le lecteur, même si cela donne aussi une touche agréable au récit. Je n’ai sans doute pas tout compris. Mais globalement la lecture a été plaisante. Note réelle 3,5/5.
J'ai dévoré les 336 pages de l'oeuvre de Pedrosa avec une grande facilité tellement j'ai été séduit par la finesse du récit. Pedrosa est passé maître dans l'art des récits intimistes. La thématique des destins croisés qui se retrouvent au même endroit est un grand classique du cinéma et de la littérature. La construction d'un tel enchevêtrement de destins doit se faire avec beaucoup de doigté. C'est le cas ici. Pedrosa évite les nombreux écueils d'un tel scénario. Il réussit à créer des situations qui rendent crédibles les rencontres, et qui équilibrent l'intérêt que j'ai porté aux personnages. En général je ne suis pas très fan du mélange de planches de BD et de récit littéraire. Mais ici l'artifice de l'arrêt sur image et la fluidité de l'écriture de Pedrosa ont pu créer un ensemble très cohérent et agréable à découvrir. L'auteur introduit des thèmes qui lui sont chers : la finitude, le sens de la vie et la réponse psychologique ou spirituelle en face de la conscience de l'inéluctable destinée. J'aime bien l'humour triste sur la désillusion des lendemains qui chantent où sur la conscience écologique de notre époque. À chaque nouvelle lecture je me laisse séduire par le graphisme de l'auteur. Ce n'est pourtant pas le style vers lequel j'ai le plus d'affinité mais la maitrise et le style de l'artiste sont si aboutis que Pedrosa m'entraîne dans cette ambiance intimiste un brin nostalgique du théâtre de nos vies.
J'avais lu Portugal il y a un long moment, et j'ai surtout un souvenir d'une BD qui m'a semblée trop hésitante, se balançant dans une histoire qui n'arrivait pas à me toucher. Pour autant, j'aime bien ce que fait Pedrosa sur d'autres œuvres et "Les Equinoxes" m'avait fait de l'œil lors de sa sortie, j'ai du cependant différer ma lecture pendant quelques années. Et je suis très content de celle-ci, qui me confirme que Pedrosa est un auteur que j'apprécie pour sa sensibilité et son travail graphique. Si j'avais plus de difficultés avec le personnage de Portugal et son histoire de famille immigrée, je me suis bien plus retrouvé dans les considérations développées ici. A travers plusieurs portraits de personnage, Pedrosa esquisse une air du temps. Une sorte de portraits croisés qui se lient autour de l'histoire d'une photographe. Tout est à peine effleuré, les histoires ne sont que peu développées, exception faite de celle du prothésiste dentaire qui a le droit à plus de temps d'apparition que les autres. Les mélanges d'histoires abordent plusieurs thématiques sur le temps qui passe, la communication entre les êtres, ce que l'on devient dans la vie … Alors même que la mélancolie domine plutôt clairement le ton du récit, je trouve que le final a quelque chose d'un peu plus positif. C'est notamment la citation sur le mari de Virginia Woolf qui rajoute quelque peu de positif dans l'ensemble. Pedrosa joue dans l'ensemble du livre sur la narration en figeant une case, prise en photo par le personnage, qui développe ensuite une page d'écriture nous mettant dans la tête de celui-ci. C'est assez bien trouvé, nous avons des petites tranches de vie rapides mais immersive. En quelques mots, quelques phrases, l'ensemble parait cohérent et les questionnements, les doutes, les incertitudes arrivent à me convaincre. Ce que j'aime chez Pedrosa, c'est que son graphisme à quelque chose de très marqué "Roman graphique", mais son utilisation des couleurs est toujours remarquable et contribue carrément à l'ambiance générale. J'aime aussi le fait qu'il coupe avec quelques moments suspendus juste avant les pages de texte. C'est plus long à lire, plus complexe aussi, mais les BD de ce genre là méritent qu'on s'y attardent un peu. En tout cas, je suis ravi de l'avoir lu et je vais continuer à explorer l'auteur qui me semble de plus en plus intéressant.
Vous voulez lire « Les équinoxes » de Cyril Pedrosa ? Et bien, soyez sûr(e) de disposer de beaucoup de temps devant vous (336 pages) et d’être prêt(e) à accepter l’absence quasi complète de scènes d’action. Car, « Les équinoxes » est un pur roman graphique, c’est un récit sur le sens de la vie et le temps qui passe. Je me suis mis à feuilleter de bon cœur cet album en souvenir de ma lecture enthousiaste de « Portugal » du même auteur. En effet, j’aime beaucoup le coup de patte de cet artiste, sa faculté de créer des atmosphères envoûtantes et des ambiances particulièrement adaptés à l’intensité de chaque scène, sa facilité aussi de changer de style de dessin, sa mise en couleurs qui me titille les pupilles. Mais qu’en est-il du scénario de « Les équinoxes » ? Autant vous le dire tout de suite : c’est un gros sentiment de mélancolie qui m’a prédominé après sa lecture, bref, ce n’est pas vraiment un livre qui je relirai de sitôt car tout dans cet album est traité de manière très subtile… il n’y a pas de scènes fortes et les personnages ne sont pas apparus au final si attachants que ça. On suit le quotidien de plusieurs protagonistes sans trop savoir où l’auteur veut en venir ; puis, au fil des pages, on comprend de mieux en mieux la finalité de ce que Cyril Pedrosa veut nous envoyer comme message. Et on referme cet album avec le sentiment que l’auteur a transposé dans son récit une partie de notre vie… c’est très fort de sa part de m’avoir donné cette sensation et ça fait un peu peur aussi ! Au final, j’ai préféré « Portugal » aux « Equinoxes » du même auteur. « Les équinoxes » est tout de même un bon album voire même un excellent album mais je suis ressorti de cette lecture éreinté, lassé de cette mélancolie qui prédomine tout au long de cette histoire dont je me suis dit au dénouement « Tout ça pour ça ! ».
