Ces jours qui disparaissent

Note: 3.64/5
(3.64/5 pour 22 avis)

2017 : Prix des Libraires de bande dessinée Une course poursuite contre le temps perdu... Que feriez-vous si d'un coup vous vous aperceviez que vous ne vivez plus qu'un jour sur deux ?


Prix des Libraires de Bande Dessinée

C'est ce qui arrive à Lubin Maréchal, un jeune homme d'une vingtaine d'années qui, sans qu'il n'en ait le moindre souvenir, se réveille chaque matin alors qu'un jour entier vient de s'écouler. Il découvre alors que pendant ces absences, une autre personnalité prend possession de son corps. Un autre lui-même avec un caractère bien différent du sien, menant une vie qui n'a rien à voir. Pour organiser cette cohabitation corporelle et temporelle, Lubin se met en tête de communiquer avec son « autre », par caméra interposée Mais petit à petit, l'alter ego prend le dessus et possède le corps de Lubin de plus en plus longtemps, ce dernier s'évaporant progressivement dans le temps... Qui sait combien de jours il lui reste à vivre avant de disparaître totalement ?

Scénario
Dessin
Couleurs
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution 13 Septembre 2017
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Ces jours qui disparaissent © Glénat 2017
Les notes
Note: 3.64/5
(3.64/5 pour 22 avis)
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25/12/2017 | herve
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Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
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Vous savez, s’il prend votre place, c’est que vous le laissez faire. - Ce tome contient une histoire compète et indépendante de toute autre. La première édition date de 2017. Il a été entièrement réalisé par Timothé le Boucher. Il comprend 192 pages de bande dessinée en couleurs. Il s'agit de la troisième bande dessinée de l'auteur, après Skins Party (2011), Les Vestiaires (2014). Sur la scène d'un théâtre, sous les yeux du public, Lubin Maréchal habillé d'une robe blanche et d'une coiffe réalise un numéro d'acrobatie, sur une cage à oiseau géante. Il laisse tomber sa robe ; il porte en-dessous un juste au corps blanc. Il danse avec sa robe qui a retrouvé du volume. Il effectue des figures au sommet de la cage, et tombe lourdement quand elle casse. En coulisses, les autres acteurs sont inquiets, mais Maréchal se relève et le spectacle peut continuer. le lendemain il se réveille à 07h45 et se dépêche de s'habiller et de partir à vélo, pour gagner son pari d'arriver avant son copain Léandre pour prendre leur service à la caisse du supermarché Smart Shop où ils travaillent. Lubin est particulièrement fier de lui car il s'assoit une minute avant Léandre à son poste. Ce dernier lui fait observer qu'il a perdu son pari car il a 23 heures et 59 minutes de retard. Lubin met un peu de temps à comprendre et encore plus à le croire : ce n'est pas le lundi 02 septembre, mais le mardi 03 septembre. Il a perdu un jour de sa vie. Léandre et Lubin aident le livreur à décharger son camion. Le soir ils récupèrent quelques invendus périmés pour leur repas, Lubin ayant invité Gabrielle à manger chez lui. Lubin rentre chez lui à vélo. Il reçoit Gabrielle et ils passent au lit avant de manger. Il se réveille le lendemain, un peu surpris que Gabrielle ne soit plus dans lit et qu'elle ait déjà récupéré ses affaires. Il consulte le calendrier de l'ordinateur et il doit se ranger à l'évidence : il n'a aucun souvenir du mercredi. Il se rend au supermarché où il est reçu par Andrès qui lui fait la morale sur l'assiduité et qui lui donne son congé. Lubin donne rendez-vous à Léandre à 18h00 au Mantra. À 18h00, les 4 membres de la troupe de spectacle se retrouvent au café. Ils passent en revue les raisons plus au moins fantaisistes qui pourraient expliquer l'absence de Lubin pendant 2 jours. Comme ils doivent se produire le lendemain à Bruxelles, Pedro & Alexandra proposent de passer chez lui pour venir le chercher. Avant de rentrer chez lui, il envoie un texto à Gabrielle, mais il reste sans réponse. Lubin se réveille en ayant encore perdu une journée, celle du vendredi. Il appelle Léandre qui lui indique que quand ils sont venus le chercher le vendredi, il n'y avait personne dans son appartement. Quelle étrange expérience de lecture. La couverture semble annoncer un conte fantastique, avec un jeune homme à moitié entré dans l'eau, de la verdure derrière lui, et un double maléfique qui se reflète. Le choix des couleurs est étrange avec une végétation violette et une onde orange. L'entrée en matière déstabilise tout autant avec 5 pages muettes (sans texte) comme si le lecteur assistait réellement au spectacle. Il assistera d'ailleurs à un deuxième spectacle, tout aussi muet, de même nature durant les pages 102 à 107. Il suppose que ces scènes ont une valeur métaphorique, celle d'un récit dans le récit, provoquant une mise en abîme dont il ne peut pas soupçonner le sens du fait qu'il s'agit de la première scène, et qu'il ne dispose pas d'autres séquences auxquelles la rattacher. Il apprécie la qualité de la narration visuelle, pouvant suivre la logique d'enchaînement des mouvements dans l'évolution de Lubin Maréchal. Il apprécie aussi la forme d'épure des dessins (avec des traits de contours fins et élégants) apportant une touche d'onirisme au spectacle. Timothé le Boucher sait donner une apparence simple et immédiatement reconnaissable à ses personnages, en jouant sur la couleur de leur peau, la forme de leur coiffure, leur couleur de cheveux, mais aussi leur morphologie (la silhouette d'Alexandra est plus étoffée, Pedro est plus grand et plus costaud). Il n'hésite pas à faire apparaître les marques de l'âge sur les visages et même dans la façon de se tenir, par exemple pour Josiane, la mère adoptive de Lubin, ou pour Lubin lui-même au fur et à mesure des années qui passent. Il donne un air assez jeune aux principaux personnages : Lubin, Gabrielle, Tamara, Léandre, Pedro, Alexandra, avec des traits de visage proches de la ligne claire et une discrète influence manga pour des éléments éparses, par exemple la chevelure de Léandre. Le lecteur adulte peut se retrouver un moment décontenancé car la représentation des personnages semble être à destination de jeunes adolescents, voire tout public. Le dessinateur montre bien quelques personnages dénudés, mais les caractéristiques sexuelles sont très atténuées et se limitent aux fesses et à la poitrine. En outre, il utilise des couleurs assez douces, voire un peu ternes, à l'exception de la chevelure rousse de Tamara. Il exagère un peu les expressions de visage, de manière à ce que l'état d'esprit du personnage soit plus clair. Il n'y a que dans le dernier quart du récit que les personnages ont des gestes plus mesurés, attestant qu'ils ont pris de l'âge. Les éléments de décors sont également détourés par des traits très fins, et l'artiste n'utilise que très rarement les aplats de noir, préférant foncer la teinte d'une zone par endroit pour figurer les ombres portées. Néanmoins, s'il prête attention aux différents environnements, le lecteur constate que Timothé le Boucher ne se