Sykes
Sykes, un marshall impitoyable, fait régner la loi et l'ordre dans l'Ouest sauvage, lorsque Jim Starret, jeune garçon devenu orphelin à cause de ceux qu'il traque, s'attache à ses pas… A voir aussi : Texas Jack
1872 - 1899 : de la IIIe république à la fin du XIXe siècle BD à offrir Ecole Pivaut, Nantes Le Lombard Les prix lecteurs BDTheque 2015 One-shots, le best-of Signé [USA] - Rocky Mountains States - Les Rocheuses
Lorsque « Sentence » Sykes pose le premier sabot dans ses collines natales, le jeune Jim Starret reconnaît immédiatement une légende de l'Ouest, digne des illustrés avec lesquels il a appris à lire. Mais son nouveau héros n'est pas là lorsque la redoutable bande des Clayton assassine sa mère sous ses yeux. Dès lors, Jim n'a plus qu'une obsession : rejoindre Sykes et participer à la traque. Il a déjà payé le prix du sang. Il ignore encore que ce sont ses démons qui forgent une légende du Far-West… [Texte de présentation de l'éditeur]
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Date de parution | 06 Novembre 2015 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Voici un grand western signé Pierre Dubois qui n'est pas connu pour être un spécialiste du genre, c'est peut-être ça qui rend ce western si intéressant car il travaille en profondeur le personnage de Sentence Sykes, un marshall rude et impitoyable avec les outlaws qu'il poursuit, mais doté paradoxalement d'un profond humanisme, et surtout tiraillé par des démons intérieurs. Sykes apparait comme un être torturé, cherchant l'oubli dans une vie aventureuse remplie de danger et de violence. Il fallait cette originalité dans le caractère du personnage pour que ce western se hisse parmi les grandes oeuvres du genre. Sinon les autres personnages comme le cabochard O'Malley, le pisteur indien Renard Gris, et même le couple de fermiers amis sont des archétypes qu'on rencontre dans le western en BD et à l'écran, à la fois rudes et attachants. L'intrigue en elle-même adopte une démarche très classique, il s'agit d'une traque, Sykes et ses compagnons pistent une bande d'ignobles salopards, ce qui occupe les 3/4 de l'album, et l'ensemble utilise des éléments typique du western hollywoodien mais revisités par une vision plus actuelle et très réaliste. La seconde partie de l'album qui occupe le dernier tiers me dérange un peu par son côté un peu trop rapide qui tranche avec la première partie, car elle montre les 2 héros vieillissants courant vers un destin inexorable mais finalement logique car ce genre d'aventuriers ne pouvaient pas finir leur vie paisiblement dans un ranch, ils allaient au bout de leur destin, leur vie étant dirigée par les armes devait se conclure dans une mort sanglante. Sans révéler la fin, je peux dire que je la trouve cruellement logique et finalement assez belle, même si j'aurais préféré que ça reste focalisé sur cette traque. C'est un grand western sombre, empli de noirceur, mélancolique et crépusculaire qui s'inspire directement de certains westerns hollywoodiens des années 70 en évitant toute analogie au western spaghetti, mais qui m'a fait penser au film Impitoyable de Clint Eastwood, à True Grit des frères Coen, et aussi à Appaloosa de Ed Harris ; le traitement de Dubois est dans cette lignée de westerns récents au cinéma qui donnent une vision beaucoup plus sombre que les westerns à l'ancienne, les héros sont fatigués, dépassés par leur époque qui voit l'Ouest se transformer et où ils n'ont plus leur place. On notera aussi quelques allusions au western spaghetti (assez ironique d'ailleurs) à propos du Django de Corbucci, qui "traîne une mitrailleuse dans un cercueil", ainsi qu'à John Ford avec le nom de Doniphon (nom du personnage de J. Wayne dans L'homme qui tua Liberty Valance, au ton déjà crépusculaire)... Quand en plus, c'est illustré par le crayon de Dimitri Armand, c'est franchement éblouissant, son dessin est superbe avec un style très cinématographique, repérable dans la plupart des cadrages, et avec un trait épais qui magnifie de splendides paysages, il offre de très belles images, et d'ailleurs l'album s'ouvre par une pleine page magnifique. Je trouve que Armand fait preuve d'un plus grand soin et d'une grande maîtrise par rapport à sa reprise de Bob Morane Renaissance au trait plus simple et moins travaillé ; le visuel qu'il offre ici contribue énormément à cette atmosphère crépusculaire et cette noirceur qui parsèment toute cette histoire, renforcées par des images à la violence crue qui donnent un ton ultra réaliste. Enfin, ça me réjouit de voir que le western est revenu en force en BD ces derniers temps, surtout quand il a une telle densité. Bref, c'est une vraie pépite !