C'est un gros pavé qui fait peur à première vue (336 pages exactement). Il faut dire que cette oeuvre a fait l'objet d'une édition très soignée et plutôt exceptionnelle. Le récit est centré sur des personnages multiples avec pour thème le temps qui passe. Il y a également des intermèdes au gré des 4 saisons composés de récits avec un petit indien. Je n'aime pas trop le trait gras qui me paraît flou et imparfait. Quant au récit, il n'a rien de réellement transcendant. Certes, la critique unanime salue les performances de cet auteur dont le récit est soi-disant ambitieux. Je ne vois pas le talent dans la construction ou dans le graphisme. Je me suis ennuyé ferme. Les équinoxes m'ont laissé un vide mélancolique immense.
Belles déclinaisons d'humanités Comme Gaston je n'ai pas aimé le fait de couper la narration par des pages de texte qui n'apportent pas assez à mon goût. Et comme lui je n'avais pas accroché à l'Album précédent de Pedrosa. Mais, pour tout le reste, j'en redemande. Les dessins sont légers et expressifs, les techniques et les couleurs variées (parfois tout en transparences, et d'autres fois en aplats contrastés, aussi bien en camaïeux de gris, qu'en griffures flashies). Les moments qui mettent en scène une photographe qui fige des inconnus dans la ville crée un contre-point mystérieux bienvenu dans cette longue ballade dans des vies relativement réalistes. Une autre histoire sans trait ni parole (comme un livre pour enfant) s'intercale aussi et trouve un sens à la fin. Bref c'est construit comme une horlogerie, alors que ça partait dans le vague dépressif. Les équinoxes c'est le moment forcément éphémère où le jour et la nuit ont la même durée. Et cet album est exactement comme ça: entre le moment d'équilibre , juste avant la chute, et ...l'histoire qui va se reproduire éternellement jusqu'à la fin des temps. (spoiler) Le prothésiste dentaire, quinquagénaire, divorcé, avec sa villa avec vue sur la mer, qui s'interroge sur le sens de sa vie, cela peut paraître un peu jean-pierre Bacriesque, mais la différence c'est qu'on ne le voit pas venir à des kilomètres. Il y a aussi le vieux communiste désenchanté (plutôt Daroussin) , l'adolescente facilement excédée, le frangin devenu curé, la femme politique écolo qui est obligée d'avaler des couleuvres pour rester au gouvernement... C'est la vie quoi...
2.5 J'ai mieux accroché à cet album qu'à l'autre one shot de Pedrosa paru dans cette collection. On suit donc un groupe de personnages dans leur vie. L'histoire est divisée en quatre chapitres (un pour chaque saison). Au début cela semble un peu partir dans tous les sens, mais je m'y suis vite retrouvé. J'aime bien le dessin (notamment comment l'auteur peut facilement changer de style), les couleurs sont sympathiques et il y a des bons dialogues. Malheureusement, je ne me peux pas dire que l'histoire m'a grandement captivé. Je trouve que c'est un peu long. Les personnages ne sont pas particulièrement attachants et je n'ai pas réussi à m'intéresser à leurs problèmes. Je n'aime pas trop lorsqu'il y avait uniquement du texte, je trouve que cela casse le rythme de l'histoire.
