Les Gueules rouges
Western chez les Chtis.
1900 - 1913 : Du début du XXe siècle aux prémices de la première guerre mondiale Au fond de la mine... Bienvenue dans le Nord ! Indiens d'Amérique du nord Sioux et Cheyennes
Été 1905. En tournée dans toute l’Europe, le cirque de Buffalo Bill s’arrête à Valenciennes. Un événement considérable pour la population locale et l’occasion pour Gervais, un gamin qui travaille au fond de la mine, d’élargir son horizon. De sa rencontre poignante avec des Sioux du cirque va naître une terrible erreur judiciaire quand ses amis indiens sont accusés d’un meurtre sauvage... Riche en péripéties, ce western transposé au pays de Germinal est aussi une chronique truculente de la vie quotidienne des mineurs au début du XXe siècle, sur fond de remous politiques provoqués par les syndicats anarchistes et l’imminence de la loi sur la laïcité. (Site éditeur)
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Date de parution | 08 Mars 2017 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
C’est un western assez étrange car il mêle un mineur du Nord de la France avec un peau-rouge du cirque de Buffalo Bill. Un jeune garçon essaie en effet d’échapper à son destin. L’intrigue entre l’enquête policière et la chronique sociale est savamment bien construite. Il sera également question du fameux débat concernant la séparation des Églises et de l’État en 1905. Cela va être une rencontre assez intéressante entre deux modes de vie totalement différents mais qui semblent combattre la même chose. Comme quoi, il peut y avoir des points d’accord malgré les différences. C’est une œuvre profondément humaine et assez bienveillante comme je les aime, comme une leçon de vie. Les thèmes me sont assez chers comme la tolérance et la solidarité dans un monde qui en manque cruellement. On y retrouve tout le vécu et l'ambiance des cités minières de l'époque. Au niveau du graphisme, j’ai quand même eu un peu de mal mais je m’y suis habitué au fil de la lecture. De manière générale, j’aime bien les couleurs directes à l’aquarelle. Ici, c’est surtout sombre et rouille. Quelques bémols cependant comme l’emploi du patois local (le ch’ti) qu’on aurait pu éviter. La conclusion sera plutôt cynique sur le fait que l’Europe sombrera dans une folie meurtrière. Une question se pose alors : qui sont alors les plus sauvages ? En tout cas, un mélange fort réussi qui rend ce western tout à fait original et surprenant.
Camargue rouge, de Faure et Vilane, racontait la rencontre entre des cavaliers de Camargue et les indiens du Wild West Show de Buffalo Bill. Les Gueules rouges, lui, parle du même type de rencontre mais cette fois par des mineurs de fond du Nord. On y suit le jeune Gervais, élève appliqué qui aimerait bien faire des études mais que son père va forcer à venir travailler avec lui dans la mine. Alors pour s'évader, il va aller voir en cachette le spectacle américain de Buffalo Bill et y rencontrera des peaux-rouges qui, par la force des choses, vont se retrouver obligés de côtoyer les fameuses Gueules noires. Malgré les circonstances compliquées de cette situation, les échanges entre les représentants de ces deux peuples si différents vont montrer tout ce qui les rapproche et permettre au jeune héros de se forger une vision nouvelle du monde et de ses ambitions. J'ai beaucoup aimé cette lecture car elle permet avant tout de découvrir de l'intérieur le monde des mineurs du Nord, ceux des corons, en 1905. C'est bien fait et ça présente les choses sous un aspect très humain, sans manichéisme. On y voit des mineurs fiers de leur métier malgré sa difficulté et ses dangers, et d'autres qui se plaignent et militent pour plus de droits ou sont plus radicalement anarchistes. Ce n'est pas du Germinal car l'ensemble reste vu par les yeux d'un garçon qui vient d'avoir son certificat d'études. Et en même temps donc elle nous permet de découvrir la magie et l'exotisme apporté par le Wild West Show de Buffalo Bill, faisant entrer l'univers de l'ouest sauvage américain dans la France du début du siècle. Et de constater aussi que les participants de ce show n'étaient pas des sauvages incapables de communiquer et de raisonner mais bien des hommes aux parcours variés permettant des échanges intéressants entre des mondes bien différents. Quant au dessin, s'il ne me charme pas totalement sur le plan esthétique, il est efficace et je lui trouve une agréable personnalité, notamment au niveau de ses couleurs directes à l'encre ou aquarelle. C'est une lecture dont je suis ressorti très satisfait car je l'ai trouvée intéressante, dense, bien menée et dotée d'une conclusion qui m'a agréablement convaincu.