Décidément 2015 est l’année des (très bons) westerns en bande-dessinée. Alors oui, il y a forcément des images qui nous viennent en tête automatiquement sans qu’on n’y puisse rien quand on lit "Sykes" dont le personnage éponyme fait penser à Virgil Cole (Ed Harris) dans le film Appaloosa. Que ce soit dans sa droiture morale, un certain sens de l’honneur et des règles tout en pouvant se montrer impitoyable et sans merci, mais aussi de par son adjoint suppléant O’Malley qui là pour le coup s’éloigne d’Everett Hitch (Viggo Mortensen) cependant que leur tandem fonctionne de la même façon avec beaucoup de respect mutuel et une certaine dévotion pour leur boulot ingrat. Et oui, on pensera également inévitablement au True Grit des frères Cohen avec le jeune orphelin Jim qui réclame vengeance pour sa famille massacrée et qui accompagne Sykes malgré les réticences de ce dernier dans la traque des meurtriers. Puis de la même façon qu’entre la déterminée Mattie et le vieux soulot Marshal Cogburn (Jeff Bridges), il y a une relation d’amitié et de filiation touchante qui se met progressivement en place entre Sykes, O’Malley et Jim. Et c'est bien ça qu'on aime ! Mais ce que j’ai trouvé étrange par un moment c’est que j’ai réalisé que la traque n’est pas le véritable propos de "Sykes" alors que tout de même elle occupe un bon trois quart de l’histoire. J’ai cru que ça allait se résumer à ce genre d’histoire assez classique et qu’il faudrait se contenter des belles planches, mais une fois ce chapitre clos le récit se focalise presque complètement sur Sykes et j’ai réalisé que certes, Pierre Dubois nous conte la vie d’un Marshal implacable au passé torturé, mais à travers lui et son ami O’Malley c’est aussi une histoire de l’Amérique que nous raconte l’auteur. Celle de la spoliation des terres des colons par les banques par l’intimidation, le chantage, la menace et si ça ne suffit pas, l’assassinat. Les truands du premier axe de l’intrigue sont de grosses raclures mais les pires sont les notables de la bourgade de fin : le banquier bien propre sur lui, le président de l’association des commerçants, le pasteur et le shérif corrompus. Eux ont de vrais gueules d’assassins. C’est le récit d’un homme fatigué, en lutte contre ses propres démons comme le capitaine Achab de Moby Dick dont il est un lecteur attentif, qui a passé sa vie à protéger les faibles et qui savait reconnaître les âmes bonnes des monstres mais qui à la fin, blasé par toute cette violence finit par ne plus s’apercevoir que le monde autour de lui à changer. L’ère de l’industrialisation à changer le paysage et les bandits qui ne braquent plus avec un masque et un revolver, mais armé d’un papier et d’un crayon. Mais attention, on n’est pas du tout dans le genre du western spaghetti ici, c’est résolument tourné vers un réalisme violent, fataliste puis tragique. Il est cependant dommage que la deuxième partie soit un peu précipité dans sa conclusion alors que jusque là les auteurs avaient pris leur temps pour mettre en place la première intrigue. Sûrement parce que le paysage mérite davantage que l’on s’attarde sur la première moitié que sur la fin. Un petit mot sur le dessin de Dimitri Armand que j’ai trouvé tout à fait remarquable de réalisme. C’est beau, qu’est-ce que je peux dire de plus. Le personnage du barman au début, je n'arrive pas à me souvenir de qui il tient les traits, mais je suis sûr que c'est un acteur. Robert Davi ? Rhââ je n'arrive plus à me souvenir mais je l'ai déjà vu quelque part. Et ces couleurs incroyablement variées, c’est d’une grande richesse et impeccablement soigné. Je trouve ça formidable qu’il y ait de plus en plus de grand récit one shot comme celui-là en bande-dessinée alors qu’on est bien souvent habitué à des séries longues qui font mal au portefeuille et qui ne savent pas toujours où elles vont. Là c’est dense, condensé en 81 planches brillamment exécutées, intelligent et rondement mené bien que l'on n'évite pas certaines scènes clichés comme la bagarre de saloon. Que demander de plus ?