contente pas de les tracer à la va-vite. Après la scène de théâtre, le premier environnement d'importance est la chambre / salon de l'appartement de Lubin. Dans un premier temps, le lecteur peut rester dubitatif devant sa grande taille. Les meubles sont, comme le reste, détourés avec des traits fins, et la mise en couleurs reste un peu terne, sans chercher à faire ressortir chaque objet par rapport aux murs du fond ou au plancher. Le lecteur intègre donc ce décor de manière machinale sans plus y prêter attention. S'il s'y attarde à l'occasion d'une case, il remarque les différents objets et accessoires, reflétant bien la personnalité de Lubin. Or par la suite, une remarque de Lubin l'incite à y prêter un peu plus d'attention et il se rend compte qu'il y avait des informations visuelles juste sous ses yeux. Sans en avoir l'air, Timothé le Boucher réalise des décors consistants, établissant des lieux concrets et uniques : le balcon de l'appartement de Lubin, les façades d'immeubles des rues qui constituent des paysages urbains différents suivant les quartiers, l'aménagement de l'appartement de Gabrielle qui reflète également sa personnalité, le viaduc autoroutier au-dessus de la rivière encaissée pour se rendre chez la mère de Lubin (page 40), le réseau routier quand Gabrielle emmène Lubin en weekend, le parcours de jogging de Tamara, les Champs Élysées pour le défilé du 14 juillet, les lieux de répétition de la troupe d'acrobates, la maison à la campagne de la mère de Lubin, etc. Le récit se prolongeant dans le futur par rapport au temps présent du lecteur, il peut également faire comme Lubin et regarder autour de lui pour voir les stigmates des avancées technologiques, discrets mais bien présents. En dépit d'une apparence gentille et tout public, la narration visuelle de Timothé le Boucher repose sur de nombreux éléments visuels brossant des personnages et des environnements tangibles et bien formés. Le lecteur plonge donc bien volontiers dans ce récit de dédoublement de la personnalité, avec une tonalité dédramatisée grâce à une narration bienveillante. L'auteur ne tergiverse pas sur la situation de Lubin Maréchal : sa conscience n'est présente qu'un jour sur deux, et une autre conscience ou une autre personnalité habite son corps et l'utilise les autres jours. Le lecteur accorde bien volontiers la suspension d'incrédulité nécessaire pour accepter ce postulat. Il suit donc Lubin alors qu'il essaye de comprendre ce qui lui arrive, de s'en accommoder dans sa vie (semi)quotidienne. Il essaye de communiquer avec son autre lui-même, et de faire comprendre à ses amis ce qui lui arrive. Il fait des propositions concrètes à son autre lui-même pour une vie en bonne intelligence : que l'autre continue à s'entraîner un minimum pour que lui puisse continuer à être un acrobate de haut niveau, essayer de maîtriser son régime alimentaire car il est végétarien, etc. Les deux personnalités finissent également par aller consulter le même psychologue (la docteure Thalmann) pour trouver une solution. Le lecteur se rend bien compte que le récit est raconté exclusivement du point de vue du Lubin acrobate, et même à sa manière, avec sa personnalité. De ce point de vue, les dessins évidents et la bienveillance générale de la narration reflètent l'état d'esprit de Lubin acrobate. Timothé le Boucher s'amuse bien avec les moments de gêne des amis de Lubin ou de sa famille, qui finissent par accepter son état, ce qui conforte le lecteur dans le fait d'en faire de même. La personnalité de l'autre Lubin se révèle différente de l'initiale, plus pragmatique, mieux organisée, plus responsable. Du coup il prend en charge les formalités administratives du quotidien et le ménage, et commence même à gagner de l'argent, que des avantages pour Lubin acrobate. Le scénariste se montre encore un peu plus facétieux du fait que l'un comme l'autre entretiennent des relations amoureuses, mais pas avec la même femme, ce qui génère des situations délicates, à nouveau sans dramatisation larmoyante. Le lecteur sourit quand Lubin acrobate se réveille un matin avec les cheveux courts (l'autre étant passé chez le coiffeur pour être plus présentable), ou quand il décide de se faire faire un tatouage sur le dos en sachant que l'autre n'aime pas ça, ou encore quand l'un se bourre la gueule la veille au soir en sachant que l'autre souffrira de la gueule de bois le lendemain. Le décalage entre les deux personnalités nourrit des métaphores, à commencer par une opposition entre la vie décontractée de Lubin acrobate, et celle plus responsable de l'autre Lubin. Il se produit une comparaison entre un individu ayant suivi une voie d'artiste refusant une forme de conformisme social, avec un autre plus productif dans la société. Néanmoins, ce n'est pas un récit à charge contre Lubin acrobate, car c'est celui que préfère ses amis, sa sœur, et même Insecte & Prêchant, les chiens de sa mère. C'est aussi celui que préfère la rousse flamboyante. Ainsi Lubin acrobate reste le héros de sa propre vie, la personnalité à partir de laquelle le récit, et donc le lecteur, porte un jugement sur les événements. La gentillesse de Lubin acrobate éprouve toutes les difficultés à accepter l'intérêt très personnel de 2 psychologues successifs qui le prennent en charge plus pour les papiers qu'ils vont pouvoir écrire dessus, que pour le soigner, encore moins par empathie. Il reste aussi un héros au sens romanesque du terme, dans la mesure où le récit repose bel et bien sur une intrigue. Celle-ci ne se limite pas à savoir si la coexistence entre les 2 Lubin peut être pérenne, ou si Lubin acrobate retrouvera son état normal. Il se produit des événements qui viennent remettre en cause l'équilibre entre les 2, parfois au détriment de Lubin acrobate. Le lecteur ressent alors une compassion pleine et entière pour lui, car son caractère ne lui a pas appris à se défendre contre ce genre d'événements ou de comportements d'autrui. Le lecteur est pris de pitié pour Lubin acrobate, souffre de le voir ainsi rabaissé et exploité, alors qu'il fait contre mauvaise fortune bon cœur, face à ces injustices. En fonction de ses inclinations, le lecteur peut être plus ou moins attiré par la couverture, ou le résumé de la quatrième de couverture, et dans tous les cas surpris par le décalage qui se produit à la lecture, par rapport à ces présentations. Il se prend vite d'amitié pour Lubin Maréchal, jeune homme éminemment sympathique et facile à vivre, et pour ses amis qui le soutiennent. Il s'adapte progressivement aux dessins à l'apparence gentille, car ils forment une narration visuelle solide et riche. Il apprécie les situations successives qui dessinent des métaphores sur la façon de voir la vie, sur les valeurs morales de l'individu, alors que l'intrigue sous-jacente le tient en haleine. Il est épaté par la manière dont l'auteur met à profit la longueur de son récit, jusqu'à la mort naturelle de Lubin. Il termine sa lecture, attristé de devoir faire le deuil de Lubin et de ce qu'il représente, ainsi que du principe de réalité qui s'est imposé à lui, à a fois Lubin, à la fois le lecteur lui-même.

