Anent - Nouvelles des Indiens jivaros

Note: 3.75/5
(3.75/5 pour 4 avis)

L'expérience d'un ethnologue racontée avec humour.


Amazonie Les petits éditeurs indépendants Tribus et peuples isolés

Au cœur de la jungle amazonienne, les Jivaros Achuar conversent quotidiennement avec les plantes, les animaux et les esprits grâce aux anent, de petits poèmes fredonnés à voix basse ou récités mentalement. Du moins en était-il ainsi il y a quarante ans, lorsque l’anthropologue Philippe Descola partagea leur vie pendant trois années. Fasciné par son récit, Alessandro Pignocchi repart aujourd’hui sur ses traces… (texte : Steinkis)

Scénario
Dessin
Couleurs
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 13 Janvier 2016
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Anent - Nouvelles des Indiens jivaros © Steinkis 2016
Les notes
Note: 3.75/5
(3.75/5 pour 4 avis)
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21/01/2016 | Spooky
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L'avatar du posteur Mac Arthur

Cet album est une petite perle. J’avais découvert son auteur via le tome 1 du « Petit traité d'écologie sauvage », un album très original qui nous propose d’inverser deux univers, les animistes étant aux commandes de nos sociétés. En découlaient situations cocasses et absurdes, qui prêtaient à rire tout en nous obligeant à réfléchir sur notre perception du monde et notre place sur la terre. Anent est le versant « sérieux » du travail de l’auteur, ethnologue, philosophe et dessinateur de talent. Il nous relate ici son séjour chez les Achuars, peuple jivaro vivant au cœur de la forêt amazonienne. Mais « sérieux » ne veut pas dire « dénué d’humour », l’auteur pratiquant régulièrement l’autodérision. Ce qui m’a d’abord marqué, c’est l’intelligence avec laquelle Alessandro Pignocchi utilise son dessin pour faire passer un message. Il alterne en effet des styles différents qui figurent avec finesse le niveau de compréhension entre les deux cultures. Au début, deux styles bien distincts. Puis un seul style dans lequel cohabitent les deux styles mais sans que la fusion ne soit parfaite. Enfin, un style propre dans lequel la couleur fait son apparition. A chaque changement de style correspond une évolution dans la compréhension par Alessandro Pignocchi du mode de pensée, et de vie, des Achuars. Des fourvoiements du début succèdent la compréhension puis l’assimilation. Au niveau de l’usage du dessin pour transmettre une idée, c’est digne à mes yeux d’un Scott McCloud ou du duo d’Enfin Libre : original et intelligent. Et comme, en plus, le gaillard sait tenir un pinceau, certaines planches sont de pures splendeurs. Particulièrement celles qui illustrent des oiseaux, que je trouve magnifiques de précision et de vie, Alessandro Pignocchi parvenant à combiner la rigueur du trait à l’art de la suggestion par l’absence de traits. Quant au contenu, il est intéressant à plus d’un titre. Tout d’abord, parce que se développant sur deux époques, il permet de montrer l’évolution (ou la dévolution, question de point de vue) de la culture Achuar au contact de nos cultures occidentales. Ensuite, parce que, alors que comme lecteur, on se dit que cette culture est en net recul, l’auteur va nous montrer le contraire grâce à certains aspects de cette culture –dont les fameux anent, qui donnent leur nom à cet album- avec une explosion finale où l’on se dit que, à nouveau (à l’image du premier séjour de l’auteur en Amazonie), on a failli passer complètement à côté. Enfin, parce que les anecdotes surprenantes et amusantes se succèdent, relançant régulièrement notre curiosité et notre envie de finir ce copieux bouquin. Intelligent, très bien illustré, amusant à l’occasion… voici un très beau récit sur la rencontre entre un ethnologue curieux et ouvert et un peuple qui n'a pas encore oublié qu'il n'était qu'un élément parmi tant d'autres de la planète Terre.

11/10/2018 (modifier)