Louise Michel - La Vierge Rouge (The Red Virgin and the Vision of Utopia)
Biographie de Louise Michel.
Anarchiste ! Auteurs britanniques Biographies Féminisme La Commune et l'occupation prussienne Les petits éditeurs indépendants Luttes des classes & conflits sociaux Une histoire de famille
Paris, 22 janvier 1905. Sous le regard des hommes et des femmes réunis pour lui rendre un dernier hommage, le cortège funèbre de celle que l’on nomme la Vierge Rouge traverse la capitale. La France vient de perdre l’une de ses héroïnes. Dans le Paris assiégé et affamé de la guerre de 1870, comme sur les barricades de la Commune, une femme combat pour les droits du peuple. Avec un courage et une détermination sans faille, Louise Michel prend les armes et, par la force de ses mots, galvanise les foules. Alors que la capitale est en flammes et la révolte brisée, elle est arrêtée, emprisonnée puis déportée en Nouvelle-Calédonie mais continue la lutte aux côtés des Canaques. À son retour en France, elle ne cessera de défendre les valeurs d’éducation, d’égalité, de progrès. De victoires en fusillades, d’épreuves en moments de partage, d’espoirs en désillusions, Mary et Bryan Talbot retracent l’histoire passionnante et pourtant méconnue de cette femme généreuse et habitée, aventurière de la liberté, qui rêvait de changer le monde. (Site éditeur)
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Date de parution | 16 Septembre 2016 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
De rouges œillets tout en fleur - Ce tome content une histoire complète indépendante de toute autre. Sa parution initiale en version originale date de 2016. Il a été réalisé par Mary M. Talbot (scénario) et Bryan Talbot (narration & dessins). Il s'agit d'une bande dessinée majoritairement en noir & blanc avec des nuances de gris, avec une utilisation ponctuelle de la couleur rouge, et parfois des lavis d'une autre couleur. Les époux Talbot ont réalisé trois autres ouvrages ensemble : Dotter of her Father's Eyes (2012), une biographie de de Lucia Joyce, la fille de James Joyce, Sally Heathcote: Suffragette (2014) sur le mouvement des suffragettes, et Rain (2019) sur la préservation d'une nappe tourbeuse dans le Yorkshire. le tome se termine avec 14 pages d'annotation rédigées par Mary M. Talbot, détaillant les sources historiques qu'elle a utilisées, en référençant chaque page. Trois phrases sont mises en exergue du récit : la définition du mot Utopie, une citation d'Oscar Wilde sur l'Utopie (une carte du monde qui ne comprend pas Utopie ne vaut pas la peine d'être regardée), et une citation de Samuel Beckett (A toujours essayé. A toujours échoué. Peu importe. Essayer encore. Échouer encore. Échouer mieux). À Calais en 1909, Franz Reichelt assiste au vol d'un avion à hélice, le pilote devant tenter la traverser de la Manche deux jours plus tard. Il pense à une panne d'avion, et a l'idée d'inventer une toile de tissu qui permettrait au pilote de ralentir sa chute. À 10h00 à la Gare de Lyon à Paris, le 22 janvier 1905, Charlotte Perkins Gilman descend du train alors que s'ébranle le cortège funéraire de Louise Michel. Monique, une jeune femme, l'attend avec une pancarte à son nom pour l'accueillir. Elle lui explique qu'il vaut mieux qu'elles aillent prendre un café en attendant que le cortège soit passé, et elle précise qu'il s'agit de celui de la vierge rouge de Montmartre. Charlotte se rend compte qu'elle a rencontré Michel à une occasion : à Londres, avec un centre d'intérêt commun la fiction utopique. Les deux femmes continuent d'évoquer la mémoire de Louise Michel, une anarchiste, sa place au cimetière de Levallois Perret, son idéal de vie sans rien posséder, sa dévotion aux autres, et bien sûr son rôle durant la Commune de Paris. En décembre 1870, elle parcourait Paris pour mendier de la nourriture pour les enfants pauvres de Montmartre. Lors de ce siège de Paris par les prussiens, elle était en colère contre les autorités publiques inefficaces et même incompétentes, et contre les profiteurs spéculant sur les denrées de première nécessité. Monique évoque les queues devant les magasins, la viande de chat et de rat pour les démunis, la viande exotique des animaux du zoo de Vincennes servie dans les restaurants de luxe, le rêve de révolution sociale dans les quartiers pauvres de Paris, les familles mettant en gage leurs biens y compris leurs outils de travail, et les violences faites aux plus faibles comme les enfants et les femmes. Dans l'auberge qu'elle fréquente, Louise Michel échange avec les habitants et les gardes nationaux, se met à rêver des applications pratiques de la science, de l'amélioration de la qualité de vie grâce aux découvertes scientifiques, et leurs applications. Elle est suivie dans son imagination par Albert Robidal un illustrateur qui dessine son idée de tuyaux distribuant la nourriture dans tous les foyers grâce à un réseau de canalisations reliées à une cuisine centrale. Le lecteur