Avec Sykes, Pierre Dubois nous offre un grand western. C'est un western avec un vrai marshall en guise de héros viril (ça change des croque-morts très en vogue par les temps qui courent…). Bon, d'accord, le coup du vieux shérif qui poursuit envers et contre tout sa croisade contre le crime n'est pas neuf ; cette histoire-là, Hollywood nous l'a déjà servie à de nombreuses reprises. Sykes est un dinosaure, un de l'ancienne école, celle du temps d'avant que la loi et les juges n'investissent l'Ouest sauvage, quand les marshalls combattaient le crime par des méthodes aussi expéditives et peu reluisantes que celles des criminels qu'ils étaient chargés de neutraliser, ceux qui n'hésitaient pas à tirer dans le dos ou ou à dynamiter sans discernement. Il me fait irrésistiblement penser au personnage de Virgil Cole dans Apaloosa et plus encore au marshall borgne dans True Grit ; d'ailleurs Dimitri Armand lui donne des allures de Rooster Cogburn (en plus élégant), et Dubois ne manque pas l'occasion de railler la nouvelle génération de cow-boys, celle du western spaghetti, quand l'adjoint de Sykes explique l'évolution du métier : « à côté de la relève, on a encore de beaux restes. Faut dire que la tendance est maintenant au bizarre. Entre ceux qui trimbalent une mitrailleuse dans un cercueil, ou te flinguent à coup d'harmonica… ». Sykes se retrouve avec un môme dans les pattes. Sa mère a été tuée par une bande de hors-la-loi sanguinaires. Le gamin identifie le marshall à ces héros sans peur dont les aventures fantaisistes parsèment les magazines illustrés. Alors, il colle aux basques de Sykes et découvre qu'il y a un fossé entre la littérature et la réalité. Le vieux baroudeur et le jeune naïf… encore une histoire que d'autres westerns ont mis en musique (voir par exemple le beau Chiens de prairie de Foerster et Berthet). Mais Dubois est un conteur, alors il sait nous accrocher jusqu'au bout des 75 planches. Et il y a le dessin de Dimitri Armand, très juste, qui varie les ambiances classiques et ose quelques innovations bienvenues (la mort du dénommé Rocky, page 20). À quelques jours d'intervalle, il publie ce bel album dans la prestigieuse collection “Signé” et le premier volume de Bob Morane Renaissance, bel exploit. Je découvre deux facettes impressionnantes de l'œuvre de ce jeune dessinateur, dont j'espère qu'il continuera à mettre son crayon au service d'aussi bons scénaristes. En somme, Sykes est un western crépusculaire, un de ceux qui marque la fin des grands westerns hollywoodiens, pleins de certitudes et de bons sentiments, en décrivant un Far-West boueux, peuplé d'individus bestiaux, vicieux et violents qui prennent un malin plaisir à abuser des faibles et ne peuvent être guéris que par le plomb chaud. Au niveau de l'ambiance, on est plus proche d'Impitoyable que de Rio Bravo. Pour parler de bandes dessinées, disons qu'on est du côté du Bouncer, de L'Etoile du Désert ou de Sans Pardon plutôt que chez Comanche ou Jerry Spring. En résumé, voici un bel album, qui plaira autant aux inconditionnels du western classique qu'à un public plus exigent qui attend des histoires plus matures.
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