31/12/2024 (modifier)
Par Jeïrhk
Note: 4/5
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J'ai vraiment adoré cette BD, au point d'y penser longtemps après l'avoir lu, même en m'endormant. Tout d'abord, il est important de préciser qu'il s'agit ici de trouble dissociatif de la personnalité et non de schizophrénie, une confusion courante (le personnage de Lubin lui-même fait cette amalgame avant de rencontrer la thérapeute). Le sujet traité avec une touche de science-fiction, m'a beaucoup plu. J'imagine bien une adaptation en film ! d'ailleurs, ça m'a beaucoup fait penser à l'un de mes films préférés, 'Click', surtout vers la fin. J'ai bien aimé le style de dessin. Le fameux pot de peinture qui simplifie la colorisation est bien utilisé même si je ne suis pas fan de cette technique, cela dit le travail d'ombrage est plus détaillé que dans d'autres BD similaires. La lecture est fluide, rapide et agréable. Je ne me suis pas ennuyé du tout. Bien que j'aurais préféré une autre conclusion, j'ai été surpris par cette fin inattendue que j'ai finalement appréciée, car l'auteur nous emmène là où on ne s'attend pas, loin d'un happy end classique. Par contre, j'ai été un peu déçu de ne pas voir une journée du point de vue de "l'autre", mais ça apporte une certaine originalité à la narration, donc pourquoi pas. Je m'étais aussi beaucoup attaché à Tamara, ressentant souvent des pincements au cœur lors des séparations.C'était un personnage que j'aurais voulu voir d'avantage dans la lutte pour soutenir Lubin1. Bref, l'histoire m'a touché, c'est une très belle BD avec un scénario original, ce genre de lecture ça fait plaisir !

