Rat God

Note: 3.33/5
(3.33/5 pour 3 avis)

Dernière création de RICHARD CORBEN, RATGOD est une nouvelle merveille du maître qui se régale toujours autant dans les univers fantastiques issus des Pulps dont il s’est nourri et inspiré tout au long de sa carrière. Dans ce nouveau récit complet, il rend un hommage jubilatoire à l’œuvre du grand Howard Phillips LOVECRAFT, entre horreur pure et humour noir !


Dark Horse Comics H. P. Lovecraft Les petits éditeurs indépendants Richard Corben

Arkham, Massachussets, dans les années 1920. Clark Elwood, professeur au sein de la célèbre université de Miskatonic, rencontre la belle Kito, qui va immédiatement le séduire. Mais Kito est originaire d’un village reculé, dissimulé aux yeux des hommes et de la civilisation moderne dans les vastes forêts ancestrales du Massachusssets, où se pratiquent encore des rituels païens en hommage à de monstrueuses divinités oubliées… Texte: L'éditeur

Scénario
Dessin
Couleurs
Traduction
Editeur
Genre / Public / Type
Date de parution 21 Septembre 2016
Statut histoire One shot 1 tome paru

Couverture de la série Rat God © Delirium 2016
Les notes
Note: 3.33/5
(3.33/5 pour 3 avis)
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09/07/2018 | Gaston
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Par Présence
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
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Une légende Cthanhlk, en Tlingit - Ce tome contient une histoire complète et indépendante de toute autre. Il contient les 5 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2015, écrits, dessinés et encrés par Richard Corben. La mise en couleurs a été réalisée par Beth Corben Reed, avec l'aide de Richard Corben. La scène d'ouverture montre Mak-Kitoto (la sœur) et Achak (le frère) en train d'essayer d'échapper à quelque chose que le lecteur ne voit pas. Ils sont également poursuivis par plusieurs personnes qu'ils qualifient de Cthanhluk (une tribu d'indiens originaires du sud de l'Alaska). Ils finissent par être séparés par les circonstances. Clark Elwood conduit sa voiture (dont le modèle atteste que le récit se passe dans les années 1920 ou 1930) sur la route qui mène à un bled paumé du nom de Lame Dog. Sur la route, il croit apercevoir au loin, une jeune femme nue. En se rapprochant, il est hélé par Chuk, un homme du coin qui lui demande de le prendre en stop. Ils font le plein de carburant et l'autochtone leur conseille de ne pas aller jusqu'à Lame Dog et de faire demi-tour car il va bientôt neiger. Avant de commencer cette histoire, le lecteur sait déjà ce qu'il va lire : une histoire dérivative d'Howard Philips Lovecraft, avec une créature monstrueuse, et vraisemblablement une touche gothique (sous influence Edgar Allan Poe). Paradoxalement, il n'a aucune idée des détails. Il sait aussi qu'il va retrouver les tics graphiques de Richard Corben, sans pour autant savoir à l'avance ce qu'il représentera. Effectivement, le lecteur retrouve les figures imposées auxquelles il s'attendait : bizarre créature issue d'une humanité dégénérée, culte bizarre rendu à cette créature ou à une déité mal définie. Il y a des indigènes d'une race indéfinie. Il y a un malaise ambiant lié à un secret qui lie les habitants de Lame Dog, cette ville à la population bizarre peu accueillante envers les étrangers. L'auteur a choisi de situer son récit à l'époque où écrivait Lovecraft. le personnage principal a étudié à l'université d'Arkham, située proche de la rivière Miskatonic. Effectivement, visuellement, c'est du Corben. Il y a une jeune femme bien en chair (Gharlena) qui n'est pas farouche, avec une poitrine hypertrophiée et un peu tombante (soumise aux lois de la gravité). Les personnages ont des visages un peu marqués, pas spécialement beaux. Les personnages évoluent parfois dans des décors naturels, où la verdure est mise en valeur. Il y a un peu de nudité, mais pas très détaillée. Comme à son habitude, cet artiste peut passer de dessins très peaufinés de type hyper réalistes, à des esquisses un peu grossières. En fonction de l'ambiance qu'il souhaite développer dans une scène, Corben ajuste son mode de représentation. le lecteur peut prendre un grand plaisir à voir des cases très détaillées, comme un hibou avec un rat dans le bec, un tronc d'arbre avec toutes ses aspérités, avec le côté rêche de son écorce, une Ford T représentée avec minutie, un lit rustique (des planches de bois) avec les réserves en dessous et une simple peau de bête comme couverture, l'aménagement intérieur de la maison où Clark Elwood trouve une chambre, le magnifique nœud papillon de Damon Peck, la grille rouillée du cimetière, l'hallucinante soirée costumée dans le manoir des Peck, etc. Il faut un peu de temps d'adaptation pour accepter que l'artiste ait décidé de représenter d'autres éléments de manière plus simpliste. Il peut parfois s'agir des feuilles des arbres. Mais dans ces cas-là, le travail sur la couleur étoffe ces surfaces pour