Stupor Mundi
Et si la photographie avait été inventée au Moyen-âge ? Une hypothèse pas du tout farfelue, comme le montre Néjib dans ce polar médiéval digne du "Nom de la rose".
987 - 1299 : Moyen-Âge et Capétiens Italie Photographie
Au début du XIIIe siècle, Hannibal Qassim El Battouti, un éminent savant arabe, débarque dans les Pouilles à Castel del Monte, refuge d'érudits en tout genre. Accompagné de sa fille Houdê, paralysée, et de El Ghoul, son serviteur masqué, il a dans ses bagages une invention extraordinaire: la photographie. Pour obtenir la protection de Frederic II et continuer ses recherches, il lui faudra retrouver une formule chimique disparue, réaliser un faux saint-suaire... et lutter contre les forces ennemies liguées contre lui. Frédéric II, quant à lui, espère grâce à lui redorer son blason auprès de la papauté. L'empereur a vite compris les avantages qu’il pourrait tirer d'une telle découverte.
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Date de parution | 08 Avril 2016 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Merci à mon bibliothécaire de me mettre dans les mains des ouvrages dont la couverture ne m’attire a priori pas. Une petite visite sur notre site préféré me confirme qu’il a raison, je prends. Je passe sur le dessin qui n’est pas ma tasse de thé, mais que je suis prête à accepter, voire même à apprécier, pour son originalité si l’histoire est bonne. Et l’histoire est bonne. J’aime bien ce contexte historique. Celui où un prince éclairé, indépendamment de sa politique, était prêt à s’opposer à la papauté et à s’entourer des meilleurs penseurs, artistes et surtout scientifiques de son temps. Point d’obscurantisme ici. Malgré les contraintes des pouvoirs religieux, les idées fusent et se diffusent. Pouvoir de la réflexion, pouvoir de l’expérimentation, pouvoir du dialogue, pouvoir de l’écrit, entre les mains d’esprits libres et emprunts de raison… dans le meilleur des cas. Mais notre savant est impatient de voir l’oeuvre de sa vie aboutir, fixer l’image de la « camera obscura ». Et même si on est entre gens civilisés, les inimitiés se créent, le pouvoir devient pressant, les compromissions sont tentantes. Sera t’il prêt à toutes les bassesses par orgueil ? J’ai bien aimé. Une subtile réflexion sur ce rapport au pouvoir dans un quasi polar médiéval. Et élégamment raconté en plus.
Que voilà un album original ! Par le sujet d’abord, ambitieux, puisqu’il brasse des sujets « sérieux » (jusqu’où un savant est-il maître de ses découvertes ? La science doit-elle être au service du pouvoir ?, etc.), qui plus est dans une époque peu souvent utilisée, la fin du moyen-âge et le début de la Renaissance. Ajoutons à cela un quasi huis-clos, puisque toute l’intrigue se déroule quasiment dans un château italien, appartenant à l’Empereur (surnommé « La Stupeur du Monde »). Et pourtant, la lecture est captivante, on ne s’ennuie pas, car Néjib (dont je découvre le travail avec cet album) n’a pas fait ici un pensum. On a même droit pendant quelques pages à une petite enquête policière digne de Gaston Leroux ou de Poe ! Quant au dessin, très moderne, en esquisses, je l’ai trouvé lui aussi réussi, à la fois simple et original. Idem pour la colorisation, très tranchée. C’est vraiment un album que je vous recommande, car il sort agréablement des sentiers battus.
Même si le graphisme m'a un peu fait grincer des dents au départ, j'ai très vite été séduit par la vraie originalité du thème et du contexte de cette histoire. Mettre en scène un scientifique arabe venu en Italie rejoindre un conclave de savants au service de l'empereur Frederic II est une idée à la fois originale et intéressante. Mais c'est vrai que le dessin ne m'a pas enthousiasmé. Je le trouve trop proche du croquis rapidement esquissé et sans charme. Il demeure efficace mais ne me permet pas vraiment d'apprécier l'histoire au point de vouloir la relire ou feuilleter ses pages. Quant à l'histoire, elle est bonne et bien menée mais elle tire un peu en longueur. Ça tient presque du roman tellement c'est dense et vu comment l'action avance doucement. Mais c'est vrai aussi qu'il y a un petit côté Nom de la Rose dans cette vision du monde scientifique un peu en bute au monde religieux. Une intéressante lecture qui sort des sentiers battus mais j'aurais aimé un dessin plus soigné et un peu plus de rythme.