17/07/2024 (modifier)
Par Emka
Note: 3/5
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Voici une BD intrigante avec un concept original : des jours entiers s’effacent de la vie du protagoniste, Lubin au profit d'une autre personnalité qui prend possession de son corps. L’intrigue est bien installée par Timothé Le Boucher, avec un décor et des personnages qui prennent leur temps pour se dévoiler. Je vois que certains ont déjà vu le concept dans des scénarios de films ou de séries mais étant peu consommateur de ces deux derniers, c'était une première pour moi. Le dessin, dans un style de ligne claire moderne, a un côté assez froid. C'est surtout la colorisation à l’ordinateur qui de mon point de vue manque de chaleur et de caractère. Le style est propre, mais peut-être un peu trop, ce qui le rend parfois fade, un peu comme le traitement de l'idée. L’idée de base, cependant, est captivante. Ce double qui occupe le corps du héros un jour sur deux, puis davantage. Cette alternance entre surprise, résignation et désir de combattre est bien amenée. La question de la schizophrénie plane, et l’auteur explore des idées intéressantes : peut-on vivre de plusieurs façons, en fonction des moments et des proches présents ? Comment gérer une vie en pointillés, garder des relations lorsqu’on ne sait pas quand on reviendra “à soi” ? Le récit, bien qu’intrigant, laisse un goût d’inachevé. J'ai refermé l’album content de l’avoir lu, mais avec une certaine ambivalence. L’exploitation de cette bonne idée de scénario manque parfois de profondeur. Les promesses du quatrième de couverture d’un questionnement fort sur l’identité et la dualité de l’être sont plus un effet d’annonce qu’une réelle intention. Le personnage du second Lubin est un point de frustration. Présenté comme le méchant, manipulateur, il semble pourtant faire moins de crasses que le premier Lubin, qui agit souvent de manière colérique et immature. Le second Lubin reste proche de la famille et des amis, tentant de mettre de l’ordre. Un parti-pris qui dessert le ressenti après lecture. Un deuxième tome du point de vue de ce second Lubin permettrait par exemple de remettre en perspective l’histoire. Au final, c'est une lecture intéressante, sur un concept de scénario qui ne l'est pas moins, mais avec des platitudes et un manque de profondeur. Les 200 pages fournies en cases montrent un auteur qui ne lésine pas sur les moyens, utilisant intelligemment les silences, mais qui aurait gagné à se lâcher davantage pour vraiment marquer les esprits.