peut aussi bien être attiré par les auteurs s'il a déjà lu d'autres de leurs œuvres que par une biographie de Louise Michel et la couverture qui semble promettre une large place consacrée à la Commune de Paris (du 18 mars au 28 mai 1871). Il est un peu décontenancé par les deux pages d'introduction consacrée à Henry François Reichelt (1878-1912) inventeur d'un proto parachute. Les deux dernières pages du récit lui sont également consacrées. Ensuite, il découvre que le récit commence le jour de l'enterrement de Louise Michel, dont la vie va être commentée et retracée par Charlotte Perkins Gilman (1860-1935), une sociologue et écrivaine américaine, ayant eu une grande influence sur le féminisme. Elle va discuter tout d'abord avec Monique, puis avec sa mère et encore avec une autre femme. L'autrice a décidé de dérouler la biographie dans un ordre légèrement réarrangé, commençant par la Commune (1871), allant jusqu'à sa déportation et son arrivée en Nouvelle Calédonie en 1873, pour sauter en 1889 au pied de la Tour Eiffel, pour revenir à son enfance au cours des années 1830, pour reprendre un fil chronologique en retournant en Nouvelle Calédonie. le lecteur comprend bien l'intérêt d'un tel réarrangement pour éviter un effet de lecture trop linéaire, mais il n'est pas forcément entièrement convaincu de son intérêt, car un tel ordre recomposé ne fait pas apparaître de constat particulier par le biais de rapprochements. La première moitié de l'ouvrage est consacrée au rôle de Louise Michel pendant la Commune de Paris, son jugement étant évoqué en une page, la deuxième moitié couvrant le reste de sa vie. Mary M. Talbot à fort à faire car elle s'adresse à un lectorat anglo-saxon pas forcément familier de la Commune de Paris. Elle se sert du personnage de Monique pour exposer le contexte de cet épisode de l'Histoire de France, à gros traits car elle ne dispose pas d'une grande pagination. Il ne s'agit donc pas d'un ouvrage sur la Commune, comme peuvent l'être Les Damnés de la Commune de Raphaël Meyssan, ou le Cri du Peuple de Jean Vautrin & Jacques Tardi. Cette partie-là sert à montrer l'engagement de Michel pour le peuple, ainsi que certains de ses traits de caractère, à commencer par un fort altruisme et une forme de témérité assumée. le lecteur est vite entraîné dans cette période car les textes de phagocytent pas les images, et Bryan Talbot est un bédéaste accompli. La narration visuelle est prenante, à la fois pour la qualité de la reconstitution historique, à la fois grâce aux personnages vivants, animés par des émotions. Dès la première page, le lecteur peut apprécier la justesse de la représentation de l'avion. Les quais de la Gare de Lyon sont représentés de manière un peu simplifiée, mais le lecteur retrouve bien la verrière et l'architecture si caractéristique ; en revanche il est très étonné que le corbillard tiré par les chevaux défile sur le quai de la gare. Par la suite, il regarde avec curiosité la vue extérieure de la Gare de Lyon avec sa tour si reconnaissable, la montgolfière au-dessus de Paris, les moulins, le défilé sur les Champs Élysées, l'Hôtel de Ville de Paris, une galerie du Louvres reconverti en atelier pour artisans, la chaire de Saint Sulpice, le trois-mâts Virginie qui emmène Louise Michel en Calédonie, la basilique du Sacré Cœur en construction, la Tour Eiffel également en construction. L'artiste se montre out aussi précis pour dessiner des tenues vestimentaires authentiques aux différentes époques, que ce soient les robes des interlocutrices en train d'évoquer la mémoire de Louise Michel, ou les uniformes militaires. Il adopte une direction d'acteur de type naturaliste insufflant de la vie dans chaque personnage, qu'il soit en train de parler, en train d'agir, en train de se battre aux barricades, en train de se faire rouer de coup. Alors que le format est plus petit que celui d'un comics, la lecture des pages est fluide le dessinateur ayant adapté ses prises de vue, sans rien sacrifier en densité narrative. Il utilise aussi bien des cases avec bordures que sans bordure, une suite de case pour décrire une action, qu'un dessin en pleine page pour un moment particulièrement mémorable (ou atroce, comme les doubles pages consacrées aux morts lors de la semaine sanglante, du 21 au 28 mai 1871). le lecteur lit donc une vraie bande dessinée, et pas un texte académique illustré. Une fois passée l'étonnement que les auteurs ne respectent pas l'ordre chronologique, le lecteur apprécie le dispositif qui consiste à raconter la vie de Louise Michel, commentée par d'autres femmes ce qui permet d'apporter naturellement des éléments de contexte, des jugements de valeur, ainsi qu'une mise en perspective car les discussions se passent après sa mort. Par la force des choses (la pagination), la Commune de Paris n'est vue qu'au travers des actions de Louise Michel, avec quelques éléments de contexte, ce qui peut s'avérer frustrant à certains moments. D'un autre côté, cela