Les Riches au tribunal
En suivant le procès Cahuzac, les fameux « sociologues des riches » s’associent à Étienne Lécroart pour démonter les mécanismes de l’évasion fiscale, et montrer comment, chez les classes dirigeantes, la fraude se gère en famille.
Documentaires Economie Lécroart, auteur oubapien par excellence Procès
« Les yeux dans les yeux », Jérôme Cahuzac, ancien ministre du Budget, avait assuré ne pas avoir de comptes en Suisse… Monique et Michel Pinçon-Charlot, sociologues, sont spécialistes de la classe dominante. À la faveur du procès Cahuzac, ils décrivent comment la classe au pouvoir, sans distinction de couleur politique, se mobilise pour défendre l’un des leurs et le système organisé de la fraude fiscale.
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Date de parution | 05 Septembre 2018 |
Statut histoire | Une histoire par tome 1 tome paru |
Les avis
Sur la forme, je n'ai pas grand chose à dire. Le dessin assez clair me va bien s'agissant d'une bd de type humoristique mais sur un sujet plutôt tabou. Sur le fond, beaucoup trop de choses à dire mais qui sortiraient sans doute du cadre. Pour autant, je n'ai pas envie de me censurer moi-même. Vous voilà prévenu. Cette bd raconte le parcours d'un brillant ministre socialiste sous la présidence Hollande qui s'est dit le champion de la lutte contre la fraude fiscale tout en étant le pire fraudeur que la France est connue (ou attrapée). Je comprends l'exaspération de mes concitoyens sans vouloir jetter plus de pierre. Les yeux dans les yeux, je n'ai pas de compte en Suisse... Sic. Les auteurs ont voulu nous montrer comment une telle chose a pu se produire dans notre pays sous un aspect purement sociologique et avec heureusement une bonne dose d'humour pour nous faire passer la grosse pillule. On comprend en effet qu'il y a bien une classe sociale composée de gens riches qui ont beaucoup de pouvoirs notamment politique, sur la presse et également sur la justice. Oui, il existe bien une justice pour les pauvres qui est impitoyable et une justice pour les riches qui est assez clémente alors que leurs faits délictueux est beaucoup plus dévastateurs. Mais bon, c'est cela notre démocratie dans ses imperfections qu'il nous faut accepter sous peine de tomber dans une tyrannie démagogique. Le but de ces gens est de payer moins d'impôts et de mettre l'argent dans des paradis fiscaux. Cela ne concerne finalement pas que ce ministre mais beaucoup de célébrités comme notre grand chanteur nationale que nous avons presque tous pleuré à sa mort ou encore des acteurs venus se réfugier chez Poutine ou un autre chanteur en Patagonie. Il y a également des vérités à fire comme le fait que l'impôt sur le revenu ne représente que 25% des recettes de l'état alors que les impôts indirects comme la TVA qui est payé par l'ensemble des foyers représente 53% donc proportionnellement, les riches payent moins. On peut aimer les riches mais détester les inégalités. Et puis, il n'y a franchement pas de mal à participer à l'effort national à l'origine du pacte démocratique de notre république. La fraude fiscale en France est évaluée à 80 milliard d'euros et les niches fiscales représent 98 milliards d'euros. Si les riches payaient, les auteurs nous expliquent qu'il n'y aurait plus de déficit public dans notre pays ce qui n'est pas faux. Cependant, ce qui se passe en France, se reproduit dans le monde entier. On comprends que la fraude existait déjà sous l'Antiquité. Bref, c'est un mal qui gangrenne nos sociétés depuis bien longtemps. Tout est d'ailleurs conçu pour protéger ce système. C'est édifiant sur le monde qui nous gouverne ! J'ai aimé cette bd car les auteurs nous démontrent par des arguments imparables que quelque chose ne fonctionne pas bien dans notre société ce qui peut sans doute expliquer bien des choses. Les arguments sont bétons sans apport d'une idéologie communiste par exemple. Ce sont des faits. J'ai bien apprécié cette sincérité du propos. Une oeuvre qui m'a convaincu personnellement. Bien entendu, toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire et on peut risquer très gros. Oui, ce n'est pas une bd pour les lèches-bottes sans vouloir être trop offensant. Au final, une excellente bande dessinée qui détaille bien les mécanismes de la corruption et de la cupidité avec une valeur pédagogique exceptionnelle.