16/07/2024 (modifier)
L'avatar du posteur bamiléké

Quelle belle lecture ! Je suis resté scotché à la série de Timothé le Boucher grâce à un scénario que j'ai trouvé d'une rare intelligence. Pourtant l'accroche n'est pas vraiment extraordinaire. En effet le graphisme ne m'a pas saisi d'émotion et le thème de la double personnalité est assez visité depuis des lustres comme le montre le personnage de Smeagol/Gollum chez Tolkien. Mais voila, la mécanique progressive que met en place l'auteur a eu le don de m'emprisonner dans ses filets. Le Boucher construit son récit avec beaucoup de finesse en installant une progression qui accentue le sentiment dramatique de la perte de contrôle de Lubin sur son existence. Le paradoxe est que plus Lubin2 gagne en jours, moins il est présent à l'image mais plus son ombre gagne en puissance. La force du récit est de nous faire réfléchir pour aller au-delà des apparences. En effet plus le récit avance et plus notre empathie et notre sentiment d'injustice vis à vis de Lubin1 grandit jusqu'à une remise en cause totale de nos certitudes dans la scène clé du psychiatre. Le final ne donne pas la clé mais saisit d'émotion sur plusieurs interprétations possibles. Le Boucher parsème son récit d'éléments sociétaux contemporains comme les couples homosexuels ou les couples mixtes ainsi qu'une allusion aux genres à travers une femme à barbe assez curieuse. Ces digressions sont assez marginales dans l'idée directrice ou la construction du récit. Personnellement je privilégie les scénarii originaux et bien construits de bout en bout à un visuel abouti mais vide de sens. Je me suis régalé avec les propositions de l'auteur. C'est graphiquement maîtrisé mais sans grande originalité cette fois. Une lecture intelligente qui m'a vraiment séduit. Un 4 que j'aurais poussé avec un graphisme plus sexy.