2.5 Cette bande dessinée me paraissait excellente et je fus déçu lorsque je l'ai lue. Ce n'est pas que c'est mauvais. La période historique est assez intéressante, il y a des bonnes scènes et le dessin est bon. Il y a deux problèmes qui m'ont empêché de trouver cette histoire passionnante. Le premièr est que je trouve qu'il y a des longueurs, surtout dans le premier chapitre. J'ai eu l'impression que plusieurs scènes étaient trop longues ou étaient même un peu inutiles. Le second problème est que les rebondissements m'ont souvent paru prévisibles. J'ai donc lu un album que je trouve trop long et qui en plus a une histoire cousue de fil blanc. C'est dommage parce que le scientifique arabe a une personnalité assez intéressante.
L’invention de la photographie pourrait-elle remonter au Moyen-âge ? Tel est le postulat de cette BD construite à la manière d’un polar. Cela peut paraître farfelu, mais d’après Néjib, les moyens techniques existaient pour faire de la photographie à l’époque, du moins en théorie. Le fait qu’elle n’ait pas été inventée avant le XIXe siècle fait partie des mystères de l’Histoire. L’auteur en profite pour avancer une théorie, des plus audacieuses, selon lequel le Saint Suaire serait un faux fabriqué selon les principes chimiques de la « camera oscura » à des fins de propagande. "Stupor Mundi" (Stupeur du monde), tel était le surnom de Frédéric II, empereur du Saint-Empire romain éclairé et érudit qui eut maille à partir avec la papauté. Celui-ci dût concilier son rôle de chef des croyants dans un monde menacé par l’obscurantisme et sa passion pour les sciences et la philosophie. A cette époque, les principales découvertes venaient d’Orient, là où la civilisation arabe connut un rayonnement majeur, mais malgré cela, les savants n’y étaient pas toujours à l’abri d’un imam intolérant. Frédéric II leur accordait volontiers sa protection pour leur permettre de mener leurs recherches l’esprit tranquille. S’inspirant librement de la vie du suzerain et de ses contemporains, Néjib a conçu un récit reposant sur l’opposition entre l’ombre et la lumière. Cette fameuse « camera oscura » sert de parabole pour illustrer de façon pertinente la lutte qui se jouait à l’époque entre le pouvoir politico-religieux et le monde des sciences et des arts, quelques siècles avant la philosophie des Lumières. Le personnage du savant Hannibal, en exil, apparaît pour sa part ambigu. S’il est bien du côté du savoir et des sciences, on devine qu’il est prêt à tout pour recevoir les lauriers de la gloire grâce à sa découverte. Peu engageant au premier abord, le dessin tient d’un minimaliste poussé mais chaque trait est à sa place, les perspectives et les cadrages semblent couler de source, en accord parfait avec l’histoire qui du coup reste d’une bonne fluidité. Les paroles alternent parfaitement avec les silences, ce qui, étant donné la teneur du sujet et une certaine complexité du scénario, est appréciable. Néjib a des choses à dire, il veut que ça se sache et pour cela va droit au but. Et ça fonctionne. Comment ne pas voir dans l’œuvre de cet auteur né en Tunisie un message adressé aux extrémistes religieux de son pays qui tentent d’avoir la mainmise sur le pouvoir politique ? Mais son message a également une portée universelle. Car c’est actuellement un vent maudit qui souffle sur tous les continents, alimenté par les peurs, la bêtise et l’ignorance. Si « Le Nom de la Rose » devait avoir son équivalent en bande dessinée, « Stupor Mundi » serait celui-là. Une des bonnes surprises de l’année, cela va sans dire.
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