les rendre plus substantiels, pour leur donner plus de volume. Il y a quelques éléments de détails qui apparaissent presqu'en toc, comme les pointes de flèche dans la première séquence, où il ne reste plus qu'une forme juste détourée. À d'autres moments, les simplifications ont pour effet de rehausser la texture de ce qui est représenté. Dans la première page de l'épisode 2, l'artiste n'a que détouré les pins recouverts de neige, donnant ainsi plus d'importance au bloc de neige. Dans l'épisode 3 (page 44), la deuxième case représente l'avancée de la voiture de Clark Elwood sur la route, en vue du ciel. Les pins et la route sont représentés de manière esquissée, laissant la couleur porter l'information. Toujours dans l'épisode 3, Elwood assiste à une cérémonie nocturne dans le cimetière où les individus sont recouverts d'une robe avec cagoule. Corben leur dessine des grands yeux tous ronds, avec un effet comique et moqueur. Néanmoins le lecteur n'a aucune idée de ce qui l'attend. Pour commencer, Richard Corben n'utilise pas le suspense comme dynamique principale du récit. Il sait que son lecteur peut être un habitué des récits d'horreur, de Lovecraft ou de Corben, et donc qu'il peut anticiper plusieurs éléments de l'intrigue. Il sait aussi que son ouvrage précédent Esprits des morts & autres récits d'Edgar Allan Poe constitue une indication claire et nette sur les mécanismes de son intrigue. Il ne peut donc pas espérer surprendre le lecteur par des révélations tonitruantes. Dès la première scène, Corben cueille son lecteur par surprise en intégrant un élément humoristique totalement décalé. Il fait apparaître Mag la Harpie (Mag the Hag, une vieille femme borgne habillée d'une couverture) qui interagit avec un personnage, plutôt que de s'en tenir à son rôle de commentatrice. Dans la deuxième scène, Clark Elwood rencontre quelques difficultés à parvenir jusqu'à Lame Dog, avec un autochtone qui l'avertit du danger, mais le lecteur est pris par surprise par la chute de cette séquence, inattendue, avec un élément narratif supplémentaire. le lecteur s'en trouve déstabilisé car le rythme n'est pas celui d'un comics d'action habituel, il se rapproche plus de celui d'un roman. La narration semble ne rien s'interdire, entre l'effet comique de Mag la Harpie, l'attitude maladroite du personnage principal. Il ne semble pas très à l'aise, et d'ailleurs se fait passer à tabac à plusieurs reprises, sans aucun panache, ou dimension romantique, juste un individu pas très doué qui se fait tomber dessus par plusieurs personne. Clark Elwood n'a pas la fibre romantique des personnages de romans de Poe. À part sa volonté de retrouver Kito Hontz qu'il a connu à l'université, il se contente de réagir aux événements, sans grande perspicacité. Il se fait trimballer dans des situations dangereuses, s'en sortant par chance ou grâce à l'aide des autres. Pourtant l'intérêt est bien là. Il y a des scènes d'une puissance étonnante (l'incroyable soirée costumée dans la demeure des Peck). Il y a aussi le mythe du dieu rat en filigrane, visiblement adapté d'une légende indienne Cthanhluk, Corben remerciant le professeur Universitaire Twitchell, pour les traductions à partir de la langue indienne Tlingit. Au fil des pages, le lecteur se rend compte que cette histoire reflète la personnalité de son auteur dans toutes ses facettes. Corben a mis un gros monstre pas beau, avec une scène de bal costumé, Mag la Harpie, une ou deux femmes callipyges, un personnage principal trop sûr de lui, une touche gothique, l'esprit d'Edgar Allan Poe, etc. du coup, la dernière page tournée, le lecteur s'interroge sur ce qu'il peut penser de cette histoire. le fait est qu'elle atteint son objectif de divertissement. Elle est racontée d'une manière personnelle qui n'appartient qu'à Richard Corben, avec un humour très particulier et pourtant parfaitement intégré, sous la forme d'un hommage maîtrisé à Poe et Lovecraft. Elle raconte le périple d'un individu qui souhaite retrouver une femme qu'il estime avoir traitée de manière irrespectueuse, et qui souhaite s'excuser. Ce que trouve Clark Elwood le confronte à ses certitudes nées de sa position sociale et de sa culture. Richard Corben a choisi de mettre en scène ces confrontations successives, de manière physique, pour respecter la dimension visuelle des comics. Elwood doit se battre contre les autochtones. Il doit se confronter à leurs pratiques pour les interrompre physiquement. Il adopte une position moralement supérieure, avec une condescendance vis-à-vis de ces individus (qui pratiquent quand même le sacrifice humain). La fin l'oblige à reconsidérer cette position supérieure, en constatant qu'il s'agit d'êtres humains comme lui. Derrière des dehors de gentille histoire à la forme un peu désuète, il y a une parabole montrant un personnage imparfait qui se retrouve parmi d'autres individus imparfaits. La difficulté provient du fait que ces imperfections ne sont pas les mêmes.

16/04/2024 (modifier)