04/07/2024 (modifier)
L'avatar du posteur Kenshiroux

Je me suis enfin procuré ce livre de ma 'whislist', présent dans celle-ci grâce à tous les avis élogieux sur ce titre. J'ai vraiment apprécié cette histoire très originale, dont je n'avais jamais lu semblable auparavant. L'auteur a réussi à me transmettre les émotions des personnages, qui eux-mêmes ont réussi à m'émouvoir... et cette fin tellement magnifique mais tellement frustrante en même temps... Le style graphique ne m'a pas transcendé, mais son point fort est que le dessin est précis, le découpage réussi, en somme, une très bonne technique. Comme quoi, même avec un dessin en deçà, on peut créer une oeuvre fabuleuse et addictive à lire, grâce à une bonne technique qui illustre parfaitement ce scénario original. Il me reste plus qu'à faire un saut périlleux vers son dernier titre, 47 Cordes...

12/02/2024 (modifier)
Par Jashugan
Note: 4/5
L'avatar du posteur Jashugan

Timothé a touché ma fibre Lehanesque avec ce récit qui va brouiller les pistes du lecteurs et nous laissera une interprétation libre dans sa conclusion. J'adore ce genre de récit, et Timothé qui n'avait pas 30 ans au moment de l'écrire, nous montre une maitrise et une minutie à toute épreuve pour sa seconde BD de sa jeune et prometteuse carrière. Et oui la France a encore des incroyables talents. Pourtant j'étais assez septique au départ, car dans le style graphique je retrouve du Culbard notamment dans le choix des couleurs et ces lignes claires, dont le comics Everything m'avait laissé un goût fadesque malgré les louanges qu'il a obtennu. Et bien avec Ces jours qui disparaissent nous avons là entre le main une oeuvre d'un tout autre niveau. Je fut d'autant plus convaincu que grace à mes conseils avisés, j'ai pu convaincre une collègue de se le procurer à un prix tout a fait descent dans un Gibert, et son retour me n'a pas laissé sans surprise. Elle l'a lu le soir même d'une traite, et l'a occupé le temps d'une nuit blanche à refaire le récit et se poser des questions métaphysique sur sa propre existance et sur la vie de proche atteint de bipolarisme. Alors si je n'ai pas était atteint d'une manière aussi intense par le récit, et bien qu'ayant adopté une approche rationnelle, cela ne signifie par pour autant que je n'ai pris un grand plaisir à lire cette oeuvre qui mérite sa place dans toute bibliotheque de BDphile au sens large. On est tout proche du Panthéon pour ma part, et je le classe parmis les classiques de la BD contemporaine.

29/10/2023 (modifier)
Par Charly
Note: 4/5
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Plonger dans les pages de "Ces Jours qui Disparaissent" de Timothé Le Boucher a été une expérience de lecture tout simplement captivante. Dès les premiers instants, j'ai été happé par cette histoire intrigante qui explore la fragilité de la mémoire et les profondeurs de l'identité. L'histoire de Lubin Maréchal, cet homme qui se réveille chaque matin en ayant oublié les événements de la journée précédente, m'a immédiatement interpellé. Le concept de perdre la trace de sa propre vie est terrifiant, mais c'est à travers cette prémisse que l'auteur réussit à tisser une trame complexe, mêlant suspense, mystère et réflexions profondes. La narration de Timothé Le Boucher est remarquablement maîtrisée. Les transitions fluides entre les différents moments temporels confèrent une dynamique unique à l'histoire. J'ai été impressionné par la manière dont l'auteur parvient à créer une tension constante tout en offrant des moments d'introspection profonde. Chaque page tournée était une révélation, un pas de plus vers la compréhension de l'univers énigmatique de Lubin. Cette BD soulève des questions profondes sur la nature de l'identité et de la réalité. La quête de Lubin pour reconstruire sa vie m'a fait réfléchir sur la manière dont nous nous définissons à travers nos souvenirs et nos expériences. L'histoire explore également la fragilité de la mémoire et la manière dont elle peut être influencée et altérée.