2.5 Personnellement, j'ai trouvé cet album assez moyen. La rencontre du monde misérable des mineurs français avec le far-west aurait pu donner quelque chose d'intéressant, mais au final j'ai trouvé l'histoire peu passionnante à lire. Il y a quelques bonnes scènes et j'aime bien le dessin (quoique cela manque un peu de dynamisme), mais c'est à peu près tout. J'ai lu cet album sans ressentir beaucoup d'émotions. J'ai attendu durant des pages un événement qui allait enfin rendre ce récit excitant et ce n'est jamais venu. Toutefois, je ne me suis pas ennuyé non plus. Disons que c'est le genre d'album que je lis sans problème et qui fait passer le temps, mais que je referme avec la sensation que rien ne me donne envie de le relire un jour.
Voilà un album relativement original quant à son sujet, que l’on devine avec cette couverture, réunissant un mineur et un Indien. L’histoire se déroule essentiellement en 1905, dans le Nord de la France, près de la tranchée d’Arenberg (que personnellement je connais surtout à travers Paris-Roubaix…), autour de mineurs, et en particulier d’un gamin, Gervais, qui réussit bien à l’école, qui pourrait faire des études et devenir ingénieur, mais qui doit obéir à son père et descendre comme lui dans les boyaux de la mine. L’univers de ces mineurs, la vie des corons, tout est bien rendu, on est proche de Les Mangeurs de Cailloux ou de Sang noir - La catastrophe de Courrières, deux belles séries de Loyer se déroulant dans le même cadre à la même époque. Mais voilà, la richesse de cet album, c’est que Jean-Michel Dupont introduit dans ce cadre très noir, très « Germinal », et quelque peu rigide depuis un siècle, de multiples agents perturbateurs, qui propagent leurs secousses plus ou moins profondément dans l’intrigue et les personnages. L’arrivée du cirque de Buffalo Bill à Valenciennes va bouleverser Gervais, qui va se lier d’amitié avec deux Indiens, et les aider à se disculper d’une accusation de meurtre. C’est l’aventure, le rêve, la maturité qui bousculent Gervais, gueules noires et gueules rouges ayant tous affaire à la police et aux préjugés de classe et de race de la bonne société. C’est qu’en plus l’histoire est bien ancrée dans son époque : on est en pleine discussion à propos de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat qui renforcera la laïcité, et Eglise et bouffeurs de curés se déchirent, alors que certains ouvriers sont sensibles à la propagande anarchiste (certains ouvriers sont eux-aussi des « gueules rouges » !) : le monde de Gervais se fissure, mais au travers de ces fissures il entrevoit la lumière. L’épilogue, dans la boucherie des tranchées, laisse ouverte la conclusion qu’on peut tirer de cette histoire : la fin d’un monde, ou pas ? Les seuls petits bémols concernant cet album n’occultent en rien sa qualité. Le dessin d’Eddy Vaccaro, dans une sorte d’aquarelle, est parfois trop brouillon, même si la colorisation, sombre, rouille, colle elle très bien au sujet, au titre et aux idées développées. La narration est parfois un peu ralentie par certaines explications (de termes ou dates), mais je le répète, ce n’est pas trop gênant. Les personnages s’expriment dans le langage chti populaire, et j’ai eu aussi parfois du mal à m’y faire, mais il faut passer outre, car au final, j’ai plutôt bien aimé ce parti pris. En tout cas, c’est une belle découverte que cet album, pas exempt de menus défauts, mais qui est très riche, et qui mérite à l’évidence qu’on s’y intéresse.
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