J’ai déjà lu pas mal de livres de ce duo de sociologues, qui travaillent quasi exclusivement sur la grande bourgeoisie, les « riches » et les passe-droits qu’ils se donnent. Avec la même rigueur et la même pugnacité que Pierre Bourdieu (dont ils se réclament), ils mettent à jour les mécanismes utilisés par les « classes dominantes » pour s’exonérer des obligations qui incombent à tous (phénomène bien évidemment occulté par les dirigeants politiques – qui les mettent en place et font partie pour la plupart de la même catégorie sociale, et par les médias – contrôlés par ceux-là même qui bénéficient de ces passe-droits). Je ne pourrais que vous encourager à lire leurs livres, instructifs. Mais déjà cet album est une bonne introduction. Au travers du procès intenté à Cahuzac, les auteurs décryptent, de façon claire (même si, parfois, certains schémas peuvent paraître moins simple), comment cet homme (et sa femme), sans scrupules, ont bâti un système d’enrichissement, de vol. Mais aussi comment ils ne sont qu’un exemple parmi d’autres. Et que, jugé presque « par hasard », ils ne sont finalement sanctionnés qu’à la marge (voir le procès en appel, présenté par la presse comme dur pour Cahuzac, car aggravant la peine, alors même que le sursis fait que Cahuzac ne fera pas de prison). Après lecture de cet album (qui ne m’a pas forcément appris grand-chose, mais qui est une petite piqûre de rappel), j’ai le même sentiment qu’après la lecture du Canard Enchaîné chaque semaine : on hésite entre rires et larmes. Mais la lecture de ce genre d’album, du Canard Enchaîné (ou du Monde diplomatique pour des analyses plus poussés et moins centrées sur le commentaire de l’actualité) devrait être obligatoire, pour que chaque « citoyen » sache décrypter les artifices mis en œuvre par une oligarchie (mêlant politique, médiatiques, industriels et rentiers – catégories il est vrai souvent interchangeables, tant certains passent de l’une à l’autre) pour s’exonérer des obligations qu’ils imposent au plus grand nombre. Par ailleurs, le traitement (médiatique, mais aussi judiciaire) subi par les gilets jaunes, ou même n’importe quel petit délinquant – voire simple jeune de banlieue, subissant comparutions immédiates, gardes à vue et peines de prison pour avoir sur soi de quoi se protéger des lacrymogènes, avoir détérioré un abribus, ou même (c’est très tendance et si facile) pour « outrage », est à mettre en perspective avec le traitement subi par Cahuzac (ou Bettancourt, ou Fillon, ou Balkany, pour ne citer que quelques têtes de gondoles du genre), qui ont volé (oui, c’est bien notre argent qu’ils volent en fraudant !) des dizaines de millions d’euros (il est vrai sans violence physique), et qui, s’ils sont jugés (ce qui arrive rarement – et alors très très très longtemps après le déroulement de faits, sans humiliation publique ni comparution immédiate, garde à vue), ne sont condamné (là aussi très rarement) qu’à la marge, et ne font pas de prison. ECOEURANT ! Je suis aussi grand amateur de Lécroart (il est vrai d’habitude davantage dans des publications liées à l’oubapo), et j’ai retrouvé là avec plaisir ses personnages rondouillard, à peine caricaturaux, son style fluide et agréable. Et, contrairement à Paco, je n’ai pas trouvé que les dessins, les gags – bref, l’emballage « humoristique » proposé par Lécroart n’affaiblissent le propos, bien au contraire. Comme le font souvent les dessins caricaturaux ou les jeux de mots à deux balles dans le Canard Enchaîné, cela « aère », sans nuire au fond.
Ayant fait des études de sociologie, j'ai toujours apprécié le travail de Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon sur les classes dominantes. Avec cet album ils tentent de nous vulgariser leur travaux ou tout du moins de toucher une frange plus large de public en passant par le medium BD, ce qui me semble une bonne idée. Car si je suis plus ou moins familiarisé aux concepts qu'ils développent et aux inégalités reproduites par les élites de notre société, c'est loin d'être perçu par un large public. C'est donc tout le mérite que j'ai trouvé à cet album, qui au travers de l'affaire Cahuzac, alors ministre du Budget en charge de la lutte contre l'évasion fiscale sous François Hollande, démonte les rouages de nos oligarchies pour se maintenir au pouvoir et se soustraire aux lois censées s'appliquer à tous. Liberté, égalité, mon cul ! Si l'ensemble de la démonstration est assez réussie et devrait être accessible à tout un chacun, certains passages pour nous expliquer les montages financier hallucinant pour se soustraire aux impôts restent quand même compliqués à suivre. Cela n'empêche pas de comprendre le sens général de l'embrouille que Jérôme Cahuzac et sa femme ont mis en place à l'époque. C'est plus au niveau du dessin que j'ai eu du mal. Ce côté caricatural des personnages ajouté aux gags pas toujours très judicieux mais sans doute placés pour alléger le propos ne m'a pas vraiment emballé ; on dirait des marionnettes. Mais sorti de cette dernière remarque, l'album n'en reste pas moins très efficace dans son propos. En 120 pages les auteurs font le tour d'une affaire complexe en en démontant les rouages et ses implications. C'est là qu'on voit tout l'intérêt de la sociologie :)
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