23/05/2023 (modifier)
L'avatar du posteur Agecanonix

C'est le genre de Bd qui ne m'interpelle pas, qui ne me passionne pas et qui me laisse totalement perplexe. Le plus étonnant, c'est que ça a l'air de plaire à pas mal de gens, et je sens que ça va rentrer dans les Bd surcotées que tout le monde trouve géniale et extraordinaire, mais comme je suis souvent à contre-courant sur le site, je ne m'affole pas outre-mesure. En tous cas, c'est le genre de truc qui me laisse froid, je n'ai rien trouvé qui pouvait m'intéresser là-dedans, et pour moi c'est pas la Bd de génie qui m'a transporté, loin de là. Le dessin n'est pas vilain, mais il n'est pas dans mes préférences. Le propos oscille entre le récit fantastique et le thriller psychologique, en posant des sujets de réflexion sur le temps qui passe, la complexité de l'esprit humain, l'identité, bref cette histoire de partage de corps est bien trop extravagante pour moi, j'accroche pas du tout.

11/03/2023 (modifier)
Par Solo
Note: 4/5
L'avatar du posteur Solo

Le Patient m'a rendu curieux sur le travail de Timothé Le Boucher, alors j'attaque le livre qui a fait de lui sa réputation. Lubin Maréchal est contraint de vivre 1 jour sur 2, il doit continuer à vivre avec son alter ego qu'il ne peut jamais rencontrer autrement que par message interposé. Je bonifie à "Franchement bien" d'abord parce-que le scénario est bien plus original que Le Patient. L'intrigue évolue lentement, ce qui me plaît ici, et la montée en tension s'alimente en continu. Je n'ai cette fois pas trouvé le genre de scènes à suspense un peu "fake" comme on en trouve en général dans les thriller (ça a tendance à m'irriter ces trucs-là). Le dernier tiers du bouquin arrive à prendre un virage réussi et, malgré le passage vers une sorte de science-fiction, le scénario réaliste reste bien en place. On en oublierait presque que ce récit est tout à fait surréaliste! Enfin, un petit mot sur l'épilogue, que j'ai trouvé très émouvant, chez moi ça a marché. Est-ce que je vais commencer à dire franchement que le dessin me plaît ? Pas loin, mais pas encore. C'est très agréable et la colorisation apporte beaucoup d'esthétisme. La comparaison avec Bastien Vivès se tient, à la différence que c'est beaucoup plus impersonnel. Je compare un peu ce style de dessin avec les films à effets spéciaux, comme Bilbo le Hobbit vs. Le Seigneur des Anneaux: c'est bien fait, mais il n'y a pas de rendu sur le travail manuel. Moi ça m'embête. Une affaire de goûts, mais je reconnais que le graphisme augmente encore dans mon estime. Il y a de la répétition, mais le "quotidien" de Lubin (comment peut-on appeler ça autrement lorsque l'on vit un jour sur deux?) n'en reste pas moins intéressant. Et surtout, l'aggravation de sa situation offre des variations du comportement intéressantes, que cela soit chez lui ou chez ses proches. La temporalité est essentielle, et à titre personnelle c'est un sujet que je trouve passionnant. L'espace-temps du récit est super bien exploité pour ouvrir de nombreux thèmes: la puissance et la pérennité de notre relation sociale, la vitesse à laquelle notre société risque d'évoluer et notre capacité à suivre le mouvement ou, à l'inverse, notre difficulté pour tourner le dos au passé. L'aspect psychologique est très bien construit. Assuré de ne pas relire Le Patient après avoir lu cette BD, il m'arrivera de revenir sur celle-ci un jour. Et que ce jour apparaisse! Je vous conseille de lire directement cette création de Timothé Le Boucher, afin de se baser sur LA référence et se rendre compte jusqu'où il est capable de construire un scénario original.