permet au lecteur de découvrir deux autres phases de la vie de cette femme, sa déportation en Nouvelle Calédonie, ses activités après son retour en métropole. Les commentaires de Charlotte Perkins Gilman et des autres font ressortir en quoi son engagement et son comportement étaient similaires à celui des autres communards, et tranchaient avec la place réservée à la femme dans la société de l'époque. Il apparaît ainsi une fibre féministe. le titre complet de l'ouvrage mentionne la vision d'une utopie. Cela commence avec la conviction de Louise Michel que les découvertes scientifiques ne peuvent qu'apporter un progrès social. Les auteurs mentionnent Jules Verne, mais surtout Mary Shelley (1797-1851), Herbert George Wells (1866-1946), Edward Bellamy (1850-1898), et Albert Robidal (1848-1926) illustrateur, caricaturiste, graveur, journaliste et romancier français. Il y a donc en filigrane une évocation des romanciers ayant fantasmé un monde meilleur au travers de leurs écrits d'anticipation ou de leurs essais, tout comme la Commune de Pais était fondée sur une vision utopique de la société. Arrivé à la fin du récit, il ne reste plus au lecteur qu'à s'interroger sur le lien qui unit la vie de Louise Michel à cette étrange introduction et conclusion mettant en scène Henry François Reichelt, lui aussi le concepteur d'une invention révolutionnaire qui l'a testé sans filet, comme la Commune était sans filet. Les époux Talbot évoquent la vie de Louise Michel dans un bande dessinée dense, tout en étant très facile à lire. La narration visuelle est impeccable pour reconstituer les différentes époques et les différents lieux (de Paris à la Nouvelle Calédonie), pour une vraie bande dessinée, et pas un texte illustré. le lecteur sortira forcément frustré de sa lecture, que ce soit sur le déroulement de la Commune de Paris, ou sur la vie même de cette femme car il y a trop à dire pour la pagination.
A l’heure où j’écris ces lignes, « Louise Michel - La Vierge Rouge » est a priori la seule série référencée sur le site entièrement dédiée à cette héroïne de l’histoire Française. Louise Michel apparait dans certaines œuvres qui parlent de la Commune de Paris de manière plus générale (dans Communardes ! par exemple, ou encore dans le dernier cycle des Passagers du vent), mais n’est jamais au centre du récit. Erreur réparée par… une autrice britannique ! Un comble. Mary Talbot a réalisé un travaille de recherche incroyable (voir les nombreuses notes en fin d’album), et son récit est tout simplement passionnant. Il faut dire que Louise Michel est une femme formidable, aux idées très modernes, et dont la personnalité sans concession force le respect. Le gouvernement français la déporte en Nouvelle-Calédonie pour avoir pris la défense des opprimés… et que fait-elle ? elle prend la défense des Canaques, opprimés par les colons français, bien sûr. J’ai fait de nombreuses pauses lors de ma lecture, pour réfléchir à ses idées anarchistes et féministes. La narration est parfaite, et la mise en image de Bryan Talbot illustre parfaitement le propos. Mention spéciale pour les couleurs au lavis, avec des touches de rouge pour représenter le caractère révolutionnaire de la vie de Louise Michel. Une lecture éducative et passionnante, sur une femme formidable dont beaucoup de gens connaissent le nom (ne serait-ce que parce que de nombreuses rues et écoles portent son nom) mais dont on parle finalement peu en BD. Un album essentiel, que j’aimerais voir dans toutes les bibliothèques scolaires.
Tout ce que j’ai déjà pu lire de Bryan Talbot m’a paru intéressant. Et en plus, les sujets sont vraiment très variés ! Avec cet album, lui et sa femme mettent en lumière leur intérêt pour les mouvements révolutionnaires et/ou utopiques du XIXème siècle. En y déclarant leur admiration pour une grande figure de ces courants, Louise Michel, la « vierge rouge », conscience anarchiste qui participa à la Commune, qui lutta pour les droits des Kanaks pendant sa déportation en Nouvelle Calédonie, mais qui fut aussi passionnée de sciences, de poésie, proche de Victor Hugo… Mary et Bryan Talbot ont parcouru les haut-lieux de la vie de lutte de Louise Michel, et traitent sans laisser de zones d’ombre la vie bien remplie de cette grande dame. De nombreuses notes et une abondante bibliographie en fin de volume précisent leurs sources, et justifient leurs parti-pris, puisqu’il a fallu quelque peu romancer le tout – ne serait-ce qu’en introduisant des dialogues. Je ne suis pas forcément fan des biopics, mais celle-ci, sur un sujet qui m’intéresse, est plutôt bien fichue. Et donne envie d'aller plus loin en se plongeant dans les nombreux livres (de Louise Michel ou qui lui ont été consacré) qui permettent d’en savoir plus sur une femme qui n’a toujours pas la place qu’elle mérite dans les livres d’histoire. Un travail honnête et pas trop rébarbatif, dont je recommande la lecture
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