Plutôt adepte du travail de Cyril Pedrosa que je suis depuis ma découverte de « Trois ombres », j’étais curieux et assez impatient de voir ce qu’il nous avait concocté après le très réussi « Portugal » qui m’avait donné l’occasion de réaliser cette interview. Car avec « Portugal », Cyril Pedrosa avait à mon sens franchi un cap. Narration et surtout graphisme ont atteint une maturité qui font la marque de fabrique d’un auteur de talent : en ouvrant un de leurs albums on sait d’emblée à qui on a affaire. Avec « Les Equinoxes », pas de nouvelle rupture, mais encore un palier de franchi. On sent que l’auteur a su asseoir sa patte graphique en la poussant encore dans ses retranchements. Son travail sur la couleur est notamment assez exceptionnel. Il alterne au fil de sa narration des retranscriptions d’ambiances, de ressentis et de sentiments, uniquement par le biais de son graphisme. C’est juste impressionnant. Alternant une palette bigarrée et très contrastée et des planches de noir et blanc, tout en passant par des camaïeux de violets par exemple à certains moments, Pedrosa se joue de la couleur mais jamais gratuitement. Car tout cela est bougrement bien pensé et agencé pour servir une narration maîtrisée. Ce récit qui peut sembler très éclaté quand on attaque cette lecture, à cause des multiples personnages qui apparaissent successivement, trouve rapidement son rythme et impose ses jalons pour nous immerger dans ce bain de sensations et d’émotions subtiles. C’est même déconcertant comment tout ces quotidiens qui s’effleurent et se croisent parviennent à tisser une trame qui nous semble si familière. On se reconnait tous plus ou moins dans tel ou tel trait de caractère d’un des personnages. Même les intermèdes de noir et blanc enchaînés de texte brut n’arrivent pas à entamer le fil de notre lecture. Ces instantanés qui s’étirent sur quelques pages nous plongent encore plus profondément dans l’âme de ces personnages qui semblent apparaître par hasard, capturé par le regard de cette jeune photographe un peu paumée. Ils nous permettent d’apprécier encore davantage la plume de l’auteur qui nous régale déjà par les dialogues savoureux et souvent drôles qui éclaire ces tranches de vies conduites par un doute omniprésent. Bref, ce dernier album savamment dosé qui s’interroge sur nos fragilités et l’équilibre précaire de nos existences m’a enchanté par sa justesse et la qualité de la capacité de l’auteur à retranscrire en images sensations et sentiments, choses souvent impalpables et difficilement descriptibles. Voilà un album riche, d’une grande sensibilité et d’une qualité graphique qui confirme le talent de son auteur.
Virginia Woolf, femme de lettres anglaise, a écrit en 1931 un roman expérimental nommé Les Vagues constitué des monologues intérieurs de 6 personnages distincts entrecoupés d'interludes détaillant une scène côtière à différents moments du jour. Avec cette oeuvre d'un genre nouveau, elle avait su faire pénétrer dans le monde intérieur de ses personnages, approcher sans la briser la justesse de leurs sentiments, comme différentes facettes de la même âme humaine au sens général. C'est de cette oeuvre que Cyril Pedrosa s'inspire et à son auteure qu'il rend hommage dans Les Equinoxes, grand roman graphique de plus de 300 pages. Il y met en effet en scène de manière originale une petite palette de personnages et leur entourage dans des scènes entrecoupées de tranches de vie d'autres personnages et ponctuées par une histoire cadre racontant les saisons d'un jeune homme sauvage, probablement préhistorique. Il y a le vieux père divorcé et désabusé, qui doit gérer sa relation avec la vie et avec sa fille adolescente dont il a la garde une fois par semaine. Il y a cet ancien militant de la gauche écolo qui s'approche de la fin de sa vie et a abandonné le combat, s'orientant désormais vers d'autres aspirations et quelques regrets. Et puis il y a cette jeune femme, passionnée de photographie, qui parcourt les rues à la recherche de personnages dont elle captera le visage et nous laissera ainsi apercevoir une vision de de leur vie et de leurs pensées intimes à un moment donné. Le traitement graphique diffère selon le cadre. On retrouve le très appréciable trait habituel de Cyril Pedrosa pour les scènes quotidiennes des protagonistes cités ci-dessus. Avec son style souple et doux, il arrive à rendre les personnages attachants et rapprocher d'eux le lecteur. Puis quand viennent les instantanés de vie des différentes personnes que Camille prend en photo, le graphisme passe brièvement au noir et blanc, comme au fusain, et finalement l'image laisse la place au texte pour 2 à 4 pages de roman où les photographiés se racontent intimement. Quant au récit cadre de ce jeune garçon préhistorique, ils est dans un style différent, sans encrage, proche du dessin vectoriel sur ordinateur tout en conservant un trait qui m'a parfois rappelé celui de Blutch. C'est beau. L'histoire, ou plutôt les histoires de chacun de ces personnages, prend son temps à se mettre en place. Pleine de non-dits, elle laisse entrevoir doucement les troubles de chacun sans les expliquer, puisque les mots seraient bien en peine de le faire. Le lecteur pourra y regretter un certain hermétisme, suivant des personnages dont il risquerait de ne pas se sentir proche s'il ne les comprend pas, ne les ressent pas facilement. Mais les émotions humaines présentées ici ne se traduisent pas en termes faciles. Il faut la subtilité du dessin, de la mise en scène et d'une narration douce pour permettre de les ressentir et de les comprendre. Sur le plan narratif d'ailleurs, il y aura peut-être quelques regrets. Tout d'abord, une entrée en matière lente à apprivoiser, avec beaucoup de personnages et un lecteur qui met du temps à s'y retrouver. Puis il est possible de regretter les passages purement textuels. Même s'ils sont plaisamment écrits, ils sont un peu longs et brisent le rythme de l'album. La même chose en bande dessinée aurait beaucoup augmenté le nombre de pages mais aurait peut-être été plus agréable à la lecture. Je salue la sensibilité et la réussite à transmettre les émotions subtiles de personnages complexes. La mise en scène est forte et originale. Et malgré quelques reproches vis-à-vis de la lenteur du développement et un soupçon de manque de clarté, c'est un ouvrage remarquable que nous avons là.
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