23/10/2022 (modifier)
Par Blue boy
Note: 4/5 Coups de coeur expiré
L'avatar du posteur Blue boy

« Ces jours qui disparaissent » est l'album qui a révélé TLB et on comprend facilement pourquoi après l'avoir lu. Dès les premières pages, le lecteur est happé par l’intrigue qui voit un jeune danseur, Lubin, confronté à des amnésies récurrentes suite à une chute lors d’une répétition. Cette histoire au départ assez ordinaire basculera rapidement vers le fantastique dès lors que Lubin se rendra compte qu’un double essaie de prendre sa place pendant son sommeil. Qui plus est, ses périodes amnésiques ne cesseront de s’amplifier avec le temps, ce qui aura des conséquences dévastatrices sur son quotidien. On ne peut en dire plus au risque de « divulgâcher » mais force est de reconnaître que Timothé Le Boucher a produit là un scénario irréprochable, où le suspense va croissant jusqu’à la fin, plongeant le lecteur dans un malaise qui pourrait même s’apparenter à de la terreur, terreur qui ne reste que psychologique car ici il n’est pas question de monstres hideux sortis tout droit de l’enfer ! Et si l’auteur suscite en nous de telles réactions, c’est parce qu’il aborde ici des thèmes qui, sous cet enrobage fantastique, font vaciller nos certitudes quant à notre identité profonde. La question du double est bien sûr dominante, un thème angoissant souvent repris par la littérature fantastique et la pop-culture, on pense notamment au célèbre « Docteur Jekyll et Mister Hyde » de R.L. Stevenson ou encore au « Portrait de Dorian Gray » d’Oscar Wilde. Mais d’autres sujets passionnants apparaissent en filigrane tout au long du récit, tels que l’amour (qu’est-ce qui fait qu’on est aimé par notre conjoint ?), l’amitié (à l’épreuve des années…), la vieillesse et la tragique fuite du temps (une notion que les moins de 40 ans ne sauraient appréhender aisément…)... Timothé Le Boucher n’apporte pas forcément de réponses mais fait preuve d’une certaine finesse dans son approche. A ce titre, on peut ressentir une certaine frustration, car si le double de Lubin apparaît au début (la scène de la vidéo), on ne saura rien de sa réelle existence (que fait-il vraiment lorsque sa « proie » dort ?). Peut-être l’auteur a-t-il délibérément maintenu cette part de mystère pour laisser à chacun le soin d’imaginer sa propre version, et après tout, c’est bien Lubin le personnage central de l’histoire… Cette finesse dans l’approche de l’auteur se répercute dans sa ligne claire gracile aux accents manga. Certes, il n’y a rien de particulièrement innovant dans le style, et Le Boucher privilégie à l’évidence simplicité et lisibilité, mais il émane de son dessin une délicatesse qui lui est propre et charmera ceux qui sauront la percevoir. La mise en page et et la couleur sont à l’avenant, et on ne pourra qu’apprécier cette disposition de l’artiste à éviter le tape-à-l’œil et l’esbroufe. « Ces jours qui disparaissent » s’impose comme une œuvre incontournable, incontestablement la plus emblématique de Timothé Le Boucher à ce jour. Même si ses productions postérieures ne l’égalent pas en qualité, elles exercent toutes une certaine fascination, le plaçant dans la catégorie des auteurs qui comptent dans le neuvième art.

09/10/2022 (modifier)